Louise et Pierre, profitant d’une très belle journée d’automne et de quelques heures de repos, décident d’aller faire une promenade jusqu’au village. Pierre est natif de Gagny, d’une famille de cultivateurs vers le centre du bourg. Il est fermier depuis peu de temps à la ferme du château de Maison-Blanche.
C’est un joli château de pierres blanches construit au XVIIIe siècle, au centre d’un parc bien décoré de fleurs et plantes diverses, entouré de bois à l’orée de la forêt de Bondy, en bordure de la vallée de la Marne.
Il a eu deux propriétaires. L’un, le sieur de Plainville et de Maison Blanche, secrétaire d’un trésorier du roi Louis XIII, l’autre Ponce Coche 1er Valet de Chambre du Duc Philippe II d’Orléans le Régent.
Cette demeure nobiliaire connut, le 13 septembre 1718, un mariage célèbre. Celui du comte François Henri de Ségur, gouverneur du pays de Foix, lieutenant général de Brie et de Champagne avec la demoiselle Philippe Angélique de Froissy, fille naturelle du régent, élevée dans cette demeure par l’épouse du châtelain Marie-Anne Bédauré et ayant comme tuteur le propriétaire de ce joli château. On en parle encore, de ce célèbre mariage ! Dans ce petit coin de Gagny, nous imaginons ces dames avec leur belle robe à panier, l’arrivée avec élégance des calèches de tous les seigneurs des environs. Nous ne savons pas si le Régent s’est déplacé, c’est une question sans réponse !
Mais au début de l’an 1890, Louise native de la Haute-Saône, de Fougerolles précisément, vient à Paris pour trouver du travail. Louise par bonheur a obtenu un emploi au château chez le banquier Teusch. Elle sera une des femmes de chambre, au service de cette famille de banquier de Paris, nouveau propriétaire depuis 1884.
Par pur hasard, elle fait connaissance avec Pierre chez la cousine de ce dernier. Une idylle s’est créée et le mariage eut lieu dans le village de Louise, le 12 avril 1890 à Fougerolles, car c’était la coutume de se marier dans la famille de la jeune fille.
- Louise et Pierre
Dès leur retour à Gagny, les jeunes mariés se sont installés dans leur logis, réservé au sein de la modeste ferme appelée d’ailleurs « petite maison ». Ils ont découvert une salle commune meublée simplement d’une grande table, de bancs ainsi qu’un dressoir à vaisselle et une chambrette avec un lit recouvert de tissu à petites fleurs, style cretonne de l’époque. Une demeure simple, mais accueillante pour ce jeune couple.
La châtelaine s’était particulièrement penchée sur l’installation. Très sociale, elle souhaitait qu’ils se sentent bien. Il faut préciser qu’elle avait certainement pensé que si les employés étaient heureux, le service serait bien fait, malgré tout, la femme du banquier était une personne aimable.
Louise, arrivée depuis peu dans son nid de jeune mariée, avait eu comme cadeau lors de son mariage en Haute-Saône un bénitier de maison qu’elle s’était empressée d’accrocher au seul clou existant sur le mur de la salle commune.
La religion tenait une grande place au sein des familles. Il ne faut pas oublier d’installer le coffre de mariage amené de chez ses parents, offert par son père selon la tradition. Superbe coffre en bois sculpté sur la façade. À l’intérieur du couvercle, un décor peint représentant une scène champêtre. Il contenait du linge personnel, mais également quelques draps brodés par elle-même et sa mère, de la vaisselle et d’autres ustensiles de ménage. Ce coffre de mariage sera déposé dans la petite chambre en attendant d’y mettre, dans quelque temps, un berceau que son père fabriquera sûrement. Espérances de Louise et Pierre, mais il faut déjà s’installer. Elle verra ensuite pour décorer le lieu ou elle va vivre avec son Pierre.
Après leur installation et leur début de vie maritale, ils ont tous les deux la chance de pouvoir s’absenter ce mardi 7 octobre 1890. Une journée de repos, avant les grands travaux d’hiver à la ferme et pour elle, la préparation pour le dimanche à venir d’un dîner important au château avec de nombreux notables des environs. Ils se sont mis sur leur trente-et-un pour aller en ville. C’est le début de la matinée, le ciel est d’un beau bleu automnal, le soleil les invite à aller découvrir le village.
