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A la recherche de Sanctus Pellini, peintre italien décorateur d’église 1/2

Réparations à l’église : l’entrepreneur est parti sans payer !

Le vendredi 7 juin 2024, par Michel Guironnet

Le 1er août 1840, "le conseil de fabrique" de la paroisse des Roches de Condrieu se réunit de façon extraordinaire : le Président explique qu’il est saisi d’une demande du "Sieur Martel Etienne, maître maçon qui s’était chargé de plusieurs travaux que devait faire à l’église le Sieur Sanctus Pellini" comme le précisait la convention du 12 octobre 1836. Mais Etienne Martel "n’ayant point reçu le prix convenu avec Sanctus, la fabrique devait payer la dette à défaut de Sanctus qui avait disparu sans payer les ouvriers et les fournisseurs dont il s’était servi."
Lançons nous à la recherche de ce "peintre décorateur d’église" d’origine italienne !

Reprenons l’affaire au début [1] :

Travaux de réparation et de décoration à l’église des Roches

Le 12 octobre 1836, le conseil de fabrique de la paroisse des Roches de Condrieu se réunit. Les fabriciens présents constatent :
« 1er Qu’il est nécessaire d’agrandir l’église dont le vaisseau est insuffisant pour contenir les fidèles de la paroisse, d’y faire un grand nombre de réparations soit pour sa conservation, soit pour lui donner une décoration. Ces réparations et constructions sont urgentes. Un plus long délai rendrait beaucoup plus considérables les réparations à faire. »
Rappelons que l’église est construite en 1784 [2], réparée rapidement vers 1805 après les dégâts liés à la Révolution et à l’abandon du culte.
Les travaux de 1823-1825 portent sur le clocher mais « la mauvaise exécution des travaux entrepris » font « que l’ouvrage entier… menace d’une ruine prochaine ! » [3]

Il y a donc urgence à entreprendre les travaux. Mais le conseil constate aussi :
« 2e la fabrique n’a en l’état qu’une somme de cinq cents francs disponible, les dépenses s’élèveront environ à cinq mille francs. Il convient de faire un emprunt qui sera remboursable par fraction annuelle de quatre cents francs, attendu que la fabrique peut économiser cette dernière somme chaque année. »

A ce rythme, la paroisse s’endette pendant douze ans et demi ! Pour éviter cet endettement trop lourd, « les fabriciens ont tous été d’avis qu’il serait fait une quête dans la paroisse pour recueillir les dons volontaires des habitants. Mr le Maire et Mr le Curé ont été unanimement chargés de cet emploi et ils ont bien voulu l’accepter. »

« Cependant, prévoyant que cette quête ne produirait point la somme nécessaire à ces réparations, Mr Dorzat desservant, a offert de prêter une somme de deux mille francs sous la condition expresse que ce prêt sera régularisé, et que les intérêts lui seront payés au taux légal. Les fabriciens ont accepté cette offre avec reconnaissance. »

Le curé François Charles Dorzat, "est installé" à la tête de la paroisse des Roches le 25 mai 1834. Il est né à Vienne (Isère) le 9 septembre 1806, fils de Jean Jacques Dorzat, marchand, et de Marie Madeleine Rose Jacquier. Le Maire des Roches est depuis fin 1832 Etienne Tranchand. Il le restera jusqu’en 1843.

Fabriciens et marguilliers

Rappelons que « la fabrique », dans une paroisse, est chargée depuis le Concordat de la conservation et de l’entretien des lieux de culte. C’est elle qui administre la distribution des aumônes de la paroisse et qui gère les subventions de la commune pour le bâtiment d’église et le presbytère. La fabrique est donc responsable de toute la question financière d’une paroisse, le curé étant chargé du côté spirituel et pastoral.

Aux Roches, paroisse de moins de 5000 âmes, le conseil de fabrique est composé de cinq membres. Ce conseil a voix délibérante pour les décisions, le président ayant voix prépondérante ; et ce n’est pas obligatoirement le curé.

