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Accueil » Articles » La vie militaire » « Nos Poilus » » Au combat, les Poilus doivent avoir un sacré coeur

Au combat, les Poilus doivent avoir un sacré coeur

Le lundi 1er novembre 2004, par Michel Guironnet
« Objets inanimés, avez-vous donc une âme
Qui s’attache à notre âme et la force d’aimer ? »

Une rapide visite avec nos amis, en juin dernier, dans la maison vers Morestel qu’ils sont en train de restaurer ; m’a fait toucher du doigt la justesse de ce vers si connu du poète Lamartine.

Les héritiers de la précédente propriétaire, une dame décédée très âgée, ont laissé à l’abandon tous les souvenirs de sa vie ! Vie certainement bien remplie où la culture tenait une large place : meubles, bibelots, partitions de musique, livres, écrits, ...tout est encore là !
Un fanion tricolore [1], sale et froissé sous une pile de vieilles revues des années trente, attire mon attention.
D’objet inutile abandonné, il devient une fois nettoyé l’objet de nombreuses interrogations : de quand date t’il, pourquoi est il ici, quel a pu être son usage... ? Cet article n’est qu’une partie de la réponse.

« Coeur adorable de notre Dieu, la nation française vous implore »

Le 30 octobre 1918, Louis Joseph Guironnet, Chasseur Alpin au 62e B.C.A, est blessé au combat, à Etreux dans l’Aisne. Evacué, il meurt pour la France le jour même. Il n’avait que 23 ans, né le 30 avril 1895 à Lamastre (Ardèche), du premier mariage de Romain Victor Guironnet, mon grand père, et de Madeleine Julie Rey : voir l’article que je lui ai consacré.

  • Louis avait « le Petit Paroissien du Soldat » dans son portefeuille.La balle l’a transpercé : on voit bien l’impact mortel
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Petit Paroissien du Soldat

A l’écart dans la tranchée, avant de monter à l’assaut des lignes adverses, le Poilu Guironnet a t’il invoqué Notre Dame du Bon Secours ou récité, une fois encore, la prière « Voeu national au Sacré Coeur de Jésus » ? :

« Nous venons à vous, Coeur Sacré de Jésus, dans nos angoisses ; ouvrez pour nous les trésors de votre charité infinie. Le sang qui a coulé de votre blessure a racheté le monde ; qu’une goutte de ce sang divin, par sa toute puissance expiatrice, rachète encore une fois cette France que vous avez aimée et qui ne veut pas renier sa vocation chrétienne...Que le temple élevé par nos mains en votre honneur devienne pour nous comme une citadelle inexpugnable qui protégera Paris et notre Patrie...Ainsi soit-il »

Avec la guerre qui dure et la brutalité des combats, « inlassablement, les évêques appellent à prier, à communier, car la décision dépend de Dieu seul, " allié plus puissant que la Russie et l’Amérique " ...C’est alors sans doute que la dévotion au Sacré-Coeur atteint son apogée ; des diocèses, comme Besançon, lui ont été consacrés dès 1914, puis c’est la France tout entière, le 11 juin 1915.

Du coup certains ultras veulent réactualiser la prophétie de Marie Alacoque à Paray-le-Monial, enjoignant à Louis XIV de faire graver le Sacré-Coeur sur ses étendards. Des images en ce sens sont saisies par la police à Lyon en 1915. De nombreux sermons exaltent les fidèles.... Si les autorités interdisent le drapeau surchargé sur la voie publique, elles sont relativement tolérantes à ce qui se passe dans les églises, et c’est plutôt de Rome, par Benoît XV et le cardinal Billot, que vient la suspicion pour une dévotion à la fois ultra-nationaliste et souvent superstitieuse ; le Sacré-Coeur, sur la poitrine d’un soldat ou sur un fanion, est une véritable amulette » [2]

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Drapeau avec l’image du Sacré-cœur et la devise
« Cœur Sacré de Jésus, Espoir et Salut de la France »

Le remarquable site Internet consacré à l’histoire de la dévotion au Sacré-Coeur nous renseigne de façon plus complète :

Dès 1915, L’Oeuvre des Insignes du Sacré-Coeur (19 quai de Tilsitt à Lyon) distribue pour la population et les soldats du front insignes et drapeaux. Pour la totalité du conflit, ces distributions représenteront douze millions d’insignes, plus d’un million cinq cent mille fanions, trois cent soixante quinze mille scapulaires et plus de trente deux mille drapeaux.

