D’après les écrits de l’Abbé Lebeuf, en 1523, le lieudit de Maison- Blanche est décrit par les Bénédictins de Saint-Maur, sous l’apparence d’une ferme. Elle appartient à monsieur Regnault le Coq. Elle est située à l’orée sud de la forêt de Bondy, sur une plaine sillonnée de veines d’eau et boisée de feuillus (chênes, hêtres, bouleaux).
Le nom de Maison Blanche lui est attribué car il faut savoir qu’à cette époque pour se situer dans les lieux il fallait trouver des astuces. De ce fait étant construite en pierre recouverte de chaux le nom était tout à fait justifié.
Quelques années plus tard à Maison-Blanche, un fermier qui se nomme Denis Coisne, entretient cette propriété appartenant à Nicolas Le Boindre.
Ce dernier par testament, lègue le domaine en 1623 à Nicolas de la Pome, secrétaire d’un trésorier du Roi louis XIII, qui améliore cette ferme décrite de la façon suivante : Propriété consistant en corps d’hostel, chambres basses et hautes, grenier au dessus, grange, volière à pigeons dessus le portail, estable, bergerie, foulerie, le tout couvert de thuiles, cour ou il y a mare et jardins , le tout clos de murs tenant de trois parts aux terres de la ditte Maison Blanche.
Le fils de Nicolas de la Pome portant le même prénom, héritant de ses parents devient le Sieur de Plainville et de Maison Blanche. Il agrandit le domaine.
Son successeur en 1707, Jean Baptiste des Chiens De Ressons, lieutenant Général d’artillerie y ajoute des terres de Chelles, Gagny, Le Chesnay, Clichy et Montfermeil.
Il s’agit maintenant d’un important domaine s’étendant sur plusieurs villages. Les seigneurs de Gagny, Monsieur de la Bouxiere, puis le Marquis Hocquart de Montfermeil prennent ombrage de son inféodation au chapitre de Saint Maur. Leurs prétentions sont vaines et, l’aveu du Marquisat de 1784 laisse « la Maison Blanche » en dehors de son recensement et cette dernière n’apparaît pas dans l’atlas de Gagny…
En 1710, Philippe II d’Orléans dit le Régent, achète cette propriété pour l’offrir à son
1er valet de chambre Ponce Coche pour services rendus.
Ponce Coche devient donc propriétaire de Maison-Blanche. Cette propriété est surtout occupée par son épouse Marie-Anne Bedaure qui n’ayant pas d’enfants, élève avec beaucoup d’amour les enfants naturels du régent.
Le lieu est sain pour faire grandir tous ces petits enfants, les bois, les prés, le tout près de cette grande demeure, car maintenant c’est devenu un petit château. Des transformations ont été faites pour accueillir dignement ses nouveaux occupants qui sont à l’écart de la Cour mais ont malgré tout du sang noble.
Le château de Maison-Blanche se situe sur la commune de Gagny. Il se présente de la manière suivante depuis l’accession de Ponce Coche.
Une cour d’honneur à laquelle on accède par une grille d’entrée et petite porte à coté.
Un peu d’architecture : de style Louis XVI, il est composé de deux étages surplombés d’une corniche entre le premier et le deuxième étage, orné d’un fronton cintré sur les façades avant et arrière richement décoré selon les armes des différents propriétaires. La corniche qui sert à séparer les différentes parties du bâtiment, est inspirée des formes antiques par sa large bande supportée par six paires de corbeaux, éléments décoratifs servant à masquer les poutres internes au moment de la construction.
Nous retrouvons également un corbeau de forme cylindrique sur le haut de chaque fenêtre du premier étage et aussi sur trois fenêtres du deuxième étage en forme de triglyphes (médaillon rectangulaire séparé en trois).
Le château se trouvant en face de la grille est élevé sur cave voutée. Un rez de chaussée. Deux étages. Un bâtiment annexe à droite avec un étage.
Du côté du parc, il existe une grande marquise en rotonde recouverte de lierre. La terrasse sous cette marquise est entourée d’une superbe ferronnerie comportant les initiales entrelacées des propriétaires.
L’entrée principale est encadrée par deux colonnes surmontées d’une pierre lisse très aplatie, appelée chapiteau dorique. Elle rappelle une fois de plus l’architecture des premiers temples grecs comme le Parthénon. Ces colonnes supportent un balcon avec à chaque extrémité un vase potelé.