Le bureau des marguilliers exerce le pouvoir exécutif. Formé de trois membres choisis au sein du conseil de fabrique, il se réunit tous les mois, à l’issue de la messe dominicale. Il est l’administrateur journalier du temporel de la paroisse : marchés passés avec les artisans locaux pour les réparations et l’entretien des édifices paroissiaux, achat du mobilier d’église, location des bancs et chaises.
« Les marguilliers fournissent l’huile, le pain, le vin, l’encens et généralement tous les objets nécessaires à l’exercice du culte » [4].

Chaque dimanche de Quasimodo [5] ainsi que le premier dimanche des mois de juillet, octobre et janvier ; le conseil de fabrique se réunit. Le budget annuel de la paroisse est voté à la Quasimodo, les marguilliers rendent compte alors de leur gestion. Tous les trois ans, le conseil se renouvelle en partie.

Pour être fabricien, il faut être catholique, domicilié dans la paroisse. Les fabriciens sont pris parmi les « notables » : « patrons sur le Rhône », riches cultivateurs, artisans, notaire…Il est vrai que la tâche mérite quelque instruction ; savoir écrire n’est pas encore bien généralisé, surtout chez les ruraux. Être fabricien est un honneur recherché.

1836 : la fabrique passe une convention avec Sanctus Pellini

« Comme le Sieur Sanctus Pellini, peintre italien, architecte entrepreneur, a proposé de se charger de tous les travaux à faire, à forfait et moyennant le prix de quatre mille francs, qui d’après les devis et les calculs faits parait très modéré, il a été appelé dans l’assemblée et à l’instant il a signé, ainsi que tous les fabriciens ; excepté le Sieur Jean Claude Dard ; la convention à deux origineaux dont la teneur suit :

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Convention avec Sanctus Pellini
(Extrait)

« Convention entre Mr Sanctus Pellini, peintre, architecte patenté à St Marcellin, Isère, et les membres de la fabrique des Roches :

1er Ledit Sanctus se charge de prolonger le chœur de l’église des Roches de dix mètres sur huit mètres de largeur, d’y établir quatre pilastres avec arc doubleaux pour supporter la charpente de la toiture. La dite charpente sera faite en bois sapin, reconnu bon par les hommes de l’art, et de neuf pouces d’eccarissage. Elle sera recouverte en tuille creuse de Roussillon, bien faîtée. Elle surpassera de cinquante centimètres l’aplomb des murs.

2e Dans le dit prolongement, il sera fait deux grandes fenêtres qui seront vitrées en plomb avec bordure en couleur et une rosace. Tout le chœur sera crépi, éparveré. Il sera fait quatre chapitaux aux pilastres, et dans tout le chœur une corniche de quarante centimètres de saillie en bon plâtre, et fait dans la règle de l’art, d’ordre corinthien.

3e Il sera jetté une voûte en brique sur champ à croizière (comprendre à croisées) entre les deux pilastres et la coquille en demie thiarre papale, toute bien enduite en mortier bâtard et fait dans la règle de l’art.

4e Le dit Sanctus se charge aussi de transporter la table de communion au dernier pilastre de l’église, baisser le terrein et le rétablir. Il fera aussi prolonger la sacristie qui aura cinq mètres de longueur en œuvre, dans sa même largeur, et prolonger la voûte dans sa même forme. Il sera aussi fait une petite cheminée en stuc avec sa grille. Les murs en seront enduits en plâtre, la porte sera placée au gré de Mr le Curé. Il sera fait un plancher dans toute la sacristie en planches de sapin de quatorze lignes d’épaisseur.

5e Il sera crépi, éparveré à neuf dans les endroits nécessaires de l’église. Les pilastres seront dressés à la règle en mortier bâtard. Les bases et les chapitaux seront refaits en entier. Le plafond sera réparé et refait dans les endroits nécessaires, et les bois des petites croisées seront refaits à neuf et vitrés.

6e Toute l’église sera peinte en ornemens, en architecture et à caissons sous tous les arceaux. Les pilastres seront tous cannelés en marbre blanc. La chaire sera replacée et peinte. Les deux petits autels seront réparés. Le grand autel sera repeint au vernis copal, avec ornemens sur le tombeau et le port. Il sera aussi mis des cymèses de six pouces dans toute la longueur de l’église.

