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La peste menace Beaumont

Une ordonnance abbatiale (18 septembre 1502) : autour d’un exercice de paléographie...

Le vendredi 4 octobre 2024, par Jacques Pageix

1- Le document

En marge :

Ordonnances
faictes concernant
la peste (écriture du XVIIe)
J(es)us maria
Or oyes or oyes que l on vous fait /
assavoir de par madame

Par ordonnance de monsieur le Chastellain du d(it) /
beaumont Et a la Requeste du procureur fiscal /
du d(it) beaumont je Guill(aume) de la porte sergent ordinaire /
de la d(ite) Justice faicz Inhibicion et deffense a tous de /
quelqu estat et (con)dicion qu ilz soient demourans dans /
la justice du d(it) beaumont qu ilz n ayent entrer es /
ville de Clermont montferrand thyart bilhon villages /
de Chamaliere ceyrat clamensat Romaignat aubiere /
et autres lieux Infectz ou suspectz de peste ne frequenter /
avec les habit(ants) es d(ite)z villes et villages Et ce sur /
peyne de esmende arbitreyre autrement estre /
pugnis corporellement ainsi que Raison vouldra.

Aussi en ensuyvent les Inhibiicions autrefoicz /
faictes ce faicz en mandement a Ja(c)ques Chivalier (Jacques Bernard chevalier, l’un des élus de 1500) ses fame /
famiylhiers et domestiques Jacques Ronzier ses fâme /
famylhiers et domestiques pi(er)re bontemps ses fame /
famylhiers et domestiques / p(ier)re Saurel ses fame
familhiers et domestiques Et la vefve de /
anthoine argellet et ses domestiques qu ilz ayent /
a vuyder et Incontinent et sans delay le lieu du d(it) beaumont /
Et ce sur peyne d esmende arbitraire Et Intimacion /
que s ilz ne obeyssent es p(rése)ns (com)ma(n)dement sera p(ro)cede /
a les fere vuyder Realement et de fait ains(i) q(ue) Raison /
vouldra.

Parelhem(en)t fait le (com)mandement a tous les susdits qu ilz /
ayent a mener au pourcher leurs pourceaulx /
et leur bailler garde en telle fasson qu ilz ne demeuroi(en)t /
de jour dans le d(it) lieu de beaumont et qu ilz ne portent /
preiudice es vignes et autres heritages du d(it) beaumont /
et ce sur poine (peine) de confiscacion des d(its) pourceaulx.

Oultre l on fait c(om)mandem(en)t es dessus d(its) qu ilz ayent /
a fermer et estacher leurs chevres et qu ilz ne les laissent /
aller hors sur payne d esmende et Intimacion que sy /
l on trouve les d(ites) chevres l on p(ro)mect aus d(its) habit(ant)z les tuer /
Et aussi que ung chacun ayt a nectoyer les femyers et Im /
mondices estant dans la d(ite) ville et sur poyne d esmende /
Et cella l a fait assavoir de p(ar) madame sur les d(ites) /
personnes fait et publiees cetz pre(sen)tes p(rese)ns les esleus /
du d(it) beaumont et plus(sieurs autres habit(ant)z lexviiie jour /
de septembre l an mil cinq cens et deux.

Bosse N(otaire) greff(ier)"

AD 63 Fds de Beaumont 50H3-4, F°287

La page de garde du registre dans lequel se trouve cet acte porte une belle lettrine :

Sa transcription est plus aisée :

« C’est Le papier
et Registre ordinaire
de la Justice temporelle de la ville de
beaumont , par Religieuses damesmesdames
abbeesse et couvent du dit beaumont estans
Religieuse dame dame marie de la Fourest
par la grace dedieu abbeesse dudit beaumont
venerable et Scientificquepersonne monseigneur
maistre pierre Usson Licencie en loix castellain
et Juge ordinaire du dict beaumont, maistres
Pierre acgier notaire Procureur Fiscal et hugues
bosse aussi notaire greffier de la dicte court Pour
mesdictes dames Lequel a este commance Le
Jeudi Sixiesme Jour de Jung L an mil Quatre
cens Quatre vingtz et dix neuf et finy le seze
fevrier Mil cinq centz et dix »