Les feuilles des arbres se sont parées d’une très belle couleur dorée et rouge, les odeurs de l’automne se font sentir. En passant près du parc du château, ils croisent les jardiniers qui s’affairent avant l’hiver à la taille des arbustes, des roses fanées, au ratissage des allées et à la préparation de certaines plantes fragiles pour les entreposer dans l’orangerie en prévision de la mauvaise saison qui s’approche. Puis, ils passent près de la nouvelle petite chapelle construite en 1814 par Monsieur et Madame Brodelet (celle qui a connu le mariage de 1718 aurait été démolie lors de la révolution). Louise s’y rend pour ses dévotions lorsqu’elle a un peu de liberté dans la journée.
En continuant leur parcours après les murs de pierre du domaine, ceux-ci ayant été construits en 1719 pour clore la propriété très étendue, ils traversent les bois. Les hêtres, les chênes et les bouleaux dégagent d’agréables odeurs d’essences variées, ainsi que celles de champignons cachés dans la mousse au pied des chênes. Soudain, un oiseau les interpelle avec son chant mélodieux qui leur fait comprendre qu’ils franchissent son territoire, mais en récompense, il leur offre des trilles agréables.
Louise a une passion pour les chants d’oiseaux et aime à se balader seule pour entendre leurs chants. Ils s’arrêtent un instant afin de pouvoir profiter de l’automne et écouter ce petit oiseau. Ils profitent de cet instant de quiétude pour s’asseoir sur l’herbe et manger un petit morceau de pain et de lard avant de pénétrer dans la civilisation villageoise.
Ils s’étaient levés très tôt pour pouvoir partir en balade, avant il fallait nourrir les bêtes : vaches, poules, etc. Ce petit encas est le bien venu. Après avoir repris des forces, ils poursuivent leur chemin par de petits sentiers en direction du village. Louise et Pierre franchissent les limites du domaine et arrivent dans le lieu dit « le grimpet ». Ils découvrent alors, un superbe point de vue sur le plateau d’Avron qui leur présente les couleurs des arbres également parés d’ocre et de rouge.
Continuant leur promenade, ils longent la nouvelle voie ferrée construite en 1850 et qui dessert Paris à Strasbourg par un chemin de fer avec sa locomotive à vapeur rugissante et fumante. Un trajet totalement inconnu pour ce jeune couple.
Soudain, un grondement sourd, ils aperçoivent de la fumée grise au loin provenant de la direction de Paris. C’est l’heure du passage de ce nouveau moyen de transport. Impressionnant pour ces jeunes.
Après quelques pas, ils sentent une odeur qu’ils connaissent bien, « le parfum très fort » des vaches, poules et cochons qui provient de la ferme située en bas à gauche du chemin en pente qu’ils viennent d’emprunter pour arriver face au lavoir municipal de Gagny. De là, ils perçoivent des bruits bizarres. Il s’agit des claquements que fait le bruit des battoirs sur le linge. Les voix des laveuses et leur langage imagé les surprennent un peu, malgré tout, ils ont l’habitude du franc-parler, eux qui fréquentent quotidiennement les gens de la terre, simples et directs.
Ils sont interpellés par un appel : le marchand de peaux de lapins « peaux d’lapins, peaux » s’écrie-t-il ! Ils sourient en voyant ce brave homme portant sur son bâton les peaux récoltées à droite et à gauche. Tout de suite après le colporteur, une voiture à cheval et le claquement du fouet du cocher, le crissement des roues de la calèche sur la route pavée allant de Neuilly sur Marne à Gagny, ils se serrent l’un contre l’autre pour laisser passer ce voyageur pressé par ses obligations, c’est le Médecin du village. Après le passage de cette calèche, le cheval a laissé une marque odorante sur le chemin ; un petit tas de crottin !
Louise et Pierre arrivent près de la Place du Marché après avoir emprunté pendant quelques mètres la rue de Chelles qui comme son nom l’indique était la voie qui allait de Gagny à Chelles, rue étroite et pavée, longée de maisons accolées les unes aux autres comme pour se tenir chaud en hiver ou au frais pendant la belle saison. À l’entrée de cette petite place du Marché, Louise et Pierre s’arrêtent pour regarder l’atelier du maréchal-ferrant, d’où se dégage une forte odeur acre, celle de la corne brûlée. Devant la porte, le cheval Pompon attend patiemment ses soins de « pédicurie ». Ils entendent les allées et venues du soufflet sur la forge qui attise le feu, et le claquement du marteau sur le fer à cheval posé sur l’enclume.
