S’il est un vocable, ancien, qui revient d’actualité, vocable usité - donc un peu usé ? - et à multiples facettes, on devrait dire à champ sémantique large, c’est celui de « pays ».
Et le Charolais est vraiment un « pays ». Si la notion actuelle, de contrat de pays, en a réduit les limites, il fut nettement, disons officiellement « limité » dès 1237, par l’achat qu’en fit le duc Hugues IV de Bourgogne. Il reste plus vaste, au sens géographique, quand on en fait le portrait géologique, climatique ou économique, car on a tendance alors, à l’étendre à tout l’arrondissement de Charolles, le plus vaste du département de Saône et Loire.
Pour revenir à l’essentiel, nous respecterons l’ouvrage de Hubert ELIE, « Le Charolais dans l’Histoire Européenne » et le résumé qu’en firent, sous la direction de Michel JOURNOT, des élèves du Lycée de la Ville, pour une plaquette intitulée : « 1684, en Charolais ». Nous verrons pourquoi cette date, en fin de récit.
L’historique « Charolais » reste un « pays », modeste en ses dimensions - accordons-lui un carré, aux côtés de 40 km, un peu mordillés : un vrai timbre-poste sur la carte de France ! Modeste en ses altitudes : la Montagne ou Butte de Suin frôle les 600 m et la Loire à Digoin est encore à 220 m. Rien ne serait à citer, hormis sa race bovine, à robe toute blanche... que les plus fins palais reconnaissent comme donnant la meilleure de toutes les viandes rouges...
Et pourtant quelle aventure extraordinaire que celle vécue par cette « pastille comtale » qui, loin de toute frontière - la plus proche était alors, à près de 100 km, si on considère la Franche-Comté, terre « étrangère » et même 150 km, si on se réfère à la Suisse, fut un temps, une enclave. Et la plus européenne de toutes !
Le CHAROLAIS vers 1500. Ce que l’on vient d’apprendre en 2011
Grâce à J.P. Valabrègue, linguiste nord-charolais, qui a traduit du latin, un texte perdu de Malteste (16e s) nous avons une image inédite de ce lointain Charolais ; le livret est un quasi reportage...
Les 6 cerches de feux du Comté de Charolais communiquées par les AD21 de Dijon, en mars 2011, éclairent d’un jour nouveau le Charolais du 15° siècle. D’après les spécialistes, elles n’auraient pas encore été l’objet d’une étude approfondie. On peut définir maintenant la population de chaque paroisse et l’évolution de ces mêmes populations sur plus de 150 ans. La cerche de 1543, permettant même, de connaître les métiers et de deviner le niveau de vie de nos ancêtres, les manants de ce temps. Ces obscurs si souvent écartés, oubliés...
Les cartes de la synthèse des 6 cerches de ces 80 paroisses, seront bientôt accessibles à tout internaute intéressé par le Charolais.
Son AVENTURE DIPLOMATIQUE EUROPÉENNE, unique en France
XVe Siècle : Le Charolais entre dans la grande Histoire de France
1390, Philippe le Hardi, Duc de Bourgogne, achète le Comté de Charolais aux Armagnacs... Déjà des noms qui résonnaient encore dans les manuels de nos Collégiens, avant l’An 2000. De plus, Philippe est frère de Roi, branche des Valois... Il s’est vu confier le Duché de Bourgogne en apanage, donc héréditaire... Le Comté sera doté de ses États particuliers comme une grande province, où siègeront les délégués de sa Noblesse, de son Clergé et son Tiers état...
En 1405, Jean sans Peur, fils de Philippe, obtient de Charolles, 2000 francs pour honorer ses devoirs de tuteur des enfants du Roi. Geste banal, dans les relations suzerain-vassaux...
Mais ici, la somme si importante pour Charolles, aura une conséquence imprévisible, exceptionnelle... presque 100 ans plus tard !
En retour, Jean sans Peur accorde une faveur flatteuse à Charolles : son fils aîné aura le titre de Comte de Charolais. Titre banal que Philippe le Bon, ne portera pas mais qu’il n’oublie pas de décerner à son propre fils, Charles, le lendemain de sa naissance : 11 novembre 1433. Petit territoire donc petit titre. Mais Charles n’est pas un enfant effacé... Très vite, son caractère et ses prouesses le font désigner par son seul titre, réduit au surnom de « Charolais », avant celui plus connu de « Téméraire ». Philippe de Commynes, lui-même, en ses Chroniques, en use ainsi.
