Dans les premiers jours de septembre 1912, Marie-Anne Pallier s’est faite belle. C’est la première fois qu’elle porte cette robe, il s’agit d’une robe particulière : celle de son mariage, ce sera très prochainement à Lambézellec [1].
Son promis est déjà arrivé chez le photographe, le studio Inizan rue de Paris à Brest, comme une répétition de la cérémonie à l’église. Il est lui aussi tiré à quatre épingles. Jean-François Bergot réside à Lambé, mais à la différence de Marie-Anne, il n’est pas natif de la commune.
Ses parents étaient cultivateurs à Plabennec lorsqu’ils ont décidé de quitter la campagne, peut-être à la recherche d’une nouvelle vie proche de Brest, ou d’une ferme disponible pour s’y installer ? Jean-François est ouvrier au port, il a suivi les traces de son père, cultivateur-charpentier. Sans doute a-t-il envie de voir du pays, à l’âge de dix-neuf ans il s’engage à Brest, au 4e Régiment d’Infanterie Colonial [2].
En 1908 son contrat de cinq ans approche de son terme, Jean-François ne rempile pas et revient à Brest après deux années de campagne en Cochinchine, ses états de service sont très bons, le certificat de bonne conduite lui est accordé.
Ce certificat lui est probablement d’un grand secours pour décrocher un emploi aux Constructions Navales. En cette fin d’année 1912, le jeune couple s’est installé à Lambé, et Marie-Anne est enceinte…
Un petit garçon, René, voit le jour au domicile familial en septembre 1913.
La famille vit certainement des jours heureux, lorsque le 22 septembre 1914, Jean-François prépare ses affaires. Sa valise bouclée, il prend la direction de la gare, il est mobilisé.
La Direction des Constructions Navales l’a mis à la disposition de l’autorité militaire pour la durée de la guerre. Du 2e Régiment d’Infanterie Colonial à Brest, il est transféré au 44e RIC le 20 octobre où il découvre les tranchées ; les combats font rage.
À l’été 1915, sous le soleil de la Marne, une pluie de feu et d’acier s’abat sur le front. Jean-François est mortellement touché le 2 juillet à La Harazée, mort pour la France, il avait 31 ans.
René Bergot ne connaîtra jamais son père, mais suivra ses traces en devenant ajusteur à l’arsenal de Brest. Marie-Anne Pallier, veuve Bergot, s’éteint à Morlaix en 1965.