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Un mouchoir portant les initiales J.L

Le jeudi 3 septembre 2015, par Michel Guironnet

Sa chemise et son « caleçon de soldat » portent le numéro matricule 10703, dans sa poche est trouvé un mouchoir avec les initiales J.L… Mon enquête est, pour l’instant, terminée. Mais peut-être que nos lecteurs pourront m’apporter des preuves supplémentaires ?

Le 5 avril 1878, Jean Girin, garde-champêtre, et Louis Prost, tailleur d’habits, déclarent en mairie des Roches-de-Condrieu « que ce jour, à dix heures du matin, ils avaient retiré des eaux du Rhône le cadavre d’un inconnu du sexe masculin, âgé d’environ vingt cinq ans, taille un mètre soixante centimètres, cheveux et sourcils noirs, yeux gris, nez fort, bouche petite, menton rond, figure ronde, vêtu d’un pantalon drap gris, gilet du même drap à manches noires, deux chemises, l’une en flanelle grise, l’autre chemise de soldat portant le timbre du 32e régiment d’infanterie, et portant le N° matricule 10703, caleçon de même, chaussé de bottines élastiques presque neuves sans clous, chaussette en laine blanche, mouchoir de poche coton à petits carreaux rayés rouge et blanc, marqué aux initiales J.L ».

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(collection personnelle de l’auteur)

Le 9 avril 1878 parait cet article dans « L’Impartial Dauphinois » :
« Le 5 du courant (avril) un cadavre a été retiré du Rhône, sur le territoire des Roches-de-Condrieu. Nous donnons son signalement : taille, 1 m. 60, cheveux et sourcils noirs, yeux gros, nez fort, bouche petite, menton rond, figure ronde. Il était vêtu d’un pantalon de drap gris, d’un gilet de même étoffe à manches noires, d’une chemise en flanelle grise, d’une chemise et d’un caleçon en toile-coton portant le timbre du 32e régiment d’infanterie et le numéro matricule 10703. Dans une poche, on a trouvé un mouchoir en coton, à petits carreaux blancs et rouges, portant les initiales J. L. Les pieds étaient chaussés de bottines à élastiques presque neuves.
L’identité de ce cadavre n’a pu être établie. Il parait avoir séjourné un mois dans l’eau. Après les délais réglementaires, il a été enterré dans le cimetière des Roches-de-Condrieu »

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Moniteur Viennois du 12 avril 1878
"Vendredi dernier" était le 5 septembre 1878 ; c’est bien le jour indiqué dans l’acte de décès...Mais pas de M. Argoud dans celui-ci. La description du cadavre change légèrement "environ 35 ans (au lieu de 25), vêtu d’un pantalon gris, gilet à manches, chemise à plis, marquée 22 (et non 32, le timbre du régiment ) Dans une de ses poches se trouvait un mouchoir aux initiales J.L" Ce doit être le même noyé.

Un article quasiment identique à celui de « L’Impartial Dauphinois » paraît dans le « Journal de Vienne et de l’Isère » du dimanche 14 avril 1878. Les « journalistes » ont du simplement recopié l’acte de décès.
En marge de celui-ci, cette mention ajoutée quelques semaines plus tard : « acte rectifié par jugement du Tribunal civil de Vienne en date du 28 mai 1878, en ce sens que cet inconnu est le corps de Mr Liège Claude Louis, fils naturel de Marie, né à Lully le 14 Xbre (décembre) 1852  ».

Lully est une petite commune de Haute-Savoie, non loin de Thonon les Bains. Ni les actes de naissance de cette commune, entre 1849 et 1854, ni les registres matricules de la classe 1872 ; ne sont numérisés. Ce qui est bien dommage.
Cela nous aurait permis de comparer sa description physique avec celle du noyé ; et surtout de vérifier si Claude Louis a bien fait son armée au 32e d’infanterie sous le numéro 10703…Ce régiment est alors en garnison à Châtellerault, dans la Vienne ; ville bien éloignée ; reconnaissons-le ; des berges du Rhône !

