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La rencontre de mes parents à Lyon et tous ces lieux aujourd’hui (12e et dernier épisode)

Le jeudi 7 janvier 2016, par Danièle Godard-Livet

Mes parents se sont rencontrés à Lyon pendant leurs études entreprises après la seconde guerre mondiale et ils élèveront leur famille dans les aspirations des « trente glorieuses », sans beaucoup parler de leurs histoires respectives (auxquelles ils voulaient sans doute échapper, l’un comme l’autre). Leurs deux familles, sociologiquement très proches, mais habitées par des histoires et des aspirations très différentes et distantes géographiquement, ne se fréquenteront pas.
Nos cousins et cousines sont des étrangers dont nous n’avons pas suivi la vie et qu’il nous faut présenter à nos enfants, s’ils se rencontrent dans les enterrements. Avec mon mari, nous sommes allés à leur rencontre par curiosité et c’est ce que raconte cet épisode.

La vie des grands parents et la rencontre des parents à Lyon

Mes parents se sont rencontrés à Lyon où ils faisaient leurs études tous les deux après la guerre. Il n’avait pas été si facile de quitter la famille pour faire valoir son envie de vivre autrement.
La seconde guerre mondiale avait sans doute constitué une excellente excuse pour les familles qui ne comprenaient pas les souhaits de leurs enfants.

Ma mère avait d’abord commencé à travailler comme laborantine dans l’usine où travaillait son père avant d’avoir le droit de s’installer à Lyon pour entreprendre des études d’infirmière. Elle semble avoir cohabité alors avec Paule Alzial qui restera son amie pour la vie.

Mon père était destiné à rester auprès de ses parents et de ses tantes. C’est l’instituteur du village qui avait insisté pour qu’il prépare le concours de l’école normale d’instituteur, qu’il avait raté. Il semble avoir fait ensuite une école de laiterie avant d’avoir le droit de préparer le concours des écoles vétérinaires logeant à Thiers chez sa tante Finette d’abord puis à Paris chez des cousins, parents de Marthe Lévigne. Après sa réussite au concours, il se retrouvait lui aussi à Lyon dans une chambre d’étudiant. Il partage sa chambre avec Jean Fade, fils de paysan des Vosges qui restera son ami pour toujours.

La vie de Marie Emma Cattelin et d’Isidore Jacquet

Après la seconde guerre mondiale les enfants de Marie Emma Cattelin et François Isidore Jacquet vont faire des études, puis se marier et partir loin. Pas trop d’abord : Marie Thérèse, après avoir travaillé au laboratoire de l’électrochimie pendant la guerre, fait ses études d’infirmière puis d’assistante sociale à Lyon et travaille un temps à Arêches, Lucien entre aux Arts et Métiers de Cluses pour ses études d’ingénieur. Puis beaucoup plus loin après leurs mariages : Lucien et sa femme38 vivent à Ste Maxime dans le sud de la France, Marie Thérèse et son mari Paul Godard s’installent dans le Puy de Dôme.

François Isidore Alphonse et sa femme acquièrent, une moto puis une voiture (une Juva) et installent sans doute la salle de bains dans la maison de Marie Lucien.

Les enfants et les petits enfants viennent pour les vacances peu de temps, vont aussi un peu à Bénétan, mais les étés d’autrefois ont bien disparu. Ils profitent du centre de vacances de Ronce les bains, propriété de l’électrochimie.

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Danièle, Isabelle, Jacques et Jean Paul à La Bâthie vers 1960
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Marie Thérèse et ses enfants à Ronce

Le chalet de pépé Laurent a été partagé entre les quatre enfants ; seuls Adrien et Marie Emma en sont désormais propriétaires après avoir racheté les parts de Jeanne Joséphine et Léonie Joséphine et un partage difficile. Marie Emma a gardé la pièce à vivre avec ses deux fenêtres, alors qu’Adrien a l’ancienne étable et ses dépendances !

Ce sont leurs enfants qui apporteront toutes les améliorations : Rolande et son mari du côté d’Adrien, Lucien et sa femme du côté de Marie Emma (entretiendra aussi le jardin et la maison de La Bâthie après la mort de François Isidore Alphonse Jacquet). Marie Thérèse et Lucien se voient encore un peu avant d’être pris dans leurs vies de famille et leurs vies professionnelles et la distance qui les séparent.

