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La disparition du soldat Francisque Durand

Le vendredi 20 octobre 2023, par Daniel Lefebvre, Gilles Drevet

C’est le 3 mars 1910, vers 11 heures du soir, que Francisque DURAND voit le jour dans la ferme familiale au hameau de la Grande Forêt. Elle était située au carrefour de la montée de la Verne et de la route de la Grande Forêt à Chèzeneuve. Ses parents, Jean Joseph et Marie Octavie, cultivent quelques lopins de terre et élèvent des animaux. Il a un frère ainé, Victor, né en 1905, et aura aussi 2 sœurs, Marie Delphine (°1913) et Gabrielle Angèle (°1914). Son père Jean est mobilisé pendant la 1re guerre mondiale, d’abord dans un régiment infanterie territoriale puis dans une section d’infirmier.

Francisque fréquente l’école du village, puis apprend le métier d’horloger. Il travaille aussi sur la ferme familiale surtout après le décès de son frère en 1928.

En fin de semaine, il anime vogues, bals et noces avec son accordéon et comme tous les jeunes de son âge, pour ses 20 ans, il fait les conscrits puis le service militaire (classe 1930, matr. 256_Vienne)

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Francisque DURAND, au centre de la photo avec son clairon

Il est appelé au 32e régiment d’aviation sur la base de Dijon, en Côte d’Or, d’avril 1931 à avril 1932. De retour du régiment, il épouse le 13 juillet 1933, à Charantonnay, Florine VELIN. De cette union nait, le 27 juillet 1934, à Vienne, un 1er fils, Raymond (+ 2020). Il poursuit son métier d’horloger itinérant allant à domicile réparer horloges et pendules tout en poursuivant ses animations musicales. Il consigne méthodiquement dans un petit carnet noir, ses achats de pièces d’horlogerie, ses prestations et ses revenus de musicien à l’accordéon chromatique.

A l’été 1935, il effectue une période de 21 jours dans la réserve militaire au 4e rgt du génie à Grenoble. Il sollicitera la commune d’Artas pour une allocation militaire, suite à la perte de son revenu journalier d’ouvrier horloger.

Le 10 Mars 1937, à Bourgoin, Florine donne naissance à son 2e fils, Paul (+1966).
Alors qu’il a le projet d’acheter, à St Jean de Bournay, un commerce d’horlogerie, la guerre à l’Allemagne est déclarée. Il intègre le dépôt de guerre n°4, anciennement le 4e Rgt de Génie. Ce dépôt forme et équipe des bataillons du génie, qui sont rattachés à des Corps d’Armées ou des Divisions d’Infanteries. Le 26 août 1939, il est incorporé à Grenoble, au 31e bataillon du génie – 1re compagnie (31/1) appartenant à la 31e Division d’Infanterie Alpine, affecté à la section de commandement, 1re escouade avec la fonction d’infirmier. (Comme son père, 25 ans plus tôt).

Cette dernière a été mise sur pied entre le 26 et 30 Août 1939, à Montpellier, avec principalement des régiments du Sud-Ouest de la France et différentes compagnies d’appui comme 2 compagnies du Génie (31/1 et 31/2), des régiments infanterie de forteresses, des compagnies de radio et de transmission, un groupe sanitaire etc… :

15e Rgt Infanterie Alpine, (Montpellier_34) 81e Rgt Infanterie Alpine, (Montpellier et Béziers_34) 96e Rgt Infanterie Alpine, (Béziers_34) 56e Rgt Artillerie Divisionnaire, (Montpellier_34) 256e Rgt Artillerie Lourde Divisionnaire, (Montpellier_34) 23e Groupe de Reconnaissance Division d’Infanterie, constitué par le 2e Régiment de
Hussards (Tarbes_ 65)

La division est commandée par le général ILHER (puis, à partir du 17 mai 1940, par le général VAUTHIER). Elle fait partie de la 5e Armée et du 8e corps d’Armée.
Une compagnie du génie ou de sapeurs-mineurs est organisée de la façon suivante en ce début de guerre :

  • L’Etat major et une section de commandement de 53 hommes
  • 4 sections de combats de 57 hommes

Pour un total de 280 hommes env. Elle dispose d’une voiture de liaison, 4 camionnettes, 2 vélos, 38 chevaux et 18 remorques hippomobiles.

