Ce premier janvier 1930, à l’État Civil de Gagny (Seine et Oise), Clémence PAILLART, 60 ans, sans profession, déclare le décès, survenu ce même jour, de Monsieur Emile Léonce Anne DON SIMONI, ingénieur, célibataire, résidant 14 avenue de la République, fils de Jean DON SIMONI et Pauline BONNEAU DES ROCHES.
Ce fait banal aurait pu passer inaperçu et tomber dans l’oubli, si Madame PAILLART n’avait, sitôt les obsèques célébrées, envoyé le faire-part ainsi libellé :
DON SIMONI (prétendu tel),
fils unique de Maximilien de HABSBOURG-LORRAINE, Empereur du Mexique et de la Princesse Charlotte de Belgique, Impératrice du Mexique, rappelé à Dieu, muni des sacrements de l’Église, le 1er janvier 1930, à l’âge de 63 ans.
De Profundis
De la part de Mesdames Clémence PAILLART et Valentine Roland, ses dévouées collaboratrices.
Les obsèques ont été célébrées en l’église Saint Germain de Gagny le samedi 4 janvier 1930 à 10 heures.
- Le faire-part de décès
Sur les images mortuaires, qu’il était coutumier de diffuser à l’époque, elle fait inscrire un extrait du 11e Livre des Macchabées :
Dans sa vie comme dans sa mort il a laissé à tous un grand exemple de foi, de dévouement, de bonté, de force et de courage.
Il a combattu vaillamment pour la vérité et la justice. Il a achevé sa course et conservé sa foi. La couronne du juste lui est réservée.
- Portrait de DONSIMONI
Émile DON SIMONI sera inhumé dans le cimetière du Centre et les « révélations » de Madame PAILLART seront gravées dans le granit de la tombe dans les mêmes termes. Le temps a quelque peu effacé l’inscription qui reste cependant toujours lisible.
Sur le côté de la pierre on remarquera une autre mention : « Marie Thérèse décédée à Gagny le 4 octobre 1927 ».
Quels sont les éléments qui ont incité Madame PAILLART à lancer cette bombe ?
C’est l’énigme, que nous n’aurons ni la prétention, ni la possibilité de résoudre, mais qui au fur et à mesure de nos recherches, nous entraînera à nous poser bien des interrogations tant le sujet est complexe.
Pour ce faire, nous avons choisi de présenter chacun des personnages de cette saga afin d’en faciliter la compréhension.
Remarque préliminaire concernant les patronymes : Nous avons conservé l’authenticité des patronymes tels qu’ils apparaissent dans les documents officiels. Ainsi le patronyme DONSIMONI apparaît constamment sous cette forme dans les actes, contrairement à l’interprétation de Madame PAILLART qui persiste à employer DON SIMONI.
De même, les actes d’État Civil ne connaissent que BONNEAU et non BONNEAU DES ROCHES. Nous expliquerons plus loin la nuance.
Émile Léonce Anne DONSIMONI
Selon l’État Civil, il naît à Paris XIIe le 15/11/1866, déclaré et reconnu par Jean Thomas DONSIMONI, 26 ans, sans profession (Sa mère Marie Anne Pauline BONNEAU, 21 ans, le reconnaîtra officiellement le 3/1/1868 soit treize mois plus tard). Ses « parents » résident Avenue Millaud, (actuellement rue Crémieux).
Émile est baptisé le 23/12/1866 à Saint Antoine des Quinze-Vingts. Il a pour parrain son oncle maternel, Léonce BONNEAU et pour marraine, sa grand-mère maternelle, Emilie Veuve BONNEAU, née DESRIBES.
Le 15 juillet 1875, ses « parents » s’unissent à la Mairie du XVIIe arrondissement de Paris. Jean Thomas est désigné comme employé et Marie Anne Pauline comme rentière. A nouveau les époux reconnaissent et légitiment Émile Léonce Anne.
Témoins :
- Charles Emile DURET, Commissaire de Police, Chevalier de la Légion d’Honneur.
- Charles Frédéric PERIER, employé.
- Nicolas Joseph ANDRIEUX, Médecin.
- Léonce BONNEAU, employé, frère de l’épouse.
- Signature de Jean DONSIMONI le 15/07/1875 (AD Paris-V4E4766-15/07/1875).
