Mathieu a vécu sans bien s’en rendre compte sans doute – comme tous les paysans de ces montagnes, éloignés des grandes villes – une période exceptionnelle ; elle est marquée par un mouvement intellectuel, qui se développe en Europe, particulièrement en France et en Angleterre, dont l’objectif est de promouvoir les connaissances, de bannir les superstitions, l’intolérance, les abus de l’église et des États. Le terme de “lumières”, traduit la volonté de ses initiateurs “d’éclairer” les hommes, autrement dit de les soustraire à l’ignorance. Mais la vie quotidienne est là, avec les nombreux soucis liés à la propriété et aussi les morts en cascade qui atteignent la famille.
Le siècle des Lumières
Les philosophes
Ils sont à l’origine du mouvement, dans un contexte marqué par les progrès des techniques et des sciences, une meilleure organisation de la production, le développement des communications, et l’ascension d’une nouvelle classe, la bourgeoisie. Ils proposent “une vision renouvelée et élargie du monde, héritée des questionnements parfois angoissés du dernier quart du XVIIè siècle”… Ils substituent à la recherche chrétienne du salut dans l’au-delà la quête du bonheur ici bas”… une idée révolutionnaire ! Ils prônent alors la liberté pour les personnes, la tolérance pour les idées, l’égalité devant la loi et la justice. Tant de chemin reste à faire, au moment où le Chevalier de la Barre, âgé de dix-neuf ans, vient d’être condamné à Abbeville à avoir le poing coupé, la langue arrachée et à être brûlé vif pour être passé près d’une procession sans avoir ôté son chapeau !
Ci-dessous, Quelques-uns d’entre eux…
L’encyclopédie [1]
En fait, ces philosophes sont aussi des militants. Ils veulent faire connaître leurs idées au plus grand nombre et publient de nombreux écrits, dont un ouvrage en constitue le symbole : l’Encyclopédie. Le premier volume paraît en 1751. L’ouvrage est achevé en 1772. Diderot, son maître d’œuvre avec d’Alembert, écrit pour le lancement de l’ouvrage : "le but d’une encyclopédie est de rassembler les connaissances éparses sur la surface de la terre, d’en exposer le système général aux hommes avec lesquels nous vivons… afin que nos neveux, devenant plus instruits, deviennent en même temps plus vertueux et plus heureux et que nous ne mourions pas, sans avoir mérité le genre humain."
Alors que l’Encyclopédie est diffusée paraît-il, jusque dans la toundra russe, est-elle parvenue dans les campagnes françaises ? Ni mathieu, ni son fils claude, ne savent lire, même pas signer leur nom, comme nous l’apprenons à travers les divers actes notariés. Il est chaque fois précisé en effet, au moment des signatures et selon la formule consacrée : "et non mathieu pra, qui a déclaré ne le scavoir, de ce enquis et sommé". La masse des laboureurs est comme lui illettrée à cette époque et durant tout le XVIIIe siècle, particulièrement dans cette partie de la France. Seuls les notables et une élite peu nombreuse, du milieu paysan et artisanal, peuvent apposer leur signature au bas des actes. En fait, la civilisation paysanne est encore une civilisation de la parole, nous disent les historiens. C’est au prône du dimanche que les paroissiens apprennent leur religion, qu’ils entendent la lecture des déclarations que le souverain veut porter à la connaissance de ses sujets. Au prône encore que sont annoncés les mariages, les décès, les réunions de l’assemblée villageoise. C’est sur la place du village que les faits publics, saisies, ventes aux enchères, sentences sont connus de la population. "C’est à la veillée, qui rassemble famille et voisins, que se transmette le savoir des anciens, tout un ensemble de recettes, de croyances, de traditions, de superstitions et de contes".
Si mathieu ne sait pas lire, entend-il seulement parler de l’encyclopédie ? Il est difficile de se faire une idée. Au XVIIIè siècle, les almanachs circulent, même dans les campagnes reculées, véhiculés par les colporteurs. Ils abordent des thèmes nouveaux. Ils traitent moins de la mort et de l’enfer et se "pénètrent de soucis d’encyclopédisme et de distraction" ; lus et commentés à la veillée, par celui qui peut déchiffrer, ils apportent un peu du monde extérieur. Mais que retracent-ils de ce vaste ouvrage, qui mobilisait 1500 personnes, auteurs et typographes, pour la production de 25 000 pages, contenant 70 000 articles ! Les progrès opérés, pendant le siècle, quant à la qualité du papier, avaient favorisé les diverses formes d’impression.
