Ode aux Sapeurs du Génie
"Pendant plus de quatre ans, les armées françaises, toujours sur la brèche, dans les situations les plus critiques, ont fourni un effort gigantesque. Toutes les armes ont contribué à la victoire, mais les sapeurs du Génie peuvent être fiers du grand rôle qui leur a été confié et de la large part qui leur revient dans le succès final…/…
Les Régiments du Génie, avec leurs compagnies et leurs détachements (cyclistes, projecteurs, etc) ont été répartis dans toutes les armées. Aussi, faire l’historique des Régiments du Génie reviendrait à écrire toute la campagne.
Dans toutes les grandes batailles, dans les plus petites opérations de détail, sur tout le front français, des Vosges à la mer du Nord, de la Marne à l’Escaut, parfois même sur le front italien, nous retrouvons des sapeurs…/…
Et chaque fois ce sont de nouvelles pertes pour les Régiments (du Génie), mais chaque fois grandit l’auréole de gloire qui s’épanouira pleinement le jour de la Victoire.
De par son rôle, le Génie ne peut pas, comme bien d’autres armes, combattre par grandes unités. Bien souvent les actions d’éclat des petits détachements, les hauts faits individuels, sont passés inaperçus, noyés qu’étaient les sapeurs dans la masse des combattants, mais ils n’en ont que plus de valeur parce qu’accomplis simplement par devoir, par abnégation.
Tous les traits d’héroïsme connus et récompensés ne sont en effet qu’une bien faible partie de ceux qui sont à l’actif des sapeurs du Génie…/… A tout instant le sapeur, sans se soucier du danger, ne songe plus qu’à la mission délicate qui lui est confiée…
Qu’il vienne du Massif Central, de la Savoie, des plaines de la Bourgogne ou de la Côte-d’Or, qu’il soit cultivateur, ouvrier, homme de lettres, une fois consacré "sapeur"…, le jeune homme savait qu’il devait être infatigable, courageux, insouciant de la mort qui le guetterait à chaque minute.
Il savait que ses anciens, les pontonniers de la Bérésina, les sapeurs de Malakoff et de Sébastopol, avaient en lettres d’or gravé leur nom dans l’Histoire, il voulait simplement se montrer digne d’eux.
Et pendant quatre années sous les obus et engins de toutes sortes qui semaient la mort, bravant les intempéries, sans trêve, toujours prêts à tout, les sapeurs ont lutté, méritant de voir inscrits sur leur drapeau les noms de toutes les fameuses batailles de la Grande Guerre…"
(Préface de l’historique du 4e Régiment du Génie)
- Le Sapeur Haglon et ses compagnons
Le Sapeur Fernand Haglon, du 6e Génie, est mort le 22 mars 1917, « à La Fille Morte, boyau Armand » (Meuse). Corinne Haye nous a confié d’émouvants clichés de son enterrement au cimetière de la Maison Forestière du Four aux Moines, sur la route de la Haute Chevauchée. Elles feront bientôt ici l’objet d’une présentation commentée.
Sapes et mines
"La guerre des tranchées est un combat continuel sur toute la longueur du front. Son intensité est variable sur la ligne de feu, qui peut s’étaler sur près de 450 kilomètres. Les secteurs s’embrasent là où l’un des adversaires emporte un succès partiel, en grignotant une position qui, souvent, à peine conquise, est aussitôt perdue.
Dans cette guerre, les deux parties sont terrées et l’action du fusil et de la mitrailleuse ne peut être effective que si l’ennemi se décide à sortir de son trou et à donner l’attaque.L’artillerie a une action plus efficace, mais elle nécessite l’emploi du téléphone pour le réglage du tir, et la dépense en munitions n’est pas toujours en rapport avec le résultat obtenu.
Aussi, pour atteindre l’ennemi jusque dans sa tranchée se sert-on de petits canons et d’obusiers permettant de lancer à de petites distances des projectiles chargés d’explosifs.
Toutefois, dès l’instant où les tranchées ennemies ne sont plus distantes que d’une centaine de mètres, la vraie guerre des tranchées commence. On exécute des sapes, qui permettent de s’avancer à couvert vers l’adversaire, en faisant appel aux troupes du génie.
Tous les 30 mètres, les têtes de sape sont reliées par des parallèles. Lorsque les sapes arrivent suffisamment près de l’ennemi pour que celui-ci puisse arrêter les travaux de pelletage en lançant des grenades ou des bombes, les sapeurs creusent une galerie de mine pour disposer, sous la tranchée ennemie, un fourneau d’explosifs qui peut dépasser 50 tonnes !
Ces fourneaux, dont l’importance de la charge varie avec la profondeur et le terrain, sont en général placés sous un saillant ou sous des points particulièrement tenus (abri de mitrailleuse, fortin...) L’explosion des fourneaux donne le signal de l’attaque, en même temps qu’elle produit dans le sol des entonnoirs devant détruire les organes de flanquement de l’adversaire et faire brèche dans le réseau de barbelés qui protège son front.
Ces entonnoirs sont immédiatement occupés et fortifiés à l’aide de gabions ou de sacs que les sapeurs remplissent de terre. On y installe - en théorie - une mitrailleuse en attendant que les sapeurs relient cet entonnoir au réseau de tranchées par un boyau de liaison.
Le travail des sapeurs, lorsqu’ils creusent leurs tunnels souterrains, provoque des chocs sourds qui mettent en alerte ceux de la tranchée à faire sauter, lesquels leur envoient leurs propres sapeurs. Il est arrivé que les deux équipes se rejoignent dans un même tunnel, et s’entretuent à l’arme blanche, quelques mètres sous le champ de bataille.
Explication tirée de Histoire de la Première Guerre mondiale par Pierre Ripert.
Sur la technique de la guerre des mines, voir :
http://www.chez.com/argonne19141918/html/La%20guerre%20des%20mines%20-%20Dispositif.htm