Les journaux de marches pour les bataillons du Génie n’étant pas disponibles pour suivre son parcours pendant les combats de 1939/40, nous allons nous appuyer sur l’Historique de la 31e Division d’Infanterie, extraits du « Service Historique de l’Etat Major de l’Armée de terre _Guerre 1939-1941 – Les Grandes Unités Française ».

Le 4 septembre 1939, Il est à Montélimar (26) où il a rejoint sa Division. Puis, direction les Hautes Alpes, prés de Gap (05), les villages de Serres, Aspres sur Buech, La Roche des Arnauds.

Fin septembre 1939, départ pour la frontière Suisse, dans la région de Delle (90), la Division y séjournera jusqu’au 20 février 1940.

En son absence, le 14 février 1940, sa fille Irène voit le jour à Bourgoin. Il obtiendra une permission, 17 jours plus tard, pour faire sa connaissance. Ce sera, malheureusement, la seule fois où il la verra ! il repartira quelques jours plus tard pour le front dans le Nord-Est de la France.

Francisque retrouve son régiment en Lorraine, au sud de Bitche (57), proche de la frontière avec l’Allemagne. Le 10 mai, débute l’attaque Allemande, sur les Pays Bas, la Belgique et le Luxembourg et le bombardement de villes françaises (Calais, Dunkerque, Abbeville …). Quelques attaques locales dans le secteur de la 31e DI. A la fin du mois, la Division fait mouvement vers Beauvais (60) puis le sud d’Abbeville (80).

Le 4 juin, l’armée française appuyée par des divisions britanniques tente une offensive à partir de la Somme. Une partie de la 31e DI attaque vers Behen -Vaux Firre, mais les contre-attaques ennemies, le manque de munitions d’artillerie et de carburant pour les chars oblige la Division à se replier. C’est d’abord sur la rivière de la Bresle qu’elle essaie de se maintenir. Puis elle décroche en direction de Rouen. Le 9 juin, l’objectif change, Rouen est occupé par les troupes ennemies, direction le Havre. Mais, trop tard, le 10 Juin, de toutes parts, les régiments sont débordés et encerclées le dos à la mer.

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La suite des événements a été racontée dans le Courrier Cauchois du 14 juin 1980 par un soldat du même régiment que Francisque DURAND. Ce soldat s’appelait Jean BOCQUET, originaire de la ville d’Yvetot entre le Havre et Rouen, il se retrouva comme plusieurs dizaines de milliers de soldats Ecossais et Français encerclés entre St Valéry en Caux et Veules les Roses.

« L’aube du 11 juin 1940 nous voit approcher de Veules les Roses. A une halte horaire, assis sur un talus, fatigué, je faisais par la pensée un retour en arrière : la 2e compagnie du 4e Génie de Grenoble, dans laquelle j’étais caporal-chef, entre en campagne en septembre 39 dans la VIIIe armée, 31e division, 1re Cie avec le capitaine PROUTEAU.

Après l’hiver dans le Haut-Rhin, le printemps dans les Ardennes, et aux avant-postes à Hanviller en ce qui me concerne, un mouvement de troupe nous fait débarquer le 30 mai à La Chapelle-aux-Pots dans l’Oise. De là, nous montons dans la Somme à pied mais la forêt d’Eu est notre point culminant et nous y avons subi un bombardement aérien alors que nous nous trouvions à un carrefour à six directions. C’était le 6 juin et de là le recul commença. Le 8, nous traversons de nuit Foucarmont en flammes. Le 9 nous sommes à Sainte-Agathe et le 10 au Catelier. La route d’Yvetot étant coupée par les Allemands, nous devons remonter sur Saint-Valery.

