Louis est né en 1894 à Montfort, près de Rennes, Ille et Villaine. Son père Edmond était magistrat à Rennes. Sa mère, Alice Le Marchant de Trigon descendait de la famille Douville. Partie de Coutances en 1717 pour St Pierre et Miquelon, François Douville faisait partie des pionners de l’Acadie, avant que la génération de ses petits enfants soit chassée par l’anglais et revint en France dans de miséreuses conditions.
Devenu médecin, Louis a épousé en 1925 Yvonne Harscouët de Keravel, qui était l’arrière petite-fille de Robert Surcouf, célèbre corsaire malouin.
Ce couple a eu une nombreuse descendance : 6 garçons et une fille !
Louis était un homme bon et serviable, et un grand sportif.
Il était aimé de tous ceux qui avaient la chance de le connaître. Les témoignages nous ont rapporté qu’il était gai, aimait sortir et s’amuser.
Aux archives de Rennes, nous avons trouvé le détail des services et mutations diverses de sa "carrière militaires", lors de la campagne contre l’Allemagne.
Il a été incorporé en septembre 1914, il avait 20 ans. Il a servit dans une section d’infirmiers avant d’être nommé médecin auxiliaire en 1916, sur ordre du directeur du service de la santé. Il a été évacué malade en septembre 1916 et il a rejoint sa section en décembre. Puis il est passé dans un régiment d’infanterie coloniale en 1917, puis d’artillerie lourde en mars 1917 avant d’être évacué blessé le 1er août et de rejoindre sa batterie le 8 ! Il lui est arrivé souvent d’être malade, mais il a toujours rejoint rapidement son poste.
Le plus important de son histoire, c’est l’exemple de dévouement dont il a fait preuve et que nous connaissons grâce aux 4 citations militaires consignées dans les archives.
Citation du 16 septembre 1916 :
"Le 2 août 1916, un avion français venait d’être précipité dans un marais et Louis s’est résolument jeté à l’eau pour porter secours aux aviateurs. Avec l’aide de 2 autres militaires il a réussi à dégager les corps et à les ramener au rivage."
Citation du 11 août 1917 :
"Le 1 août 1917, quoique blessé par l’explosion d’un dépôt de grenade, Louis n’a pensé avant d’être pansé qu’à donner les premiers soins aux blessés, n’a pas voulu être évacué.....Modèle de courage et de dévouement"
Citation du 1 juin 1918 :
"Dans la matinée du 4 mai 1918 Louis a coopéré avec le plus grand courage à la relève rapide des blessés, n’hésitant pas à se porter en première ligne malgré les tirs des mitrailleuses et de l’artillerie ennemie."
Citation du 24 novembre 1918 :
"Faisant fonction de médecin chef de service du dixième bataillon du 122 RI, Louis n’a pas cessé pendant les mois de septembre et d’octobre de se prodiguer sans cesse au secours des personnes malgré l’incommodité des conditions de guerres, des mouvements... et il a fait preuve du plus calme esprit d’organisation dans les moments les plus critiques et assuré la relève et les soins immédiats des blessés malgré les bombardements, en faisant preuve de l’abnégation la plus absolue lors du combat du 26 octobre 1918."
Il reçu la médaille militaire.
Cet homme courageux et dévoué a tragiquement trouvé la mort le 23 juillet 1933, en voulant sauver de la noyade Edmond, son fils aîné âgé de 7 ans. Ils ont péri tous les deux.
Louis n’avait que 39 ans.
Un article de presse paru dans un journal de Rennes :
" Le docteur Barbedor bien connu des milieux sportifs de l’Ouest,
se noie à Irodouër en voulant sauver son fils qui est lui même noyé.
Notre correspondant de Becherel nous a téléphoné dimanche soir une affreuse nouvelle qui n’a pas manqué de jeter la consternation à Rennes et dans la région.
Notre ami, le docteur Barbedor, vient de trouver en compagnie de son fils, une mort brutale dans des circonstances particulièrement tragiques.
Le docteur Barbedor, accompagné de ses enfants Edmond, âgé de 7 ans et Alain âgé de 6 ans, était depuis samedi soir au château de la Ville ès Sénéchal, l’hôte de M de Laforêt, maire d’Irodouer. Dimanche dans l’après midi, le docteur Barbedor faisait une partie de canotage sur une pièce d’eau qui borde le château avec ses fils, lorsque l’aîné à la suite d’un faux mouvement tomba à l’eau. Le père, excellent nageur, sans perdre un instant, plongea pour essayer de rattraper son fils, mais malheureusement, il dû être aussitôt frappé de congestion, car il disparut lui aussi.
Les cris du deuxième enfant resté dans la barque au milieu de la pièce d’eau alertèrent l’attention des habitants du château. Il fallu toutefois attendre que l’enfant, en suivant les indications qu’on lui donnait de la rive, eut ramené la barque. On se précipita alors pour essayer de sauver les deux naufragés. Le père qui était remonté un instant sur l’eau tenant son fils, disparut de nouveau et ce n’est qu’au bout d’un quart d’heure que l’on parvint à le retirer. Mais il avait cessé de vivre. Le corps du pauvre petit ne fut retrouvé qu’une heure plus tard. Le docteur Maillard de Bécherel mandé en toute hâte, ne pu que constater les décès.
On sait de quelle estime méritée jouissait en notre région le docteur Barbedor. Actif, dévoué, très profondément cultivé et doué d’un caractère particulièrement aimable, ce jeune médecin avait donné dès la guerre, où il avait conquis la médaille militaire et plusieurs citations, la mesure de son talent professionnel et de sa haute valeur morale. Tous ceux qui ont eu l’avantage de l’approcher et de le connaître admiraient la délicatesse de son coeur et son esprit pétillant d’indulgente malice.
Le docteur Barbedor, directeur du centre d’appareillages de la 10è Région, était père de huit enfants.
Cette perte sera cruellement ressentie notamment dans les milieux sportifs médicaux et dans les milieux sportifs où notre ami prodiguait ses utiles conseils et jouissait de très fidèles amitiés.
C’est avec le coeur serré que nous nous inclinons devant ces cercueils et que nous prions Mme Barbedor, ses enfants et toute la famille d’agréer l’expression de notre très vive sympathie. "
Yvonne, qui, le 18 juin précédant avait mis au monde leur septième enfant, ne se remaria jamais et éleva seule ses 6 enfants.
L’un des garçons, Hervé, mon beau-père, est également devenu médecin.
Je trouve très émouvante la lecture d’un acte mettant en exergue le courage d’un ancêtre.
Notre Histoire de France est remplie de personnages hauts en couleurs, de saints, d’individus qui par leur vie nous servent de modèle. Mais la généalogie, au détour de quelques archives, peut nous donner en cadeau des exemples plus proches de nous, et dont nous devons nous montrer digne d’en descendre. A nous de savoir recevoir et transmettre cet héritage de noblesse d’âme.