Eugène Havard naît le 17 septembre 1890 à Durtal (Maine et Loire) sous le nom d’Eugène Joseph Taillebois (enfant naturel). Il n’est déclaré à la mairie de Durtal qu’un an plus tard, le 21 septembre 1891. Sur l’acte de mariage de ses parents le 9 juillet 1894 à Durtal, il est spécifié qu’un enfant illégitime est né d’eux. Eugène prend le nom d’Havard à quatre ans.
Son père (?) Louis Havard avait dix sept ans à la naissance de ce fils. Il savait lire et écrire, sa femme non. Il était cultivateur. Ensuite il est devenu garde chasse au chateau de la Motte Grolier (près de Durtal). Là les deux enfants, Eugène et sa soeur (la grand mère de Mme Gourdon) ont reçu une éducation distinguée ; étant en contact avec un milieu qui n’était pas le leur. Ils allaient à la messe le dimanche, en calèche, avec "Madame la Baronne".
A vingt ans, de la classe 1910, il a effectué son service militaire au 69e Régiment d’Infanterie et s’est engagé pour deux ans au 5e Régiment d’Infanterie Coloniale (R.I.C) En novembre 1913, à Lyon, il a terminé son instruction pour être sous-officier.
Il habite alors à La Chapelle d’Aligné, dans la Sarthe, avec ses parents.
Le jour de la mobilisation, Eugène Havard rejoint le 5e R.I.C en garnison à Lyon. Il est incorporé comme sergent au 2e bataillon. Son Chef de Bataillon est le Commandant Demarque mais nous ignorons sa compagnie.
Début août 1914, Eugène commence son « Journal de Marche »
Carnet, couverture toilée, dimensions : 16.5x19.7x2 cm
Ci dessous la première page du Journal de Marche.
Nous avons croisé son récit avec deux sources militaires :
L’historique du 5e RIC, fascicule rédigé après la fin des combats par le Lieutenant Bourdet , Officier de Renseignements du Régiment, et publié à la librairie Chapelot en 1920 (numérisé par Julien Prigent du site des Historiques 1914-18.org).
Le JMO, Journal de Marche et Opérations, du 5e R.I.C, beaucoup plus complet et très fiable (relevé par Philippe Hartemann et disponible grâce au « Thésaurus » de Génémilassoc).
Les consignes strictes décidées dès 1874 pour la rédaction des J.M.O sont rappelées en introduction à celui du 5e R.IC :
« Chaque journée de la campagne, à partir du jour du départ, aura sa date inscrite en marge du journal.…Les faits relatés par les corps exige impérieusement l’indication exacte des dates et des heures.
…Ce journal devra mentionner tous les évènements à mesure qu’ils se produisent. Aucun des incidents importants qui se présentent, soit en marche, soit en station, soit pendant les manœuvres et le combat, ne doit être passé sous silence.
On consignera sur ce registre, jour par jour, sans intervalles ni grattages, le résumé des ordres reçus et donnés, les renseignements recueillis et tous les détails relatifs aux marches, cantonnements ou bivouacs, au service de sûreté, aux reconnaissances, aux manœuvres et aux combats.
Il y sera joint un dossier des pièces justificatives, telles que situations sommaires, copie des ordres généraux et particuliers, rapports complémentaires, tableaux de marche, de cantonnements, ordres de mouvements, etc ».
Ce « Journal de Marche » , communiqué par sa petite nièce Madame Roselyne Gordon, est rédigé sur les pages d’un « calepin » ou carnet.
Dans ce carnet il y a 21 pages avec, entre chaque page, un intercalaire en papier fin genre papier de soie. 3 ou 4 pages ont été enlevées au début .
A l’intérieur de cette pochette une inscription. La pochette ne s’ouvre pas beaucoup et ne voulant pas découper ce précieux carnet, la photo est difficile à prendre.
Ce qui peut être traduit par :
« Bulletin de commande. Découper ici et rabattre. De la Maison d’Edition de Leipzig et Commission ???? ( manque une partie ??). Leipzig – Marienhöhe, rue de la Gare
Je vous prie (d’accepter mon mode de payement). Le montant est prélevé contre remboursement ».
Sur chacune des pages, en haut et au verso, des mots sont en gothique allemand.
Traduction : « Les échelles non utilisées seront biffées » (rayées )
A la fin du carnet : un papier carbonne entre la couverture et une contre couverture en carton.
Ce carnet doit être un « carnet de commandes » (ou son équivalent à usage commercial).
Ce « calepin » a pu être « récupéré » par Eugène Havard dans un village abandonné. Ce qui lui aurait donné l’idée et le moyen de noter les épisodes qu’il vivait.
Sa rédaction commence à la date du 2 août 1914 et se termine, un peu brusquement, à celle du 24 août. Le récit des épisodes est beaucoup plus détaillé à partir du 10-11 août et semble être rédigé plutôt de temps à autre qu’au jour le jour…
Eugène Havard doit la débuter dès son arrivée en Lorraine. Elle s’interrompt à cause de sa mort le 4 septembre 1914.
Nous présenterons ce récit dans nos deux prochains articles.
« Mémoire au coin du feu », deux souvenirs d’enfance racontés par Roselyne Gourdon Henriette Havard, la soeur unique d’oncle Eugène, avait un fiancé avant la Grande Guerre. Il n’aimait pas danser mais ma grand mère si. Alors, il l’emmenait dans les bals populaires de l’époque. Elle avait un danseur (attitré ?) : mon « futur » grand père . Comme le "fiancé" a été tué à la guerre ma grand mère s’est mariée avec son danseur. Conclusion : si la guerre n’avait pas existée, je ne serai pas là ! Le danseur en question à fait toute la guerre de 14. Il en avait tellement "marre" de cette guerre qu’il levait la main, la gauche, hors des tranchées. Il n’a jamais été blessé ! Mon grand père paternel, lui, a été très grièvement blessé. A 90 ans quand il passait des radiographies, il avait encore + de 90 éclats d’obus dans le corps (Il est décédé à 93 ans). Lorsqu’il a été blessé en Belgique ou dans le nord de la France (?) il a erré dans un train pendant plusieurs jours. Ce train s’est arrêté dans une gare (en Normandie). Il était couché et par la fenêtre il a vu sa maison et sa femme. Il a demandé à un autre blessé d’aller la chercher. C’est incroyable mais vrai ! |