Ainsi, la guerre et le destin me ramenaient dans mon pays de Caux. Marchand jour et nuit depuis une semaine, nourris de biscuit, de sucre, et par le système débrouille-toi, on se demandait à quoi nous servions et où nous allions aboutir. Dans les prairies, les vaches demandaient à être traites, beuglant, et en ce matin du 11 juin, j’ai bu un quart de lait chaud sortant du pis de la vache ; en cette circonstance que c’était bon ! L’aurore annonçait encore une journée chaude. Comme chaque matin, le « mouchard » faisait sa ronde et surveillait les mouvements de troupes. Et de nouveau, nous repartons. En colonne par un, nous traversons Veules, si plaisant auparavant et si triste avec ses volets clos. Des habitants ou des réfugiés nous supplient de les embarquer avec nous. A la sortie de Veules, nous entamions la côte vers Saint-Valery lorsqu’un roulement d’avions nous fait nous éparpiller dans les jardins bordant la route. C’était le bombardement incendiaire de Veules, 300 bombes paraît-il ; des flammes s’élevaient déjà mais de nouveau la colonne reprenait son incessante marche. Depuis quatre jours le crépitement des mitrailleuses allemandes semblait nous suivre. Ectot est notre prochain arrêt.

Attendant l’ennemi vers le sud, on nous fait barrer une route avec des chariots et des véhicules hétéroclites. 11 heures, à Ectot un morceau de pain frais semble un festin après 10 jours de biscuits. Et nous reprenons la route de Saint-Valery. Le plan de défense est connu : deux divisions d’infanterie doivent embarquer sous la protection de deux divisions de cavalerie. Et là, il faut rendre hommage, entre autres à la 2e division de cavalerie légère qui s’est battue si vaillamment. Notre deuxième compagnie du Génie est envoyée dans Saint-Valery faire des travaux et des échelles d’embarquement. Mon ami CARRA, un Lyonnais, y a été blessé et fait prisonnier (père de 2 enfants ; depuis la mobilisation il écrivait tous les jours à sa femme). Quant à ma compagnie, elle dut rester à l’entrée de la ville, à mi-côte, et attendre les ordres… qui ne sont jamais venus. Faute de travail, nous nous sentions d’une inutilité complète, armés d’un mousqueton et d’une douzaine de balles. Les avions et l’artillerie ennemie continuent sur Saint-Valery leur œuvre dévastatrice.

On nous fait revenir en arrière sur la falaise. Les passages d’avions nous obligeant chaque fois à nous éparpiller, il advint qu’on ne se retrouvait plus.

Alors commence sur la falaise, cette longue après-midi du 11 Juin, suivie de son interminable nuit. Un de nos lieutenants voulut rassembler ses hommes, il trouva trois gradés, quatre sapeurs et moi. Chacun était parti du côté où il croyait trouver le salut.

Longeant le bord de la falaise, des soldats de toutes armes allaient et venaient. Par hasard, on en rencontrait un ou deux de connaissance. Les bobards ne manquaient pas. Le but cherché était de descendre sur la plage pour embarquer. L’un disait : non, pas par Saint-Valery, il est bombardé et les Allemands vont y arriver. L’autre disait : non, pas par Veules, ça brûle et on prépare la résistance. On est cerné. On sent l’étau de l’ennemi se resserrer. Rien pour s’abriter du soleil accablant, rien pour éviter les avions en dehors des meules de foin.

Rien à boire. Quel beau coucher de soleil pendant que derrière nous, le crépitement des mitraillettes se précise. La nuit vient mais l’incendie de Veules transforme l’horizon en écran rouge sur lequel nous devenons des ombres chinoises. Les Allemands lancent des fusants et peuvent maintenant tirer à vue. Chaque fois qu’un groupe se risquait à franchir une certaine butte de la falaise, il était certain d’être canonné. Un ordre circulait : briser les armes, détruire. Des motos sont jetées du haut de la falaise. Dans la nuit, une pluie fine nous rafraîchit mais ne dure pas. On allait d’un côté et de l’autre cherchant des renseignements ou quelqu’un de sa compagnie. On attendait des bateaux…qu’on ne voyait pas. On installerait des cordes pour descendre, mais où ? Et puis à un certain endroit, il y a comme une brèche au bord de la falaise dans laquelle je vois une bonne centaine de soldats, assis pour ne pas glisser, car la pente était prononcée. « Que faites-vous là ? » dis-je. Il parait qu’il y a une corde. Lassé, je m’assis, là ou ailleurs ! Soudain, vers trois heures du matin, des signaux viennent de la mer et dans le groupe, un soldat répond en morse avec une lampe.