Pour pénétrer dans le Château, une entrée avec un carrelage à damiers noir et blanc permet d’accéder dans la grande salle de réception donnant sur le parc. Les murs et le plafond sont décorés de pâtisserie [1]. Une superbe cheminée de marbre blanc veiné face aux portes fenêtres laissant admirer les jardins.
Un escalier de bois ciré dessert les étages supérieurs.
Dans une pièce du premier étage avec vue sur l’Orangerie, se trouve une cheminée ressemblant à l’architecture gothique flamboyant.
Cette pièce était vraisemblablement agencée en chapelle privée qui servait de lieu de recueillement pour la famille. Il faut préciser que Charles de Saint Albin devenu l’Archevêque de Cambrai (fils naturel du Régent et frère d’Angélique de Froissy devenue Comtesse de Ségur en 1718 dans cette propriété ) séjournait au Château de passage lors de ses voyages. Il gardait surement le souvenir des bons soins apportés par Marie-Anne Bédauré lors de son enfance. C’est lui qui prit possession de ce domaine jusqu’aux environs de 1723. L’archevêque était très proche de ses gens de maison et nous pouvons en trouver des traces dans les écrits des archives Communales de Gagny, (registre d’état civil) vu l’attention apportée lors du décès d’une de ses femmes de chambre âgées.
Présentation de la cheminée :
Les décorations sur chaque pilier de la cheminée
À gauche de la cour d’honneur, vastes communs comprenant : la maison du jardinier, et celle du garde, écurie pour six chevaux, remises, vacherie, laiterie, basse-cour avec bassin au milieu, grands hangars.
À coté, une grande Orangerie avec un grenier au- dessus. Cette orangerie servait comme son nom l’indique à entreposer pour l’hiver toutes les plantes exotiques venant de lointains pays et destinées à décorer le parc.
Derrière les communs, grand potager avec serres tempérées et serres chaudes et beaux espaliers. Une grande volière qui permettait de garder quelques faisans et autres volatiles sauvages échappés au coup de fusil du Châtelain.
À droite de la cour d’honneur, la Chapelle (malheureusement détruite lors de la révolution mais aucune reproduction aux archives) un peu en arrière, un petit pavillon de chasse appelé « Castel » ou « Maison neuve » édifié sur cave, avec rez -de -chaussée et deux étages, une tour juxtaposée qui devait servir de réserve d’eau. Un grand parc bien dessiné avec vastes pelouses et fleurs de saison.
Un peu plus loin un étang de deux hectares environ avec une ile nommée « Ile de beauté ». Allées couvertes, arbres d’agrément et haute futaie, bois taillis. De larges percées à travers la partie boisée forment un point de vue du château, un kiosque dans le parc, et une statue de femme.
Près de l’étang un petit édifice appelé belvédère qui servait de glacière pour que le seigneur de Maison- Blanche puisse entreposer les produits de sa chasse. En hiver, la glace était récupérée lors des fortes gelées sur l’étang, ou sur le lac du bois de Boulogne. Une petite porte existait sur le côté de la base de l’édifice pour laisser pénétrer à l’intérieur un jardinier afin d’y déposer la glace dans le sous- sol. La glace calfeutrée par des toiles de jute et des branchages en plusieurs couches se maintiendra très longtemps. Les faisans, poules d’eau, canards pouvaient attendre d’être cuisinés dans l’année, voire même à la belle saison.
- Un pavillon de pêche pour abriter les pêcheurs et leur matériel.
Le domaine de Maison-Blanche d’une superficie de 53 hectares sera entièrement clos par de très beaux murs de pierres aux environs de 1719. Des pans de murs de cette époque sont toujours visibles et en état à Gagny en 2012.
Ce château a appartenu successivement après la révolution aux familles Brodelet, Cartier-Bresson. Le domaine fut vendu pour être loti en 1923 et le Château a été acheté par une famille Italienne Monsieur et Madame Negra qui l’ont transformé en hostellerie. À la fermeture de cette dernière, le château a été acquis par la commune, en 1987.