A moins qu’en 1878 il n’ait déjà terminé son service militaire et soit arrivé, pour travailler peut-être, à Lyon, Givors ou Vienne….ayant emporté avec lui ses effets militaires !

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Effets de petit équipement
Page extraite du livret militaire de mon grand-père Romain Victor Guironnet,
de la classe 1882.

La réponse nous est fournie quelques pages plus loin. Le jugement de rectification du « greffe du tribunal civil de première instance séant à Vienne » le 25 mai 1878 est retranscrit en juin dans le registre des décès : Claude Louis Liège était « employé chez Madame la Comtesse de Quinsonnaz en la commune de Chasselay, d’où il aurait disparu le onze février dernier… »
En fait, c’est du côté de Saint Germain au Mont d’Or, commune très proche de Chasselay et en bordure de la Saône, qu’il faut s’orienter. C’est là qu’est le château de la famille Pourroy de l’Auberivière de Quinsonas.

Dans le recensement de 1876, au hameau de La Combe, est noté « Emilien de Quinsonas, propriétaire rentier » âgé de 50 ans ; son épouse « Caroline de Gesse », 49 ans, et leurs deux enfants Stéphanie, 22 ans, et Henri, 20 ans.
Mais point de Claude Louis Liège parmi le nombreux « personnel de maison » employé au château ! Ce doit pourtant bien être chez « Caroline Elisabeth Pauline de Jessé-Levas » qu’il travaille.

Née le 2 mars 1829 à Lyon, « Madame la Comtesse de Quinsonnas » se marie le 4 août 1852 à Lyon avec le Comte Emilien Ennemond Gabriel Marie Pourroy de l’Auberivière de Quinsonas, né le 26 octobre 1827 à Creys-et-Pusignieu, en Isère dont elle a trois enfants. Elle décède le 30 avril 1913, à la Villa Prato, à Menton, à l’âge de 84 ans.Ces notes sont extraites de la généalogie de Christian Soyer sur Geneanet.

Une autre noyade est restée mystérieuse : quelques jours auparavant, le cadavre d’un pontonnier est retiré du Rhône à Condrieu, de l’autre côté du fleuve.

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11 Messages

  • Un mouchoir portant les initiales J.L 26 septembre 2015 11:17

    Bonjour
    Le problème des noyés aux Roches et à Condrieu m’a également interrogé (j’y ai des ancêtres jusque vers 1890) .
    En effet chaque année la liste des noyés est impressionnante et seulement qq rares enfants sont de Condrieu (Les Roches faisant partie de Condrieu avant la création des départements).Je me suis demandé pourquoi !

    La réponse est dans le cours du fleuve qui fait une anse à cet endroit et où toutes les personnes qui se noyaient en amont finissaient par échouer.
    Ces circonstances malheureuses nous renseignent sur l’activité qui régnait sur le Rhône.
    Mais je n’ai pas, actuellement, trouvé de noyés/absents parmi les nombreux bateliers de Condrieu qui transportaient le vin produit sur les coteaux jusqu’au delta.
    Les activités des habitants de Condrieu : les vignerons, les tonneliers, les charpentiers de bateaux et les bateliers.

    Voilà ma petite pierre à l’édifice de la Généalogie !