Alors un immense espoir s’empare de nous. La corde est prête mais on attend le petit jour pour descendre les hommes. On s’aperçoit vite qu’il faut une minute et demie pour descendre un homme et remonter la corde. Or nous étions devenus plusieurs centaines. Les Allemands approchent toujours. Je calcule que je n’aurai pas le temps de descendre lorsqu’un officier, assis devant moi, se lève quelque peu et ordonne de le laisser passer pour commander l’embarquement. Je m’accole à lui et pus arriver ainsi à proximité de la corde. On parle du destin et c’est à cette minute que s’est joué le mien ; merci, officier inconnu. Je passai une heure à descendre les camarades puis mon tour vint. On m’attache la corde autour du corps sous les bras et je descends ainsi les 70 mètres environ de la falaise, glissant d’abord sur un plan incliné puis totalement dans le vide. Il devait être six heures environ. J’eus la chance que le hasard m’ait guidé sur la bonne corde. Pas loin de là, il y en avait une autre mais elle n’allait pas jusqu’en bas et les hommes devaient la descendre à la force des bras. Fatigue, manque de nourriture, certains durent se laisser glisser et lâcher par l’échauffement des mains. Un Marseillais se fit plusieurs fractures en tombant sur les rochers.

Il y avait, parait-il, une autre cordée faite avec des ceinturons bout à bout. Sur les galets, je retrouvai à nouveau des quantités de soldats allant vers la droite, d’autres vers la gauche.

Les bateaux arrivés durant la nuit se sont approchés au maximum et envoient leurs barques pour nous chercher par dix ou par quinze. Mais déjà le « mouchard » a commencé sa ronde et les avions viennent mitrailler. L’embarquement s’organise. On forme une colonne pour chaque barque mais pas pour longtemps car les avions reviennent et tout le monde se replie au pied de la falaise. Quatre fois, on a fait cette manœuvre et j’eus enfin la chance d’être bien placé. Mon tour vint de monter dans une barque : un pilote et quatre rameurs, il est 8h30 environ ; et quand je pense que deux rameurs se chicanaient pour une histoire de femme ! Ils avaient fait Dunkerque et c’était autre chose. La falaise s’éloignait. Sur les galets, le nombre de soldats augmentait et je ne savais pas que je faisais partie des tout derniers embarquements. Monté à bord d’un ancien bateau de commerce, ma première parole fut pour demander à boire et les marins firent tout pour nous donner ce dont on avait besoin. Je demande une cigarette à un marin, il me donne une cartouche de paquets de Players navy cut. Ce bateau s’appelait le « Patrie », un patrouilleur, et quel beau nom pour un sauveur. J’y trouvai 2 camarades et je ne reconnus pas un de nos sous-lieutenants qui s’était risqué à le joindre à la nage ; mais épuisé, il fut sauvé par une barque. Le Patrie était le seul bateau qui soit armé de six pièces. On était dans les 800 à bord. Il devait être 9 heures lorsque le Patrie s’éloigna en canonnant la côte. Le convoi vogua vers Cherbourg où je ne retrouvai que 36 camarades de ma compagnie. C’est aux 40 000 prisonniers de Saint Valery en ce 12 Juin 1940 qui n’ont pas eu ma chance que je dédie ce souvenir.

Francisque DURAND a disparu !!

Cela fait plusieurs jours en cette fin de mois de juin 1940, que les lettres de Francisque n’arrivent plus, lui qui écrit si souvent pour demander des nouvelles des siens. Depuis les environs de Beauvais, il a suivi comme Jean BOCQUET (voir témoignage), les tribulations de sa division qui a terminé son périple sur les plages du pays de Caux. Mais plus de nouvelles !

