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Bimblotier à La Guillotière

D’un soldat de la Révolution à un aubergiste de la fin du XIXe siècle

Le jeudi 25 avril 2019, par Michel Guironnet

Claude, le grand-père, pendant la Révolution et sous le Consulat, est soldat "pensionné de la République". Son fils, également prénommé Claude, est, sous Louis-Philippe, "fabricant d’étoffes", puis saltimbanque "montrant une mécanique", et "fabricant de jouets d’enfant". Pendant le Second Empire, il est"bimblotier" puis "cabaretier".
Le fils de Claude, Louis Alexis, est d’abord "ouvrier bimblotier", puis, lui aussi, "fabricant de jouets d’enfant". En 1861, il est "débitant de vins" puis "hôtelier" pendant dix ans, à la fin de sa vie, au début de la IIIe République.

Soldat "pensionné de la République"

Le 5 brumaire An III (26 octobre 1794), en Côte d’Or, est célébré le mariage de Claude Prautheaux et de Jeanne Barrangier :
« Dans la maison commune » de Tillenay se sont présentés : « D’une part Claude Prothot, âgé de trente trois ans, ci-devant attaché au soixante et treizième Régiment d’Infanterie, actuellement pensionné de la République, domicilié à la commune d’Auxonne…fils des déffuncs Philipe Prothot et de Petronille Mathaut ? qui était charpentier audit Auxonne.
D’autre part, Jeanne Barranger, fille de Philibert Barrangé, manouvrier à Tillenay, et d’Oudette Bonnion, ses père et mère ; laquelle est âgée de trente huit ans… »

Parmi les témoins qui accompagnent les futurs mariés : « Pierre Fourcault, cidevant soldat au quatre vingt neufvième Régiment d’Infanterie, pensionné de la République, domicilié audit lieu de Tillenay, âgé de vingt cinq ans ».
L’acte nous apprend que Claude Prothot est né à Auxonne le 19 janvier 1760 et que Jeanne Barranger est née à Billey le 24 juillet 1756.

Le 23 prairial An IV (11 juin 1796) se présente en mairie « Claude Protot, pensionné de la République, résidant audit Tillenay » Lequel déclare « que de son légitime mariage contracté à (Tillenay)…le cinquième jour du mois de ? (Brumaire certainement : le lieu et le mois du mariage sont cachés dans la reluire !) l’an trois de la république avec Jeanne Barangés, est né à quatre heure du matin en sont domicile d’un garson auquele il a donné le prénom de Claude »

"Fabricant d’étoffes" à Lyon

Jeanne Marie, la première fille de "Claude Protheaux, fabricant d’étoffes" au 25 Montée Saint Barthélémy dans le quartier Saint Paul, nait à Lyon le 10 mars 1822. Est témoin, le lendemain pour la déclaration en mairie, Maurice Monnet, fabricant d’étoffes au 9 rue du Plat d’Argent à Lyon, l’oncle de l’enfant. C’est le frère d’Antoinette Monnet, la mère du nouveau-né.
Antoinette Monnet est native de Lyon. Pourtant Claude et Antoinette ne se sont pas mariés à Lyon. Nous n’avons pas réussi à retrouver leur acte de mariage.

En s’appuyant sur les recensements de Lyon [1] nous savons pourtant que le couple habite déjà à cette adresse en 1821. Dans leur appartement logent Claude et Antoinette plus deux ouvriers. "Ouvriers en soie", ils travaillent sur métier Jacquard :

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Au 25 Montée Saint Barthélémy
En 1821, sur la deuxième ligne, est noté "Protheaud Clde" appartement N°67.
L’année précédente cet appartement est vide. Ils seront à cette adresse jusqu’en 1824.
Le 3 thermidor An III (21 juillet 1795), Simon Barrochet, « administrateur de l’hospice des malades » de Lyon (l’Hôtel Dieu) déclare devant l’officier d’état-civil que « Magdelaine Jarosson, femme de Jean Fleury Monnet, ouvrier en soye, rue Moricot, est accouchée hier au dit hospice d’un garçon qui a été nommé Maurice Monnet… » La rue Maurico (ou Morico) est la rue de Jussieu actuelle dans le 2e arrondissement de Lyon.