Ici, nous abrégeons la vie politique et surtout militaire du dernier Duc « Valois » de Bourgogne, Charles devenu le Téméraire. Ses excès amènent la ruine du « presque - Grand Duché d’Occident ». Sa mort sous les murs de Nancy le 5 janvier 1477, réjouit Louis XI et pousse Marie, sa fille unique, à l’exil. Elle trouve à Wien, et le refuge et l’époux. Le plus puissant souverain d’Europe ! La dot énorme qu’elle aurait pu lui présenter, est bien réduite : Flandre et Pays-Bas et une moitié seulement de la Bourgogne, la Comté, dite Franche-Comté... Et en 1499, Maximilien obtient que Charles VIII, lui restitue le Charolais, dot personnelle de sa jeune et déjà défunte épouse. Elle était Comtesse de Charolais, bien entendu !
Ainsi, le Comté de Charolais devînt-il autrichien. En 1477 et 1478, il y eut une brève « mutemaque » (mot hollandais francisé ), rébellion menée par un Seigneur de La Guiche qui visait à soustraire notre contrée, à l’armée et à la fiscalité de Louis XI... Ce mouvement moins violent que chez les Comtois, traduisait la même frayeur suscitée par l’« Araigne ».
Écrire que les Habsbourg d’Autriche ne sillonnèrent jamais le Charolais, serait manquer de précision. Ils firent visiter notre Comté par une mission « administrative et fiscale » Luxembourgeoise dans l’été 1500. Une lettre des AD 25, à Besançon, nous révèle encore la pose, en 1542, d’un vitrail « aux escussons de l’Empereur », dans la verrière de l’église St Nizier de Charolles...
XVIe siècle : « Au cœur de la diplomatie européenne ! » (Hubert ELIE).
Longtemps, en la Cité du Téméraire, il fut entendu que ni Autrichien, ni Espagnol, n’atteignît jamais nos terres charolaises. Et pourtant dès 2008, la rectification s’imposa comme nous venons de le prouver. La nouvelle suzeraineté, quant à elle, Madrid la revendiqua, de 1506 à 1684. Ses Archives Royales en font foi !
Revenons à Marie de Bourgogne, réfugiée ô combien protégée, à la Cour de Vienne. De son hyménée impérial, naissent, Philippe (le Beau) puis Marguerite (d’Autriche). Quand ce jeune et bel Archiduc se marie, en 1504, il devient Roi d’Espagne (sous le nom de Felipe 1er) et emporte « virtuellement » ses fiefs français, aux mêmes archives... Dont le modeste Comté de Charolais.
Dans la série des abondantes possessions de la couronne d’Espagne, on aurait pu croire que la petite « pastille comtale » serait tombée aux oubliettes de l’Histoire. Que nenni ! Plusieurs traités internationaux vont mentionner, en des alinéas discrets, mais néanmoins réels, cette revendication permanente des Rois d’Espagne et de Navarre, même devenus Empereurs, comme Charles Quint, de retrouver cette terre de leurs ancêtres qu’était encore le Comté de Charolais, puisque dans le long ruban de leurs titres de possessions, il fut toujours ajouté « Comte de Charolais » !
Et les habitants dudit comté, ces modestes villageois répartis en 83 paroisses, que virent-ils comme modifications ? Certainement peu de choses... On dit que, certains, à Charolles, tentèrent de « jouer » sur la dualité de suzeraineté, car fiscalement et judiciairement, ils relevaient de la Franche-Comté autrichienne devenue espagnole. En réalité, chaque fois que le Roi de France reconnaissait l’enclave dans une signature diplomatique, il s’empressait, dès le retour au calme, d’envoyer des agents assermentés, vérifier que tout continuait comme auparavant ! Ce qui obligeait son adversaire castillan à reformuler la même précision possessive, à chaque traité suivant. Et au même titre que tout autre contrée acquise par une guerre...
Et là, ce sont les traités de Senlis (1493) de Noyon (1516) de Madrid (1526) de Cambrai (1529) de Cateau-Cambrésis (1559) d’Aix la Chapelle (1668) et de Nimègue (1678) pour les plus importants. Tous traités qui impliquaient les souverains les plus influents du moment, qu’ils soient d’Espagne, d’Autriche, de Hollande ou les Princes Allemands du Saint Empire.