2- Contexte et commentaires

Située aux portes de la capitale auvergnate, Beaumont, ou « Beaumont lès Clermont » comme on l’appelait à cette époque, était une petite ville fortifiée, construite autour de son abbaye bénédictine de Saint-Pierre. Dans le fonds d’archives de ce monastère, on trouve des actes de toutes natures : lièves, terriers, registres de justice (où j’ai trouvé ce document) etc. En particulier, une liève, datée de 1543/46, utilisée pour restituer le parcellaire cadastral du bourg, a permis d’évaluer sa population à 1300 âmes (j’ai reconstitué les parcellaires cadastraux de 1790, 1543 et 1426) [1].

L’abbesse de Beaumont, Marie de la Forest, exerçait son droit de haute, moyenne et basse justice. Les signes tangibles de l’autorité seigneuriale, qui n’étaient pas seulement symboliques, se trouvaient d’ailleurs là pour le rappeler : le pilori, placé devant la porte Réale, et les fourches patibulaires, dressées à l’emplacement de l’actuelle clinique de la Châtaigneraie...

Beaumont avait un Corps Commun avec deux élus nommés pour une année à chaque fête de la Saint Jean-Baptiste (parfois à la Toussaints). Lorsqu’une nouvelle abbesse prenait possession de son monastère, les élus et les habitants l’accueillaient selon un cérémonial immuable : Il l’attendaient à l’entrée principale du bourg, la porte Réale, et lui présentaient les clés de la ville en lui jurant obéissance et fidélité. En retour, l’abbesse promettait de préserver leurs privilèges.

En 1502 Jacques Mège Lhonard (Léonard) et Anthoine Demezes (de Mezet ou de Mezeix) dit Grasset étaient ces deux élus, et Michel Chaptard était le collecteur chargé de prélever les impôts royaux, de même que les subsides nécessaires pour financer les travaux, et la taille de la Toussaint, ou taille abonnée ; à Beaumont, cet impôt seigneurial, prélevé tous les ans à la Toussaint (d’où son nom), ne s’élevait qu’à 6 livres tournois (le montant variait notablement d’une localité à l’autre, pouvant aller jusqu’à 40 livres. Un montant peu élevé comme à Beaumont serait une marque d’ancienneté).

Beaumont ne fut manifestement pas doté d’une charte de franchise et cela peut être lié, à mon avis, au fait qu’il s’agissait d’une seigneurie ecclésiastique. Les circonstances et les conditions dans lesquelles les seigneurs laïques accordèrent généralement des libertés à leurs sujets, libertés notifiées dans une charte de franchise, étaient ici de nature différente. On retrouve toutefois à Beaumont la plupart des caractéristiques d’une telle charte, les obligations réciproques étant quasiment analogues. Les libertés municipales acquises constituaient assurément un état de fait très ancien. Les habitants avaient comme on l’a dit la faculté d’avoir un corps commun avec deux élus, (à partir du XVIIe siècle, il y aura quatre consuls), qui convoquaient les assemblées dans leur « maison du Saint-Esprit » pour délibérer. En revanche, certaines prérogatives seigneuriales, étaient jalousement revendiqués par l’abbesse, ce qui fit l’objet de nombreux conflits et procès. L’une de celles-ci, le droit de noce, sur lequel on peut consulter la notice consacrée au mariage à Beaumont, provoqua parfois des situations pour le moins cocasses...(voir mon article "Le mariage à Beaumont, à propos d’une sentence abbatiale")

Beaumont était bien défendue derrière ses enceintes qui s’appuyaient sur les bâtiments de l’abbaye bénédictine de Saint-Pierre, eux-mêmes fortifiés. Aux élus ainsi qu’aux « commissaires aux réparations » désignés à cet effet, était confié le soin de les maintenir en bon état [2].

