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Les oubliés de Girowicze

Le jeudi 5 février 2015, par Nicole Chassaing

Parce qu’il était alsacien et que l’Alsace était alors occupée par l’Allemagne, il fut envoyé combattre sur le front de l’Est d’où il ne revint pas. Sa famille ne sut jamais où il avait perdu la vie. Sa petite fille, indignée face à ce manquement par rapport à ceux qui ont perdu leur vie, et déterminée à ce que justice soit rendue, presqu’un siècle après, entreprit des recherches et commença une inlassable quête qui lui apportera un éclairage sur le lieu et les circonstances de la mort de son grand-père, Jacques Rieg, et aboutit à la réhabilitation, par l’Allemagne de ces oubliés de la grande guerre…

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Du temps de la boucherie, juste avant sa 2e incorporation

Il était mon grand-père. Alsacien, né en 1882, il avait alors 33 ans, était père de 2 jeunes enfants de 2 et 3 ans, était boucher-charcutier à Munster. L’Alsace étant annexée à l’Allemagne depuis la défaite de la France en 1871, il était donc allemand et avait dû combattre sous cet uniforme, alors qu’il se sentait français au plus profond de lui-même. Moins de 6 mois après sa mobilisation en tant que réserviste, il fut envoyé sur le front de l‘Est, comme le furent ensuite en 1916, tous les Alsaciens pour ne pas qu’ils désertent.

Un jour, ma grand-mère reçut cette notification péremptoire : « Mort à la bataille de Girowicze, le 22 septembre 1915 ». Puis le silence ! Le silence des autorités ! Un deuil porté toute une vie. Impossible de savoir où se trouvait Girowicze.

Le temps passa. Un filet de mémoire se perpétua, refusa de disparaître...

Presque un siècle plus tard, ne pouvant me résoudre à ne pas savoir, ne pouvant me résigner à ce que le fantôme de mon grand-père erre dans les limbes de l’oubli et de l’abandon, convaincue que les morts ont droit à la dignité d’une tombe et les familles à la dignité du recueillement et du souvenir, j’entreprends alors des recherches. Cette quête durera près de 2 années parcourues d’espoirs, d’attente, d’échecs, de combats contre l’inertie, l’indifférence, les vents contraires mais aussi les intempéries, la neige, la chasse…. Mais toujours le refus de se résigner et d’abandonner.

Un message envoyé sur internet comme une bouteille à la mer trouve un écho au fin fond de la Biélorussie, auprès d’Andrej dont on ne peut qu’admirer le dévouement exceptionnel et l’abnégation totale qui apportent à cette démarche une note d’espérance sur la solidarité et la générosité humaines. Ainsi, nous savions que grand-père était mort à plus de 2000 kms de sa ville natale.

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Le site tel qu’il fut découvert
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Après 1 siècle, les restes d’ossements et d’habits des soldats
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Le site à présent
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Le site fini avec la croix et les plaques

Mon livre raconte la lutte pour sortir ces hommes de l’oubli, les rebondissements mais aussi les soutiens inattendus tout au long des étapes de cette recherche pour retrouver enfin le lieu où était mort ce grand-père et ses compagnons de détresse, leur offrir une sépulture digne de leur condition d’homme. Il me fallait œuvrer pour sauvegarder leur souvenir et la mémoire de leur destin tragique, ma manière à moi de rendre justice à la mémoire des victimes de ces folies de l’histoire.

Ce livre préfacé par Pierrette Fleutiaux, prix Fémina 1990, est écrit sans haine, sans agressivité et sans attaque personnelle. Quant au suspens, il y est maintenu jusqu’à la dernière ligne, par les quelques mots d’amour et de gratitude qui en font la conclusion. Mais surtout ne soyez pas pressé d’en découvrir la raison !

A noter : à la fin de l’ouvrage sont répertoriés toutes les adresses des sites allemands et français contactés afin d’aider d’autres personnes dans leurs recherches.

Bon de commande à adresser à l’éditeur : Jérome Do-Bentzinger, 8 rue Roesselmann, 68000 Colmar.

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Bon de commande à imprimer

Prix du livre : 15€ +3€ de frais de port.