Le 16 janvier 1917, une lettre de Claire Ferchaud est remise à Raymond Poincaré, président de la République. Elle lui fait part d’un message qu’elle dit avoir reçu du Christ, qui contient une double demande : sa conversion, et l’apposition du Sacré-Coeur sur le drapeau national. Malgré leur rencontre du 21 mars, et un nouveau courrier envoyé le 1° mai, ses démarches resteront sans effet :

" ... Jésus veut sauver la France et les Alliés, et c’est par vous, Monsieur le Président, que le Ciel veut agir, si vous êtes docile à la voix divine.

Il y a des siècles déjà, le Sacré-Coeur avait dit à la B. Marguerite-Marie : "Je désire que mon Coeur soit peint sur le drapeau national, et je les rendrai victorieux de tous leurs ennemis". Dieu semble avoir dit ces paroles pour nos temps actuels...

Monsieur, voici les paroles sacrées que j’ai entendues de la bouche même de Notre Seigneur : "Va dire au chef qui gouverne la France de se rendre à la Basilique du Sacré-Coeur de Montmartre avec les rois des nations alliées. Là, solennellement, les drapeaux de chaque nation seront bénis, puis le Président devra épingler l’image de mon Coeur sur chacun des étendards présents. Ensuite, M. Poincaré et tous les rois alliés à la tête de leur pays, ordonneront officiellement que le Sacré-Coeur soit peint sur tous les drapeaux de chaque régiment français et allié. Tous les soldats devront être recouvert de cet insigne de salut."

Début mai 1917, Mlle de Béarn ouvre un Secrétariat du Sacré-Coeur à Paris, destiné à recueillir les signatures de la profession de foi intitulée "La France au Sacré-Coeur", diffusée dans une cinquantaine de diocèses et au plan national par l’intermédiaire du journal La Croix, appelant à l’apposition de l’emblème du Sacré-Coeur sur le drapeau national.
Mgr Amette (le 9 mai) puis Mgr Odelin, son vicaire général (le 24 mai) désapprouvent l’entreprise, qui disparaît rapidement.

Le 1er juin 1917, les préfets interdisent l’apposition de tout emblème sur le drapeau national...Les 18 et 29 juillet, au nom de la liberté de conscience et de la neutralité religieuse de l’Etat français, le gouvernement interdit la consécration des soldats au Sacré-Coeur et le port, aux armées, de fanions et étendards du Sacré-Coeur.

Le 6 août, pour couper court à la lettre envoyée par Claire Ferchaud aux généraux français, Philippe Pétain, alors Général en chef des armées, rédige une Note aux Armées et conclut :

« Les militaires (officiers et hommes de troupes) qui recevront d’oeuvres quelconques des fanions ou étendards revêtus d’emblèmes religieux les remettront immédiatement à leur chef de corps qui en assurera la réexpédition à l’oeuvre expéditrice.
Les généraux commandants les armées rappelleront aux officiers sous leurs ordres qu’ils doivent dans le service s’abstenir de tout acte à caractère confessionnel constituant une violation flagrante de la liberté de conscience de leurs hommes et de la neutralité de l’Etat français »
.

Le livre de référence est « Le Sacré-Coeur et la Grande Guerre » de Alain Denizot aux Nouvelles Editions Latines (1994)

[118 X 15 centimètres

[2François Lebrun « Histoire des catholiques en France »

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13 Messages

  • > Au combat, les Poilus doivent avoir un sacré coeur 30 août 2005 16:23, par Gérard MEUGNOT

    Je possède un de ces petits insignes en broche (pin’s avant l’heure), trouvé dans la cave de mon grand-père avec un insigne des "poilus de l’Ozerain". Je connaissais l’origine de cet insigne et je suis très content d’avoir retrouvé un article.