Puis, ils se dirigent vers le magasin « le bon Marché ». En passant devant un immeuble face à la place, où se trouvait jusqu’en 1870 la mairie. Tous les deux admirent cette si jolie place pavée, avec ses deux rangées d’arbres, « elle a fière allure notre place du marché » s’exclament-ils, vraiment très belle, ils sont contents de pouvoir la parcourir et d’admirer tous ces commerces variés qui la bordent de chaque côté des trottoirs.
- La place de Gagny
- Place du marché Baron Roger
Louise est très attirée par la devanture de la boutique « Au Bon Marché », tenue par les demoiselles Pruvost. De petites broderies sont pendues ainsi que des vêtements de travail, des chapeaux, des canevas, des bavoirs, et brassières en coton brodés pour bébé, etc. Par l’entrebâillement de la porte, elle aperçoit les étagères avec les fils à coudre, les soies à broder. Elle pénètre pour admirer les boutons de nacre blanche si bien rangés dans les tiroirs, les rubans, et diverses passementeries. Car il faut souligner qu’à cette époque les femmes cousaient beaucoup, surtout à la main, les machines à coudre étaient réservées à une catégorie de la société plus élevée que les femmes de chambre, qui avaient peu de moyens. Devant la vitrine, il y a une table avec des tissus divers et variés chatoyant à l’œil.
À côté de cette boutique se trouve un bazar, vente d’outils de vigneron, de fermier, des paniers, et devant la vitrine se trouve également à la vente un Landau de style anglais monté sur de grandes roues pour le confort du bébé. Pierre est très intéressé par certains outils manquants à la ferme, il se renseigne pour un éventuel achat, mais Louise est pressée d’aller un peu plus loin où il y a un autre magasin de bonneterie dans lequel elle espère trouver ce qu’elle cherche pour son habillement.
À nouveau un bruit de sabots les fait se retourner, une calèche arrive sur les pavés en faisant un joli bruit de cliquetis harmonieux. Une dame chapeautée est installée confortablement ; le cocher est à l’avant, muni de son grand fouet, les rênes à la main pour diriger l’animal chevalin.
Que ce doit être agréable dit Louise à son époux, de se faire transporter de la sorte, Pierre lui répond en opinant de la tête, en pensant que sûrement jamais ils n’auront l’opportunité de se laisser véhiculer dans une calèche aussi somptueuse que celle-là !
Le village est animé, des badauds comme eux et certains commerçants sont sur le pas-de-porte pour inviter les promeneurs à connaître leur produit en vente.
Ils repartent pour continuer leurs éventuels achats et leur visite. Ils découvrent le nouveau magasin à la mode qui deviendra célèbre par son nom : « Le Comptoir français » au milieu de cette rangée de commerces. Plus loin se trouve le magasin attendu par Louise, « Au petit Soleil ». Là, elle veut comparer avec ce qu’elle a pu admirer dans l’autre boutique.
Ils ressortent sans rien acheter, trop cher pour leur petite bourse de métayer. En avançant, un peu plus loin se trouve l’échoppe du cordonnier. Paré de son tablier de cuir, assis sur un petit tabouret, il est en train de réparer une chaussure bien malade qui est posée sur une sorte de pied en métal. Il faut dire qu’à cette époque les villageois marchaient beaucoup, et parcouraient de nombreux kilomètres. Les chemins étaient souvent d’un accès difficile et boueux à la mauvaise saison. Des peaux pendaient derrière lui et dans ce petit atelier une odeur de cuir et de graisse faisait frissonner les narines. Un salut à cet ouvrier d’art et ils continuent leur chemin.
En face, au n° 8 de la place, se trouve une officine, « la Pharmacie centrale » ce qui est assez nouveau pour l’époque. Ils peuvent voir de superbes bocaux teintés avec des étiquettes sur lesquelles sont mentionnés les noms latins des plantes ou toute autre chose qui s’y trouve. Dans la vitrine des affiches sur l’hygiène du corps et des invitations à acheter des onguents pour soulager les maux divers et notamment la réclame de l’eau Badoit pour ses bienfaits sur la digestion. À l’intérieur de la pharmacie, ils aperçoivent l’apothicaire comme on la nommait autrefois, Mme Melot, femme savante, car en 1890 elles n’étaient pas très nombreuses à pouvoir exercer cette profession, comme celle de médecin également… De nombreuses années d’études surtout réservées à la gente masculine et à une catégorie sociale. Louise et Pierre pénètrent dans cette officine, une nouveauté pour des gens de la campagne. Ils demandent des conseils à Mme Melot qui les impressionne par ses connaissances du corps et des remèdes à prendre. Ils ressortent de ce lieu un peu magique, heureux d’avoir pu obtenir des renseignements aussi chaleureux et ils ont appris beaucoup de choses. Ils sont un peu plus savants.