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11 Messages

  • Les oubliés de Girowicze 23 janvier 2016 11:52, par philipp

    bonjour
    mon grand père Charles Philipp né en 1875 à Stotzheim 67
    a aussi été incorporé dans l’armée allemande et envoyé comme beaucoup d’alsacien en Russie
    en 1917 au moment de la révolution russe n’ayant plus confiance les autorités leur ont dit de rentrer chez eux .... a pied + de 4 mois de marche
    j’ai appris cet évènement il y a quelques années en rencontrant a l’occasion d’un achat dans le val de Villé une dame assez âgée dont le papa était un des compagnons de mon grand père.
    Chaque année ils se réunissaient pour commémorer leur aventure et cette dame connaissait très bien mon père qui était avec moi, leur rencontre êtait très émouvante.
    malheureusement tout le monde est maintenant décédé et je n’ai pas eu la présence d’esprit de tout noter ;
    mon papa est né en 1906 et il etait titulaire de la croix de guerre 1940 et moi je suis de la génération guerre d’Algérie et chevalier de le légion d’honneur
    comme quoi les guerres sont des belles bêtises humaines
    et que se souvenir est très, très important
    merci et bravo pour votre boulot
    cordialement

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  • Les oubliés de Girowicze 4 décembre 2015 18:20, par MAZIERES Bernard

    Bonjour

    Oh ! pas de "commentaire" ;trop banal !

    Quel travail !! Admiration !!

    Une pensée pour ce compatriote de coeur

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  • Guerre de 1914 à 1914 8 février 2015 13:42, par René Malaisé

    Bonjour,

    Mon grand-père alsacien mais parfaitement bilingue car habitant à Ste Maries aux Mines (68)ne parlait que très peu de cette époque et surtout pas du front..,
    Son frère ainé est mort en septembre 1914 à Bouconville ( 08) sous l’uniforme allemand.
    Grand-père lui même à l’issue de ses classes en 1915 s’est directement retrouvé en Russie.
    Voilà textuellement la phrase qu’il à prononcée :
    " Nous étions tous rassemblés, un ordre fusa : les Alsaciens et Lorrains, un pas en avant et nous fûmes de suite dirigés vers la Russie".
    Ce qui lui a probablement sauvé la vie.

    Concernant les décès : les archives de moins de 75 ans étant consultables, les décès sont reportés intégralement mais les lieux précis sont parfois très vagues ( sur le front près de xx), et il faudrait chercher où se trouvait (par exemple) le " Feldlazareth N° xxx" ( Hôpital de campagne )à telle date.
    Ces décès sont parfois inscrits tardivement, j’en ai trouvé en .....1925.
    1919 fourmille de blessés n’ayant pas survécu.
    Par contre les archives militaires couvrant cette période ont disparues pendant les bombardements de la 2° guerre mondiale.

    Cordialement

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    • Guerre de 1914 à 1914 15 décembre 2015 18:08, par GAGNOL Marie Anne

      Bonjour,

      Je viens seulement de lire tous les messages que je trouve particulièrement intéressants. Originaire de Schirmeck, je ne sais rien de cette époque. Dans la famille de mon père, il n’y a qu’un de ses frères qui a dû être engagé dans l’armée allemande en 1914, les autres étant trop jeunes. Dernière une photo de cet oncle,je lis qu’il s’est évadé en Belgique après avoir été blessé. C’est tout.

      Merci pour tous ces témoignages précieux.

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  • Les oubliés de Girowicze 6 février 2015 15:38, par BITZBERGER

    mon grand-père paternel (alsacien) a été incorporé dans l’armée allemande dès le début de la guerre en 1914 autant que je sache, et serait mort sur le front russe en 2015 ; mon père est né en juin 2015 et n’a donc jamais connu son père ; mon père (mort en 1969) et ma grand-mère (morte en 1967) n’ont jamais trop parlé de cela ; le nom de mon grand-père figure sur le monument aux morts de son village dans la rubrique (victimes de la première guerre mondiale) : je voudrai savoir ou obtenir des informations concernant le lieu de son décès et autres. merci à qui pourrait me renseigner. Joseph BITZBERGER

    Répondre à ce message

    • Les oubliés de Girowicze 6 février 2015 22:25, par Nicole Chassaing

      Comme je l’ai indiqué dans mon livre, je vous conseillerais si vous n’êtes pas en possession de l’avis de décès de votre grand-père de vous adresser en 1er à la mairie de la localité où il résidait. Dans les archives, vous devriez obtenir son parcours militaire et ainsi savoir où il est décédé. Ensuite, il faudra localiser ce lieu, ce qui n’est pas toujours aisé, comme je l’ai écrit. Bonne chance !