Le 3 vendémiaire An VIII (25 septembre 1799), devant Charles Poulat, « officier public de l’administration municipale de Lyon, division du Midy », le citoyen Jean Thomas Roulier « commissaire administrateur de l’hospice des malades de cette commune » déclare que « Magdeleine Charrasson, femme de Fleury Monnet, fabricant d’étoffes de soye, Montée du Gourguillon (Lyon 5e aujourd’hui), est accouchée d’un enfant du sexe féminin auquel on a donné le prénom d’Antoinette »

Catherine, leur deuxième enfant ; nait également à Lyon le 27 février 1824 "à l’hôpital des malades de cette ville" (l’Hôtel Dieu) ; le couple réside à la même adresse.

Maurice, leur premier garçon, naît le 1er juillet 1825 "rue Noire N°4" [2]. Claude est toujours "fabricant d’étoffes". Maurice Monnet est aussi présent : à noter qu’il exerce son métier "rue de l’hôpital N°26".

"montrant une mécanique"

Pour la quatrième naissance du couple, le fait que Louis Alexis Prautheaux naisse dans l’auberge de Jean Louis Coutenceau, le 26 octobre 1828 à Cloyes-sur-Loir (Eure et Loir), doit être la conséquence d’un déplacement "à titre professionnel" de ses parents.

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Acte de naissance de Louis Alexis Prautheaux

Domicilié à Lyon, son père Claude (32 ans) est dit « natif de Tillenay » en Côte d’Or, et est qualifié de "montrant une mécanique".
Probablement, Claude présente ; sur les places des villages et dans les foires ; un spectacle itinérant d’automates, matériel de théâtre transporté au gré des chemins dans de grosses malles arrimées sur une carriole certainement très décorée pour attirer le public. Il n’est donc plus "fabricant d’étoffes" ! Peu probable en effet qu’il puisse cumuler ces deux activités.

Bimblotier à la Guillotière

Le 16 août 1832, devant l’adjoint au maire de La Guillotière (c’est alors une commune, non encore rattachée à Lyon) se présente "Claude Protaux, ouvrier en soie en cette ville, rue de la Vierge N° 7" Il a 38 ans et vient déclarer la naissance de Jean Baptiste, son cinquième enfant, né la veille.
Est présent Jean Baptiste Abre, 57 ans, ouvrier en soie au 21 rue du Boeuf, dans le quartier Saint Jean...C’est peut être le parrain ? Présent également le fidèle Maurice Monnet, le frère d’Antoinette, fabricant d’étoffes de nouveau domicilié au 9 rue du Plat d’Argent à Lyon.

Le 22 décembre 1834, en mairie de La Guillotière « se sont présentés les sieurs Claude Protaux, fabricant de joués d’enfants en cette ville, rue de la Vierge N°9, agé de quarente ans ; et Maurice Monnet, fabricant à Lyon, rue Plat d’Argent N°9, agé de quarente ans ; lesquels ont déclaré que Jean Baptiste Protaux, agé de deux ans, né à La Guillotière, fils légitime du premier déclarant et de Antoinette Monnet ; est décédé hier soir, à deux heures… »

La famille Prautheaux (ou Protot, Protheau, entre autres variantes !) est passé du 7 au 9 de la rue de la Vierge et s’est lancée dans la fabrication de jouets d’enfants. La rue de la Vierge est devenue aujourd’hui la rue Gilbert Dru à la Guillotière (Lyon 7e) en hommage au résistant assassiné en juillet 1944.