Une première enceinte, de forme oblongue, datée du début du XIIIe siècle, abritait le bourg de Beaumont le Puy avec sa paroisse de Saint-Pierre dont les habitant partageaient l’église avec les moniales qui se réservaient le choeur. Elle avait trois portes : la porte Réale déjà évoquée, la porte Basse et la porte du Terrail qui ouvrait sur les quartiers de La Rivière.

Une deuxième enceinte, de forme rectangulaire, construite probablement au XVe siècle, s’appuyait sur la précédente et protégeait les quartiers de Notre-Dame de la Rivière, qui avaient leur propre église paroissiale, flanquée d’un beffroi. Ses deux portes étaient la porte de l’Olme et la porte du Chaufour.

Au pied de la façade méridionale du monastère sur laquelle s’appuyait l’enceinte primitive, on devinait encore la vieille basse-cour qui avait servi de refuge aux habitants de la Rivière avant la construction de leur propre enceinte. J’aime à croire que le Beffroi de Notre Dame de la Rivière leur servait alors de tour de guet et qu’ils courraient se réfugier dans la basse-cour au moindre danger signalé par le son du tocsin...(cf "Beaumont, essai d’histoire urbaine", Jacques Pageix, 1982, BSHA, chapitre consacré au Moyen-Âge).

Ces enceintes servaient bien sûr à protéger les habitants des gens de guerre qui parcouraient alors la région et malheur aux villes et villages occupés par la soldatesque qui vivait de rapines au détriment de l’habitant...(cf "Nos ancêtres, le service militaire et les guerres")

Elles avait aussi, hélas, la triste fonction de faciliter l’expulsion des personnes infectés ou soupçonnés de l’être, tout en interdisant aux pestiférés de s’introduire dans le bourg. Les suspects ou « infects » étaient relégués dans des cabanes ou dans des granges situées à l’extérieur de la ville, véritables mouroirs où la plupart finissaient leurs jours...

Ces épidémies affectaient des populations déjà touchées par une mortalité élevée -notamment chez les enfants- et l’espérance de vie pour les survivant n’excédait pas une quarantaine d’années, à quelques exceptions près : par exemple, les témoins d’une enquête faite en 1494, choisis pour leur grand âge, avaient près de 80 ans...

Il n’y a donc pas lieu d’être surpris, lorsqu’on examine les plans parcellaires de Beaumont dont j’ai pu restituer chaque maison pour le début du XVe siècle (terrier de 1426) et le milieu du XVIe siècle (liève de 1543/46), par l’importance des cimetières qui s’étendaient bien au-delà de leurs enclos d’origine. Il en était ainsi du cimetière de Saint-Pierre, dont l’extension -le cimetière de la Conche- avait gagné la presque totalité d’un quartier. Il en était de même pour le cimetière de Notre-Dame de la Rivière, qui s’était considérablement étendu vers le sud, occupant toute la place de l’Olme dont il avait pris le nom. Il existait donc une véritable promiscuité entre les morts et les habitants, probablement résignés face à la précarité de la vie...

Ainsi, les vieux documents consultés pour cette période nous révèlent des mœurs cruelles, voire même sordides, où régnaient la mort et l’insalubrité ; de plus, la délation ne devait pas être absente des décisions d’expulsion des gens suspectés d’être atteints par le mal...Ceci n’est pas sans rappeler le film « le nom de la rose » de Jean-Jacques Annaud....

À tour de rôle, les habitants étaient tenus de faire le guet aux remparts et aux portes de la ville. Fait surprenant : j’ai pu noter que les élus et les commissaires parcouraient les remparts et les corps de garde, la nuit, pour vérifier si les guetteurs ne dormaient pas, et leur distribuaient du vin !... Lors des périodes de plus grande insécurité, la surveillance était renforcée et l’on faisait « grand guet », en disposant six hommes à chaque porte, dans les corps de garde.