Sources : D’après les écrits de l’Abbé Lebeuf, Histoire de la ville et de tout le diocèse de Paris, Éditions Fechoz et Letouzey 1883 et des travaux de Monsieur Charles PEYRE du Musée du travail de Montfermeil. Pour la description de l’architecture du Château renseignements fournis par la responsable des archives communales de Gagny. Les cartes postales et photos sont de ma collection personnelle. Certains paragraphes sont en vieux français et peuvent surprendre par l’orthographe.
Un visiteur insolite
Un visiteur à Gagny
Pascal demeurant en Haute-Loire a l’habitude de consulter les écrits qui paraissent sur ce magazine-web. Il a découvert ce texte sur le château de Maison-Blanche à Gagny qui était en fait le château d’un de ses ancêtres :
Le Sieur Nicolas de la Pome Seigneur de Plainville, commissaire ordinaire des guerres, secrétaire d’un trésorier du Roi Louis XIII, qui devint Trésorier des Cent Suisses et reçut le Domaine de Maison Blanche par legs en 1623 à la mort de son oncle Nicolas le Boindre (conseiller du Roi, contrôleur des Finances à Bourges) qui possédait le domaine.
Denis Coisne, fermier, était chargé d’entretenir la propriété qui était en réalité une très grosse ferme.
Nicolas de la Pome de Plainville se marie avec Anne de Boisgaultier, fille de l’honorable François de Boisgaultier, bourgeois, marchand de soie et de Catherine Ménard. Il améliora cette ferme pour en faire une maison bourgeoise appelée « château ». Le nom de château de Maison-Blanche lui sera donné en rapport à l’aspect extérieur de son édification en pierre blanche (dite pierre de chaux). Le domaine représente 440 arpents soit 200 hectares environ.
Pascal, très intrigué, ne connaissait que de nom le château, me sollicite alors afin de venir à Gagny voir cette demeure et découvrir l’histoire racontée verbalement.
La rencontre est décidée et effectuée le 30 avril 2013. Pascal put découvrir enfin ce château qui est en cours de restauration par la ville de Gagny. Il souhaitait y pénétrer, mais ne reçut pas l’autorisation de la part de la mairie à cause des travaux de réfection. Son désir ne fut pas entièrement satisfait. Il se contenta alors des explications historiques qui l’ont beaucoup intéressé.
Il parcourut le parc restant, admira l’architecture et aperçut cette superbe marquise récemment rénovée avec son sol en mosaïque reconstituée à l’identique, comme à l’époque où celui-ci était frôlé par les belles robes de ses dames des siècles derniers.
Il fut particulièrement touché par l’information sur deux petites chapelles ayant existé. L’une construite à l’époque du sieur Ponce Coche en 1710 et, certainement détruite sous la Révolution, l’autre édifiée par un nouveau propriétaire du Château en 1814 Monsieur Brodelet. Elle fut détruite vers 1930. Cette chapelle était édifiée sur le terrain du propriétaire d’un immeuble en construction qui eut un différend avec la Mairie concernant la hauteur de sa construction dont le faîtage aurait dépassé la hauteur du Château.
Pascal se rendit au lac et admira le belvédère. Il fut très surpris de voir encore des murs construits pour clore le domaine en 1719 par le Sieur Ponce Coche et toujours en état à plusieurs endroits. Il apprit la fin du domaine de Maison-Blanche qui ne représentait plus à cette époque que 53 hectares et comment il avait été morcelé par la vente en parcelles suite au décès du dernier propriétaire Monsieur Teusch banquier de profession en 1919.
Les parcelles, vendues à partir de 1923, on été transformées en propriétés privées.
Le château ayant été acheté par Mr et Mme Negra famille Italienne fut transformé en une hôtellerie sympathique, très appréciée pour l’époque, vers 1929.
En 1987 le château fut acquis par la commune.
La généalogie et l’histoire font découvrir quelque fois de surprenantes histoires… Pascal est reparti en Haute-Loire content d’avoir fait ce retour dans le passé.
- Le Blason de Nicolas de la Pome de Plainville
- D’or au pin terrassé de sinople, chargé de trois pommes de pin du champ et d’une quatrième pendante à dextre du même accompagné à senestre d’un lion à gueules contre le fût de l’arbre ».
- Le blason de Nicolas Le Boindre
- de pourpre au chevron d’or accompagné en chef de deux roses et en pointe d’une pomme de pin.