A cette époque Marie Anne Pauline vivait chez sa mère (alors que dans l’acte de naissance d’Émile les parents résidaient à la même adresse), mais Madame veuve BONNEAU n’assistera pas au mariage de sa fille. Elle requiert de son notaire la rédaction du document attestant son consentement signé le 14 juin 1875, et sera présente à l’étude le 10 juillet 1875 pour l’établissement du contrat de mariage. Dans ce contrat il est indiqué que les futurs époux choisissent le régime de la communauté réduite aux acquêts, que Jean apporte des biens composés de linge personnel et meubles meublants d’un montant évalué à 500 francs. La future épouse apporte linge personnel, bijoux, meubles d’une valeur de 5000 francs, plus une somme de 5000 francs en deniers comptants.
Aucun des deux futurs époux n’avait préalablement contracté de dettes.
Des bans de ce mariage avaient été publiés une première fois en avril 1866, soit 9 ans auparavant, et 6 mois avant la naissance d’Émile, mais ne furent pas suivis de célébration. Jean Thomas était alors désigné comme sergent au 68e de ligne, de retour de la campagne du Mexique.
Émile aurait fait ses études au Lycée Chaptal selon Clémence PAILLART.
En 1886, il se présente au 2e Bureau de recrutement militaire de Paris. On lui attribue le matricule 2750. D’après un article de presse, il n’aurait pas fait son service militaire, ayant été exempté comme soutien de famille. Ce qui ne correspond aucunement à sa situation réelle, à savoir, non marié et sans enfants [1].
En 1890, Emile est domicilié à Asnières. Il est membre de la Société d’Anthropologie. En tant qu’archéologue « attaché » au personnel de l’entreprise FROT, il procède à des fouilles au cimetière mérovingien d’Andrésy, ainsi qu’à Cormeilles en Parisis où il découvre des foyers néolithiques [2].
Vient ensuite une période de recherches dans d’autres domaines scientifiques.
En 1891, il rédige une notice relative à un avant projet de réseau central de tramways à vapeur à Paris.
A partir de cette date il présentera plusieurs brevets d’invention [3] :
- système de générateur à vapeur (1896).
- système de chaudière à vapeur et système d’aérothermogène à canalisation capillaire (1897).
- Avec DARGENTON, perfectionnements aux plots pour tramways électriques (1902).
- Funiculaire sous-marin (1905).
- Aérostat dirigeable (1908).
Le 25 juin 1898, à la requête et au profit de Jean Thomas DONSIMONI, qui bénéficie de l’assistance judiciaire, le Tribunal Civil de la Seine prononce le divorce de ses « parents ».
Puis c’est l’escalade des ennuis.
En 1901, Émile est déclaré en faillite (transports), par insuffisance d’actifs [4].
Émile perd ensuite son procès contre le Colonel RENARD. Le litige avait pour origine la paternité de l’invention du « train Renard » pour lequel un brevet avait été déposé par le colonel en 1903.
Émile, qui prétend être le véritable inventeur, exploitera un train sur route à Madagascar.
En 1908 survient le décès brutal (suicide ? crise cardiaque ?), du colonel RENARD.
En 1909, le dirigeable DON SIMONI est présenté au tout nouveau Salon de l’Aéronautique à Paris aux côtés du SANTOS et du ZODIAC [5].
C’est dans cette période qu’Émile est condamné à treize mois de prison pour coups et blessures. Mais c’est le 9 septembre 1915, que le pire se produit, alors que la France va s’enliser dans la guerre.
A Draveil où, il réside, Émile est arrêté, sur ordre du Général GALLIENI, devenu Gouverneur militaire de Paris. Selon les informations diffusées dans la presse, il est placé sous le régime de « haute surveillance » d’abord à la Santé puis à la Maison Centrale de Poissy [6]. Les articles consultés précisent que DONSIMONI menait à Draveil une vie « assez mystérieuse » n’ayant aucune relation dans le pays et ne recevant jamais la moindre visite. Vivaient avec lui une dame âgée sur laquelle « on manque de renseignements », ainsi qu’une dame BONOT (sic) des ROCHES, âgée d’une cinquantaine d’années et dont la famille est originaire d’Auvergne.