1684. La fin de cette aventure diplomatique
Enfin, en 1684, un événement peu glorieux va éteindre cette « braise » qui couvait ainsi depuis 1477, soit 207 ans !
Le prince de Condé ayant militairement, contre le Roi de France, rendu service au Roi d’Espagne, celui-ci reconnut en 1659, lui devoir 600 000 écus d’or. Comme le paiement total tardait vraiment trop, la famille de Condé obtint du Parlement de Paris en 1684, l’extinction de cette dette, par la confiscation à son profit, du Comté de Charolais, dernière propriété espagnole sur le sol de France et de valeur équivalente. Qui plus est, sur le sol bourguignon dont un prince de Condé était gouverneur, en ce dernier quart de siècle.
Maintenant, si vous cherchez sur votre atlas historique, vous verrez un tout petit « timbre » de couleur, au cœur de la France des XVIe et XVIIe siècles, si petit que bien peu de lecteurs se posent la question de savoir ce qu’il fait ici.
Et si un jour vous traversez Charolles, ne cherchez pas indéfiniment, car de souvenirs ibériques, il n’y en a pas... Quoique, à l’ombre de la Tour du Téméraire, rien ne vous empêche alors, de laisser aller votre imagination, en savourant... un téméraire... par exemple.
Encore une autre énigme ?
Notre petit Comté aurait pu n’être que le héros de cette originale Aventure Diplomatique si un dernier mystère ne venait susciter de nouvelles questions.
En février 2009, les archives parisiennes du Ministère des Affaires Étrangères nous avertissent que le traité de Nimègue qu’elles gardent précieusement, recèle un ajout secret ! Si secret que personne n’en avait entendu parler depuis 1678. Et que cet ajout signé de la main - même de Louis XIV, rendrait le Charolais, non au Roi d’Espagne, non au Prince d’Orange, Stathouder des Provinces Unies mais au Comte d’Auvergne ! Pourquoi cette ultime fantaisie qui ne fut jamais appliquée ?
Plus sérieusement... Qui pourrait nous expliquer, pourquoi ce si petit territoire, ne fut jamais oublié alors que les Grands de cette Europe-là, avaient bien d’autres sujets de préoccupation ? Quelle lignée de discrets diplomates n’oublia jamais, en plus de 200 ans, notre si petit territoire, au Cœur d’une Europe sans cesse remaniée ?
Les EUROCHAROLAIS
Leur histoire :
Un groupe d’Internautes répartis sur les 7 pays concernés par l’AVENTURE DIPLOMATIQUE EUROPÉENNE. Créé lors de l’enquête Européo- Historico- Biblio- Pédagogique, en septembre 2007, ce Groupe - « EuroCharolais » en un seul mot soudé ! Gage du respect de solidarité et d’égalité entre ses correspondants issus des 7 pays, le néologisme est volontairement exclusif ! - fédère des Correspondants qui ont accepté d’aider au moins une fois, l’enquête à propos des livres scolaires en usage dans chacun des 7 pays, lorsque des chapitres évoquent l’État Bourguignon au 15e siècle ou l’Empire de Charles Quint au 16e siècle.
Ces internautes nont aucun engagement contractuel, les uns vis-à-vis des autres, mais ils admettent la courtoisie citoyenne au sein de tout dialogue eurocharolais ; ils n’ont aucune cotisation ; ils acceptent de rester EuroCharolais et peuvent demander à quitter le Groupe, à tout moment. Ils ont été inscrits parce qu’ils avaient à un moment, accordé « un coup de pouce » (ex : une photo, un décryptage, un texte, une idée...). En décembre 2011, ils sont une trentaine.
Les 6 autres pays concernés autour de la France : L’Autriche dont l’Archiduc fut le premier nouveau suzerain, la Belgique qui garde tant de souvenirs bourguignons, l’Espagne qui ne cessa de vouloir recouvrer notre petit Comté, le Luxembourg qui donna le premier « enquêteur officiel » de l’Archiduc, les Pays-Bas qui reconnaissent devoir plusieurs structures administratives aux Bourguignons et la Suisse, toute proche, qui accepte d’exposer, depuis 2008, le « Trésor de Bourgogne » saisi à l’armée du Téméraire, voici plus de 500 ans...