A l’époque où l’abbesse faisait proclamer cette ordonnance, non seulement la région étaient marquée par les épidémies de peste, mais elle eut aussi à subir une série de tremblements de terre dont on retrouve la trace dans les archives de l’Abbaye, qui était toute « rapetassée », aux dires d’une abbesse, et qu’il fallut presque entièrement reconstruire à la fin du XVe siècle suite à la série des séismes de 1490 (voir mon article "La terre a tremblé à Beaumont en 1490 et en 1765").

Pour ce qui concerne la peste, le texte ici transcrit nous révèle par quels moyens l’abbesse et les élus luttaient contre la propagation du mal. En septembre 1502, l’épidémie sévissait dans plusieurs localités voisines, mais n’avait apparemment pas encore atteint Beaumont . L’attitude adoptée était de s’isoler de l’extérieur, en interdisant à tout un chacun d’entrer dans les villes infectées, ou soupçonnées de l’être. La liste de beaumontois figurant dans l’ordonnance visait probablement des individus qui avaient faillis à cette mesure collective et qui pouvaient donc être à priori suspectés d’être eux-mêmes atteint par ce terrible mal.

3- L’action répressive ; les condamnations

Bien sûr, ceux qui n’appliquaient pas les ordonnances abbatiales étaient traduits devant la justice seigneuriale. L’abbesse présidait rarement elle-même ces assises qui se tenait le plus souvent sur la place du cloître (actuelle place Saint-Pierre). Là se trouvait la halle qui abritait pour l’occasion les séances, que son juge-châtelain présidait en son nom.

Dans le même registre, on trouve une telle condamnation, en date du 14 septembre 1505, alors que la peste sévissait encore dans la région. L’ affaire fut instruite par le Châtelain de Beaumont (peut-être à la suite d’une dénonciation ?). Ainsi, le 14 e jour de septembre, « heure de soleilh couchant », Loys Vinhole fut condamné sur exploit (procès-verbal) de Hugon Agier, dit Ganoy, Sergent de ville, à ne plus « communiquer avec les siens ne entrer dans la ville de Beaumont pour ce qu’il avoit mys a sa maison une des filles de feu Bérauld Moly Cussat estant infecte (malade) de la peste ». Louis Vinhole (ou Vignole) se défendit en protestant « qu’il avoit mis la dicte filhe a sa maison et icelle (celle-ci) coucher au soir cuydant (croyant) qu elle ne fust point infecte ne qu elle ne vind de lieu infecte » , car « depuis qu’il en a este adverty », précisa-t-il, « elle n a plus demeure a sa maison » (F°14).

Le 14e jour d’août 1502, bien que les commissaires eussent commandé la garde des portes, Guillot Cosserant (Cousserand) fut « pris au cors et contreingt deffaire vuyder une chambrière venue de la ville de Clermont »...(F°284)

Face aux actes délictueux, L’abbesse ne badinait pas et sévissait par l’intermédiaire de son châtelain, son lieutenant ou le Sergent de ville, et ceci quel que fut le récalcitrant. Que l’on en juge plutôt par cet acte qui, même s’il ne concerne pas l’épidémie, n’est pas moins intéressant :

Le 20 janvier 1502, « honorable homme Maistre Martin Cousturier, Chanoine de l’esglise cathédrale de Clermont » de son bon gré dut payer l’amende dans les mains du Lieutenant de l’abbesse, Maître Hugues Bosse, car il y a « ung moys ou environ qu il a este trouve chassant au furon (furet) dans la justice de madame » ! Le chanoine-chasseur bénéficia toutefois d’une exemption pour cette amende sur intervention de « hault et puissant seigneur Artus de la Forest Chambellan du Roy nostre Sire, frere de la dite dame ! » (F° 285) Quand on peut faire jouer ses relations...