Après quelques mois passés à la prison des Invalides il aurait bénéficié d’un non-lieu et aurait recouvré sa liberté [7].
On retrouve sa trace à Gagny, où le recensement de 1926 révèle que trois personnes résident au 14 avenue de la République : Émile DONSIMONI, Madame Veuve Clémence PAILLART, et Mademoiselle Valentine ROLAND, 19 ans, ces deux personnes étant désignées comme amies. Le pavillon était précédemment occupé par des Belges, la famille MARQUETTE.
Les Gabiniens un peu curieux se posent des questions concernant ce citoyen qui semble vivre à la foi dans l’opulence et le mystère. Le chanoine MONTSANGLANT, curé de Gagny aurait confirmé avoir entretenu une correspondance avec la Cour de Belgique au sujet de ce paroissien peu ordinaire [8].
Le 4 octobre 1927 survient au domicile d’Émile le décès de Marie Thérèse BONNEAU DES ROCHES, qu’il désigne à l’État Civil comme étant sa sœur, célibataire, née à Mexico en 1865, « sans autres renseignements ».
Quinze mois plus tard Émile décède à son tour.
Le 7 mars 1931, Madame PAILLART occupait toujours le pavillon, secondée par une dame Marie Anne FLICK, née en 1888 à Hyppolyte (Haut-Rhin).
Marie Thérèse
C’est le personnage le plus mystérieux de tous. A part le certificat de décès nous n’avons trouvé aucune pièce officielle la concernant.
Émile se présente comme étant son frère.
Quand elle a rédigé le faire-part de décès d’Émile, Madame PAILLART a-t-elle réalisé que, du même coup, Marie Thérèse, la sœur, devenait bien « encombrante » pour la crédibilité de cette histoire ? Elle proposera cependant une solution au problème. Marie Thérèse aurait été adoptée par Marie Anne Pauline. Il faut toutefois remarquer qu’en 1865 Marie Anne Pauline n’avait que 19 ans.
Marie Thérèse s’appelle BONNEAU DES ROCHES. Contrairement à Émile, elle n’a été ni reconnue ni légitimée lors du mariage de Jean Thomas DONSIMONI avec Marie Anne Pauline BONNEAU. Au mieux, Marie Anne Pauline pourrait être sa véritable mère.
Marie Thérèse était célibataire. Qui subvenait à ses besoins ? Peut-être son « frère » Émile qui avait été reconnu comme soutien de famille.
A Draveil elle résidait avec Émile, mais à Gagny, officiellement elle n’occupe le domicile de son frère qu’au moment de son décès. Pourquoi a-t-elle été « oubliée » dans les recensements ?
Pourquoi, si sa mère était Marie Anne Pauline BONNEAU, le patronyme BONNEAU DES ROCHES, disparu de cette branche depuis 1802, réapparaît-il dans son identité ?
Quant à Émile, il ne pouvait ignorer la date de naissance de sa prétendue sœur. Dès lors, pourquoi dissimule-t-il des informations qui, à priori, ne semblent poser aucun problème ? Notre sentiment serait que, n’indiquant ni le lieu, ni la date, toute recherche ultérieure serait vouée à l’échec. Mais pourquoi cette dissimulation ? Émile désirait-il l’anonymat pour les parents de cette soi-disant sœur ?
Pourquoi sur la tombe ne fait-il apparaître ni le patronyme ni la date de naissance de Marie Thérèse ? Il est vrai aussi que, s’il avait une arrière-pensée, ce prénom, présenté seul, pouvait induire une connotation princière !!
Marie-Thérèse serait-elle une des descendantes illégitimes de Maximilien ?
Clémence Paillart
Elle nait le 3 février 1869 à Abbeville (Somme). Son père est imprimeur.
Le 11 avril 1890, elle épouse Marius Georges BOURGONGNE originaire de Villequier Aumont dans l’Aisne. Il est fils d’un négociant en bois.
Le père de Clémence deviendra Directeur-Gérant du journal « L’Abbevillois ». C’est un notable dans sa commune.
Le divorce de Clémence et Marius sera prononcé par le Tribunal de la Seine le 1er Août 1907. Madame PAILLART n’est donc pas veuve comme elle le prétend, et comme elle le confirme sur certains documents officiels lorsqu’elle doit renseigner sur son identité.