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Marie Thérèse et Lucien en 1953
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François Isidore Jacquet et Danièle en 1954

Et puis dans les années 60 tout change encore beaucoup pour La Bâthie avec la construction du barrage de Roselend ; c’est toute cette zone de la Tarentaise qui se transforme, avec les stations de ski aussi.

Marie Emma meurt jeune en 1970 à 76 ans avant d’avoir vu se marier ses petits enfants et naître ses arrière-petits enfants, emportant dans la tombe tous ses secrets qu’elle ne voulait partager avec personne. François Isidore la suivra quelques années après en 1978. Lui non plus ne connaîtra aucun de ses arrière petits enfants.

Le partage des possessions de François Isidore Jacquet et Marie Emma Cattelin s’est fait après la mort de Marie Emma selon les volontés de François Isidore ; Lucien recevra les biens de la Bathie :la maison, son jardin et son verger comme le chalet de Bénétan et des parcelles de terrains dispersées sur la commune de La Bâthie ; les terres les plus grandes sont ces longs champs au bord de l’Isère : la Muraz Tellier (E 677) et les Vernays (E3634), deux parcelles qui contiennent à elles deux un demi hectare mais ne sont pas voisines l’une de l’autre. Le reste est constitué de micro parcelles de bois taillis et de prés. Marie Thérèse reçoit sa part en argent.

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Le chalet de Bénétan en 2013
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Le jardin de La Bâthie dans les années 80

La maturité et la vieillesse de Maria Guyonnet et Jean Godard

Maria Guyonnet et Jean Godard vivent avec les parents, leur fille Marinette et les sœurs de Maria. Marinette ne fait pas d’études préférant garder les vaches et ne partira (pas très loin à Noirétable) qu’au moment de son mariage.

Le départ de Paul est plutôt mal vécu, comme une défection, un abandon de la famille. Il s’en défend écrivant souvent, en particulier à sa tante Finette dont il est très proche.

L’exploitation familiale se modernise en installant une laiterie plus proche des règles d’hygiène modernes. Puis ce sera un tracteur, puis une voiture.

Paul rentrera à La Chevalerie après ses études, à défaut de mieux. Il est marié et sa femme est enceinte. Ils ne quitteront définitivement la Chevalerie qu’un peu plus tard pour s’installer à une cinquantaine de Kilomètres à Puy-Guillaume où une clientèle vétérinaire se libère qu’ils achèteront avec un prêt consenti par l’entreprise où travaille Isidore Jacquet. Les Auvergnats n’aideront pas le fils prodigue !

La mort des parents de Maria surviendra en 1955 à 80 ans pour lui et 1966 à 90 ans pour elle. Jusqu’à mes 20 ans, je suis souvent allée à La Chevalerie, avec mon père le dimanche, avec mes frères pour des vacances et après encore lorsque mon frère y a retapé une maison (dont il avait hérité). Après la mort de Jean (en 1976) et celle de Maria (en 1980), plus rien ne nous y a conduits.

La tante Finette survivante à ses deux sœurs (Maria et Camille) sera prise en pension par sa nièce à Noirétable.

Un partage compliqué des biens de ses parents laissa un souvenir douloureux à mon père...et la fierté de posséder enfin des bois !

Aujourd’hui, des lieux et des descendants, auxquels j’ai rendu visite

A la Bathie et à Bénétan

Les ardoisières ne sont plus exploitées depuis la courte reprise des années d’après guerre et l’on voudrait en faire un site classé. Le chalet de la tante Sara s’est effondré et on n’en voit plus que les fondations. Bénétan s’est enrichi de beaucoup de chalets qui servent de résidences d’été, construites avec ou sans permis de construire. Il y a maintenant l’eau courante, mais toujours pas d’électricité sauf pour ceux qui ont installé des panneaux solaires ou des groupes électrogènes.

L’électrochimie qui a fait vivre des générations de Bathiolains continue après des fusions, des reventes et cessions de branches d’activité et La Bâthie abrite la centrale de Roselend. Un plan de protection des inondations de l’Isère et des torrents est en cours d’élaboration.

Le village a connu une forte croissance de sa population, dépassant dès les années 1950 le niveau des années 1900 et plus de 2000 habitants aujourd’hui. Sa population est maintenant double de ce qu’elle était avant la seconde guerre ; un boum de la construction aussi : 907 maisons et 250 appartements à comparer aux 250 maisons des années 30 (tous hameaux confondus) ; 30 % seulement des gens travaillent dans la commune ; ce n’est pas un village riche, le revenu moyen des ménages est de 22 572 € en 2011 mais il n’y a presque pas de chômage 6,5 %

Et les descendants des contemporains de Marie Emma et François Isidore, que sont-ils devenus ? Cette recherche a été l’occasion de renouer avec certains et d’en découvrir d’autres grâce aux sites de généalogie. Force est de constater que les liens familiaux si forts à la naissance de Marie Emma et François Isidore vers 1900 se sont bien distendus avec leurs neveux et nièces , cousins de leurs enfants.

