Alors que je travaillais à la préparation du Contexte Provinces (la suite de Contexte France ), j’ai rencontré pour la première fois la sœur Sabot dans une courte mention de l’ouvrage de l’historien Jean de Viguerie, Histoire et dictionnaire du temps des Lumières (1715-1789). Sœur Sabot est mentionnée, en fin de volume, dans la chronologie pour l’année 1761. On y apprend laconiquement que sœur Sabot, membre de la Congrégation de Saint-Joseph, est décédée le 6 avril 1761 à l’âge de 108 ans et 2 mois !
- Extrait de l’ouvrage de Jean de Viguerie, page 1506.
Aucune information géographique n’est précisée dans cette courte mention, mais je sais, par mes recherches, que l’origine géographique du patronyme Sabot se situe dans l’est du Velay, l’actuel département de la Haute-Loire, autrefois situé dans la province de Languedoc (Auvergne aujourd’hui). Plus précisément, l’Yssingelais, cette zone qui, au contact des « pays » protestants voisins, a été un domaine de la contre réforme de l’Église catholique aux XVIe et XVIIe siècles, sous la houlette de la Compagnie de Jésus et notamment du missionnaire jésuite Jean-François Régis (1597-1640).
- Carte de l’Yssingelais.
Dans cet espace géographique, plusieurs foyers de familles Sabot sont attestés depuis au moins le XVe siècle, notamment à Yssingeaux, Montregard (d’où est originaire ma famille paternelle depuis au moins la fin du XVIe siècle), Montfaucon, Tence et aussi Saint-Didier.
À Yssingeaux, une famille de notaires royaux est présente depuis le XVIIe siècle :
Jean Baptiste SABOT (1659-1765) 3 E 409 (AD de la Haute-Loire).
André SABOT (1705-1768) 3 E 409 (AD de la Haute-Loire).
Joseph Marie SABOT (1785-An10) 3 E 409 (AD de la Haute-Loire).
Je ne sais pas si sœur Sabot se rattache à cette branche de notaire.
Comment l’historien Jean de Viguerie a eu connaissance de cette information sur sœur Sabot ?
Probablement par la lecture de la Gazette de France qui se terminait parfois par l’annonce des décès des personnalités de l’époque, les Grands de ce monde ou de la Cour, ou par les décès de gens modestes devenus centenaires, comme le rappelle déjà cet article : L’un de vos ancêtres a-t-il eu les honneurs de la Gazette de France ? ...
- La Gazette de France du 25 avril 1761.
Dès leur publication dans la Gazette de France, les annonces sont aussitôt reprises dans L’Almanach de la vieillesse, ou notice de tous ceux qui ont vécu cent ans et plus qui incite les centenaires, les journalistes et les curés, dépositaires des registres mortuaires des paroisses de Paris et des provinces, à signaler tous les cas connus de centenaires comme on peux le lire dans l’Avis ci-dessous :
- Avis de L’Almanach de la vieillesse.
- L’Almanach de la vieillesse du premier supplément pour l’année 1762.
Puis l’annonce du décès de sœur Sabot est ensuite diffusée dans les provinces par la plupart des autres Gazettes périodiques de l’époque :
- Affiches de Paris du 4 mai 1761.
- Journal historique sur les matières du temps de juin 1761.
- Gazette de Vienne du mercredi 6 mai 1761.
- Mercure de France du 1er mai 1761.
Mais qui était sœur Sabot ?
Grâce à Michel Guironnet qui a retrouvé son acte de décès sur Filae dans les registres de la paroisse de Sainte-Sigolène en Haute-Loire (Velay) nous savons que sœur Sabot se prénommait Claudine et qu’elle est décédée le 5 avril 1761, enterrée le lendemain, le 6, en présence de Louis Court, boulanger, et de André Quitaud, journalier, tous les deux illettrés du bourg de Sainte-Sigolène.
Sœur Claudine Sabot appartenait donc à la Congrégation de Saint-Joseph :
- Donation de 1736 conservée aux Archives de la Haute-Loire (cote B 48).
dont l’une des missions était le développement de l’enseignement populaire, grâce en particulier à l’action des religieuses de l’Instruction, les béates, ou à celle des Frères des écoles chrétiennes. J’ai d’ailleurs déjà rencontré, au cours de mes recherches, une dénommée Sabot, béate dans l’Yssingelais, et une autre sœur dans ma branche Ganivet, à Tiranges, en Haute-Loire.
Mais revenons à l’acte de sépulture de sœur Claudine Sabot. Contrairement aux annonces publiées dans les Gazettes, l’acte mortuaire indique que sœur Claudine Sabot serait décédée à l’âge d’environ 112 ans et non 108 comme précisé dans les périodiques de l’époque.
Selon Michel Guironnet, « Si la personne qui a signalé ce décès à L’Almanach de la Vieillesse a bien respecté les consignes données dans l’avis ci-dessus, elle a dû trouver sa naissance en 1653 pour mourir à 108 ans. Le curé Chilhac a été, à mon avis, un peu trop optimiste... sauf s’il la connaissait bien et que ce soit elle qui lui ait donné son année de naissance ! »
Dès lors deux questions s’imposent :
- À quel âge est décédée sœur Claudine Sabot : 108 ou 112 ans ?
Pour le savoir, une seule solution : trouver son acte de baptême.
D’où la seconde question :
- Dans quelle paroisse de l’Yssingelais est née Claudine Sabot ?
Merci à tous pour votre aide...