Les almanachs les plus prisés des paysans, à l’époque de mathieu, étaient ceux qui parlaient du monde agricole, comme depuis 1708 “le messager boîteux” toujours diffusé en Suisse… ou “l’Almanach des Laboureurs”, présenté ici avec une couverture de 1759 ; ils donnaient une grande place au calendrier (et tous les saints), aux lunaisons, saisons, météorologie… ponctués de nombreux proverbes et parfois, comme celui de 1759, des conseils pour l’hygiène et la santé “des enfants, des bœufs, des brebis, des cochons…” !! Les curés faisaient-ils allusion aux nouvelles colportées par les almanachs dans leur prêche du dimanche, comme à d’autres événements nationaux, qu’ils consignaient ensuite dans les registres, par exemple : "Mg le Dauphin, l’ami des peuples, l’espérance de tous les françois, l’appuy de la religion, mourut en 1765, fut inhumé à Sens. Madame la Dauphine mourut en mars 1767. notre grand monarque, mourut le 10 mai 1774. Dieu veuille l’avoir aimé et reçu en son paradis. la reyne mourut avant lui en 1758. Sainte Reine, grand Dieu, quelle perte pour la France". A la mort de Louis XV, le trône revient donc à son petit-fils, né du dauphin Louis de France, qu’on marie à quatorze ans avec Marie Antoinette d’Autriche qui en a seize ! Louis Auguste devient Louis XVI, roi de France et de Navarre.
Mathieu et ses deux fils Claude
Ainsi au fil du temps qui passe, malgré toutes les difficultés, les embûches, Mathieu a réussi à acquérir, pièce par pièce, le domaine Borjas, à passer de la situation de fermier à celle de propriétaire usufruitier… illustrant en cela un mouvement plus général, favorisé par la baisse notamment des taux d’intérêt qui décroît, de 10 % à la fin du XVIIe siècle, à 3 % dans les années 1730-1760. Plus que tous ceux de sa lignée, il incarne “la faim de terre”, la grande quête de nos ancêtres paysans depuis si longtemps.
Une catastrophe survient alors qu’il a soixante-dix ans, la mort de son fils aîné en 1763, âgé de quarante-deux ans. Ils venaient d’acquérir ensemble les terres de Borjat de leur bailleur Villeneuve, d’autres du sieur Rousset et, juste un an avant, de vendre à un parent dénommé Antoine Oblette leurs terres de Roche et d’en échanger avec lui contre d’autres à Borjas… une opération importante, le document fait huit pages. Claude laisse plusieurs enfants dont une petite Claudine d’un an et une veuve de trente-quatre ans, Claudine Treille. Reste pour Mathieu son fils cadet, un autre Claude, né quinze ans après son frère aîné. Au moment du décès, il a vingt-huit ans et n’est pas marié. Il va rester à la ferme, le temps qu’un neveu puisse prendre la relève.
Que savons-nous du fils aîné, Claude ?
Peu de chose, car sa vie est toute mêlée à celle de son père. Ce dernier est mort trop vieux pour que Claude ait eu le temps de prendre la relève et de marquer le domaine et la vie des siens de ses initiatives et de sa personnalité, sauf peut-être à l’occasion de son mariage… Au moment de sa naissance le 25 mai 1721, c’est encore la régence du duc d’Orléans, en attendant que le jeune Louis, petit-fils de Louis XIV, soit en âge de prendre la succession, ce qui se produit deux ans plus tard. Le pays est en paix. Quant au Forez, l’événement marquant se produit peu après la naissance de Claude avec la mort en 1724 du dernier représentant de l’illustre maison d’Urfé : Louis de Lascaris d‘Urfé. Tous ses biens passent à son petit-fils, le marquis de Langeac, dont la veuve dilapide la succession en faisant des recherches pour la découverte de la pierre philosophale ! C’est une de leurs filles, épouse du marquis de Chastellet, qui hérite, mais le couple meurt quelques années après. Leur fils se trouve en pleine Révolution de 1789 ; réduit à un maigre patrimoine, il s’empoisonne dans la prison du Luxembourg pour se soustraire à l’échafaud. Entre-temps, la Seigneurie d’Urfé a été acquise en 1764 par le marquis de Simiane, qui la revend par la suite au baron de Meaux [2]. Une triste fin pour cette longue lignée de baillis du Forez, dont demeurent aujourd’hui les ruines de leur château d’Urfé, comme une sentinelle éclairée la nuit au-dessus des villages.
Le mariage de Claude, une occasion de s’émanciper ?
Le jeune Claude se marie un 4 août 1744 avec une Claudine Treille de quinze ans, en pleine période de travaux agricoles, au moment où commence une sévère épizootie qui ravage le bétail, dont j’ai déjà parlé.