Au sujet d’Émile DONSIMONI, elle avance, sans réticence aucune, un certain nombre d’allégations [9], dont certaines semblent assez fantaisistes mais on doit reconnaître qu’elle est parfois dans le vrai.
Émile serait l’arrière petit fils de Napoléon.
Si Émile était véritablement le fils de Maximilien ET de Charlotte, il paraît impensable que sa future naissance n’ait pas été annoncée par le palais impérial de Mexico. Il est donc raisonnable de rejeter une telle affirmation qui présente trop d’incohérences.
Clémence PAILLART s’aventure à affirmer qu’Émile a été enlevé à sa mère, Charlotte, par des policiers français qui le garderont toute sa vie. Quelle aurait été pour Napoléon III la légitimité d’une telle action ? En quoi le fait que le couple impérial du Mexique ait un héritier concernerait-il la France ? Si un tel crime de lèse-majesté s’était produit on peut raisonnablement envisager des protestations émanant soit de l’Autriche, soit de la Belgique. Il est vrai que l’on constate la présence, en tant que témoin, d’un commissaire de police, Chevalier de l’ordre de la Légion d’Honneur, lors du mariage de Jean DONSIMONI et Marie Anne Pauline BONNEAU, mais est-ce là un fait extraordinaire ?
Toutefois on peut s’étonner aussi du peu d’enthousiasme (13 mois), mis par Marie Anne Pauline pour reconnaître Émile. Que s’est-il passé pendant ce laps de temps ?
Clémence continue en affirmant que Charlotte n’était pas folle. Or l’on sait que la pauvre impératrice avait perdu la raison, qu’elle était incurable et ce fait n’est mis en doute par personne.
Elle aurait écrit de nombreuses lettres à Émile. Il est vrai que, malgré sa démence, Charlotte était l’auteur d’une abondante correspondance, qu’elle ne signait pas toujours de sa véritable identité. Elle aurait écrit 250 lettres en 4 mois [10].
Force est de constater que le choix du texte diffusé par Clémence lors des obsèques d’Émile n’est pas innocent. On relève les expressions : « grand exemple de courage », « combattu vaillamment pour la vérité et la justice », « la couronne du juste ».
En dévoilant une supposée véritable identité d’Émile DONSIMONI, Madame PAILLART respecte-t-elle les dernières volontés de ce dernier pour faire éclater une vérité jusque là soigneusement occultée ?
Charlotte
Fille de Léopold 1er, Roi des Belges, et petite fille de Louis Philippe, Roi des Français, par sa mère, qu’elle perd à l’âge de 10 ans, c’est une princesse intelligente, mature mais orgueilleuse. Elle a beaucoup d’affection pour sa grand-mère Marie Amélie qui pallie un peu, mais à distance, le manque d’amour maternel. A 17 ans elle épouse Maximilien, frère de François Joseph, Empereur d’Autriche.
Charlotte qui est très ambitieuse, compare sa situation à celle de sa belle sœur Élisabeth (Sissi) avec laquelle elle ne s’entend guère. Elle influencera beaucoup le choix de son époux lorsque Max sera pressenti pour occuper le trône impérial du Mexique.
Par fierté elle ferme souvent les yeux sur les incartades de son époux qui délaisse souvent le toit conjugal mais elle n’en souffre pas moins. Elle est blessée dans son orgueil.
Une autre grande déception l’attend à son arrivée au Mexique. L’accueil de la population n’est pas celui qu’elle espérait. Sa nouvelle vie dans ce pays inconnu commence difficilement.
Là encore nous la retrouvons drapée dans sa fierté. Les nombreuses lettres qu’elle adresse à sa grand-mère Marie Amélie ne reflètent aucunement la dure réalité qu’elle édulcore avec brio.
A la fin de l’année 1865 les premiers signes dépressifs se manifestent. Charlotte apprendra bientôt le décès de son père Léopold, puis celui de Marie Amélie.
Elle se révolte contre Max qui décide d’adopter Iturbide, jeune mexicain apparenté à l’ancien empereur, en vue de sa succession puisque le couple impérial n’a pas de descendance.
L’abandon presque certain de l’appui de la France ne va pas améliorer l’ambiance.