Le 22 Juin 1940, l’armistice est signé. Dans les Ondes d’Artas de septembre -octobre 1940, le petit bulletin écrit par le curé de la paroisse, le père Sadin s’interroge sur le sort de ses compatriotes : « La plupart des mobilisés de la paroisse, après cette triste guerre, qui laisse les cœurs de tous les patriotes et la France en deuil, ont regagné leur foyer respectif. Un certain nombre sont hélas prisonniers, une vingtaine m’a-t-on dit. De ce nombre se trouve M. l’Abbé THEVENON. Nous avons eu, il est vrai, à déplorer la disparition du soldat GLASSON, décédé à l’hôpital. Il est vrai également que M. Francis DURAND, horloger à la Grande-Forêt, n’a pas encore donné signe de vie depuis la cessation des hostilités. Mais il ne faut pas s’étonner de ce silence, étant donné que les communications officielles entre la zone libre et la zone occupée sont vraiment capricieuses. Espérons que lorsque ce bulletin paraîtra, notre camarade aura pu rassurer sa chère épouse et toute sa famille. Il est à noter que 2 soldats d’Artas, du moins à ma connaissance, ont été blessés au cours de cette guerre unique dans l’Histoire de France. Honneur à ces braves ! »

Les mois passent, son épouse Florine, aidée par la mairie envoie des courriers.

L’armée et la Croix Rouge, le recherchent. On va jusque dans les camps de prisonniers interroger des personnes l’ayant côtoyé. Son officier témoigne, indique la dernière fois qu’il l’a vu.

Je réponds à votre lettre du 13 / 01 / 1942 qui m’est seulement parvenue il y a 2 à 3 jours.
Je ne vous apporterai guère de lumière sur le sort de ce très brave homme que j’ai eu sous mes ordres pendant la guerre.

Il y a un mois à peu près, j’ai reçu une lettre de sa femme à laquelle j’ai donné peu de renseignements, car je n’en savais pas davantage.

Tout ce que je peux vous dire c’est que le 12 juin 1940 au matin, il était avec moi, dans une ferme, deux kilomètres avant d’arriver à Saint Valéry en Caux et je l’ai perdu de vue à partir 8 heures du matin, moment où nous nous sommes dispersés, un violent bombardement nous obligeant à partir dans toutes les directions pour accomplir le travail commandé par les circonstances. La division fut faite prisonnière vers les 11 heures du matin.

En conscience, je crois à 2 solutions, toutes les deux peu réconfortantes d’ailleurs :

  • Ou bien il a tenté de s’embarquer, ce qui était bien périlleux,
  • Ou bien il a été victime du bombardement.

Car après un an et demi sans nouvelles, on ne peut espérer grand-chose.
Croyez, Monsieur le Maire, à l’expression de mes sentiments les meilleurs.

Les nouvelles ne sont pas rassurantes, même si le sapeur CARRA (le camarade de jean BOCQUET), pense l’avoir vu parmi une colonne de prisonniers en route vers le Nord ; il ne peut préciser l’endroit ni la date de cette rencontre, mais affirme qu’elle a eu lieu antérieurement à son passage à Doullens (Somme), entre le 12 et le 20 juin 1940. (Entre Veules-les-Roses, où il a été fait prisonnier le 12, et Doullens. Le sapeur CARRA se rappelle être passé à Fontaine-le-Dun, à Formerie et à Aizaines.) ce témoignage a été recueillie par le Capitaine PIRAUD Jacques depuis son camp de prisonniers, pour la Croix Rouge. C’est le seul qui mentionne que Francisque était vivant après le 12 juin. Il n’est pas confirmé par M. DIGONNET de Lyon qui de retour de la guerre en a discuté avec ses anciens compagnons de régiment. Ces derniers ne l’ont pas vu après le 12 juin (source : cote _21P177799 SHD CAEN dossier n°11 583).

En juin 1943, Florine et ses enfants, alors réfugiés chez sa famille à Charantonnay, reçoit un courrier. Une enveloppe en provenance de Chatel Guyon (63) du Secrétariat Général des Anciens Combattants qui contient la plaque d’identification de Francisque sans aucune explication. Détail troublant, la plaque est entière, si elle avait été retrouvée avec son corps, on peut penser qu’elle aurait été découpée. La partie avec l’attache serait restée avec le corps, l’autre partie conservée par l’administration militaire pour le traitement administratif puis renvoyée à la famille.

La thèse du décès suite aux bombardements semble la plus plausible, si l’on retrace ses derniers instants en reprenant les témoignages les plus fiables.