7e Il sera fait une tribune dans la largeur du clocher ; planchée et plafonnée en mortier bâtard avec un petit escalier à la parisienne, tablé en briques.

Eparveré : revêtu de plâtre ou de mortier, uni et dressé avec un frottoir [6].

Mortier bâtard : On désigne ainsi les mortiers de chaux dans lesquels on a fait entrer une certaine quantité de ciment en poudre pour leur donner plus de résistance et en hâter la solidification ; on les emploie avec beaucoup d’avantages dans différentes espèces de travaux [7].

Le tout sera fait dans la règle de l’art, toute fourniture à la charge de l’entrepreneur, pour la somme de quatre mille francs.
Les payements seront effectués savoir : le premier payement de quinze cents francs au premier janvier prochain, le second aussi de quinze cents francs à la St Jean prochaine, et le troisième de mille francs au premier janvier mil huit cent trente huit.
La peinture, la tribune et tout le travail de l’église, excepté le chœur, sera fait à la fin de la présente année et le chœur sera fini à la St Jean prochaine. Fait à double aux Roches le 12 octobre 1836 »

Mr Dorzat est prié de tenir un compte des sommes qu’il payera soit à Sanctus, soit aux fournisseurs des matériaux et aux ouvriers du consentement et pour le compte de Sanctus, afin que l’on connaisse les époques auxquelles les intérêts prendront cours, et tous les membres ont signé à l’exception de Sr Jean Claude Dard absent. Manin, Tranchand, P. Tranchant, Girin, S. Goutarel, Dorzat, curé »

Des Italiens aux Roches de Condrieu

Le 15 mars 1837, aux Roches de Condrieu, Jérôme Costa « Capitaine retraité, veuf de Rose Astima décédée à Ajaccio, fils de Séverin Costa et Marie Dorothée Oldoini » épouse religieusement Anne Ghiraldi, fille de Charles Giraldi et de Blanche Martinenghi.

Mais dans les actes d’état-civil, pas de mariage civil à cette date ! Deux ans plus tôt, Marie Louise, leur fille née aux Roches le 13 juin 1835, est baptisée le 18 juin. Cette enfant est « légitime » et le baptême ne pose aucun souci au curé Dorzat…

En fait, ils se sont mariés civilement à Vienne (Isère) le 8 juin 1830 [8]. Les deux époux sont nés à Ajaccio, lui est domicilié à Cuers, elle à Saint Tropez !

A cette date, Jérôme Costa « capitaine d’infanterie en non activité » est « divorcé de Rosine Astima ». Il ne peut donc se remarier à l’église. En 1837, sa première épouse est décédée. Considéré comme veuf, il peut maintenant se marier religieusement.

Jacques Donati et Philippe Scolari, « peintres italiens » assistent au mariage. Sont-ils employés aux réparations de l’église sous la conduite de « l’entrepreneur » Sanctus Pellini ? C’est probable. "Filippo Scolari" signe l’acte de son nom italien.

Il signe de son nom francisé lorsqu’il se marie à Tullins, vers Grenoble, le 14 décembre 1852 avec Marie Paris [9].
"Peintre plâtrier, domicilié à Tullins depuis plus de quinze ans", Philippe Scolary est né le 13 mai 1810 "à Ponte Treize, canton du Tesseins" en Suisse !
C’est en fait Ponte-Tresa, ancienne commune, aujourd’hui faisant partie de Tresa dans le district de Lugano. La rivière passe au milieu de la ville et sert de frontière entre l’Italie et la Suisse.

En 1839, Bernard Cardelino, « maitre platrier », fils de « défunt François Cardelino, receveur des Douanes, et de Antoinette Pilloti, résident à Senavales, province de Verceil en Piémont » (Vercelli en Italie, au nord-est de Turin) se marie civilement le 31 août et religieusement le 5 septembre avec Laurence Marthoud, une Rocheloise. Bernard Cardelino meurt le 22 mars 1851 à 35 ans, il serait donc né vers 1816.

1837 le curé Dorzat présente les dépenses faites pour Sanctus

L’intérêt de cette liste de comptes, un peu rébarbative, est de donner les noms de nombreux artisans des Roches et des alentours, fournisseurs de matériel et de main d’oeuvre. Croisée avec l’état-civil, elle se révèle riche d’informations.