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    • Les oubliés de Girowicze 6 février 2015 17:31, par ZUMBIEHL

      Tous auront corrigé, je pense, les "coquilles" ... (1915 et non 2015)
      Je voudrai simplement confirmer, et c’est significatif, qu’en Alsace-Moselle aucun monument aux morts ne comporte l’inscription "Morts pour la patrie" ou "Morts pour la France" mais simplement "À nos morts" ou quelque chose de semblable, pour l’une comme l’autre des deux guerres mondiales.
      Je souhaite que vous aboutissiez, vous aussi, dans vos recherches !

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      • Les oubliés de Girowicze 9 février 2015 20:39, par Craon

        En effet, s’il y a un monument aux morts dans chaque commune d’Alsace et de Moselle (ce qui est généralement le cas aussi en Allemagne), il n’est jamais surmonté d’un poilu, comme souvent en France "intérieure", souvent, c’est une croix. Et pour cause, puisque tous les morts de la 1re guerre mondiale et la plupart de la seconde l’ont été sous uniforme allemand.

        Malgré tout, le 11 novembre y est toujours fêté avec ferveur devant le monument aux morts, où le maire prononce un discours (généralement préparé par le préfecture, comme partout ailleurs) rappelant le "sacrifice des poilus pour que nous soyons libres", cela devant les pompiers en uniforme (casque français modèle 1915 à 1940) et au garde-à-vous, sans que cela n’étonne ou ne gêne personne.

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  • Les oubliés de Girowicze 6 février 2015 14:38, par Craon

    Bonjour,

    Tel était en effet le sort des Alsaciens dans les deux conflits mondiaux, mais aussi des Mosellans, qui ont connu exactement le même destin.

    La question de la loyauté des Alsaciens-Lorrains à l’Allemagne s’est posée dans les deux mêmes conflits et les mêmes termes, et surtout le deuxième. C’est la raison pour laquelle ils étaient envoyés systématiquement sur les fronts de l’Est.

    Toutefois, durant, le premier conflit, c’était moins vrai, pour les raisons suivantes :
    Les gens qui avaient expressément refusé de devenir allemands ont été expulsés (en abandonnant le plus gros de leurs biens) et ont émigré vers Nancy, vers Paris ou vers l’Algérie.
    A l’inverse l’Allemagne a conduit une politique de colonisation avec l’implantation de "siedler" (=colons), au delà des fonctionnaires (militaires, administrateurs et administratifs...), avec principalement des ouvriers, des employés, des ingénieurs, des commerçants, peu de fermiers ou de commerçants. Ces "colons" connaitront le même destin que les autochtones durant le premier conflit et leur loyauté à l’Allemagne était évidemment acquise. A la fin de la 1re guerre mondiale, ceux qui ne retourneront pas vers l’Allemagne (minoritaires en Lorraine) seront assimilés au point de pratiquer le culte catholique dans les villages. Toutefois, comme ils étaient à l’origine très largement Prussiens, c’est à cette époque (1871/1918) que remonte la construction de temples protestants en Moselle (un par canton en règle générale) dans une région qui ne comptait jusque là,contrairement à l’Alsace, que des catholiques et des juifs. Les plus connus étant le Temple-Neuf à Metz et celui de Courcelles-Chaussy, ville "impériale", puisque le Kaiser y venait en villégiature tous les étés, "pour la douceur du climat" dit-on, mais aussi pour "suivre" la germanisation d’un pays qui était essentiellement roman...!

    Enfin, "l’Alsace-Lorraine", que les Allemands rebaptisèrent "Reichsland" (=Terre d’Empire), dépendait donc directement de l’autorité de l’empereur, c’est-à-dire du roi de Prusse (conformément à la proclamation de l’Empire allemand à Versailles en 1871), les autres princes n’y avaient donc pas voix au chapitre. Pour cette raison, les jeunes hommes faisaient leur "service militaire" (2 ans me semble-t-il) dans des régiments prussiens exclusivement et jamais en Bavière, dans le Hanovre ou une autre principauté constitutive de l’empire. Or la Prusse, c’était essentiellement des régions qui se trouvent actuellement en ex-Allemagne-de-l’Est, en Pologne et même en Russie !
    Tel fut le cas de l’un de mes grand-pères, qui fut "Uhlan" à Königsberg (actuellement Kaliningrad)en 1903 et qui par bonheur, et en temps que réserviste à 40 ans passés, ne fut pas en première ligne en 14/18, bien qu’ayant combattu jusqu’en 1918.
    S’il était mort au front, comme votre grand-père, je ne serais pas là à vous en parler, étant donné que je ne serais jamais né.