Leurs actions déjà menées
L’Enquête Européo-Historico-Biblio-Pédagogique a permis de démontrer que cette « Aventure » apparaît dans tous les atlas des 7 pays et dans presque tous les manuels scolaires qui évoquent les 15e et 16e siècles, dans les 7 pays. La nuance qui distingue, s’établit à l’importance accordée par chaque programme scolaire qu’il soit national ou régional pour la Belgique, l’Espagne ou la Suisse.
La demande parfois exaucée de rectifier les erreurs relatives à l’Empire de Charles Quint, lorsque l’éditeur des Guides Touristiques Verts, Bleus... « oublie » le Charolais. Les précisions apportées par nos Amis EuroCharolais des 6 autres pays, pour l’un des 10 traités de « l’Aventure » ou sur l’un des acteurs de l’Aventure.
Des directions de recherches historiques nouvelles qui après avoir acquis les copies originales des 10 traités, s’attachent à sortir des fonds d’archives des documents révélateurs de ce passé si exceptionnel qu’il suscite trop souvent beaucoup d’incrédulité. Les causeries lancées fin 2011 qui, en chaque ville ou village charolais, pourront créer un certain intérêt pour ce passé charolais si original, puisque les « cerches » s’adaptent parfaitement à l’histoire locale de chacun.
Leurs vœux
Il reste 2 mystères à résoudre :
Qui pendant 2 siècles a réussi à glisser la présence du Comté de Charolais, à la table des négociations internationales, alors que le Charolais est minuscule ?
Où est le récit du Voyage de Jo Wouters, cet homme qui accompagnait le Luxembourgeois François de Busleyden, envoyé en mission administrative par Maximilien d’Autriche, en Franche-Comté et qui aurait visité le Charolais dans l’été 1500 ?
Comme le « Trésor de Bourgogne » gardé par les Suisses lors des combats de Morat en 1476, a été présenté en 2008 à Berne, en 2009 à Bruggen et en 2010 à Wien, les EuroCharolais souhaitent que ledit Trésor soit un jour, présenté à Dijon.
Ils souhaitent encore que Charolles soit désignée « filleule de Dijon » pour que Charolles obtienne le label (à créer) « Cœur d’Europe ». Avec ses 80 autres paroisses charolaises, elle a été le seul exemple, dans toute l’Histoire de France, d’une enclave qui aura vécu une telle Aventure Diplomatique Européenne.
Pour que leurs vœux soient pris en compte, ils imaginent un ou des jumelages avec des Cités équivalentes à Charolles et pourquoi pas, un voyage EuroCharolais vers ces autres cités qui gardent un peu de leur histoire locale.
Enfin, les premières causeries « A.D.E. + cerches locales » connaissent un succès encourageant, en cet automne 2011. Dix sont déjà prévues pour ce printemps 2012... Le thème « Les EuroCharolais » aurait-il déjà, le vent en poupe ?
Et désormais un livre :
L’aventure européenne du Charolais
L’aventure diplomatique européenne du comté de Charolais commence en 1390. Elle rebondit avec la disparition de Charles le Téméraire en 1477. Ce livre présente l’enchaînement (digne d’un feuilleton diplomatique) qui fit que le comté du Charolais fut, aux XVIe et XVIIe, siècles sur les tables de négociations de douze traités internationaux. Des rois, des reines, deux empereurs, des drames et beaucoup de pièces d’or en furent les guides, le tout sans intervention d’aucune armée. Et pourtant, quelle aventure jusqu’en 1684 !… Un cas unique dans l’histoire de France pour une petite enclave territoriale éloignée des frontières.
Pour tout renseignement : Fernand LAURENT, coordinateur des EuroCharolais à Malessard, 71120 Changy près Charolles. fernand.laurent[arobase]wanadoo.fr
L’auteur, Fernand Laurent, est Brionnais d’enfance et Charolais d’adoption. Ancien professeur au collège public de Charolles, il a présidé les fêtes cantonales du Tricentenaire de 1684 et celles du Bicentenaire de la révolution de 1789. Aujourd’hui à la retraite, il a repris ses recherches sur cette aventure européenne méconnue. Avec les internautes de son G.7, il a tissé depuis 2007 des liens de sympathie partagés avec les six autres pays concernés par cette aventure. Ses travaux sont uniques et inédits, ils mettent à jour une passionnante et très surprenante histoire du Charolais.