« Dimanche de Quasimodo, 2 avril 1837 …Mr le Curé a ensuite présenté l’état des sommes qu’il a payé soit à Sanctus Pellini, entrepreneur des réparations de l’église, soit aux fournisseurs des matériaux et aux ouvriers du consentement et pour le compte du Sieur Sanctus ; ainsi que l’état des sommes payées pour des réparations dont s’était chargée la Fabrique, et dont Mr le Curé était chargé de tenir compte par la délibération du 12 octobre 1836, lesquelles sommes il a payé soit avec l’argent qui était en Caisse de Fabrique, soit de son propre argent dont il a fait l’avance à la Fabrique, après promesse par celle-ci de rembourser le capital et les intérêts de l’argent avancé »

« Etat des sommes payées à Sanctus Pellini ou à ses fournisseurs envers lesquels la fabrique s’était engagée à son défaut » : Année 1836 :
« 22 novembre : à Etienne Martel, maitre maçon » 600 francs (frs) ; 2 décembre : à Sanctus Pellini 80 frs ; 4 id : à Sanctus 50 frs ; 11 id : à Sanctus 270 frs ; 23 id : « à deux ouvriers de Sanctus » 20 frs.
« 1er janvier 1837 : à Sanctus » 1100 frs ; 22 id : « achat d’une grille pour la sacristie » 39 frs 75 cts ; 22 id : « à Mr Tranchant, fourniture de plancher » 30 frs ; 15 février : « achat et transport de plotets » 100 frs ; 18 février : « à Peyret, marchand de plâtre » 150 frs ; 1er mars : « à Bresson, nourriture d’ouvriers » 24 frs ; idem : « A Péju, serrurier » 43 frs 40 cts ; 10 mars : « à Manin, serrurier, posage de la table de communion » 10 frs ; 15 id : « à Viannet, tailleur de pierre » 75 frs ; 17 id : « à Manin, serrurier, dette de Sanctus » 80 frs ; 19 id : « à un peintre de Sanctus » 11 frs 50 cts ; 26 id : « à Garin, droguiste, fourniture de couleurs » 8 fr 50 cts ; 1er avril : « à Viallet, épicier, fourniture de couleurs » 74 frs 63 cts. 1er juin : « à Felot, vitrier » 150 frs ; 15 juin : « à Pitrat-Béraud, marchand de fers » 54 frs 45 cts ; 25 juin : « à Ramay, charpentier » 80 frs ; 1er septembre : « à Clémaron de Vienne, marchand de bois » 374 frs ; 26 décembre : «  à M. Guignard, avoué, frais de saisie et déclaration » 45 frs ; « Nourriture d’ouvriers de Sanctus : 130 jours à 2 francs » 260 francs (130 jours = environ 4 mois et demi)

« Total des sommes »  : 3730 frs 23 cts

« Etat des sommes payées par Mr Dorzat, soit pour réparations à l’église dont restait chargée la fabrique, soit pour l’achat d’objets pour l’ornement de l’église et dont l’acquisition n’est pas encore mentionnée dans le registre de la fabrique »  :
10 décembre 1835 : « douze vases en porcelaine dorée » 78 frs « fleurs artificielles » 50 frs ; 16 janvier 1836 : « une cuvette en zing pour la sacristie » 11 frs ; 4 février : « à Ramay, menuisier, pour bancs » 71 frs « cordes pour les lampes » 1 fr ; 20 février : « Peau ? pour la chaire » 8 frs ; 8 mars : « à Péju, façon de chassis en fer » 48 frs ; 18 avril : « achat de 50 chaises pour l’église, à 65 cts l’une » 32 frs 50 cts ; 10 avril « diverses dépenses pour les reposoirs des années précédentes » 35 frs ; 6 mai : « à Berrier, pour 6 souches et happes » 33 frs 70 cts [10] ; Id : « à Carrot père, diverses fournitures » 17 frs 85 cts ; 14 mai : « à Carrot fils, fourniture de planches » 39 frs 15 cts ; 15 juin : « achat des canons d’autel dorés » 31 frs [11] ; 15 juin : « à Pitrat-Béraud, fers pour les fenêtres » 65 frs ; Id : « à Péju, pour réparations aux serrures » 2 frs ; 25 juin : « à Champin, serrurier, façon des candélabres des pilliers » 16 frs 50 cts ; 1er juillet : « à Gerin Jean, fourniture de planches » 13 frs 40 cts ; 1er août : « à Granjon, bossetier, six grands chandeliers port(atifs ?) » 395 frs [12] ; Id : « à Gigarel, menuisier, ouvrage de l’église » 190 frs ; 10 août : « achat d’une nappe d’autel » 9 frs ; 1er septembre : « trois reliquaires » 40 frs ; 14 octobre : « à Clémaron pour planches » 26 frs ; Id : « achat de deux rochets » 50 frs [13].