    Je peux adresser des photographies aux personnes intéressées.

    Répondre à ce message

  • Au combat, les Poilus doivent avoir un sacré coeur 21 octobre 2008 13:29, par Tregouet

    23 SEPTEMBRE 1915 LETTRE DE MON GRAND PERE jean Besseyrias 40° d’ infanterie
    un petit fanion qui donne du coeur au ventre du courage a ces jeunes garçons (une leçon de courage pour moi)

    J’accepte la mort de ma pauvre mère avec une résignation bien chrétienne,sachant que les desseins de la providence sont impénétrables.D’ailleurs ne m’a_t_on pas appris a l’ecole et dans ma famille la soumission a la volonté de dieu.C’ est pourquoi je garde l’espérance de retrouver la haut les parents qui m’ont été ravis
    Votre bulletin nous donne des nouvelles de tous et il est pour chacun une source de courage qui nous aide a surmonte les misères de notre vie présente.
    je vous remercie du fanion du Sacré- Coeur que je porte épinglé sur ma poitrine J’assiste a la sainte messe aussi souvent qu’il m’est possible.Nous avons un aumonier d’une bravoure et d’une abnégation sans pareilles.c’est l’ange gardien du régiment.Nous occupons un secteur de L. qui n’est pas très calme, a cause de la proximité des lignes.la lutte a la grenade y est très active et il y a tres souvent des coups de mains

    Répondre à ce message

    • Au combat, les Poilus doivent avoir un sacré coeur 21 octobre 2008 21:03, par GUIRONNET

      Bonsoir,

      Merci pour ce beau témoignage qui "colle" parfaitement au sujet de mon article.

      Extrait de l’historique du 40e Régiment d’Infanterie en Septembre 1915 :

      Secteur de la ferme de l’Espérance (7-19 septembre). - Le 7 septembre, le régiment est relevé par le 61e
      R.I. ; appuyant un peu vers l’Est, il occupe le secteur de la ferme de l’Espérance. Il est encadré par le 118 R.I.T.
      à droite et par le 58e R.I. à gauche. Il occupe ce secteur jusqu’au 19 septembre, date à laquelle le 61e
      commence à le relever ; les fractions relevées continuent à Mailly-Champagne.

      Le 22 septembre au soir, le régiment quitte Mailly et porte par étapes vers l’Ouest, à Muscourt, en suivant
      l’itinéraire Chamery, Rosnay. Il arrive à Muscourt dans la nuit du 25 au 26 et s ‘établit en cantonnement bivouac
      dans le village et dans la ferme de Beauregard. Il fournit des travailleurs au génie, tandis que les officiers font des
      reconnaissances d’itinéraires en avant de Pontavert, pour le cas ou le 40e devrait participer à l’attaque projetée
      sur les positions allemandes (en général : plateau de Craonne).

      Le 29 septembre, le régiment quitte par alerte ses emplacements et suivant le même itinéraire qu’a l’aller,
      revient cantonner à Rosnay, Janvry et Germiny, où il arrive vers 9 h. par une pluie battante. Il y fait séjour
      jusqu’au 1er octobre au soir ; il se porte alors à Jouy-les-Reims, Pargny-les-Reims et Vrigny, pour embarquer le
      lendemain en camions automobiles à Sacy ; le 40e est transporté à Suippes par Monchenot, Dizy, Tours, St-
      Martin. Il s’installe au bivouac, entre Suippes et Jonchery, le long de la Suippe.

