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L’administration des communes pendant la Révolution et le Consulat

(Districts, cantons et municipalités)

Le vendredi 1er décembre 2000, par Michel Guironnet

A travers l’exemple local de la création du département de l’Isère et la mise en place des communes en Viennois en 1789-1790, Michel Guironnet évoque les différentes administrations des municipalités mises en place pendant la Révolution et le Consulat.

Le département de l’Isère

La division nouvelle de la France en départements est adoptée fin 1789 par les députés réunis en Assemblée Constituante. Le décret du 15 janvier 1790 en fixe le nombre à 83, avec un découpage répondant à peu près aux impératifs de l’histoire et de la géographie.

Le Dauphiné se trouve donc divisé en trois départements : les Hautes Alpes, avec Gap comme chef lieu, celui de la Drôme avec Valence...et l’Isère avec Grenoble, créée par le décret du 3 février 1790.

Malgré les démarches des Viennois, appuyés par leurs députés CHABROUD et SAINT-ALBIN, l’ancienne capitale des Gaules perd contre Grenoble. Vienne va également perdre son siège épiscopal en juillet 1790.

A l’enchevêtrement des anciennes circonscriptions est substitué un système unique : le département subdivisé en districts, le district en cantons, le canton en communes.

Le département de l’Isère est administré par un conseil général de 36 membres élus pour deux ans, qui se réunit une fois par an. Pendant les intersessions, le directoire exécutif (8 commissaires élus au sein du conseil) suit les affaires, assisté par un procureur général syndic qui représente le Roi. Les membres du conseil général sont élus par un système électoral censitaire à deux degrés :

" Les droits politiques furent réservés à une minorité...Les citoyens actifs payaient au minimum une contribution directe égale à la valeur de trois journées de travail...Ils se réunissaient en assemblées primaires pour désigner les municipalités et les électeurs...

(Ceux ci) payaient une contribution égale à la valeur locale de dix journées de travail... Ils se réunissaient en assemblées électorales aux chefs-lieux de département pour désigner les députés, les juges, les membres des administrations départementales " (A.Soboul " Précis d’Histoire de la Révolution française ").

District de Vienne et cantons

Le département de l’Isère compte 4 districts : Grenoble, Saint Marcellin, La Tour du Pin... et Vienne.

Ce district, composé de 21 cantons et de 102 municipalités, a une administration quasi identique à celle du département : un conseil de 12 membres ; 4 membres formant le directoire de district, avec un procureur syndic du district. Le district, nous y reviendrons dans un prochain article, est spécialement chargé de la vente des Biens nationaux.

Son directoire est également responsable de la rentrée des nouvelles impositions. Il s’occupe des travaux publics, de l’approvisionnement, de la défense nationale avec la levée des Volontaires...une petite République, avec d’importants pouvoirs !

Les cantons, eux, n’ont pas d’administration propre. Les 16e et 17e cantons de l’Isère nous concernent plus particulièrement. " Le procès verbal de démarcation du département de l’Isère " coûte " deux mois de soins et de pénibles recherches " aux commissaires désignés pour son exécution : " Les difficultés qu’il nous a fallu vaincre sont surtout provenues de l’incertitude des limites de la plupart des communautés et paroisses, de la diversité des dénominations données à un même lieu...de l’inconvénient fréquemment répété que les communautés...les plus rapprochées se trouvent séparées, de la différence des circonscriptions...Ces désordres de l’ancien état de choses nous ont jeté dans de minutieuses vérifications aussi difficiles qu’indispensables à faire. Notre travail servira du moins à manifester les vices de ces divisions bizarres, qui ne sont qu’une confusion intolérable, et que les nouvelles administrations se hâteront de rectifier ".

Sur cette superposition de limites entre les différentes juridictions avant la Révolution, le lecteur curieux d’en savoir plus peut se reporter à mon ouvrage "L’Ancien Régime en Viennois (1650-1789)"

Tableau réalisé d’après le « Procès Verbal de démarcation du département de l’Isère » pour le district de Vienne (1790) aux archives de l’Isère.

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On le constate pour le 17e canton, en 1790, plusieurs paroisses ou succursales sont réunies en une seule municipalité (aujourd’hui tous ces villages, hormis Vitrieu, sont des communes indépendantes) mais restent des paroisses indépendantes ! La Constitution civile du clergé ne va pas simplifier les choses. Nous aurons l’occasion d’y revenir. On ne change pas, dans les villages, les habitudes séculaires des paroissiens !