Le 4 août 1744, mariage de claude prâ, fils légitime de mathieu prâ et de marguerite maignard, marchand dudit St Just, âgé d’environ vingt et un ans avec claudine treille, fille de jean et claudine espinat, aussi marchand, âgée d’environ quinze ans, en présence de claude prâ, oncle paternel et guillaume espinat, vicaire de cette parroisse, oncle maternel. On constate que “Pra” est écrit ici, comme aux premiers temps, avec un accent circonflexe, qui représente le “a” fermé et accentué de la prononciation (cf. épisode 2) et, par ailleurs, que l’âge du jeune marié est approximatif et de fait erroné, il a deux ans de plus…
Pourquoi ce mariage précoce pour la jeune fille à un moment peu favorable ? Il est vrai que le père est marchand et que pour lui l’activité au moment des moissons est peut-être au contraire plus ralentie ? Mathieu le père de notre ancêtre a cinquante et un ans. Il n’a pas encore procédé à toutes les acquisitions qu’il envisage. Comment considère-t-il ce mariage ? De manière positive, estimant qu’il n’a pas encore assez de terres pour faire vivre deux foyers et qu’il est mieux pour l’instant que son fils entre dans une famille honorablement connue – les Treille – qui dispose d’un peu de biens. Négativement au contraire, parce que Claude semble vouloir quitter la terre, suivre une voie nouvelle : en effet le beau-père est marchand et Claude au moment du mariage est noté comme tel. C’est peut-être le seul moment de sa vie où il a voulu échapper à la tutelle de son père et marqué son indépendance. Est-ce qu’assez vite le métier de marchand ne lui plaît pas ? Est-ce que Mathieu insiste pour qu’il revienne, comme le veut la tradition et comme d’ailleurs le prouve le fait qu’il lui donne la moitié de ses biens au moment du contrat de mariage ? Toujours est-il qu’on retrouve très vite Claude comme laboureur à Borgeas. (une autre façon d’écrire Borjas, comme encore borgeat ou borjat…). Il sera peu question de lui par la suite, sauf quand son nom est associé à celui de son père dans différents actes. Rien ne le concerne directement, en dehors du contrat de mariage, qui a précédé la cérémonie.
Claudine Treille, une jeune épouse de quinze ans
• quelques digressions sur le prénom
Avec la jeune épouse de claude, située dans le temps – à mi-parcours pratiquement - entre claudine roche née en 1661, la femme d’estienne, et plus près de nous claudine coudour née en 1784, grand-mère paternelle de Stéphane (que nous avons toutes deux déjà évoquées), on croise cette fois encore le prénom de Claudine.
Plus encore que le correspondant masculin Claude, le prénom féminin est très répandu pour les filles, dans la région de St Just-en-Chevalet. Cette fréquence m’a interrogée et j’ai fait une petite investigation sur ces prénoms qui ont bien sûr la même origine et l’engouement qu’ils ont suscité dans la région. Claude vient du latin “claudius”, qui veut dire boiteux. Quant au saint, il s’agit d’un Claude qui vécut au VIIè siècle (620-703). Destiné à une carrière militaire, il quitte le monde à trente-cinq ans pour entrer dans un monastère à Condat dans le Jura (actuellement la ville de St Claude). Élu abbé puis évêque, il se retire plus tard comme ermite et consacre sa vie à la prière et au jeune. Après six siècles où il est ignoré des populations, il connaît une renommée exceptionnelle.
Cet homme, qui de son vivant mène une vie humble et rigoureuse, va connaître après sa mort une " survie " prestigieuse. En effet, 600 ans plus tard, au milieu du 13éme siècle, grâce à la conservation intacte de son corps, de nombreux pèlerins accourent vers l’abbaye où les miracles se multiplient. Le pèlerinage de St Claude bénéficie alors d’une renommée égale à celle de Lourdes aujourd’hui. Il sera vénéré par l’Europe entière jusqu’à la Révolution… et les miracles qui lui seront attribués sont consignés dans des registres. En 1754, plusieurs docteurs en médecine examinent le corps du Saint et certifient son incroyable conservation !
A la Révolution, le corps de St Claude sera brûlé dans la nuit du 6 au 7 mars 1794. Seul en réchappe l’avant-bras gauche qui est aujourd’hui encore conservé, mais c’est après le temps que nous évoquons. Nous n’avons trouvé trace dans cette région du Forez d’aucune chapelle ou église dédiée à ce saint et les curés interrogés nous ont dit qu’aucune relique non plus n’existait. Mais l’engouement peut s’expliquer par la renommée du saint, particulièrement sans doute dans toute la région du franco-provençal, dont le jura fait partie comme le Forez. Une fois le prénom introduit par quelques familles, il peut se développer très vite par les parrainages. A St just, nous le trouvons dès le début des registres et chez les Pra à partir de 1585, davantage encore sous la version féminine : Claudine.
• La rencontre
Les Treille sont apparus dans le réseau des pra dix ans plus tôt, quand une des cousines germaines de claude, (fille de sa tante paternelle claudine et de son oncle claude borgeas), a épousé en 1734 un denis damon dont la mère se nommait jane treille. Les jeunes gens avaient eu l’habitude sans doute de se fréquenter lors des fêtes de famille. Et de plus, nous l’avons dit, les villages sont très proches. Je parlerai des treille dans un prochain épisode, ainsi que des espinat qui constituent les deux branches ascendantes de Claudine, côté paternel et côté maternel, des familles qui ont donné de nombreux prêtres.