« A en juger par le nombre des marchands forains qui arrivaient chaque jour sur la fin de la semaine, la fête promettait d’être plus animée que les années précédentes. Il y avait déjà sur la place deux marchands de pain d’épice et de sucre d’orge, un jeu de tourniquet, un marchand bimbelotier avec une cargaison de mille objets peu luxueux mais étonnamment bon marché, et d’après les renseignements fournis par diverses personnes, on en attendait encore quelques autres » [3].
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« L’Intermédiaire des chercheurs et curieux » janvier 1904

Le 7 mai 1839, « Mr Prautheaux Claude, fabrican de jouets d’enfant en cette ville, rue de la Vierge N°9 » déclare la naissance de sa fille Jeanne Claudine. Il est accompagné de Claude Monnet, « ouvrier en soie à Lyon, rue de l’Hôpital N°3 » 30 ans, « oncle de l’enfant » et de Claude Louis Pascal, « cordonnier à Lyon rue Caponny N°3 », 37 ans.

Le 30 mars 1843, « Mademoiselle Louise Bonichon, accoucheuse en cette ville (de La Guillotière) rue Saint Louis 3 », 18 ans, déclare en mairie la naissance de « Louis Alexis Antoine, né hier à une heure après midi, enfant naturel de Demoiselle Jeanne Marie Protheaux, couturière domiciliée à La Guillotière, chez ses père et mère, née à Lyon, agée de vingt un ans, laquelle est fille légitime de M. Protheaux Claude, marchand fabricant blinbottier à La Guillotière, rue de la Vierge 8, et de Dame Antoinette Monnet ».
Claude Louis Pascal, le cordonnier de la rue Capponi, est présent : il est dit « cousin de l’enfant ».

Le 3 juillet 1844, devant l’adjoint au maire de La Guillotière sont présents « Mr Pahus Jean, forgeron, domicilié en cette ville, rue de la Vierge 8, né à Mosnac, département de la Charente inférieure » le 25 avril 1816 ; et « Mademoiselle Jeanne-Marie Protheaux, ouvrière fabricant de casquettes, domiciliée à La Guillotière, rue de la Vierge 8, née à Lyon » le 11 mars 1822, fille de « Claude Protheaux, cabaretier, et de Dame Antoinette Monnet, domiciliés susdite rue de la Vierge N°8 » « …aussitôt (après l’échange des consentements) les dits époux ont déclaré reconnaître et légitimer un enfant du sexe masculin, né d’eux à La Guillotière » le 29 mars 1843, inscrit le lendemain « sous les noms & prénom de Protheaux Louis Alexis Antoine ».

Témoins au mariage :

  • Claude Monet, ouvrier en soie à La Croix Rousse, 18 rue du Mail, 35 ans, oncle de l’épouse
  • André Dévigne, « fabricant d’étoffes de soie » 53 rue de Cuire à La Croix Rousse, 29 ans
  • Maurice Monnet, « fabricant d’étoffes de soie » 3 rue du Plat d’Argent à Lyon, 49 ans, oncle de l’épouse.
  • Claude Louis Pascal, cordonnier rue Caponi à Lyon, 42 ans, cousin de l’épouse.

Le 29 janvier 1856, « Prautheaux Alexis Louis, bimblottier, âgé de vingt sept ans, domicilié…rue de la Vierge 9 » vient déclarer à la mairie du 3e arrondissement de Lyon que son père « Prautheaux Claude, cabaretier, né à Auxonne (Côte d’Or) » le 11 février 1796, « fils de défunt Claude et de Jeanne Barrangier, époux de Antoinette Monnet » est décédé « à deux heures du soir » en son domicile du 9, rue de la Vierge.
Alors, Claude est-il né à Auxonne ou à Tillenay ? Le 11 février 1796 correspond en calendrier républicain au 22 pluviôse An IV. Rien à cette date, ni à d’autres d’ailleurs, à Auxonne. Du côté de Tillenay, rien non plus en pluviôse ! Claude y est bien né en juin 1796.