D’une manière générale, les actes de justice ne concernent le plus souvent que de menus larcins. On trouve toutefois pour la même époque un cas ou le coupable fut tout de même fouetté et banni de la justice de Beaumont ! (F°12).

S’agissant des fortifications, on y trouve des condamnations pour défaut de garde des portes de la ville et quelques dégradation et usurpation du domaine public, comme l’on dirait aujourd’hui, certains habitants dont les maisons s’appuyaient sur les remparts n’hésitant pas à y pratiquer des ouvertures et des "ballets" (balcons) !

Ainsi, un acte de la justice abbatiale stipule qu’au cours de la même épidémie de peste, certains avaient « fait plusieurs pertuys (petites ouvertures) à la murailhe de la ville », à laquelle leurs maisons se trouvaient accolées, afin de les rendre leur habitat plus salubres (F°116).

Pour ce qui concerne la garde des portes, on voit dans un autre acte que le 27 e jour d’août 1505, deux beaumontois, Pierre Goujon et Antoine Delusse eurent maille à partir avec la justice abbatiale pour n’avoir pas « gardé la porte royale (la porte Réale) pour la conservation de la ville », tout comme Antoine De Mezet et Pierre Saurel, chargés de garder la porte de l’Olme, « parce qu’ils (ne) devoient pas boyre s’ils la gardoient » (F°5).

Pour certains gardiens, la tentation de sombrer dans un sommeil réparateur, ou d’aller vider un pichet au cabaret voisin était parfois la plus forte...

Elle les détournait pourtant du devoir sacré de veiller aux portes et aux remparts pour assurer la sécurité de leurs concitoyens (ceci est étonnant au regard des distributions de vins faites aux portes évoquées plus haut !...).

Notons qu’il existait une auberge, près de la porte Basse, tenue par Gaspard Auberoche ; elle sera reprise plus tard -vers 1605- par Pierre Pagheix, notre ancêtre beaumontois qui mourra lors de l’épidémie de peste de 1630/1631.

4- Conclusion

Nous voyons au travers de tels documents que nos aïeux durent traverser de bien sombres périodes, affrontant quotidiennement les pestes, les famines, et les incessants passages de gens de guerre. Des bandes d’individus de toutes nationalités constituaient alors l’essentiel d’une armée jamais démobilisée (que ce soit lors des guerres d’Italie au début du siècle ou plus tard au cours des guerres de religion). Ces bandes armées parcouraient les campagnes et subsistaient, en temps de paix comme en temps de guerre, aux dépens des populations qui devait les héberger en garnison. Parfois, elles assaillaient les villages qui n’avaient pas redouté de leur fermer leurs portes ; elles pillaient, rançonnaient, et ne laissaient derrière elles que ruines et désolation. A certains moments, les élus de Beaumont purent même craindre qu’elles vinssent incendier leur bourg... Elles ravivaient probablement pour eux le cruel souvenir des exactions commises par les Routiers au cours de la Guerre de Cent Ans. Pour couronner le tout, les impôts royaux collectés, déjà suffisamment lourds, comportaient chaque année des « crues » pour alimenter les dépenses liées aux guerres d’Italie (cf l’article "Nos ancêtres, le service militaire et les guerres" déjà cité, et en particulier le passage consacré aux frais nécessités par l’entretien de deux hommes d’arme...)

Pour terminer, nous ne devons pas oublier que la peste s’inscrivait dans un cortège de maladies comme la lèpre, également bien présente au Moyen Âge. Les malheureux lèpreux, après examen médical, étaient jugés par le Tribunal de la Purge de Montferrand qui les condamnait à l’isolement dans des Léproseries comme celle d’Herbet  [3]. Ce fut le cas en 1449 où une beaumontoise, Jacmecte Perset, fut reconnue lépreuse, à l’issue d’un examen par les experts en médecine et en chirurgie. Il lui fut interdit de "converser, boyre, menger entre les sains" et elle dut porter "les claquettes que les ladres pourtent comme est de coutume"... 