      Le 5 octobre à 19 h., il quitte le bivouac pour se porter, par Suippes sur Souain où il arrive vers 1 h. Il
      s’établit dans des tranchées à cheval sur la route de Souain-Perthes. La 30e D.I. doit être prête à marcher à
      partir de 5 h. , le 6 octobre, pour participer à l’attaque qui doit avoir lieu, elle est à la disposition de la IVe
      Armée.

      Cordialement.
      Michel Guironnet

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      • Au combat, les Poilus doivent avoir un sacré coeur 18 avril 2009 14:07, par sicot

        Bonjour
        je suis passionné d’histoire et collectionneur d’objets s’y rapportant, je fais partie d’un groupe de collectionneurs sur le forum "chasseurs d’histoire" je vous demande l’autorisation de mentionner (sans but lucratif) votre article afin de déchiffrer une photo d’époque représentant un groupe de poilu avec l’insigne du sacré coeur sur leur képi. Je mentionnerais bien entendu mes sources si vous m’y autorisez.
        Merci par avance
        jacky.sicot chez wanadoo.fr

        Répondre à ce message

  • Dimanche 31 mai 2009

    A Versailles paroisse Notre Dame des Armées on peut encore voir un drapeau tricolore frappé du Sacré - Coeur ( Foyer du Soldat )

    "Dimanche 31 mai, le drapeau a été béni à l’infirmerie par un des aumôniers de la division, la cérémonie s’est faite très simplement ; notre capitaine était présent. A l’issue de la messe, Monsieur l’aumônier a béni le drapeau que lui présentait le plus ancien sous-officier de la Cie, puis, avec l’autorisation du capitaine, au nom de nos camarades absents, on a lu la consécration de la compagnie au Sacré-Coeur".

    Après la guerre, M. Du Plessis de Grenédan, doyen de la faculté catholique de droit d’Angers, écrit : " Depuis le début de la guerre jusqu’à ma démobilisation, le 25 février 1919, j’ ai constamment arboré, soit au cantonnement, soit dans ma chambre, soit en ligne, dans mon poste de commandement, le drapeau du Sacré-Coeur, contre la paroi de la pièce ou de l’abri, bien en évidence. Quand je logeais à la belle étoile, il était, soit dans ma musette, soit au bout d’un bâton fiché dans le sol. J’ai consacré deux fois, en 1917 et en 1918, mon bataillon au Sacré-Coeur, le jour de sa fête. "

    Répondre à ce message

  • Pour info en vous priant de bien vouloir m’autoriser à laisser la MAJ affichée sur

    Si telle n’était pas votre volonté, il suffira que vous m’écriviez de supprimer la copie que j’ai pris la liberté de faire sans votre autorisation préalable.

    Toute absence de courrier vaudrait pour moi tacite acceptation.

    Pour éviter tout malentendu qui serait infiniment regrettable, merci bien sûr de ne pas afficher ce commentaire qu’il vous suffira de supprimer après lecture.

    Quelle que soit la décision que vous prendrez, merci d’avoir assuré l’existence de votre site depuis notre dernier échange ...

    Répondre à ce message

    • Au combat, les Poilus doivent avoir un sacré coeur 18 mai 2016 05:20, par Michel Guironnet

      N’ayant pas trouvé d’autre moyen de vous répondre (vous n’indiquez ni signature ni adresse mail), je prends le parti de publier votre message pour vous dire mon total désaccord avec votre méthode pour le moins cavalière !
      Il convient donc de retirer sans délai mon article de votre site.

      Michel Guironnet

      Répondre à ce message

  • Au combat, les Poilus doivent avoir un sacré coeur 23 février 2017 12:57, par Benoît

    Bonjour,
    merci.
    bien à vous.
    M. Benoît

    Répondre à ce message

  • Au combat, les Poilus doivent avoir un sacré coeur 14 avril 2018 20:55, par Marie Saget

    D’où provient votre petit fanion du Sacré Cœur. Vient-il de l’Œuvre du l’Insigne du Sacré Cœur, rue de Tilsit à Lyon (adhérer Garde du Sacré Cœur au Front) OU de Claire Ferchaud

    Répondre à ce message

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