Le 7 février 1856, jour de son mariage à Tournus, Louis Alexis Prautheaux est dit « ouvrier bimblotier demeurant à Lyon ». Son père « qui était cabaretier et bimblotier » à Lyon est décédé, nous l’avons vu, le 29 janvier 1856. Sa mère est « cabaretière » au même lieu.
Louis Alexis épouse Benoite Audard, née à Tournus le 5 juillet 1835, fille de Claude Audard et de Marguerite Thomas « tonneliers et cabaretiers à Tournus ». C’est une sœur de Claudine Audard ; l’épouse de Philibert Duchez. Celui-ci est d’ailleurs témoin au mariage.

Le 26 octobre 1856, Antoinette Monnet, veuve de Claude Prautheaux, domiciliée "rue des Asperges à Lyon" décède à l’Hôtel Dieu à 56 ans. La mort de son père Claude puis celle de sa mère entrainent la vente des biens.

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Annonce de la vente en 1857
Parue dans "Le Salut public" du 11 mars 1857

Claudine Antoinette Benoite, le premier enfant de Louis Alexis Prautheaux, nait le 8 janvier 1857 à Lyon, au domicile de ses parents : 42 rue des Asperges. C’est l’actuelle rue d’Anvers dans le 7e. Louis Alexis est toujours « bimblotier ».

En 1861, Louis est « débitant de vin » et la famille habite au 7 rue de la Vierge. A la même adresse est recensée une veuve Ballard, journalière de 60 ans, hébergeant Jean Baptiste Duchez « garçon » de 13 ans.

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Des aventureux commerçants
"Le Salut Public" du 8 février 1867
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"Salut public" du 16 février 1867

"Hôtelier" en 1883 au 5-7 rue de la Vierge, il décède à Bron le 17 décembre 1892. Le 30 janvier 1896, à Lyon 3e, décède Benoîte Audard « débitante de boissons » ; 5 rue de la Vierge, « veuve de Louis Prautheaux ».

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Bimblotier à Lyon
"Annuaire officiel des jouets , jeux, des bazars, bimbeloterie, articles de Paris et des industries annexes" publié, sous le patronage de la Chambre syndicale des fabricants des jouets et jeux de Paris, par A. Clavel. 1897.

[1en ligne sur le site des archives municipales de Lyon

[2C’est aujourd’hui la rue Stella dans le quartier Grolée, dans la presqu’ile de Lyon

[3« La fête de Breluche : roman comique » par Albert Humbert (1835-1886). "la Lanterne de Boquillon" (Paris)

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5 Messages

  • Bimblotier à La Guillotière 26 avril 2019 22:38, par Pierrick Chuto

    Bravo pour cette belle recherche, Michel.
    Amitiés
    Pierrick

    Répondre à ce message

  • Bimblotier à La Guillotière 26 avril 2019 15:21, par André Vessot

    Bravo Michel et merci pour cet excellent article où tout est scrupuleusement documenté.

    Je crois que Christianne, mon épouse, avait des ancêtres sur La Guillotière.

    Bien amicalement.

    André

    Répondre à ce message

  • Bimblotier à La Guillotière 26 avril 2019 09:00, par Colette Boulard

    Tout un monde aux métiers très divers, très coloré, qui me changent d’une certaine répétition des emplois ruraux. La vie de la ville, avec cependant des survivances de la campagne : la famille vit à "la Guillotière",le quartier est nommé en plus du nom de la rue, comme ailleurs on indique, nécessairement cette fois, les hameaux. Des naissances parfois à l’hôpital, des métiers très différents au fil des ans. Capacité d’adaptation et souplesse indispensables ! Merci à vous pour ce récit.

    Répondre à ce message

  • Bimblotier à La Guillotière 26 avril 2019 08:40, par Pascal DUFON

    Bonjour,

    Pour information, le mariage de Claude Prautheaux et Antoinette Monnet a bien eu lieu le 19 septembre 1820 à Lyon (Archives de Lyon registre cote 2E191 page 316/433). Claude Prautheaux y est dit né à Tillenay le 22 pluviose an IV, fabricant d’étoffes demeurant à Lyon rue Grolée.

    Bien cordialement,

    Pascal Dufon

    Répondre à ce message

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