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C’était une famille comme beaucoup d’autres

Les cinq frères Charbonnier

Le mercredi 28 avril 2010, par Jacques Charbonnier

Le père, Jules, était le petit-fils d’un « Vieux de la Vieille », obscur canonnier de la Vieille Garde, qui avait suivi l’Empereur pendant plus de dix ans... Jules, lui , après quelques années passées dans l’Infanterie de Marine, avec un séjour aux Saintes, en Guadeloupe, était rentré dans ses foyers, et avait épousé la fille du voiturier de Thonnance.

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Thonnance les Joinville
Une photo du village où ils habitaient tous ; avec la charrette du boulanger faisant sa tournée, - le dit boulanger étant le beau-père de Georges, le fils aîné.

Installés au village, puis à Vecqueville où Jules travaillait à la fonderie, les époux eurent successivement un garçon, né fin 1879, et quatre autres garçons, nés, un peu plus tard, entre 91 et 98. Une petite sœur était également venue au monde, mais elle n’avait pas eu le temps de vivre.

L’aîné des garçons, Georges, poussé par son instituteur, put aller au collège. Puis il entra à l’École des Arts et Métiers de Châlons en Champagne, d’où il sortit Ingénieur. Embauché par les fonderies de Vecqueville, il fut rapidement nommé responsable de la fabrication.

Hélas, la maman, malade, décéda en 1900, et Jules ne lui survécut que cinq années.

Georges, l’aîné, se retrouvait chef de famille à 25 ans, avec ses quatre frères.

Malgré les difficultés, l’un après l’autre, tous furent reçus à leur Certificat d’Études, et obtinrent, après une période d’apprentissage, une place d’ouvrier à la fonderie.

1914 : La guerre est déclarée

Georges, bien que dispensé (Article 23 ?) comme ingénieur diplômé, fut rappelé dès le 2 août.

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Georges

Paul, de la Classe 11, qui faisait alors son service dans l’Artillerie, ne quitta pas l’uniforme.

Le troisième frère, Albert, classe 13, partit, avec son Régiment de Dragons, sa lance et son cheval, en direction de l’Alsace. On n’entendra plus guère parler de cavalerie, dans cet univers de tranchées et de barbelés...

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Albert

L’avant-dernier, Camille, de la classe 15, ne fut mobilisé qu’en décembre, et rejoignit le 156e Régiment d’Infanterie de ligne.

Le « petit » dernier, Louis, qui n’avait pas encore seize ans, resta seul de la famille à Thonnance, mais naturellement fut pris en charge par sa belle-sœur.

Georges fut affecté au Train des Équipages, et rejoignit le Service des Convois automobiles à partir d’avril 1915.

Dix-huit mois plus tard, en novembre 1916, il est mis en sursis ( ?) et désigné pour rejoindre une fonderie du Sud haut-marnais, comme chef de fabrication fonderie (munitions d’artillerie), « jusqu’à nouvel ordre ».

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Georges au milieu des ouvriers de la fonderie

En avril 15 également, Paul, sous-chef mécanicien puis maréchal-des-logis au 6e Régiment d’Artillerie à pied, va participer à la Bataille d’Artois.

Soumis aux violents bombardements ennemis de contre-batterie, il sera grièvement blessé par un éclat d’obus qui lui arrache la moitié de la cuisse.

Transporté à l’hôpital militarisé de Nancy, il y décèdera un mois plus tard.
Il sera cité à l’ordre de l’Armée.

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Paul

Pendant ce temps, Camille, le biffin, est également en Artois, puis en secteur belge dans les environs d’Ypres. Le froid, l’eau omniprésente, la fatigue, s’ajoutent aux duretés des combats, et il tombe sévèrement malade (congestion pulmonaire).

À l’hôpital de Troyes, il sera soigné, et réformé temporaire. Déclaré guéri, il rentre dans sa famille, où il mourra deux mois après, en août 1915.

Camille avait eu cependant l’occasion, au 15/6, de retrouver des copains et des cousins de son village : parmi eux, Émile, classe 15, le fils du peintre-vitrier de Thonnance, qui était (sans le savoir) le futur beau-frère (posthume !) de Louis.

En septembre 1915, le 156e de ligne est engagé dans la Bataille de Champagne. Une lettre d’Émile, la dernière, envoyée à ses parents, leur raconte ces retrouvailles, et les "faits divers" qu’il est en train de vivre. Il leur annonce l’issue victorieuse des combats du lendemain.

Le lendemain, 30 septembre, le Journal des Marches et Opérations du 156e signale Émile dans la longue liste des « disparus » lors des combats de la journée... C’était à la ferme Beauséjour ( ! ), région de Tahure-lès-Hurlus... Voir l’article de Michel Guironnet.

Cependant, au village, le « petit » frère, le Louis, s’impatiente. Malgré les horreurs de la guerre, malgré les morts et les disparus qui accablent toutes les familles - et peut-être à cause d’eux -, il décide de se présenter à la Gendarmerie de Joinville, pour souscrire un engagement volontaire.

On le renvoie chez lui : « Trop jeune ! ... ». Mais il s’obstine, et, fin 1916, à ses dix-huit ans, il signe pour trois ans dans la Marine Nationale. Quartier-Maître électricien, puis radiographiste T.S.F., il embarque sur le Cassiopée, un dragueur de mines...

L’armistice est signé ...

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Louis

Le sous-officier du Train, le cavalier, le matelot rentrent chez eux. L’artilleur et le fantassin ne reviendront pas...

On conservera précieusement la Médaille militaire, reçue en 1920. Elle était pour Paul, mais chacun d’eux y avait un peu droit...

Cinq frères comme beaucoup d’autres...

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