Elles ne pourraient plus paraître à notre époque car une directive européenne [1] réglemente la pratique de la publicité dans le domaine médical. La loi française, du 18 janvier 1994, transpose en droit français cette directive en la rendant toutefois un peu plus restrictive.
Le premier article de cette loi définit la publicité médicale : « On entend par publicité pour les médicaments à usage humain toute forme d’information, y compris le démarchage, de prospection ou d’incitation qui vise à promouvoir la prescription, la délivrance, la vente ou la consommation de ces médicaments, à l’exception de l’information dispensée, dans le cadre de leurs fonctions, par les pharmaciens gérant une pharmacie à usage intérieur. »
La directive européenne interdit toute publicité auprès du public donnant des indications thérapeutiques pour :
- la tuberculose,
- les maladies sexuellement transmissibles,
- les autres maladies infectieuses graves,
- l’insomnie chronique,
- le diabète et autres maladies du métabolisme.
La loi, quant à elle, précise :
- La publicité ne doit pas être trompeuse ni porter atteinte à la protection de la santé publique.
- Elle doit présenter le médicament ou produit de façon objective et favoriser le bon usage.
- Elle doit respecter les dispositions concernant le résumé des caractéristiques du produit ou les mentions légales.
- La publicité destinée au grand public n’est pas autorisée pour les médicaments soumis à prescription médicale (à l’exception des campagnes pour les vaccins ou relatives à la lutte contre le tabagisme).
- La remise d’échantillons gratuits, exclusivement réservée aux professionnels habilités à les prescrire ou les délivrer, est réglementée [2] .
Après ce rapide tour d’horizon sur l’aspect législatif actuel, nous allons examiner l’ensemble des publicités médicales contenues dans le journal Le Nouvelliste du Morbihan du samedi-dimanche 21 mars 1909 en les classant par catégorie.
La première publicité concerne un médicament pour soigner la tuberculose, l’Elixir Dupeyroux. C’est le docteur Dupeyroux de la région parisienne qui s’appuie sur la guérison de madame Emmanuelle Lardeux d’une tuberculose pulmonaire pour vanter les mérites de son élixir vendu dans des pharmacies à Vannes et à Auray.
La deuxième publicité est encore plus surprenante car c’est un appel à tous les malades « même réputés incurables [avec] paiement après guérison » pour tester « la médecine naturelle (électricité, radiations, eau, plantes, hygiène) » pour guérir d’un nombre considérable de maladies telles que : tuberculose, maladies de poitrine, asthme, rein, foie, vessie, estomac, peau, intestins, anémie, rhumatisme, goutte, gravelle, vices du sang, nerfs, impuissance, neurasthénie, paralysie, etc. Ce qui est encore plus étonnant, c’est le mode consultation. Il suffit décrire au Président du Comité Médical de la Médecine Naturelle en lui donnant des détails sur sa maladie et le malade reçoit alors par courrier les résultats de la consultation qui de plus est gratuite.
Une autre publicité présente elle aussi le médicament miracle car elle annonce « des milliers de guérisons rapides et radicales obtenues dans les cas les plus rebelles » avec des pilules appelées « Pommade de Larcade de Tarbes ». Ces pilules sont fabriquées par un pharmacien-chimiste de Tarbes qui les vend par correspondance au modeste prix de 1,65 F. Sa publicité précise que ce médicament est efficace et ceci dès les premiers jours contre : « Eczémas, pelade, dartres, chute des cheveux, pellicules, démangeaisons, psoriasis, acnés, herpès, sycosis, boutons, taches de rousseurs, glandes, rhumatismes, plaies des jambes, hémorroïdes, tumeurs, maladies contagieuses et tous les vices du sang ».
Trois publicités ventent les grandes qualités de sirops contre la toux et la coqueluche. C’est ainsi que l’on trouve le docteur Bodélio qui indique que son sirop guérit en 24 heures « des rhumes, bronchites, catarrhes-inflenza et grippes ». Par ailleurs, une publicité préconise « le vrai remède pour guérir la toux » le « sirop des Vosges Cazé » et il est lui aussi très efficace contre les mêmes mots que ceux guérit par le sirop du docteur Bodélio. Mais cette dernière publicité va encore plus loin car elle précise que ce sirop guérit « plus sûrement que tous les autres » et qu’il faut faire attention « de n’acceptez rien d’autre car rien ne saurait produire le même effet ». La troisième préconise le « coklal » contre la coqueluche et précise en s’adressant aux mamans que c’est le seul médicament qui guérit de cette maladie.
Trois publicités sont encore plus surprenantes car l’une préconise un système qui permet de guérir des hernies : l’appareil « Glaser ». Cette publicité n’est pas affichée par un médecin mais par l’inventeur de l’appareil, monsieur Glaser.
L’autre offre la possibilité de guérison par la prise « des gains de Sully » des états dépressifs et des coups de fatigue et dans ce cas, ce sont des pharmaciens de Lorient et Pontivy qui conseillent ce produit.
La troisième est une petite publicité d’un pharmacien de Paris proposant contre 1.5 F l’envoi d’un almanach et d’une boite de « pilules Suisses » pour soigner « les maux d’estomac et la constipation ».
Les problèmes dentaires font aussi l’objet de publicités. Une personne préconise des « boulettes dentaires » contre « les maux de dents » et des dentistes eux aussi font de la publicité pour attire la clientèle dans leur cabinet.
Les dernières publicités relevées en rapport avec la santé concernent la qualité de l’eau qui préconise l’utilisation de filtre Berkefeld pour obtenir une eau stérilisée ou l’amélioration de la poitrine des femmes avec les « Pilules Orientales ».
La lecture de ces publicités montre que l’on a fait d’énormes progrès dans ce domaine pour l’information du public. Et c’est heureux ! Ces publicités se servaient de la crédulité des gens en ce début de XXe siècle et de leur manque de connaissances dans le domaine médical pour leur venter des produits qui n’avaient probablement souvent qu’une efficacité limitée.
La publicité médicale avait une grande place dans le journal, environ 50 % de la totalité de la publicité. Les encarts publicitaires étaient surtout basés sur un argumentaire pour convaincre quitte à utiliser des formules parfois mensongères. Il y avait peu d’images, parfois un dessin et très rarement une photographie, toujours en noir et blanc. Le nom des personnes renommées était quelquefois utilisé pour donner du « poids » à une publicité comme dans le cas du sirop du docteur Bodélio.
Les temps ont bien changé car actuellement dans la presse quotidienne, on ne trouve plus aucune publicité à caractère médicale et les publicités existantes sont surtout orientées vers les produits tels que le mobilier, la nourriture, les supermarchés, etc., avec peu de texte et en s’appuyant sur des images et de la couleur.