Le Caporal-chef CATHERIN, de la Cie du Génie 31/1 déclare avoir vu F. DURAND pour la dernière fois le 11 juin 1940, vers 10h, aux abords immédiats de Veules-les-Roses (Seine Inférieure), avant le bombardement de cette localité, par l’aviation allemande. Il se trouvait alors avec le convoi des véhicules automobiles de la Cie 31/1, commandé par le sous-lieutenant JONEAUX. Il quitte le convoi et remonte la côte vers St Valery en Caux, jusqu’au hameau de l’Ecot situé à environ 2 km en avant du village, où il passera la nuit. Le lendemain, son officier, le docteur GUIRAUD le perd de vue après 8h, lorsque éclate un violent bombardement. Son corps ne sera pas retrouvé, ou ne sera pas identifié suite, peut être, à la perte de sa plaque d’identification.

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Ferme du hameau de L’Escot, dernier lieu où à été vu Francisque DURAND (photo : R. DISTANTE)

Sa disparition est actée par le procureur du tribunal de Vienne et paraît au journal officiel le 5 décembre 1944. Son décès avec la mention « Mort pour la France » officialisé le 27 mars 1947 est transcrit sur les registres de la commune d’Artas, le 15 avril de la même année. Son nom est inscrit sur le monument de la commune et sur le monument commémoratif de Veules-les-Roses.


Remerciements pour le prêt de documents et de photos à Mme Irène DESMUR fille de Francisque DURAND et M. Raphaël DISTANTE, historien de la bataille de St Valery en Caux et Veules Les Roses.


" Article rédigé par Gilles Drevet, qui sera publié dans le cadre de l’ouvrage "Les Artasiens dans la Seconde Guerre mondiale, à paraître en 2024."

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7 Messages

  • La disparition du soldat Francisque Durand 2 novembre 2023 16:33, par Jean-Louis PY

    Il est très possible que la soldat Francisque Durand ait été touché par un projectile de gros calibre lors du violent bombardement de 8h à l’Ecot où le docteur Giraud le perd de vue. Le corps a pu être pulvérisé, ses restes ne pas être identifiés et la plaque retrouvée plusieurs mois (ou années) après. Cette plaque est restituée à sa veuve 3 ans après sa disparition, délai qui peut-être a permis de restaurer le lieu en pâture (ce qui semble le cas aujourd’hui d’après la photo du monument) et où la plaque est réapparue du fait des mouvements usuels d’un terrain naturel sous l’effet de la croissance de la végétation et des affouillements de la faune.

    Répondre à ce message

  • La disparition du soldat Francisque Durand 23 octobre 2023 16:08, par level magguy

    ils ont été acculés entre falaise et mer malheureusement son corps a disparu comment se fait il que sa plaque d’identification n’ait pas été jointe au corps !!!

    Répondre à ce message

  • La disparition du soldat Francisque Durand 23 octobre 2023 16:03, par level magguy

    c’est curieux que sa plaque seule lui ai été retirée, sans que la déclaration de décès ne soit faite à la famille et le corps retourné à la famille ou peut être ce qu’il en restait hélas !!! bien triste période !!!!

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  • La disparition du soldat Francisque Durand 21 octobre 2023 10:37, par Colette Boulard

    Histoire touchante, même s’il y en eût beaucoup de disparitions comme celle de Francisque Durand.

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  • La disparition du soldat Francisque Durand 20 octobre 2023 13:45, par GIROD Alain

    Bonjour,
    Francisque DURAND qui repose à Divion (62) dans le carré militaire (message 2) est mort le 03/10/1915, il ne peut donc s’agir de la même personne.
    Cette "course à la mer" pour embarquer a fait de nombreuses victimes restées inconnues qui peuvent reposer dans les cimetières militaires du secteur. Le retour à la famille de la plaque d’identité, complète, est une interrogation.
    Cordialement
    Alain

    Répondre à ce message

  • La disparition du soldat Francisque Durand 20 octobre 2023 09:57, par Michel Jeannot

    Témoignage émouvant et très documenté, qui me fait penser à un cousin, René Louis Galut du 8°RA, également « Mort pour la France » et décédé précisément selon "Mémoire des hommes" le 11 juin 1940 à Veules les Roses…

    Répondre à ce message

  • La disparition du soldat Francisque Durand 20 octobre 2023 09:14, par Goutierre vincent

    Le Sapeur infirmier DURAND Francique est enterré à Divion (62) carré militaire, tombe n° 1. (cf "Sépulture de Guerre)

    Répondre à ce message

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