Coté Jacquet, la famille est fâchée avec les Billat, descendants d’Huguette Bonvin et Séraphin Billat, peut-être à cause de l’héritage de Jeanne Nélie Jacquet. Côté Cattelin comme Côté Jacquet, plus personne n’habite La Bâthie sauf la cousine Rolande, nièce de Marie Emma et les enfants de sa sœur et la fille de Marius Payot, le neveu boucher de Marie Emma, témoin de mariage de sa cousine Marie Thérèse avec Lucien, qui tient le camping. Neveu dont la sœur Marthe Marceline Payot qui avait pourtant épousé un neveu Ronque n’a pas laissé que de bons souvenirs. Bizarrement, tous ceux là ont été touchés par des morts prématurées : Marius Payot, Julien René Ronque et Poupette la sœur de Rolande. Côté Cattelin, des descendants de Marie Léonie Cattelin (une tante de Marie Emma) et Joseph Vuillet, un frère et une sœur viennent de racheter le chalet à des cousins. C’est le chalet juste en face de celui de pépé Laurent. Et même parmi les descendants de François Isidore Jacquet et Marie Emma Cattelin on ne se connaît pas tous ; certains ne sont jamais allés à La Bâthie ou à Bénétan que même son héritier délaisse.

Les Salles et Vollore-Montagne aujourd’hui

Les hauteurs du Forez et de la proche Auvergne n’ont pas connu le développement des vallées savoyardes. Vollore-Montagne s’est dépeuplé et la déprise agricole est presque totale. Les maisons de la Chevalerie ne sont plus habitées par personne et sont louées aux vacanciers qui veulent un bol d’air pur et ont peu de moyens ; il reste encore des habitants à l’année à Bournier mais leur activité est plus touristique qu’agricole. C’est pareil au grand bois depuis longtemps, où personne n’a pris la suite de Jérome, préférant choisir des activités salariées dans la région. Les Salles et Cervières sont devenus des lieux touristiques eux aussi, même si les activités agricoles et forestières y sont plus présentes. Et c’est un Godard (lointain cousin) qui en était maire jusqu’aux dernières élections municipales en 2013. Les espoirs de Noirétable comme station climatique se sont effondrés depuis longtemps, même si un casino y est toujours actif et s’il y reste quelques restaurants.

Nos visites sur les lieux et une rencontre inattendue

Avec mon mari, nous sommes allés sur les lieux de cette histoire et il en a rendu compte dans son blog :

http://leclairon.blog.lemonde.fr/2013/05/02/les-bois-noirs/
http://leclairon.blog.lemonde.fr/2013/05/02/la-montagne-thiernoise/
http://leclairon.blog.lemonde.fr/2012/09/06/beaufortain-la-montagne-preservee/
http://leclairon.blog.lemonde.fr/2012/08/31/benetan/

La publication de cette chronique familiale qui se termine, m’a permis de rencontrer le fils de Jeanne Maréchal (née en 1915) qui était, comme ma grand-mère (née en 1894), une arrière petite fille de Joseph Marie Cattelin, le quasi centenaire aux deux mariages et aux onze enfants, mort en 1894.
Ensemble, nous écrivons l’histoire de cette autre branche des Cattelin de La Bâthie, descendants de Joseph Marie, à partir de ses souvenirs et de ses archives complétées de mes recherches ; histoire très différente de la mienne : le père de Jeanne est mort à Douaumont en 1916, une des tantes de Jeanne a émigré au Canada en 1923 et malgré tout cela cette branche est restée beaucoup plus unie et attachée à La Bâthie que ma propre branche.
Peut-être une nouvelle chronique familiale en préparation qui montre l’extrême diversité des destinées particulières et l’importance des personnalités qui s’attachent à faire vivre le lien par delà les accidents de la vie et l’éloignement géographique."

  • Pour visiter le site de l’auteur : A partir de ce que vous me racontez de votre arbre généalogique ou de vos albums-photos, j’écris pour vous l’histoire de votre famille.

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