    Bien cordialement.

    Répondre à ce message

    • Les oubliés de Girowicze 9 février 2015 17:40, par Fister Simone

      Bonjour

      Mon grand Père, né à Metz en 1874, donc sujet Allemand,( acte de naissance rédigé dans les 2 langues)a fait trois ans de service militaire en 1894 -5 -6 et réserviste pendant deux ans encore, marié, parti avec femme et enfants en France en 1903 ou 4,a fait un an de service militaire en France, s’est engagé en 1914, à l’age de 40 ans sous une toute autre identité pour ne pas être reconnu si le cas échéant, il avait été fait prisonnier et de ce fait n’a pas été envoyé sur le Front Russe.
      Quel était le sort des familles restées en Allemagne ?
      Les hommes ayant émigrés après 1872 ont-ils été recherchés
      par les Allemands en 1914 ?

      Répondre à ce message

      • Les oubliés de Girowicze 9 février 2015 21:59, par Craon

        Les gens ayant émigré après 1872 ont été considérés comme Français par l’Allemagne qui n’était pas mécontente de s’en débarrasser, car elle gardait en partie leur bien, et d’autre part, elle voulait se donner les meilleures chances de réussir son entreprise de germanisation de la Lorraine, germanisation qu’elle a donc menée de manière assez "soft", en instaurant le bilinguisme dans la partie romane de la Moselle (noms des communes, voire des rues restant français, d’où aujourd’hui des noms bizarres comme "en Fournirue" ou "en Néxirue" à Metz) et en entérinant le fait concordataire. Cette résistance (Mgr Dupont-des-Loges au Reichstag, les instituteurs, les journalistes, les intellectuels, et le "peuple") ne se démentira jamais. D’autre part, la France et le français étaient "respectables" en particulier pour le Kaiser, plutôt épaté par cette conquête qui l’honorait comme une danseuse charmante, à tel point que son projet était de faire de Metz la "plus grande ville militaire du monde", cela aussi pour parer à la revanche française qu’il redoutait. Quoiqu’il en soit,ce projet était à peu près réalisé en 1914.... Si vous connaissez Metz, vous ne pourrez pas ne pas vous en convaincre (Hôtel de Région actuel, quartier impérial, rue Foch, etc....

        Donc pour se résumer, je ne pense pas que votre grand-père prenait un plus grand risque qu’un autre Français en combattant contre l’Allemagne en 14/18 du fait de sa naissance allemande, car l’Allemagne, dans cette boucherie, ne faisait pas de distinction entre ses ennemis, malgré (ou à raison de) ses techniques de combat discutables (gazages) défiant les lois de la guerre. Néanmoins, elle respectait, à-priori, les droits des prisonniers.

        Rien à voir dans ce cas, avec la seconde guerre mondiale, où les hommes ayant combattu pour la France en 39/40 (et nés Français, la plupart) devront combattre pour l’Allemagne, malgré les modalités de l’armistice entre Hitler et Pétain, qui normalement devaient les exclure des combats ultérieurs. Un engagement qui ne durera pas deux ans !
        Après, en cas de refus ou de désertion, c’était la mort assurée par exécution sommaire et sans procès. A défaut, c’est la famille qui partait en camp, y compris les jeunes soeurs.
        Malgré cela, il y aura quelque 10 % d’insoumis, vivant clandestins plusieurs années dans les greniers ou les forêts (sur les cartes de rationnement des autres qui les protégeaient) comme aussi nombre de Juifs ou de prisonniers russes échappés des camps. L’allemand sera la seule langue officielle, on germanisera les prénoms et les noms de villages, même de ceux qui n’en n’avaient jamais eu auparavant. Un grand-oncle, pas nazi pour deux sous, qui tentera de faire valoir sa qualité de Français par son nom et par son arbre généalogique n’y parviendra jamais (alors que c’était théoriquement autorisé). Son émigration en France refusée, il partira en camp et on a supposé qu’il y est mort, puisqu’il n’en est jamais revenu, laissant une veuve de moins de trente ans et deux jeunes enfants....
        .

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