Après les guerres de 1870, et de 1914, les foyers devaient trouver bien souvent un nouveau moyen de ressources pour reprendre une vie normale. Les femmes restées seules avaient dû se débrouiller pour subsister, et ensuite quelques-unes retrouvaient leur mari pas toujours en bon état de travailler, voire disparus. Il fallait faire face.
À cette époque, les femmes préféraient travailler à domicile si elles n’avaient pas de compétence pour travailler en usine ou dans d’autres professions plus nobles.
Après cette période de grandes difficultés, il fallait créer du travail et c’est à ce moment que les Maisons de couture Parisiennes essayaient de relancer un peu de gaieté et d’élégance dans la vie. Il fallait des accessoires de grande qualité et l’occasion était trouvée pour donner un emploi aux femmes qui recherchaient un emploi manuel.
Des têtes pensantes et innovantes eurent l’idée de relancer la fabrication de différents accessoires de mode déjà connus un peu dans le XVIIIe siècle, en atelier et à domicile, pour satisfaire la demande des grandes maisons de Couture qui essayaient de renaître.
Ces ateliers se situaient pour la plupart dans les quartiers du Faubourg Saint-Martin, des Halles et vers la Bastille, près des gares pour permettre aux ouvrières de banlieue de pouvoir y accéder facilement. Puis des intermédiaires ont eu l’ingénieuse idée de s’installer en région parisienne pour faciliter le travail et éviter trop de déplacement. Nous trouvons la trace de Monsieur Griot, demeurant à Gagny, qui avait une trentaine d’ouvrières à domicile. À Montfermeil également se trouvait un fournisseur de travail à domicile, Monsieur Denos, pour qui de nombreuses ouvrières œuvraient chez elle.
D’autres préféraient se rendre à Paris pour chercher le travail sur place et le rapporter fini dans l’atelier. C’était aussi un moyen de garder le contact avec les personnes préparant l’ouvrage. Car la préparation des tissus était faite à plus grande échelle, sur place, avec des machines. Les formes étaient faites par le découpeur. Celui-ci découpait le tissu sur un billot de plomb à l’aide d’emporte-pièces de différentes formes. Il obtenait ainsi les formes désirées : pétales, feuilles, tiges...
- Les emporte-pièces
L’ouvrière à domicile avait comme outils de petits instruments, des poinçons, des matrices et un petit four pour chauffer certains outils.
- Outils pour la fabrication des fleurs en tissus
Une grande dextérité leur était demandée, car l’ouvrière travaillait souvent pour des fleurs de toute sorte qui iraient orner les plus belles créations des grands couturiers de l’époque.
Leur travail consistait à préparer le tissu (la soie, le pongé ou la mousseline). Elle se chargeait de réaliser la teinture adéquate, puis elle préparait le trempage, ensuite l’essorage dans une petite presse entre deux feuilles de buvard pendant 40 secondes précises ! Après un temps de séchage, ces feuilles ou pétales allaient être formées.
- Le four pour chauffer
Le petit four allumé, l’outil avec une petite boule à son extrémité pour la mise en forme y était placé et l’ouvrière en appuyant dessus donnait la forme souhaitée. Pour les feuilles, c’était à l’aide d’une pince très fine et chauffée que se faisaient les nervures. Cette action se nommait le panachage et le veinage. Les fleurs et les feuilles étaient ensuite fixées et montées sur de fines tiges de métal enrobés de coton ou fil de soie.
- Les fleurs en tissus
Des heures de travail manuel effectuées avec beaucoup d’art et de minutie qui donnaient naissance à de superbes roses, gardénias, pivoines, œillets etc, qui se trouveraient ensuite sur les plus beaux atours de ces dames, ou dans de superbes bouquets trônant au centre de l’entrée d’un grand hôtel, ou tout simplement chez des particuliers. Les fleurs étaient utilisées également dans les théâtres.
Ce travail de fabrication de fleurs de soie a perduré jusqu’à l’arrivée de la guerre 1939-1945. Nous retrouvons les traces d’ouvrières : Lucienne, Louise, Denise et Suzanne Maillard, épouse de Henri Maillard déportée pour faits de résistance (à Gagny, une rue porte le nom d’Henri dans le centre de la ville).
Maintenant les fleurs de soie faites à la main sont très rares, mais quelques ateliers résistent encore à l’invasion étrangère, notamment un atelier à Paris dans le 12e arrondissement et un autre plus petit mais tout aussi efficace à Rozay en Brie (les violettes).
L’habilité de ces petites ouvrières de notre région a fait que leurs créations ont alimenté le monde entier. Elles avaient aussi la réputation d’être les meilleures en la matière et elles voulaient que la France garde toujours l’élégance parisienne.
Sources :
- Photos prises au Musée du travail Charles Peyre de Montfermeil.
- Témoignage personnel.
- Atelier de Rozay-en-brie.
- Photo d’une des ouvrières de Gagny.