A la fin du printemps 1866 elle décide d’aller plaider la cause du Mexique auprès de Napoléon III afin que ce dernier envoie des renforts et des fonds pour pouvoir continuer la lutte contre les rebelles.
Max songe alors à abdiquer mais il se heurte à l’opposition farouche de Charlotte.
Le 13 juillet elle embarquera à destination de l’Europe, sur l’Impératrice Eugénie ancré à Vera Cruz, accompagnée par le capitaine Léonce DETROYAT.
Selon Dominique Paoli, « elle a deux soucis majeurs : que Maximilien ne revienne pas à son idée d’abdication, et que surtout elle ne rate pas son bateau. ». Étrange attitude. Que cache-elle ?
Arrivée en France le 8 août où personne ne l’attend, elle parvient à forcer la porte de Napoléon III au mépris des règles du protocole, pour s’entendre dire par le souverain qu’il ne peut plus rien pour le Mexique.
Charlotte est à la fois, effondrée et furieuse. Les troubles nerveux vont s’installer durablement avec plus ou moins d’acuité. Elle vit dans la crainte de l’empoisonnement et refuse toute nourriture et toute boisson.
Deux voyages prévus, à Bruxelles et à Vienne, sont annulés.
En Septembre elle se présente au Vatican pour une visite protocolaire mais réapparait 3 jours plus tard et refuse de quitter les lieux. Elle dormira dans la bibliothèque du Vatican, mise à sa disposition dans l’urgence par un pape bien embarrassé par cette situation inédite.
Elle se retirera ensuite dans son château de Miramar. Elle y sera surveillée de près par son grand ennemi le Comte de BOMBELLES, ami et homme de confiance de Max. Il n’est pas exagéré de parler de séquestration.
Le 19 juin 1867, à Queretaro, Max est exécuté après un jugement sommaire. La nouvelle de sa mort parvient en Europe début juillet, mais l’entourage de Charlotte lui dissimule l’affreuse nouvelle.
De par son veuvage, Charlotte n’ayant plus de lien avec la Cour de Vienne, la reine Marie Henriette, épouse de Léopold II, vient la chercher pour la ramener dans son pays natal, la Belgique. Elle résidera au château de Bouchout, jusqu’à sa mort, le 19 janvier 1927, après avoir vécu 60 ans dans les ténèbres de sa folie.
Pratiquement tous les historiens s’accordent pour avancer que Charlotte était enceinte lorsqu’elle entreprit son voyage de retour du Mexique. Certains annoncent même qu’elle aurait accouché au Vatican.
Là où les avis divergent c’est sur le nom du père éventuel.
Personne ne songe à Max, car il est de notoriété publique que Max et Charlotte n’avaient aucune vie de couple. « Le mariage que j’ai fait m’a laissée telle que j’étais, jamais je n’ai refusé des enfants à l’Empereur Maximilien. »
On peut s’interroger sur cette note qu’elle écrit en 1869 : « J’ai été grosse neuf mois de la rédemption du diable, neuf mois de l’Église et maintenant je suis grosse de l’armée. Faites-moi accoucher en octobre. » [11].
Si Charlotte a eu un enfant, qui est-il et qu’est-il devenu ?
Certains ont tout d’abord affirmé qu’il s’agissait du Général WEYGAND. Cette thèse a été abandonnée.
Maximilien
C’est le frère de François Joseph, Empereur d’Autriche.
Certains historiens ont prêté à Sophie, la mère de Max , une liaison avec le Duc de REICHSTADT, (fils de Napoléon), pendant son séjour au Palais impérial de Vienne. Max serait le fruit de leurs amours. Il s’agit ici d’une autre énigme historique au sujet de laquelle nous ne nous attarderons pas.
Les deux frères ne s’apprécient guère. François Joseph est un souverain très rigide et traditionnaliste. Il prend ombrage d’une certaine préférence dont fait preuve sa mère vis-à-vis de Max. Quant à ce dernier il affiche des opinions assez libérales qui ne sont pas de mise à la Cour de Vienne
Lorsque Max demande à Léopold 1er la main de sa fille, il discute âprement le montant de la dot, ce qui sous-entend qu’il s’agit d’un mariage de convenance.