Réduction des cantons

Dès mi 1790, le directoire du district de vienne se préoccupe de réorganiser le découpage initial. Dans sa séance du 29 septembre " l’assemblée est d’avis, à la pluralité des voix, de réduire les vingt et un cantons à dix sept ; d’abord pour éviter les frais d’établissement de juges et de greffiers (un " juge de paix " par canton), ensuite pour pouvoir se procurer des personnes plus aptes à remplir les dites places, et enfin parce que cette division ; à l’exception du canton de Vienne et quelques autres dont la plus grande population est entrée en considération ; aucuns d’eux n’aura moins de quatre lieues et plus de cinq... "

Le directoire du district propose 17 cantons :

1/ VIENNE ; 2/ DECINES ; 3/ PUSIGNAN ; 4/ VENISSIEUX ; 5/ SAINT SYMPHORIEN D’OZON ; 6/ HEYRIEUX ; 7/ LA VERPILLIERE ; 8/ MAUBEC ; 9/ CHATONNAY ; 10/ SAINT JEAN DE BOURNAY ; 11/ SAINT GEORGES D’ESPERANCHE ; 12/ LA COTE SAINT ANDRE ; 13/ AUBERIVES ; 14/ ROUSSILLON ;15/ MONTSEVEROUX ; 16/ BEAUREPAIRE ; 17/ ANJOU

A noter que nombre de ces cantons sont depuis la fin du vingtième siècle dans le département du Rhône.

En fait ce sont surtout les " anciens " cantons de Chonas et d’Auberives qui sont modifiés, les 16e et 17e cantons devenant le 13e :

Auberives " l’assemblée a composé ce canton...des paroisses d’Auberives, Saint Prim, Chessieu, Clonas et Saint Alban du Rhône, Saint Clair et Saint Alban de Vareize, Vitrieu, Vernioz, Chonas, Jardin, Reventin, Vaugris, Les Costes d’Aray, Saint Mamert et les Roches ".
" Auberrives a été conservé comme chef lieu de canton, étant le lieu le plus central et placé sur la grande route ".

Le canton de Roussillon rassemble " Roussillon, Saint Maurice (l’Exil), Colombier, Givray, Salaize, Le Péage (de Roussillon), Assieu, Chanas, Montbretton et Sablons ". 
Cette " science du découpage " d’une région en " entités administratives " quel que soit le nom dont on la désigne, s’exercera encore de nombreuses fois, à la faveur d’élections notamment !

Création des municipalités

L’une des premières réformes de la Révolution est la création des communes. Quelques rappels utiles :
En décembre 1789, Louis XVI donne des " Lettres patentes "pour la constitution des municipalités. Il est crée une assemblée, le Conseil général de la commune, composée du Maire " chef du corps municipal " et des membres du corps municipal : trois avec le Maire pour les municipalités de moins de 500 habitants ; six pour les communes de 500 à 3000 habitants ; neuf, depuis 3000 et jusqu’à 10.000 habitants.

" Dans chaque municipalité, il y aura un Procureur de la commune, sans voix délibérative, il sera chargé de défendre les intérêts et de poursuivre les affaires de la communauté... " (article XXVI des Lettres patentes).

" Les citoyens actifs nommeront par un seul scrutin de liste, et à la pluralité relative des suffrages, un nombre de Notables double de celui des membres du corps municipal " (article XXX).

Ces Notables forment donc, avec le corps municipal, le Conseil général de la commune. Il s’adjoint pour ses séances, au moins une fois par mois, les services d’un " Secrétaire greffier " prêtant serment comme tous les autres élus municipaux :
" Je jure de maintenir de tout mon pouvoir la Constitution du Royaume, d’être fidèle à la Nation, à la Loi et au Roi, et de bien remplir mes fonctions ."

Le Conseil est élu pour deux ans, renouvelable par moitié tous les ans. Le Maire reste en exercice deux ans et peut être réélu deux autres années, mais il est seulement rééligible après deux ans d’intervalle.
La municipalité dispose de pouvoirs étendus : assiette et perception de l’impôt, maintien de l’ordre et juridiction de simple police. Elle peut requérir la Garde nationale.

