Jehan du Lys, neveu de la Pucelle, meurt entre le 8 mai et le 30 octobre de l’an 1501. Son épouse était sans doute décédée avant lui.
C’est Marguerite du Lys, sa fille, et donc petite-nièce de Jehanne, qui recueille sa succession, avec en particulier l’usufruit de l’Ile-aux-Boeufs, située sur la Loire, à peu près au droit de Combleux.
Cette île appartenait à la famille d’Orléans, qui en avait jadis accordé l’usufruit à Pierre d’Arc/du Lys.
Marguerite avait épousé Antoine de BRUNET, seigneur du Mont, à Saint-Denis-en-Val, tout près de là, qui fait de suite établir un bail à de nouveaux métayers.
Pierre du LYS avait tiré quelques revenus de cette île, provenant surtout du forestage et de quelques cultures.
Jehan du LYS, son fils, en avait longtemps loué une grande partie à trois frères, bouchers d’Orléans, pour y faire paître les bêtes destinées à l’abattage pour les étals d’Orléans.
Antoine de BRUNET imposera des conditions bien précises à ces nouveaux exploitants.
Bail de l’Ile-aux-Boeufs à Ymbert CHEVALIER et à son fils Colas :
"Le mardy XXè jour d’octobre (1501), au lieu de l’Isle-aux-Boeufz, entre deux rivières, parroisse de Combleux... Anthoine de Brunet, escuier, sieur du Mont et de l’Isle-aux-Boeufz, parroisse de Combleux, congnut et confessa avoir baillé et baille à moictié, à Ymbert Chevalier et Colas Chevalier, son filz, laboureurs, à présent demourant audict lieu de l’Isle (à Saint-Denis-en-Val), à ce présens et acceptans, qui assemblement (ensemble) et chascun d’eulx seul et pour le tout sans division, ont prins (pris) de luy dujourd’hui jusques à ung an ensuivant ledit lieu, mestaierie, terres et appartenances de l’Isle-aux-Boeufz, ainsi qu’il se comporte et poursuit en pasturaiges, bois, buissons et aultres appartenances et deppendances dudict lieu, situé et assiz entre deux rivières en ladicte parroisse de Combleux..."
nb : s’il est dit "deux rivières", c’est qu’en fait l’Isle-aux-Boeufs était située au milieu de la Loire qui, donc, passait des deux côtés.
Il est fort peu probable qu’une maison, du moins en dur, ait existé sur ce site, très sablonneux, et périodiquement recouvert par les crues de la Loire.
On poursuit en énonçant certaines restrictions :
"... sauf et réservé le pré de ladicte mestaierie qui demourera audict bailleur seul, et aussi les bois d’icelle mestairie, esquelz lesdicts preneurs ne prandront et auront sinon du bois mort pour leur chauffage seulement ."
Il est dit expressément d’où provient la possession de cette île :
"lequel lieu et mestaierie ledit bailleur dit à luy appartenir et estre, puis naguière escheu et advenir à damoiselle Marguerite du Lys, sa femme, cousine et héritière de feu Jehan du Lys, derrenier possesseur d’icelluy."
Les Chevalier y entretiendront un élevage de chevaux. On leur fait confiance, car ils ont jadis travaillé pour Jehan du Lys :
" Et pour norrir et entretenir en icelluy lieu et appartenances pendant ledit temps, ledict bailleur a baillé à moictié audict preneur deux jumens,l’une de poil bayart et l’autre de poil noir, aians les deux piez blancs, avec trois poulins, l’un âgé de deux ans, de poil bayart, et les deux aultres de ceste année .
" Lesquelles bestes qui ont ésté prisées (évaluées en prix) et estimées entre eulx à la somme de dix-huit livres tournois, lesdicts preneurs seront tenuz tenir, nourrir, garder et gouverner avec le croist qui en ystra (leur descendance), audict lieu de l’Isle-aux-Boeufz et ses appartenances, bien et deuement, pendant ledit temps (nb : un contrat d’un an, renouvelable), selon la coustume du païs, et tout ainsi que ledict Ymbert Chevalier a cy devant tenus aultres bestes dudit Jehan du Lis."
On fera du "50/50" :
"Et en la fin dudit temps partiront (partageront) le tout par moictié après que ledit bailleur aura premièrement prins lesdictes dix-huit livres tournois pour son chetel (cheptel)desdictes deux jumens et trois poulins."
Antoine de BRUNET veut donc récupérer sa mise, ayant servi à commencer l’élevage. Mais on reprécise les clauses restrictives :
"Et ne pourront lesdict preneurs, pendant ledict temps, tenir ni nourrir aucunes bestes audict lieu et appartenances sans le congé, voulloir et consentement dudit bailleur.
Et si (aussi) seront à garder les bois dudit lieu à leur povoir, sans aulcune chose en enlever sinon pour leur chauffaige seullement, comme dict est."
Les Chevalier devront mettre en culture les quelques terres labourables, et aussi s’occuper des arbres fruitiers du lieu. Là aussi on partegera par moitié :
"Et au regard des terres labourables, s’aucunes en y a audit lieu de l’isle (aux Boeufs), lesdictz preneurs les seront tenuz labourer de toutes façons et ensemencer à leurs despens, en les fournissant par ledict bailleur et la moictié des semences et aussi de la moictié des jumens et boeufz qu’il conviendra avoir pour faire ledit labouraige.
"Et touchant des fruictz comme pommes, poires, noiz et aultres fruitaiges, lesditz bailleur et preneur les prandront par moictié et les cuelleront (cueilleront) à commun despens..."
Puis, les témoins :
"Présens à ce Pierre MIGNON, sergent royal au bailliage d’Orliens, et Pierre BURY, archer de l’élection d’Orliens, soubz le cappitaine Bongars, pour tesmoings."
(nb : ce Pierre MIGNON est-il en famille avec les trois frères MIGNON, bouchers d’Orléans, qui avaient obtenu aussi cette île pour y élever leurs bêtes destinées à la boucherie ?)
Tout est clair, net et bien pesé ! Antoine de BRUNET tient bien en main son nouveau domaine.
Sources :
- Bull. SAHO - Médiathèque Orléans.
- Minutes de Rousseau, notaire. Etude de Me.Linget, à Orléans.