Le 26 février 1857 Max est devenu Gouverneur Général de la Lombardie et de la Vénétie. On en est aux prémices de l’unité italienne et le climat politique est très lourd.
Le couple s’installe au château de Miramar, sur la côte Adriatique, près de Trieste, possession autrichienne qui présente une grande importance en raison du débouché maritime qu’elle offre à l’empire austro-hongrois.
MAX est très réservé quant à la proposition qui lui est faite de devenir empereur du Mexique, mais les pressions exercées par Napoléon III, ainsi que par Charlotte, lui font finalement accepter ce cadeau empoisonné.
Avant de partir il devra abandonner tous ses droits à la succession au trône autrichien.
Dès son arrivée au Mexique Max a tôt fait de réaliser que ses craintes étaient fondées. Il n’est pas le bienvenu.
Il a face à lui Benito JUAREZ, Président de la République mexicaine depuis 1861. Contraint à la guerilla par l’arrivée des troupes européennes, Juarez livrera une lutte sans merci à ce nouvel empereur. Il finira par l’emporter avec l’exécution de Max, le 19 juin 1867, qui mettra fin à ce triste épisode de l’histoire mexicaine.
En 1865 Max avait pensé à sa succession qui n’était pas assurée, lui et Charlotte n’ayant pas de descendance.
Il avait adopté le jeune Augustin Iturbide, petit fils de l’ancien empereur, et l’avait élevé au rang de prince. Charlotte n’avait guère apprécié.
Il avait envisagé également l’adoption d’un de ses deux neveux François-Ferdinand ou Otto, fils de son frère Charles-Louis, Archiduc d’Autriche. Ce projet ne se réalisera pas.
Le 30 août 1866 était né à Cuernavaca un fils illégitime de Max, fruit des amours de ce dernier avec une métisse que l’on s’était empressé de marier pour sauver les apparences.
On retrouvera ce fils, Julio SEDANO y LEGUIZANO, le 10 octobre 1917, dans les fossés de Vincennes, où il sera fusillé pour espionnage au profit de l’Allemagne.
Ainsi, le sort voudra que le père et le fils soient passés par les armes.
Et les autres…
Les BONNEAU
Le véritable patronyme est BONNEAU DESROCHES.
L’ancêtre Louis Henry Antoine a deux fils. Le premier Louis Marie, né en 1791, gardera le patronyme BONNEAU DESROCHES, quant au second, Jean Anne, né en 1802, qui épousera Claudine Émilie DESRIBES, grand-mère d’Émile, il ne sera connu que sous le seul nom BONNEAU, transmis à ses descendants.
Jean Anne est receveur à cheval des contributions directes.
Les DESRIBES
C’est une vieille famille de la noblesse auvergnate.
L’ancêtre le plus emblématique est Jean Austremoine, membre du corps législatif sous l’Empire, élu au Sénat en 1808.
Dans cette famille on trouve des contrôleurs des contributions directes, des notaires, des médecins et des politiques.
Nous avons également remarqué un prénommé Louis Joseph, décédé en 1874, qui fut supérieur de l’orphelinat des frères de la doctrine chrétienne à Clermont-Ferrand [12].
Jean DONSIMONI
Il nous est permis de nous interroger sur le (ou les) auteur(s) des signatures suivantes censées avoir été apposées par la même personne.
- Signature de Jean DONSIMONI le 16/11/1866 (AD Paris- V4E 1516-16/11/1866).
- Signature de Jean DONSIMONI le 23/12/1866.
- Signature de Jean DONSIMONI le 15/07/1875 (AD Paris-V4E4766-15/07/1875).
Pierre Léonce DETROYAT
Entré dans la Marine en 1845.
Il servira au Mexique successivement sous les ordres des Généraux BERTHIER, DOUAI et BAZAINE, puis sera détaché comme sous secrétaire d’État de la Marine auprès de l’Empereur Maximilien, fonction qu’il cumulera avec celle de chef du cabinet militaire.
Il reviendra en Europe en mission spéciale, chargé d’accompagner l’Impératrice Charlotte (juillet-août 1866), avec interdiction de retourner au Mexique. La même année, à Bayonne, il épouse Hélène GARRE.
