Mon grand-père paternel, Marceau Philibert, né à Lumigny (Seine et Marne) le 1 juillet 1899, était cordonnier. Comment avait-il appris ce métier ? je ne sais pas. Son père ne l’était pas. Il avait dû être apprenti comme cela se faisait beaucoup à l’époque.
Il avait eu son certificat d’étude à l’âge de 12 ans. Je peux retracer son histoire professionnelle à partir du 1er juillet 1922 date à laquelle il a été procédé à la cession d’un fonds de commerce par un monsieur Grignac au profit de Monsieur Marceau Philibert, acte reçu par Maître Roger Gauthier, Notaire à Fontenay Tresigny (Seine et Marne).
Je possède cet acte qui relate la désignation de l’acquisition, notamment :
- la clientèle et l’achalandage qui y sont attachés.
- le droit au bail des lieux où il est exploité
- le matériel et les objets mobiliers servant à son exploitation, lesquels sont entièrement désignés.
Il y a également des marchandises garnissant ledit fonds, notamment des paires de chaussures femmes, fillettes et garçonnets, mais aussi 20 paires de galoches fillettes, 15 paires de galoches hommes, des chaussons, des pantoufles, des lacets etc…
Je fais la déduction suivante, qu’il n’était pas uniquement cordonnier, mais aussi vendeur de chaussures et de galoches (les galoches étaient des chaussures à semelles de bois).
- La cordonnerie à Fontenay Tresigny
- Photo prise en 2007 de la maison avec mon père installé devant. Cette maison était donc la cordonnerie et il y est né en 1923 dans la chambre où il y a le père noël à la fenêtre.
Mon grand-père a donc exercé son métier à Fontenay Tresigny, de juillet 1922 jusqu’en 1935-1936.
Pourquoi n’a-t-il pas continué à Fontenay Tresigny, on ne sait pas.
Mon père répétait souvent qu’il avait fait une sottise de « s’expatrier » pour Clichy la Garenne.
Le 11 février 1936, le cordonnier Marceau Philibert signe un acte de cession de droits par un monsieur Small à son profit, concernant un fonds de commerce alors rue du réservoir à Clichy, laquelle rue devenue ensuite rue Médéric au n°1.
Je me souviens très bien de cette cordonnerie puisque mon grand-père y exerçait toujours son métier en 1957 lors de son décès. Elle n’existe plus à présent, c’est devenu une maison de particulier.
Entre-temps, il avait fait établir un contrat de gérance au profit de son fils, André Philibert, mon père, suivant acte reçu par Me P. Fontaine-Descambres, notaire à CLICHY le 10 février 1947.
En effet, son épouse est décédée en 1946 et il avait du mal à remonter la pente, celle-ci s’étant pendue dans l’escalier de cette cordonnerie.
Il va donc rejoindre la maison familiale de Saint-Augustin (Seine et Marne) pour y vivre et s’y reposer.
Mon père est donc le nouveau cordonnier de Clichy.
Il n’avait jamais appris le métier, mais avait toujours aidé son père et pouvait fort bien le remplacer.
Ce qu’il fit, mais peu de temps.
Il faut dire que cette maison n’avait aucun confort, deux chambres à l’étage et une petite cuisine à côté de la cordonnerie du rez-de-chaussée.
Lorsque je dis pas de confort, je n’exagère pas, car il n’y avait pas de wc , même pas sur un palier comme cela était souvent le cas à Paris.
Il fallait passer par la rue pour aller au café du coin, chez « loulou », lequel était le propriétaire (ce qui peut être acceptable à la campagne avec une cabane au fond du jardin, l’est beaucoup moins à Clichy).
Je suis née en mai 1947, et ma mère avait bien du mal à vivre ainsi.
De plus mon père avait des soucis de santé et le métier était bien pénible.
Mon grand-père revient de Saint-Augustin en laissant cette maison à sa fille qui vient de se marier et reprend son activité de cordonnier à Clichy jusqu’en 1957 date de son décès.
Il fut retrouvé allongé à l’étage, asphyxié par un poêle à pétrole.
Ainsi mon père et sa sœur ont eu des parents décédés de façons tragiques.
- Maison actuelle au 1 rue Médéric à Clichy
- Cordonnerie au moment où mon père était cordonnier. Il est en photo avec son tablier avec sa sœur et un monsieur qui devait être un client.
- Marceau Philibert devant sa cordonnerie
Mon père a repris des études et est devenu mécanographe dans une compagnie d’assurances à Paris rue de Chateaudun mais dont le siège fut transféré à Clichy.
Ainsi il a retravaillé à Clichy jusqu’à sa retraite.
Comme j’ai repris la maison de Taverny qui appartenait à mes parents, je retrouve à la cave les traces du métier de cordonnier.
Il y a le banc à chaussures, les outils de cordonnier, les formes de toutes tailles pour les chaussures, etc…
Mon père a continué toute sa vie à réparer nos chaussures.
Ce sont les traces d’un passé dont je voulais témoigner par écrit.
- Les outils du cordonnier