Un exemple : la commune de Saint Clair et Les Roches

Au début de la Révolution
Louis BOUDIN est le premier Maire de la commune « Saint Clair et Les Roches », les deux villages sont alors réunis sous une seule et même municipalité, dès le début de 1790. Etienne RAMAY est membre de la municipalité et s’occupe comme « adjoint » de la « succursale » des Roches. Les archives apportent bien des preuves de cela.

Quelques faits tirés des registres paroissiaux des Roches :

  • Le 29 avril 1790, au cimetière des Roches, est enterré le corps d’une femme noyée. Le Procès Verbal est dressé par « Mr CADIER, chatellain du lieu des Roches mais encore par Mr BOUDIN, maire de la municipalité de St Clair et Les Roches, en datte de ce jour… »
  • Le 1er juin 1790, pour l’enterrement de François JANIN, est présent « Sieur Louis BOUDIN, maire habitant aux Roches de Condrieux »
  • « Etienne RAMAI, membre de la municipalité » assiste au baptême d’Etienne PLASSON le 2 août 1790.

Louis BOUDIN a « des fonctions officielles » : le 19 décembre 1790, à la messe de 9 heures, c’est la prestation de serment du curé ALBERT à Saint Clair. A celle de 11 heures aux Roches, c’est celle du vicaire VALLORY. Le maire BOUDIN et le conseil de la commune sont présents.
Le 10 janvier 1791, à Vienne, c’est l’installation les juges du district. Présent « BOUDIN, maire » de Saint Clair. « Nous Officiers municipaux de Saint Clair et Les Roches….fait dans la maison commune aux Roches ce 12 février 1791 BOUDIN, Maire… »

Sous la Convention
Etienne RAMAY exerce depuis 1792 les fonctions de Maire. C’est en 1792 qu’est déclarée la République. Les communes se chargent officiellement de l’état civil, auparavant tenu par les curés, et paraphent pour cela les registres :
« Nous, Etienne RAMAY, Maire de la commune de St Clair et Les Roches, sur la réquisition du Procureur de la commune….avons signé le présent registre…Ce jourd’hui troisième décembre mil sept cent quatre vingt douze, l’an premier de la République. Et. RAMAY, Maire »

On retrouve souvent cette date du 3 décembre 1792 citée comme celle de la création de la commune. Méconnaissance des faits : nous avons vu qu’en réalité elle date de début 1790 !

Les archives conservent un discours du maire Etienne RAMAY le 6 août 1793 « sur la place de la Liberté aux Roches » discours fait à l’occasion de la fête du 10 août à Vienne (chute de la royauté en 1792) Louis BOUDIN est « Commandant de la Garde nationale » du canton d’Auberives en août 1793.

Dans un « tableau des autorités constituées de la commune de Roches - Clair du Rhône » en 1794 il est noté au sujet d’Etienne RAMAY : « 54 ans, marchand, dévoué à la chose publique » Etienne RAMAY est né vers 1740 il est marié avec Marie TAVIAN. Le « Saint » de Saint Clair est alors supprimé : nous sommes en pleine Terreur et déchristianisation.

Lors du partage des communaux, on lit : « Délibération des citoyens de la commune des Roches et Clair du Rhône assemblés aux Roches….au temple de la Raison aux Roches (l’ex église) ce dix floréal an deux de la République (29 avril 1794)…Etaient présents les citoyens Etienne RAMAIS, Maire…Louis BOUDIN, éné (aîné) » Signé Etienne RAMAY

Etienne RAMAY reste Maire de la commune de St Clair et Les Roches jusqu’au Directoire. Il n’y a plus à partir de cette période de municipalités avec un Maire dans chaque village mais une « municipalité de canton » qui regroupe plusieurs anciennes communes. Il n’y a alors que des « adjoints » dans les villages.

Les Roches et Saint Clair sont alors paradoxalement dans deux cantons différents : Chonas et Auberives. On peut considérer qu’à partir de 1799, les deux villages sont séparés en deux « communes » Ce ne sera vraiment le cas que sous le Consulat.

