En 1839, l’horloge parlante n’avait pas encore vu le jour ; les chemins de fer aux horaires si précis non plus.
Cependant, le courrier devait être acheminé avec le plus de régularité possible. Il en allait de l’honneur des postiers.
Une anomalie subsistait, comme vous allez le voir, dans la mise à l’heure des horloges communales.
Une circulaire du 21 février 1839 donne la marche à suivre.
On expose tout d’abord le problème :
"L’Administration des postes vient, dans l’intérêt du service qui lui est confié, d’appeler l’attention de Monsieur le Ministre de l’Intérieur sur la nécessité de faire régler d’après un système uniforme toutes les horloges communales.
Les rapports des inspecteurs des postes constatent que ces horloges sont réglées aujourd’hui d’après un système mixte et que souvent même, on ne suit aucun système.
Ce défaut d’uniformité est cause qu’à une distance de quelques lieues, les horloges publiques présentent une différence de quinze, vingt et même trente minutes et plus.
De là, des retards extrêmement préjudiciables pour le service publique (sic) comme pour les particuliers notamment en ce qui concerne le commerce."
Et voici donc ce qui résulte de ce manque d’uniformité dans la mise à l’heure des horloges :
"En effet, la régularité dans le service des postes repose essentiellement sur l’exacte coïncidence de l’arrivée et du départ des courriers.
Tous ont, pour accomplir leur course, un temps déterminé d’après la longueur et la difficulté du parcours et aussi d’après le mode d’exploitation des services.
Ils doivent partir et arriver à heure fixe.
Si l’horloge du bureau expéditeur, réglée d’après l’horloge communale, est en retard de trente minutes sur celle de la commune du point d’arrivée, il en résulte nécessairement, alors même que le courrier n’a employé pour faire sa course que le temps qui lui est accordé, qu’il est en retard d’une demi-heure à son arrivée, et que le courrier avec lequel il devait correspondre pour la réexpédition des dépêches est parti quand il arrive.
Le même inconvénient se présente quand l’horloge du bureau d’arrivée est en avance sur celle du bureau expéditeur."
C’est évident... mais il fallait le dire. Et cela ne peut plus durer !
"Il est donc désirable que toutes les horloges des communes que traversent les courriers soient réglées d’une manière uniforme.
Quant au système qu’il convient d’adopter, il résulte des renseignements donnés par des personnes compétentes pour décider la question que c’est d’après le temps moyen et non d’après le temps vrai, que les horloges communales doivent être réglées.
Reste à indiquer comment on pourra, dans toutes les communes du royaume, se procurer facilement et d’une manière certaine l’indication du temps moyen.
Mais on a la solution :
"A cet égard, voici ce qui paraît le plus convenable.
Le Bureau des Longitudes publie chaque année un annuaire au prix très modique de un franc. Parmi les documens (sic) que contient cet annuaire, se trouve un calendrier qui indique pour chaque jour l’heure qu’une horloge, réglée sur le temps moyen, doit marquer à l’instant où le cadran solaire marque midi.
Ainsi, par exemple, pour le 20 février, on trouve page 10, dans l’annuaire de 1838, dans la colonne intitulée "temps moyen à midi vrai", le nombre 14’3", ce qui veut dire 14 minutes 3 secondes."
Et le Ministre décide donc :
"En conséquence, Monsieur le Ministre de l’Intérieur a décidé, le 18 de ce mois, que toutes les communes qui possèdent des horloges et qui sont sur les routes que parcourent les courriers de l’Administration des postes, feront la dépense annuelle de l’Annuaire des Longitudes, et que la personne chargée de régler l’horloge sera tenue, sinon chaque jour au moins plusieurs fois par semaine, de rapprocher les indications du cadran solaire de celles de l’annuaire."
Et voilà ! Les courriers de l’Administration des postes seront ainsi à l’heure, et ne souffriront plus de retard. Il fallait y penser !
Les Administrations prennent-elles toujours autant de soin dans l’exécution des tâches qui leur sont confiées ?
Source :
- D’après : En singeant et papotant, recueil d’anecdotes abraysiennes, par François Marchand (ancien secrétaire général de la commune de St-Jean-de-Braye (Loiret) - Elvire Editions - Beaugency - IDB Bellegarde - 1991 - ISBN 2-90668-34-6.