- Etat des pertes
- Trois soldats Petrequin
Jules Marius est né le 12 avril 1884 à Saint Prim (Isère), au hameau de Gerbay au bord du Rhône, il est le fils de Michel Petrequin, 46 ans, jardinier ; et de Julie Chaix, 43 ans, cuisinière.
Ils se sont mariés à Die, dans la Drôme, le 25 novembre 1869. Michel, natif de Saint Clair le 31 mai 1838, est alors jardinier à Chatillon sur Chalaronne. Julie Chaix est née le 20 décembre 1843 à Treschenu-Creyers (Drôme)
Jules a une sœur aînée, Marie Madeleine, née à Saint Prim le 12 avril 1872. Brodeuse sur tulle, elle se marie à Saint Prim le 16 février 1895 avec Pierre Cellard, plâtrier, né à Condrieu le 14 novembre 1870. Le couple s’installe rue de l’église aux Roches et aura deux enfants : Antoine Honoré, né le 13 septembre 1897 et Louise Augustine née le 8 juin 1899.
A 16 ans, Jules Petrequin est « ouvrier en sparterie chez Chamouton »aux Roches puis tapissier. En 1901, il habite chez son tuteur Pierre Cellard aux Roches. En effet, ses deux parents sont décédés :
- son père est mort « à une heure du matin dans sa maison d’habitation située à Saint Prim, hameau de Gerbay » le 24 novembre 1888. C’est le père de Michel, Jean Baptiste, 76 ans, qui déclare le décès. Jules Marius, 4 ans, et sa mère Julie viennent habiter chez lui à Gerbay. Il est veuf. Son épouse, Madeleine Garat, est décédée à Saint Prim le 20 décembre 1884.
- Julie Chaix décède en février 1900 au Péage de Roussillon. Dans l’acte, elle est dite « née à Nonerée », en fait il faut lire « Les Nonières », hameau de Treschenu où elle est née.
En 1904, Jules Petrequin se fait recenser pour l’Armée [3]et tire le N° 49. Déclaré « Bon pour le service », il ne fait qu’un an d’armée, dispensé au titre de l’article 21 : « aîné d’orphelins ».
Après son armée, il habite en 1906 « au Grand Pavé » à Reventin-Vaugris (tout à côté des Roches) puis en 1907 à Villeurbanne, 55 place de la mairie. En 1908, il est de nouveau « chez Cellard » Grande Rue, aux Roches de Condrieu.
En août 1914, à la mobilisation, Jules Marius est affecté au 299e Régiment d’Infanterie, 19e compagnie. Ce régiment regroupe essentiellement des soldats de Vienne et de ses environs. Précision utile pour la suite de notre récit, le 299e RI fait partie de la 147e Brigade d’Infanterie rattachée à la 74e Division d’Infanterie du 16e Corps d’Armée.
Malgré la résistance des Allemands, le 299e marche dans la direction de Gerbéviller, et le 28 (août 1914) il franchit la Mortagne. Immédiatement après le passage, le 6e Bataillon se déploie et gagne la côte 282. Le feu ennemi est intense, la lutte est âpre contre les puissantes lignes organisées allemandes. Cependant nous réussissons à nous établir fortement sur les pentes au nord de la rivière. L’avance a été pénible et les pertes sensibles, mais l’ennemi a subi un véritable échec. Le 29, le brouillard est trop épais, pour qu’on puisse tenter quoi que ce soit : ce n’est que le 30, au lever du jour, que le Régiment en liaison avec les autres unités de la 74e D. I. attaque les tranchées du bois du Haut de la Paxe. Au pied des pentes, face à l’objectif, les bataillons marchent dans le brouillard jusqu’à 300 mètres environ des lignes ennemies. Là il faut s’arrêter. Une fusillade intense, à laquelle succède un feu d’artillerie prend le régiment en écharpe. Les pertes sont sérieuses. « Historique du 299e régiment d’infanterie : la grande guerre » 1921 |
Jules Marius est blessé au cours des premiers combats, probablement le 30 août à Gerbéviller. Evacué, il meurt, « des suites de ses blessures », à une heure du matin le 7 septembre 1914 à l’Ambulance 3/8 du 8e Corps d’Armée à Vennezey (Meurthe et Moselle). Victor Dallois et Joseph Millet, infirmiers militaires, déclarent son décès [4].
- Victor Dallois, infirmier et prêtre
- "Livre d’Or du Clergé"
Cette Ambulance N°3 est mise à la disposition de la 15e Division et, venant d’Essey la Côte, elle s’installe à Vennezey le 28 août au soir.
Jules Marius, à priori, doit être retrouvé blessé et être secouru par un autre Groupe de Brancardiers Divisionnaire (GBD) que celui de la 74e.
Rien d’étonnant lorsqu’on lit quelques passages de son JMO [5] :
« 30 août 1914 : dès 6h du matin, exploration de la région Séranville, passage toujours impossible sur Gerbéviller….A partir de 10 h 30, l’affluence des blessés est telle que le GBD, bien que fonctionnant comme Ambulance depuis le matin, est absolument débordé. Une ambulance est demandée par téléphone au Directeur (du Service de Santé) du XVIe Corps (d’Armée). 197 blessés ainsi recueillis et pansés sont évacués au fur et à mesure du retour des voitures qui font constamment la navette entre Remenoville et Vennezey.
A 15 h 30 arrive une Ambulance, N°12. Cette ambulance fait partie d’un groupe de 2 ambulances, la 10 et la 12, et d’1 SH [6], N° 8 mises à la disposition de la 74e division… »
« 31 août : avant le jour et grâce au brouillard, un nouveau convoi (de brancardiers) réussit à passer sur Gerbéviller malgré la canonnade de la route. 32 blessés sont ramenés. La même opération est reprise à la tombée de la nuit…le jour toute tentative reste impossible. A 12h arrivée au GBD de M. l’abbé Vasseur, aumônier volontaire. »
- Louis François Vasseur
- Aumônier volontaire au GBD de la 74e DI.
"Livre d’Or du Clergé"
« 1er 7bre (septembre) : pour la 1re fois, Remenoville n’est pas bombardé…le soir attaque sur la rive droite (de la Mortagne) vers Vallois. Convoi sur Gerbéviller. Ramené 18 blessés graves dont quelques-uns restés 3 jours dans les tranchées sans pouvoir être relevés à cause de la fusillade continue. »
Ceci explique en partie que, dans les pertes du 299e régiment, Jules Marius Petrequin soit indiqué "disparu". C’est par contre vraiment le cas pour Joannès Sylvain Petrequin, celui prénommé Jean dans la liste du JMO. Ce n’est que le 29 avril 1920 qu’un jugement établit que ce soldat, né à Vienne le 11 août 1885, est tué à l’ennemi le 30 août 1914 à Gerbéviller.
Jules Marius Petrequin faisait partie du même régiment que le soldat Jean Baptiste Ducrot, tué au combat du 30 août 1914. Henri Reymond, de Saint Clair du Rhône, village voisin des Roches, est également « mort pour la France » ce jour-là.
Pour comprendre le contexte de la mort de ces soldats, et de tant d’autres du 299e Régiment d’Infanterie, vous pouvez lire mes deux articles. |
Son acte de décès est transcrit dans les registres des Roches le 24 décembre 1914. Il est inscrit sur le monument aux morts des Roches et sur la plaque de l’église paroissiale.
- Monument aux morts des Roches