Le contrat de mariage
... en faveur duquel mariage s’est establi ledit mathieu pra et de son authorité laditte Maignard, sa femme, lesquels de gré ont donné comme ils donnent par donnation pure et simple et irrévocable faite entre vifs à cause de noces, dès à présent et toujours valable, audit futur époux leur fils acceptant et humblement remerciant ses deux père et mère, scavoir ledit pra :
la moitié de tous chaque un de ses biens, tant meubles qu’immeubles, droits, noms, raisons et actions présent et à venir, chargés de la moitié de ses dettes et légats ( = dons, legs) pour en disposer à sa dernière volonté ; et au cas où il n’en disposerait, il en fait pareille donnation audit futur époux, son fils, lequel ce acceptant sera tenu au dit cas de payer l’autre moitié de ses dettes et légats ; et laditte Maignard, tous les biens qu’elle peut avoir dans les acquisitions que elle et ledit pra, son mary, ont fait pendant leur mariage, se réservant laditte maignard ses autres biens pour en disposer à sa dernière vollonté.
item donne et lègue ledit pra donateur, tant sur ses biens donnés que réservés et par droit d’institution d’héritier particulier, délaigue à Claude pra le jeune son fils la somme de cent livres et à marie et claudine pra ses deux filles, à chacune d’elle, la somme de quatre cent livres, un lit garny de couetre et duvet de plume, une couverture laine et filet, quatre draps, six serviettes, une nape de neuf pieds, un habit nuptial suivant leur condition, un coffre sapin, trousseau et menu linge, avec leurs autres habits à leur usage,
payable lesdits legs de cent livres à son dit fils et de quatre cents livres et susdits lit et meubles à chacune de ses filles à leur majorité ou à leur mariage et sans intérest jusques alors et fait pour tout ce que le futur enfant suivant espéré et prétendre sur lesdits biens dudit pra leur père qui les institue auxdits legs chaqu’un ses héritiers particuliers
veut ledit pra donnateur que au cas qu’il décède avant laditte maignard, sa femme, qu’elle jouisse de l’usufruit pendant sa vie de la moitié des biens par luy cy-dessus réservé, en payant par elle les charges annuelles et courantes.
D’autre part et par même faveur, il est estably ledit jean treille et de son autorité laditte claudine epinat, sa femme, lesquels de leur gré ont donné et constitué par moitié et égale portion en dot de mariage à laditte futture épouse, leur fille, la somme de six cents livres, un lit garny de couetre et duvet de plumes, une couverture de laine et quatre draps, six serviettes, une nape de neuf pieds, le tout toille de ménage, un habit nuptial suivant sa condition, un coffre de sapin, un trousseau et menu linge, une autre nape de six pieds, six et huit robes de différentes étoffes de couleur, un tour de lit, toille de ménage et deux chemisettes laine et pair (?)
laquelle somme de six cents livres et susdit lit et meubles, lesdits mariés treille et epinat, tous deux ensemble et solidairement promettent et s’obligent à payer audit futur époux et épouse et auxdits mariés pra et maignard, scavoir lesdits meubles à la célébration du présent mariage ; de ce jour en quatre ans, la somme de cinquante livres et ainsy continuer pareil payement de laditte somme de six cent livres et sans intérest, jusques à échéance de chaque terme, moyennant quoy laditte future épouse... pour suffisamment légitimé et ses droits de père et mère en principal et intérest, auxquels de l’authorité dudit futur époux elle a renoncé et renonce en faveur de ses père et mère, convenu entre les parties que tous acquis et conquest qui se feront pendant et ... le présent mariage seront à moitié entre les futurs époux et épouse, le propre d’un chaque un .... déclarant que l’usufruit légué à laditte maignard et en valeur annuelle de quatre livres dix sols ; le tout par obligation de biens et clauses nécessaires.
Fait et passé au bourg dudit St Just, étude du soussigné après midy, le cinquième juillet mille sept cent quarante quatre, en présence de Guillaume Epinat, prêtre et vicaire dudit st Just (c’est l’oncle paternel de Claudine) et maitre Jean Baptiste Rozier, procureur demeurant audit St just, témoins requis et soussigné avec ledit Jean Treille et Benoit Molin et Claude Borjas, Pierre Epinat et Denis Damon, laboureur demeurant en la parroisse de st just, témoins, qui ont déclaré avec les deux futurs époux et épouse et autres parties ne scavoir signer, de ce enquis et sommés
ainsy signé à la minutte jean Treille, Epinat, Rozier et Fonthieure, notaire royal.