Total : 1263 francs
Report « argent donné à Sanctus ou à ses fournisseurs » : 3730 francs 23 cts
Total des dépenses : 4993 frs 23 cts

« Etat des sommes que possédait la fabrique au 1er janvier 1837 » : 2039 francs, dont :
« Don de la Reine des Français »  : 100 frs, (Marie Amélie, épouse du Roi Louis Philippe)
« Secours de la commune » : 60 frs,
« Don d’Anne Rivoiron, veuve Thonnérieu » [14] : 45 frs,
« Quête pour les réparations de l’église » : 759 frs.

Pour boucler le budget, il manque dans la caisse de la fabrique : 2954 francs et 23 centimes !

1840 réclamation du « Sieur Martel », maitre maçon

« Le premier août mil huit cent quarante, le conseil de fabrique s’est extraordinairement assemblé au lieu de ses séances ordinaires en vertu d’une autorisation et d’une convocation régulière.
Mr le Président a exposé qu’un compte joint à une demande lui avait été adressé par le Sr Martel Etienne, maître maçon qui s’était chargé de plusieurs travaux que devait faire à l’église le Sr Sanctus Pellini par suite des conventions passées le douze octobre mil huit cent trente six ; cette demande établissait que n’ayant point reçu le prix convenu avec Sanctus, la fabrique devait payer dette à défaut de Sanctus qui avait disparu sans payer les ouvriers et les fournisseurs dont il s’était servi.
Le conseil de fabrique, considérant la position gênée du Sr Martel, bien qu’il ne se croye pas obligé à payer la dette du Sr Sanctus avec qui il a traité et qu’il a soldé entièrement soit par l’argent qu’il lui a compté soit par celui qu’il a compté aux divers fournisseurs auprès de qui le trésorier de la fabrique avait répondu au défaut du Sr Sanctus.
(Le conseil de fabrique) est d’avis que le Sr Martel soit appelé pour traiter amiablement avec lui. Le Sr Martel ayant comparu, entre lui et les membres du conseil de fabrique, il a été convenu ce qui suit :

  • 1er Les membres du conseil de fabrique offrent au Sr Etienne Martel la somme de dix sept cents francs pour final payement, soit des ouvrages commandés par Mr le Curé, soit des ouvrages confiés au Sr Martel par Sanctus Pellini, peintre italien, en octobre 1826 (il faut lire 1836) exécutés dans l’église des Roches la même année et l’année suivante.
  • 2e Le Sr Martel accepte cette proposition et renonce à toute réclamation. »

Qui est Etienne Martel ?

Etienne nait aux Roches de Condrieu le 4 floréal an VIII (24 avril 1800) fils de Jacques Martel, maçon, et de Louise Manin. Nicolas Guillot, qui enregistre la naissance, note : « officier public de la commune des Roches dont la population est de douze cent habitants ».
Son père meurt le 26 novembre 1815, sa mère est présente au mariage de son fils, le 12 avril 1822 à Chonas. Etienne épouse Marguerite Drevon, née dans cette commune le 29 floréal an XII (19 mai 1804). Etienne signe son acte de mariage.

En août 1840, Etienne Martel a donc 40 ans. Six enfants sont nés entre 1823 et 1840 mais ne survivent que trois filles, encore bien jeunes. Deux autres enfants naitront aux Roches [15].

L’enquête sur Sanctus commence...