    Répondre à ce message

    • Un mouchoir portant les initiales J.L 26 septembre 2015 12:09, par Michel Guironnet

      Bonjour,

      Merci pour votre commentaire.
      Les corps retirés du Rhône à Condrieu, Les Roches, Saint Clair et Saint Alban viennent souvent "de plus haut" : Vienne et villages des environs, voire Lyon ; après plusieurs jours dans l’eau.
      Par contre, dans les registres d’état-civil des Roches et de Condrieu ; on trouve assez souvent des transcriptions de décès de Condriots ou de Rochelois survenus par noyade au sud de ces villages, en Ardèche ou dans la Loire, voire très loin...
      Dans ce cas, soit ils se sont noyés dans le fleuve aux alentours de leur village natal (Les Roches ou Condrieu) et sont retrouvés beaucoup plus bas ; soit ils se sont noyés au sud de ces villages en exerçant leur métier de bateliers ou de "marchands sur le Rhône"
      Une recherche dans les registres des villages du bord du Rhône, faite sur plusieurs années, devrait permettre de retrouver bien des habitants des Roches et de Condrieu victimes des flots, pas aussi sages qu’aujourd’hui, du Rhône.

      Mais j’y pense : comment s’appellent vos ancêtres ?

      Cordialement.
      Michel Guironnet

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      • Un mouchoir portant les initiales J.L 15 janvier 2016 18:12, par micheline arnould

        je viens seulement de revenir sur cet article concernant les noyés du Rhone.
        Vous désiriez savoir qui étaient mes ancêtres de Condrieu.
        il s’agit d’abord de Jacques JACQUIER né le 11/2/1823 puis de toute sa parenté Claude JACQUIER et Antoinette GAY ; Benoit JACQUIER et Marie TISSOT, Jacques GAY et Marie PIATON ; .....

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  • Un mouchoir portant les initiales J.L 8 septembre 2015 15:12, par jean-François NYS

    Bonjour ! Dans votre article, il y a deux cadavres non identifiés. L’un possède deux chemises et un mouchoir qui servirait à l’identifier. Mais, en réfléchissant, il se pourrait que la chemise militaire et le mouchoir brodé furent volés par l’autre qui était peut-être cause de son décès. Que dit on de l’autre cadavre dans la presse ? Vous nous mettez devant de nombreuses interrogations sans nous permettre d’avancer d’autres hypothèses qui puissent vous aider. Cordialement JF NYS

    Répondre à ce message

  • Un mouchoir portant les initiales J.L 5 septembre 2015 00:15, par jean antoine

    Bonjour,
    avec le numéro matricule ne pouvez vous pas retrouver sa fiche militaire ???
    Cordialement
    J.A.

    Répondre à ce message

    • Un mouchoir portant les initiales J.L 5 septembre 2015 04:31, par Michel Guironnet

      Bonjour,

      Justement, c’est bien le but de cet article !

      Les registres matricules de la classe 1872 ne sont numérisés, ou du moins pas "en ligne".
      N’habitant pas sur place, je compte sur les lecteurs de Haute-Savoie, ou d’autres, pour m’aider à retrouver cette fiche.

      Cordialement.
      Michel Guironnet

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  • Un mouchoir portant les initiales J.L 4 septembre 2015 08:44, par Lorraine Lagesse

    Bonjour
    Pourrait il avoir une connexion entre ce mouchoir aux initiales<> JL < et Caroline E Pauline de :- J essé L evas ...
    Cordialement LL

    Répondre à ce message

    • Un mouchoir portant les initiales J.L 4 septembre 2015 09:51, par Michel Guironnet

      Bonjour,

      Belle déduction.Pourquoi pas en effet !
      Je n’avais pas fait le rapprochement.

      Merci pour votre contribution.

      Cordialement.
      Michel Guironnet

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      • Un mouchoir portant les initiales J.L 4 septembre 2015 10:56, par Lorraine Lagesse

        Monsieur permettez moi de ""broder"" un peu..
        Qui avait des mouchoirs brodés a leurs chiffres ??? Les gens ""de la Haute !!"" pas les petites gens..
        Comment ce mouchoir est il en la possession du malheureux garçon noyé ???...Comment se noye t il ?par accident ou se donne t il la mort a cause d un amour impossible en gardant dans sa poche ce mouchoir...

        ON ne le saura jamais..
        Très cordialement LL
        .

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