Il est question dans ce contrat des autres enfants de mathieu pra, notamment de claude Pra le jeune (cf. ép. 40). Deux filles seulement sont citées, marie et claudine. Nous pouvons en déduire que les autres enfants sont morts. Mais il est question aussi d’un futur enfant espéré. Nous ne l’avons pas trouvé pour l’instant, le dernier né connu étant le jeune claude, né en 1735. En 1744, leur mère marguerite a quarante-six ans, le bébé n’est peut-être pas venu à terme ! Il est prévu que chacun des enfants recevra, au moment de ses noces ou à sa majorité : le fils cadet claude, 100 livres ; chacune des filles, 400 livres… pourquoi cette différence (je ne sais pas l’interpréter ?), d’autant plus que Marie et Claudine pourront compter aussi, selon l’usage, sur des robes de différentes couleurs (6 à 8) , du "menu linge", et aussi linge de maison, coffre et “habit nuptial selon sa condition". Quant à la jeune mariée Claudine Treille, sa dot est supérieure quant au montant en espèces, 600 livres, correspondant à environ deux années et demie du salaire d’un manœuvre (source : La valeur des biens, Théma n° 2, Thierry Sabot, édité en 2012, déjà cité), mais elle reçoit exactement le même trousseau. Comme c’est la coutume aussi, chacune doit renoncer à tous droits sur la succession future des parents. Cette clause apparaît dans tous les actes et montre combien on était respectueux de l’ordre établi. La somme à verser n’est jamais réglée comptant, comme nous l’avons déjà observé lors du mariage d’Antoine après la Révolution, mais elle se fait en plusieurs échéances, ce qui permet d’en être dispensée si la jeune mère vient à mourir prématurément sans enfant. C’est aussi moins lourd pour la famille.
Chacun tend l’oreille…
On note que, pour ce contrat, la signature a lieu à l’étude du notaire, ce qui est un fait nouveau. Jusque-là, cet événement se déroulait plutôt au domicile de la future mariée. Il donne lieu à une cérémonie presque aussi importante que celle du mariage. On réunit la famille, nombre d’amis et de relations. Au moment de la lecture du document, chacun tend l’oreille : “montant de la dot, apports matrimoniaux, clauses particulières… Dès le lendemain, à la veillée, au marché ou au lavoir, tout sera commenté”. L’appel des témoins est très attendu, ici quelques notables, curé, procureur… “Pour le notaire, c’est souvent un moment délicat, il lui faut appeler chacun à son tour et “en son rang”, respecter les usages et les coutumes” [3]. Chaque famille s’est efforcée d’être bien représentée.
Une fois le contrat signé, on passe aux réjouissances, généralement un copieux repas auquel le notaire est toujours invité. La bénédiction nuptiale en notre “Mère Sainte l’Église”, pour les fiancés “qui se sont promis en vray et loyal mariage” aura lieu un peu plus tard, quand l’un par l’autre en sera requis. En l’occurrence, c’est juste un mois après ! Nous avons remarqué que la date n’est jamais précisée au moment de la signature du contrat. On meurt si vite en ce temps là ! Claude et Claudine, nos ancêtres, attendront presque quatre ans pour mettre leurs enfants au monde, compte tenu sans doute du jeune âge de Claudine au moment des noces.
“Il faut deux enfants pour faire un adulte”…
Le couple aura sept enfants, de 1748 à 1763, dont trois garçons ; un seul survit à l’enfance ainsi que deux filles, la dernière née un an avant la mort de son père. Le garçon qui demeure s’appelle claude, encore un pra à porter ce prénom, celui de son oncle paternel et parrain. C’est mon ancêtre. A la mort de son père, il a huit ans, on l’appellera plus tard “claude pra neveu” pour le distinguer de l’oncle toujours en vie. Il vient au monde en plein été de l’année 1755, trois ans après une marie, née le 20 mai 1752. Celle-ci épouse à vingt-trois ans un Jean Pras, dont nous connaissons la généalogie ascendante ; la parenté commune est éloignée et ne donne pas lieu à dispense ; elle meurt à trente-quatre ans (1786), deux mois après avoir accouché de son cinquième enfant ! Claudine, la dernière sœur de Claude a plus de chance, elle épouse à vingt-six ans Mathieu Chambon (source : Gérard Pras). Ils feront souche.