La cloche de l’église Saint-Germain tout près sonne trois heures de l’après-midi. Ils sont un peu fatigués et pensent qu’il serait bon de se rafraîchir avant de continuer leur promenade. Près de cette pharmacie se trouve l’école où les enfants sont en récréation. Ils entendent des chansons enfantines et le claquement de la corde à sauter.
- La rentrée des classes
Les petits garçons jouent sur le sol avec des billes ou des osselets. À côté de cette école se trouve la Maison commune. Le Président des Assemblées municipales (maire) est Monsieur Léon Bry. À ce moment, il arrive et leur fait un signe de tête, en pénétrant dans la cour de l’école pour assurer le bon fonctionnement de la ville, pour quelque temps encore, car ensuite il prendra possession de sa nouvelle et belle mairie dans le château du village.
Ils continuent, car ils savent qu’il y a un café qui se trouve près de l’Église. Sur le trottoir, une ou deux tables sont installées avec des chaises. Il fait bon cet après-midi d’automne, c’est le moment d’en profiter. Il sera agréable de s’asseoir un petit moment en dégustant une limonade pour Louise, mais Pierre préfère un verre du petit vin de Gagny, production des vignerons du village. Ce n’est pas cher et cela fait du bien. Puis ils poursuivent leur chemin.
Dans la rue de Villemomble pas très loin de l’école, est installée une boutique d’épicerie fine, dont les odeurs des produits se font sentir jusque dans la rue. Les passants peuvent humer les épices venant des pays lointains ou tout simplement les herbes sèches pour améliorer le goût de la cuisine. À l’intérieur, des bonbons multicolores, des coquelicots, des violettes dans des bocaux de verre transparent, des roudoudous, des rouleaux de zan avec une petite perle de couleur au centre de ce ruban magique, si appréciés des petits ou grands gourmands.
Ils continuent leur parcours découverte du village en empruntant la rue Brodelet. Ils passent devant la gendarmerie qui se situe juste au coin.
Le gendarme Thibault Théodore est de faction près de la porte d’entrée.
Ils arrivent enfin devant le café et s’installent comme ils l’avaient prévu pour prendre un peu de répit, le patron gros bonhomme jovial, protégé par son grand tablier bleu jusqu’en bas des chevilles vient leur parler pour prendre leur commande et leur demander de quel coin de Gagny ils viennent, ne les connaissant pas encore. Ils papotent pendant un petit moment et après leur rafraichissement, décident de reprendre leur parcours.
La promenade continue vers l’église Saint-Germain pour que Louise puisse faire une petite prière, mettre un cierge. Il ne lui est pas facile de se rendre à l’office du dimanche. Elle se rend à la chapelle du château, mais ce n’est pas l’église du centre du Village.
L’église a été édifiée en 1839. À l’intérieur, son superbe autel en bois sculpté par Cruchet en 1872.
- L’église
Bien souvent le dimanche ou les jours de fête, il y a réception au château de Maison-Blanche, impossible de se rendre à la messe. Louise travaille toute la journée, tôt le matin et jusque très tard dans la soirée pour tout ranger avec le valet de chambre Joseph Brush, l’autre femme de chambre comme elle, Angelina Gorbeloni qui arrive tout droit d’Italie. Louise aide également la cuisinière Eugénie Guevauviller qui est un cordon bleu apprécié par les Châtelains. C’est pourquoi ils ont plaisir à inviter pour des déjeuners ou diners les Notables de Gagny ou des villes avoisinantes comme Gournay-sur-Marne ou Livry-Gargan. Il fait bon vivre dans ce joli petit château décoré avec soin et raffinement.
Mais revenons auprès de nos deux visiteurs du village. Louise sort de l’église, ravie elle a pu faire les prières pour tous ceux qu’elle aime, tout va pour le mieux…
Et bras dessus, bras dessous, ils reviennent sur leur pas, car ils veulent découvrir le château de Monsieur le Comte de Laugier-Villars, qui va bientôt devenir la mairie. « L’inauguration est prévue le 12 octobre 1890 » et la nouvelle mairie accueillera pendant son mandat le Maire Léon Bry élu en 1884.