A ce stade de notre récit, bien des questions se posent :

  • Qui est ce Sanctus Pellini "décorateur d’églises" italien, d’où vient il ?
  • Comment fait-il pour être "justement" aux Roches alors que des réparations "urgentes" sont à faire à l’église ?
  • Où part-il après avoir laissé quelques "ardoises" aux Rochelois ?

Il y a encore quelques mois, je ne savais rien de lui... Aujourd’hui j’en sais beaucoup plus. La presse ancienne sur Internet m’a ouvert bien des pistes, confirmées par l’état civil "en ligne" de l’Ain et de l’Isère.
Déjà en France vers 1830, il décore des églises, surtout dans la Bresse et le Bugey. Pour cela, il fait même "des réclames" dans les journaux !

C’est ce que nous vous raconterons dans notre second épisode.

A suivre...


[1Tous les passages cités sont extraits du registre du Conseil de fabrique des Roches de Condrieu, conservé dans les archives de la paroisse Saint-Nicolas des Roches.

[2voir le chapitre consacré à cette construction dans mon ouvrage « L’Ancien Régime en Viennois »

[3En 1833, le curé Boudard présente bien un projet de réparation et d’agrandissement mais il est mal conçu et ne sera pas exécuté.

[4Pierre Pierrard « la vie quotidienne du prêtre français au XIXe siècle »

[5Selon Wikipédia, le mot quasimodo est formé à partir des premiers mots latins (incipit) de l’introït de ce jour, « Quasi modo geniti infantes, alleluia : rationabile, sine dolo lac concupiscite, ... » (« Comme des enfants nouveau-nés, alleluia : désirez ardemment le pur lait spirituel, ... »), tirés de la Première épître de Pierre (2,2). Une étymologie populaire attribue ce nom au fait qu’il désigne la fête la plus rapprochée de Pâques, qui est donc pour ainsi dire (quasi modo) une deuxième Pâques.

[6« Dictionnaire général des termes d’architecture… » par Daniel Ramée (1868)

[7« Pratique de l’art de construire : maçonnerie, terrasse et plâtrerie : connaissances relatives à l’exécution et à l’estimation des travaux de maçonnerie, de terrasse et de plâtrerie, et en particulier de ceux du bâtiment… » par J. Claudel et L. Laroque (1859)

[8Vue 34/64 référence Archives de l’Isère.

[99 NUM/5E 518/13 Tullins, vues 477 et 478/482 sur le site des archives de l’Isère.

[10Ce sont des souches de cheminées et des happes de scellement.

[11« Canons d’autel » : petits panneaux, souvent encadrés, portant, imprimés ou manuscrits, certains textes invariables de la messe et utilisés comme aide-mémoire par l’officiant. Les canons sont souvent au nombre de trois. Celui du milieu, plus grand que les deux autres, peut être pliant.

[12Le bossetier est un artisan fondeur qui confectionne les statues, statuettes et autres ouvrages en ronde bosse.

[13Le rochet est le surplis de dentelle que les évêques, les chanoines et certains dignitaires ecclésiastiques portent au-dessus de la soutane et au-dessous du camail dans les offices solennels auxquels ils assistent sans célébrer eux-mêmes. https://liturgie.catholique.fr/lexique/rochet/

[14"Anne Rivoiron, veuve Thonnerieu, rentière" décède aux Roches à 82 ans le 1er mars 1836. Je n’ai pas réussi à trouver le décès de son mari !

[15Enfants nés aux Roches :

  • Antoine 23 mars 1923 mort à 6 ans le 24 octobre 1828
  • Marie 1er juin 1826 morte à 8 mois le 23 janvier 1827
  • Etienne 24 janvier 1830 mort à 4 ans le 29 août 1833
  • Antoinette 20 mars 1832
  • Marie 18 juin 1834
  • Delphine 11 février 1839 morte le 8 avril 1875
  • Antoine 8 novembre 1841, marié à Etiennette Boudin
  • Célestine 8 mars 1845 morte à 2 ans le 6 novembre 1847
    Marguerite Drevon décède aux Roches le 23 octobre 1871. Etienne Martel meurt dix ans plus tard aux Roches le 27 décembre 1881.

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