Avant les jumelles, deux enfants étaient décédés en bas âge, Mathieu qui avait un mois (mars 1748-avril 1748) et Marguerite, qui en avait sept (octobre 1749-mai 1750). L’hécatombe n’est pas finie ! Après la naissance de Claude en 1755, les deux enfants qui le suivent meurent eux aussi : Claudine à deux ans et un Pierre de six ans et demi. Pourquoi tous ces décès, sans compter celui du père, survenu lui aussi au printemps, comme pour plusieurs des enfants ? La jeune mère, claudine treille, n’avait plus quinze ans au moment des premiers accouchements, mais dix-neuf, un âge raisonnable pour faire des bébés dans de bonnes conditions. On ne note pas de grands froids, ni d’épidémies catastrophiques au moment de leurs morts, sinon en 1763 celle de la grippe qui fait en France de nombreux décès, mais ils auraient été plusieurs à être atteints… Il est vrai que les maladies infantiles sont encore très meurtrières, tels rougeole, varicelle, oreillons, coqueluche ou rubéole. La diphtérie, ce maudit “croup”, ne pardonne jamais, pas plus que la variole ou la dysenterie. Beaucoup trop d’enfants, exposés sans précaution au soleil dans un champ où la mère travaille, sont victimes d’insolation, d’autres meurent de froid. L’hygiène est encore très rudimentaire. On se lave peu. Les enfants dorment dans le même lit et la contagion va grand train. En vain, porte-t-on l’enfant malade à un saint protecteur, rien à faire contre la fatalité pense-t-on. En fait, la moitié des enfants n’atteint pas l’âge adulte entre 1740 et 1789 ; sur 1000 enfants nés vivants, le nombre des survivants est de 525. On dit qu’il “faut deux enfants pour faire un adulte” [4].
laboureur demeurant au village Borgeat, âgé d’environ quarante ans, décédé hier en présence de Mathieu Pra et Claude Pra, père et frère du défunt et de Denis Damon, demeurant au village Borgeas, quy ont déclaré ne scavoir signer, de ce enquis et sommés.
Que reste-t-il de Claude aîné ?
Pour revenir à mon ancêtre claude aîné, époux de claudine treille, il n’aura pratiquement pas laissé de trace, tant sa vie fut brève et confondue avec celle de son père. Sans doute, fils soumis à son autorité quasiment absolue, comme le voulait la tradition, il n’a pas pu exprimer sa personnalité. Il devait travailler dur pour élever ses nombreux enfants. Comment a-il vécu les naissances en cascade et les décès si nombreux ? Était-il résigné ? Quels rapports entretenait-il avec la parenté Treille et Epinat ? Lui, pas plus que son père, ne sait signer son nom ! Mais si ces familles de prêtres et de marchands ont accepté le mariage, c’est sans doute que la propriété Borjas commençait à être importante et, la majorité de la population étant analphabète, le peu d’instruction des Pra ne constituait pas une mésalliance.
Ainsi c’est grâce à ce claude dont la vie fut brève et peu marquante que notre lignée continue. C’est un passeur, le passeur de la vie, comme son neveu Jacques (ci-après) qui a fait souche lui-aussi, malgré sa courte vie, 1778-1809
Claude, le fils cadet de Mathieu
Claude, le cadet, est né le 9 août 1735, quinze ans après son frère aîné, qui est son parrain et qui lui donné son prénom. A la mort de celui-ci, il a bientôt vingt-huit ans et se trouve encore célibataire. Il va aider son vieux père de soixante-dix ans à élever les orphelins, en patientant pour prendre femme. Claude, le premier garçon, a huit ans. Le jeune oncle attend plusieurs années, assez pour que le neveu, devenu jeune homme, puisse prendre la relève. C’est alors qu’il va convoler le 16 mars 1771 à près de trente-six ans, avec une antoinette oblette de trente ans, puisqu’elle est née le 22 mai 1741 (fille de mathieu oblette et jeanne vacheresse). C’est la quatrième d’une famille qui comptera seize enfants … nés entre 1736 et 1766… dont la moitié au moins aura des descendants ! Parmi ceux-là, une autre antoinette qui se mariera elle aussi à trente ans avec un nicolas Epinat et une dernière, née en 1766, qui meurt trois jours après. Jeanne vacheresse à ce moment compte 49 ans… C’est la première et unique fois que je rencontre une fratrie aussi nombreuse née de la même mère et un accouchement aussi tardif. Née en 1717, jeanne avait commencé à enfanter à dix-neuf ans et ensuite, sans interruption avec une régularité remarquable, de deux ans en deux ans, sauf pour la dernière claudine venue preque quatre ans après une madeleine (qui n’a pas survécu elle non plus). Cette jeanne vacheresse aurait pu prendre à son compte la formule de Marie Lesczinska, l’épouse de Louis XV (1703-1765) : “toujours coucher toujours grosse, toujours accoucher”.
L’hécatombe est pire que chez Mathieu (source : Gérard Pras qui descend de cet ancêtre côté paternel et côté maternel).