- La mairie
- Gentilhommière construite en 1715 par François Normand avocat au Parlement de Paris. Monsieur le Comte Laugier Villars a été lui-même maire en 1848.
Mais l’heure tourne et il faut penser revenir à la ferme, car Pierre a du travail malgré la permission donnée par le châtelain de s’absenter cette journée. Il faut qu’il nourrisse les animaux de la basse-cour, les vaches et cochons avec l’aide du valet de ferme Eugène Leloup ainsi qu’Anatole Mozille le charron. Tous s’entraident pour le travail.
Ils reprennent le chemin du retour, cette fois ils remontent la rue de Chelles. Après quelques pas ils sont surpris par un remue-ménage ! L’éleveur de cochons est en train de trier ses porcs, afin de choisir ceux qui vont devenir des jambons… entre ceux qui sont les plus dodus. Ces petites bêtes bien sympathiques et nourrissantes sont très odorantes, très bruyantes et animent la rue…
Un peu plus loin et heureusement pour l’odeur très tenace des porcs, une laveuse du lavoir municipal se trouve devant sa porte assise sur une petite chaise. Petite bonne femme ronde dans sa jupe étoffée par des jupons, la taille serrée par un lien, avec son chignon monté sur la tête, ses joues rouges qui lui donnent un air de bonhomie.
Ils se saluent et bavardent quelques instants tous les trois, Louise s’informe des conditions de travail de cette brave dame, Marguerite lui explique que tous les jours très tôt le matin, elle descend avec le linge de ses patronnes sur sa brouette pour se rendre au lavoir municipal. Elle y retrouve ses amies. Le terme n’est pas vraiment exact, car il existe entre elles une rivalité assez forte qui entraîne parfois des crêpages de chignon assez spectaculaires ! Elle parle fort, l’habitude du bruit dans son lieu de travail et de plus, elle n’est pas toute jeune, percluse de rhumatismes à cause de l’humidité chaude et constante, dans le lavoir. Sa gaîté fait plaisir à voir, elle s’exclame et rit aux éclats comme une petite fille. Elle souhaite aux deux tourtereaux un bon retour et bon courage pour la fin de journée.
Pour tous les deux, c’est un plaisir de faire connaissance avec des villageois, car à Maison-Blanche ils sont un peu isolés. Ce sont les bois et la campagne, malgré qu’ils ne soient pas éloignés.
Après avoir parcouru quelques mètres, le décor devient totalement différent dès qu’ils passent devant les carrières de gypse qui commencent à être exploitées pour l’élaboration du plâtre. Une poussière blanche a envahi les lieux, Louise trouve une certaine ressemblance avec un jour de neige.
- Les carrières
Ils suivent encore la rue de Chelles et arrivent à la route de Gournay, nom donné également selon la direction, cette route rejoint Gournay-sur-Marne. Pour le retour, ils vont la suivre jusqu’au lieudit la Glacière de Maison-Blanche, car Pierre veut faire découvrir à Louise la plantation de pruniers qui doit appartenir à la famille Moisan, fermier du centre du village, et dont elle a entendu parler par la cuisinière du château qui avait fait des confitures pour les enfants. Louise connaît plutôt les grands vergers de cerisiers qui sont la spécialité de son village, Fougerolles, et de plus avec les fruits se fabrique le Kirch réputé même à Paris.
Elle découvre effectivement les vergers et se dit que l’année prochaine, elle essayera de se procurer ce délicieux fruit qu’est la prune noire de Gagny, pour la goûter et en faire également des confitures pour son mari et elle-même.
Après avoir observé les vergers, ils continuent d’avancer en empruntant le nouveau pont qui enjambe la voie de chemin de fer nouvellement installée. Ils avancent en entrant à nouveau dans le bois qui entoure le domaine du châtelain, ils arrivent à la fin de leur promenade. Ils sont fourbus, mais ravis, le travail de la ferme attend Pierre, pour Louise elle va préparer le dîner, car ils n’ont pas beaucoup pris le temps de se nourrir, ils ont préféré profiter de leur visite dans le village.
Sources : archives municipales de Gagny, photos, et cartes postales collection personnelle.