Sous le Directoire : la municipalité de canton de Chonas
Le village de Chonas, en tant que chef lieu de canton, est le lieu où se réunit la « municipalité de canton » créée par le Directoire. Elle siège « à la maison commune » Le premier registre de ses délibérations s’ouvre le 24 brumaire An IV (15 novembre 1795) par la liste de cette nouvelle administration :

Président : Etienne RAMEY, nommé par l’assemblée primaire du canton le 10 brumaire (1er novembre)
Chaque commune du canton a un agent municipal et un adjoint, nommés par l’assemblée des communes le 15 brumaire (6 novembre)

Communes Agents municipaux Adjoints
Roches (de Condrieu) Antoine CHANAL Jean CHAINE

Joseph Louis JOUBERT, notaire à Chonas, est choisi pour secrétaire. Alexandre Jean VOYNE, « professeur de la jeunesse » (instituteur) à Chonas, est nommé « commissionnaire de l’administration municipale du canton »

Antoine CHANAL sera remplacé le 12 germinal An VI (1er avril 1798) par Arnaud VIALLET, marchand aux Roches. En messidor An VI (juin 1798), Nicolas GUILLOT « ci devant vicaire pensionné » est nommé agent (adjoint) de la commune des Roches.

Cette administration n’a pas un réel pouvoir de décision. Elle est surtout chargée de faire appliquer à l’échelon local les décisions prises par le département : gestion municipale, organisation des écoles, entretien des routes, patrouilles, équipement des soldats, réquisitions de toute sorte…

A la date du 18 floréal An IV (7 mai 1796) on note encore « Etienne RAMEY, Président de l’administration municipale du canton »
Dans le dossier « Elections d’agents municipaux- canton de Chonas » aux archives de l’Isère existe un « Registre civique où sont inscrits tous les citoyens ayant droit de voter aux assemblées primaires du canton de Chonas, dressé le 25 pluviôse An V ».
Pour Les Roches, on note : « Louis BOUDIN, cadet » et Etienne RAMEY
Louis Boudin pendant les années 1795 à 1799 fait partie de l’administration de la municipalité de canton d’Auberives comme « agent municipal de la commune de Saint Clair  ». Il est chargé comme « commissaire » de cette municipalité des questions de fournitures pour l’équipement des conscrits.
A la date du 25 messidor An VIII (14 juillet 1800), on note "Louis BOUDIN, maire de la commune de Saint Clair".

Pendant le Consulat
« Liste des Notables de l’Isère » document du 5 frimaire An X (27 novembre 1801)
« N° 287 BOURDIN, Maire – St Clair » « N° 820 RAMAY, Maire – Les Roches »

Sous l’Empire
Extrait des registres paroissiaux de Saint Clair (1808) :
« Le six juin mil huit cens huit, Mrs BOUDIN, Maire ; CHAUVET son secrétaire m’ont prié d’inhumer le corps d’une femme trouvé au bord du rivage (du Rhône) de la parroisse de Saint Clair, ce que nous avons exécuté de suite en leur présence, encore en présence de Monsieur Pierre François BORRELY et de Joseph VALIN qui ont signé avec nous. H.(Hugues) VIALLET, curé » Acte signé par « BOUDIN, aîné Maire »

Louis BOUDIN reste maire de Saint Clair jusqu’au 25 novembre 1815 ; il est remplacé par Marc Jean FAURE. Etienne RAMEY est maire de la commune des Roches, créée sous le Consulat ; il ne sera remplacé que le 20 juin 1815 par Claude BRUYAT.

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2 Messages

  • Pas vraiment d’accord avec vous sur le nombre d’officiers municipaux par nombre d’habitants ! Du moins si je m’en rapporte à ce que je connais des communes du Calvados !

    redonnez moi donc le détail tel que vous le lisez dans les lettres patentes de 1789 ! Celà m’aidera à comprendre mieux !

    amicalement DJ. Honfleur

    Répondre à ce message

    • Extrait du décret relatif à la constitution des municipalités (14 décembre 1789)

      25. Les membres des corps municipaux des villes, bourg, paroisses ou communautés seront au nombre de trois, y compris le maire, lorsque la population sera au-dessous de 500 âmes ; de six, y compris le maire, depuis 500 âmes jusqu’ à 3.000... [Et ainsi de suite].

      26. Il y aura dans chaque municipalité un procureur de la commune sans voix délibérative ; il sera chargé de défendre les intérêts et de poursuivre les affaires de la communauté...

      30. Les citoyens actifs de chaque communauté nommeront, par un seul scrutin de liste et à la pluralité relative des suffrages, un nombre de notables doubles de celui du corps municipal.

      31. Ces notables formeront, avec les membres du corps municipal, le conseil général de la commune et ne seront appelés que pour les affaires importantes, ainsi qu’il sera dit ci-après.

      Attention à ne pas confondre les "notables" avec les "membres du corps municipal"..

      Cordialement.
      Michel Guironnet

      Répondre à ce message

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