Le jeune couple claude pra/Antoinette s’installe à Feugère un village proche, où vit un beau-frère jean pra, puis semble-t-il à Dionnet. Malgré son âge au moment du mariage – 30 ans - antoinette va mettre au monde neuf enfants, dont huit garçons… échelonnés de 1772 à 1787 ; le dernier, prénommé claude, ne survivra pas semble-t-il, à moins qu’il ait quitté la ferme plus tard (nous n’avons pas retrouvé son décès). Sa mère a quarante-six ans. Mais beaucoup d’autres sont déjà morts en bas âge ou dans l’enfance, ils ont eu encore moins de chance que leurs cousins germains, bien qu’ils soient décalés de presque une génération. La seule fille disparaît elle aussi, en 1793, à presque neuf ans... au grand chagrin des parents et de ses deux frères. Dans l’acte de décès, la commune de St Just-en-Chevalet est rebaptisée « Montmara ». Tous ces décès sont impressionnants et bien pires que pour l’ensemble de la population, puisqu’ici il a fallu presque cinq enfants, pour faire un adulte !
Comment expliquer ces décès en cascade ? Ils ne se produisent pas aux mêmes dates et sont échelonnés en fonction des naissances. Les parents avaient-ils un facteur rhésus contraire (positif et négatif), qui provoquait des jaunisses mortelles chez certains enfants… Antoinette n’avait-elle pas un lait suffisant pour les nourrir, un problème de pauvreté ? On sait que Claude n’avait reçu que 100 livres au moment de son mariage et je pense qu’antoinette « aublette », avec ses nombreux frères et sœurs, n’avait sans doute pas eu grand-chose… Ceci dit, on dénombrait beaucoup de décès également dans les familles royales ou seigneuriales, des naissances difficiles laissant des séquelles, une hygiène insuffisante, des châteaux glacés l’hiver et plein de courants d’air toute l’année et des médecins encore bien ignorants… !
Seul mathieu, qui porte le prénom de son grand-père et qui naît l’année de son décès et Jacques survivent et font souche. Jacques commence pourtant mal sa vie d’adulte : marié à dix-neuf ans avec antoinette brunet, il se trouve veuf l’année suivante, après la naissance d’une petite fille. Remarié en 1802 avec romaine (ou germaine) feugère, il a cinq enfants avant de mourir à trente-et-un ans en décembre 1809. C’est lui qui a transmis son patronyme à notre cousin Gérard. Mathieu a vécu plus longtemps, jusqu’en 1830. Marié à antoinette goutorbe, il a eu au moins quatre enfants. Claude jeune, le père de cette fratrie, vit jusqu’à soixante-treize ans, antoinette meurt quatre ans après lui, le 16 mai 1812, à l’âge de soixante et onze ans… des parents qui n’avaient pas transmis à leurs enfants la résistance dont ils avaient fait preuve.
Épilogue
Comme ses prédécesseurs, mathieu se montre très attaché à la terre et connaît le prix de chaque journée de labeur. Pour profiter des opportunités qu’offre le siècle, il lui a fallu travailler dur pour agrandir, pré par pré, la propriété qui les fait vivre, lui et tous les siens. Comme le veut la coutume, le fils aîné est resté après son mariage "à même pot et à même feu", après des velléités de devenir marchand avec son beau-père. Mais hélas ce n’était pas pour très longtemps, puisqu’il meurt comme nous l’avons dit, prématurément en 1763, à quarante-deux ans tout juste ! Le vieil homme reste donc seul à soixante-dix ans, avec son fils cadet, pour élever les quatre petits-enfants qui ont survécu, tous mineurs. Pour ne pas s’embrouiller avec les claude, je propose le petit tableau ci-dessous.
L’aîné des garçons, (notre ancêtre) a donc huit ans à la mort de son père et le plus jeune des enfants, un an. Mathieu meurt treize ans plus tard en 1776, sans avoir eu le temps de connaître, à un an près, l’aîné de ses arrière-petits-fils né en 1777, encore un Claude, devenu prêtre cette fois… Treize ans pour maintenir l’exploitation, alors que ses forces déclinent, treize ans pour assurer l’avenir du nom et du domaine. Il est vrai qu’il est secondé par son plus jeune fils, célibataire, obligé de rester sous l’autorité absolue de celui qui est “le patriarche” de la famille.
Mathieu, un homme rude de caractère, sans doute endurci par les malheurs
Je pense que mon ancêtre mathieu était un homme rude de caractère, courageux devant la mort qui frappait souvent la famille : enfant, il a vu disparaître au moins un frère et deux sœurs, plus tard deux de ses filles jeunes adultes, son fils aîné et nombre de ses petits-enfants, non pas heureusement ceux de Claude son cadet, il n’était plus là ! J’imagine qu’il a dû réserver son affection au premier petit-fils, celui qui devient notre ancêtre, sur lequel portent tous ses espoirs après la mort du père. Nous ne savons pas s’il l’a envoyé longtemps à l’école, mais ce dernier sait signer son nom. Mathieu, lui, n’a pas appris. A quoi bon pour travailler la terre ! Le savoir, on le tient de ses aînés et on l’enseigne à son tour : toute une culture venue du fond des âges, solidement ancrée, faite de dictons, de tours de main pour utiliser le moindre matériau, réparer ses outils, le toit de la maison, soigner les bêtes… de savoir-faire pour semer et récolter, sur des terres pentues, souvent gelées, ingrates. Beaucoup de bon sens aussi, d’intelligence sans doute, pour bien négocier, mais aussi la croyance au surnaturel, aux saints guérisseurs comme au pouvoir des jeteurs de sort. Par-dessus tout, persuadé de la valeur du passé sacralisé, de la sagesse des anciens, de la supériorité naturelle des autres groupes sociaux.