Sur sa demande, il sera mis en congé de non-activité, pour infirmités temporaires.(11)
Il s’adonne ensuite à des activités journalistiques, politiques et littéraires.
Avec Louis Andrieux, il fonde un journal, Le Jour, en 1885. Nous n’avons pu établir ( sans pour autant l’exclure), de lien de parenté entre ce Louis Andrieux( Préfet de Police de Paris de 1879 à 1881, puis Ambassadeur de France en Espagne en 1881), et Nicolas Joseph Andrieux, témoin au mariage de Jean DONSIMONI.
Charles LOYSEL
Au Mexique, appartient à l’Etat-Major de Bazaine, puis deviendra chef de cabinet de Max.
Charlotte n’est pas insensible au charme de cet officier.
Dans les nombreuses lettres qu’elle écrira, d’Europe, beaucoup seront destinées à Loysel. Elle y fait état de son amour pour lui et lui demande de venir la délivrer.
Dans son délire elle en viendra même à signer « Loysel » la correspondance adressée à ses divers destinataires.
Nous avons été fortement intrigués il y a plusieurs années, de trouver sur le net, le message d’un internaute à la recherche de son arrière-arrière grand-père.
Selon les rumeurs qui circulaient dans sa famille, cet aïeul aurait été un descendant de Maximilien. Il mentionne un enfant trouvé qui s’appelait Simon (ou Simione) MASSALIN, qui vivait à Socerga, près de Trieste (maintenant en Slovénie). Il aurait eu 2 enfants avec une femme prénommée Ana. Il fut tué par arme à feu en 1893 alors qu’Ana était enceinte de leur second fils.
Ce qui nous interpelle ce sont les appellations de Simon et Ana, ainsi que le lieu proche de Trieste. La transmission orale est source de déformations de la vérité. Alors que penser de ce témoignage ?
Conclusion
Beaucoup d’éléments très perturbants apparaissent dans ce dossier :
Marie Anne Pauline, issue d’une famille « respectable » selon les canons de l’époque, qui semble mener une vie assez libre et indépendante, sans pour autant couper les ponts avec sa mère.
Jean DONSIMONI, de modeste condition, qui parvient à épouser une femme d’un rang social plus élevé. Il faut se replacer dans le contexte de l’époque.
Les signatures de Jean DONSIMONI apposées au bas de divers documents
Dans la limite de nos connaissances, la parenté biologique, entre Émile et Marie Thérèse, nous paraît inexistante.
Le fait que, lors de son arrestation, Émile ait été placé « sous haute surveillance » peut être interprété différemment. Les insinuations de la presse évoquent l’espionnage au profit de l’ennemi. Cette mise à l’écart pendant le conflit aurait-elle eu, au contraire, un but de protection d’un personnage important ? Peut-être pour deux raisons : la première étant sa naissance ; la seconde, le fait que les inventions d’Émile étaient « sensibles » sur le plan militaire.
Nous terminerons par une interrogation : « Qui était réellement Émile Léonce Anne DONSIMONI ? »
Sources :
- Archives municipales de Gagny.
- AD de Paris.
- AD du Cantal.
- AD de Mayenne.
- AD du Puy de Dôme.
- AD de la Somme.
- Les Archives Nationales pour le contrat de mariage.
- Archives paroissiales des Quinze-Vingts.
- Archives commerciales de la France.
- Base Léonore.
- Bulletin des lois.
- Dictionnaire Contemporain des Familles Françaises.
- André Castelot, Maximilien et Charlotte, Ed. Perrin.
- Dominique Paoli, L’Impératrice Charlotte, Ed. Perrin.
- Patrick Roegiers, La spectaculaire histoire des rois des Belges, Ed. Perrin.
- Suzanne Desternes et Henriette Chandet, Maximilien et Charlotte, Ed. Perrin.
- Laurence Van Ypersele, Une impératrice dans la nuit, Ed. Quorum.
- Comtesse Reinach Foussemagne, Charlotte de Belgique, Impératrice du Mexique, Ed. Plon-Nourrit et Cie.
- Gallica.
- La Nature.
- L’intermédiaire des chercheurs et curieux.
- L’indicateur des mariages.
- Le Petit Parisien.
- En Aulnoye jadis, N° 8.
- Geneanet.
- Documentation personnelle.