Ci-dessous, je propose une photo, que j’avais placée voici longtemps dans la version familiale, c’est celle d’un Forézien. Je n’en connais plus l’origine et les photos n’existaient pas du temps de mathieu… mais elle évoque pour moi ce que devait être le vieil homme, avec son regard plutôt sévère qui porte au loin, perspicace, son expression volontaire et aussi son visage émacié, creusé par le temps et les soucis… et - clin d’œil - il s’appelle Mathieu… comme le nôtre ! Quant à l’épouse, plus jeune de quelques années, elle a l’air malicieuse et contente d’être près de son homme. Il fallait bien tempérer la sévérité du vieux patriarche.
- Droits réservés.
Des motifs de fierté…
Ils ont dû être fiers tous les deux des relations avec les marchands et les prêtres de la famille de Claudine, notamment de son oncle Guillaume Epinat que nous évoquerons dans le prochain épisode… Combien a-t-on dû parler à la veillée des péripéties relatives à son élection à la société des prêtres de St-Just-en-Chevalet, de sa nomination comme curé et responsable de la communauté religieuse. Mais pour autant, cette relation, comme celle de l’archiprêtre Roche qui avait été témoin à leur mariage, n’a pas entraîné un souci d’éducation pour les enfants - pour la ferme, ce n’est pas nécessaire - ni un désir de les voir réussir dans d’autres voies, de tenter leur chance hors de la terre. Ce n’est pas l’esprit général du temps.Voltaire n’écrit-il pas à la Chatolais [5], qui venait de rédiger un ouvrage sur l’éducation "je vous remercie de proscrire l’étude chez les laboureurs. Moi qui cultive la terre, je vous présente requête pour avoir des manœuvres et non des clercs tonsurés." Ce Chatolais déclarait en effet "... le bien de la société demande que les connaissances du peuple ne s’étendent pas plus loin que ses occupations".
Chacun doit rester à sa place
Malgré les avancées du siècle, à l’exception près des physiocrates chez les intellectuels, on pense de même : chacun doit rester à sa place. Jean Jacques Rousseau le premier : "ceux qui sont destinés à vivre dans la simplicité champêtre n’ont pas besoin pour être heureux du développement de leurs facultés ... n’instruisez pas l’enfant du villageois, car il ne lui convient pas d’être instruit". Tout est dit. Pourquoi le simple paysan aurait-il eu à l’époque davantage d’ambition ? Mathieu avait seize ans au moment de la grande famine de 1709. Il est sans doute toujours habité par ce souvenir douloureux et la hantise de quelque nouvelle calamité. Le spectre de la faim n’est jamais loin… Cette constatation m’impressionne, car 1709 c’est à peine deux siècles avant la naissance de mon père Georges, soit deux fois la durée de sa vie, deux vies mises bout à bout !
En novembre 1775, juste un an avant de mourir, mathieu a la joie de marier claude, l’aîné de ses petits-fils, celui sur lequel il a porté toute son affection et auquel il va transmettre le domaine. C’est la dernière fois que c’est possible, mais il ne le sait pas. La Révolution va passer par là et nous avons vu combien tout change pour le fils de claude, à savoir mon ancêtre antoine et sa femme claudine coudour. Malgré tous les tracas que mathieu a rencontrés, a-t-il été ému par le magnifique paysage sur la montagne qu’on peut voir des hauteurs de Borgeas, quel que soit le temps et surtout quand c’est le coucher du soleil. Victor de Laprade, né à Montbrison le 13 janvier 1812 a consacré quelques vers à ce spectacle.
Coucher de soleil sur la montagne du ForezLe soir encore, du haut des cimes empourprées,De sa rougeur suprême inondait nos contrées ;Plus qu’à demi caché par les monts, le soleilS’abaissa tout à coup sous son rideau, vermeil,Et l’ombre, à larges pas, des forêts aux villages,Glissa rapidement d’étages en étages,Tour à tour s’éteignaient en de noirs horizons,Les clochers flamboyants et les blanches maisons.Bientôt submergeant tout de l’une à l’autre chaîne,La pâleur de la nuit noya l’immense plaine.Rasant l’herbe et les fleurs, un vent léger et frais,Comme exhalé du sol, souffla vers les forêts.Dans les vignes éparses, mais à leurs nids fidèles,Les oiseaux vers les bois rentraient à tire d’aile.
Pour lire la suite 44 : Une promenade du côté de Claudine, chez mes ancêtres Treille et Espinat.