On doit tout de même tempérer cette vision pour le moins sordide des mœurs en usage, en n’oubliant pas d’évoquer les mouvements de solidarité qui se manifestèrent au travers des confréries charitables. Ainsi, au XVe siècle, il existait à Beaumont une "charité" dont la maison du "Sainct Esprit" s’appuyait sur l’église de notre Dame de la Rivière (cf mon "cadastre" de 1426) et dont les bailes étaient Jehan Sobra, Guillaume Bossa et Guillaume Agers. Les élus de Beaumont levaient pour le compte de cette charité des cens en nature sur des biens situés à Aubière, Romaignhat, Boysegoulh. En 1514, ces revenus s’élevaient en froment à 8 setiers une quarte et 4 coupes (env. 1160 litres) et en pamoule à une quarte et 16 coupes (env. 96 litres).

En 1543, à l’emplacement de cette maison du Saint-Esprit, il n’existait "qu’un chaume que solloit estre la maison de Sainct Esprit de notre-Dame de la Rivière, dans la ville, quartier de l’Olme". les "bailles" de la charité du Sainct Esprit de Beaumont, quant à eux, existaient toujours et se nommaient Bertrand et Jehan Mathieu fils à feu Pierre, et Bertrand Villeneuve...

Notons que Beaumont avait une autre maison du Saint-Esprit au quartier du Plot (ou Plat), qui n’était autre que la maison commune où les élus et les habitants se réunissaient pour délibérer. Elle subsistera jusqu’au XIXe siècle en tant que mairie !

5- Bibliographie

Hippolite Gomot : « Chroniques de Riom, la peste noire de 1631 », à Riom, chez Ulysse Jouvet, imprimeur, 1874.

Marc Dousse :"La peste de 1631 en Auvergne ; l’épidémie à Orsonnette" in Revue d’Auvergne, T. 44 1930, p.94 à la fin, suivi du remède contre la peste : le vinaigre des quatre voleurs...

Edmond Morand : « La peste à Riom au Moyen Âge », in Revue d’Auvergne, T 77 1963, p 133 à 140.

Pierre Charbonnier : « La peste de 1631 à Clermont, même revue, T 79 1965, p 97 à 128.

Gabriel Audisio : la peste en Auvergne au XIV ème siècle, Revue d’Auvergne, T 82 1968, p 257 à 265.

Yves Morvan : « La peste noire à Jensat », même Revue, T 92 1984, p 89 à 110.

Sur les tremblements de terre, voir l’article " : La terre a tremblé à Beaumont en 1490 et en 1765" ;
« Notes historiques sur les séismes en Auvergne », par Henri Pelletier, in Revue des Sciences Naturelles d’Auvergne, 1969, vol. 55, fasc. 1-4, page 23.

Sur la lèpre et sur le crime de 1336, voir la thèse de M. Johan Picot, et le site criminocorpus.


[1Eléments tirés de l’étude « Beaumont, essai d’histoire urbaine », Jacques Pageix , Bulletin Historique et Scientifique de l’Auvergne T. 92, N° 684, Janvier-Mars 1985.

[2Extrait de « Une communauté urbaine au XVIe siècle, Beaumont-Lès-Clermont-Droits seigneuriaux et libertés municipales », Jacques Pageix 1992, et de « Beaumont Histoire de bourg des origines au XIXe siècle » non publié.

[3Le Tribunal de la Purge de Montferrant était une juridiction très originale, exercée sous l’autorité des consuls de cette ville (ce passage se réfère aux nombreux articles de M. Johan Picot, dans le BHSA et autres publications).
L’image de l’en-tête représente un médecin pendant la peste noire (gravure de Paul Fürst 1656) : tunique recouvrant tout le corps, gants, bésicles de protection portées sur un masque en forme de bec, chapeau et baguette.

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1 Message

  • La peste menace Beaumont 4 octobre 10:32, par Michel J.

    Intéressante évocation des mesures radicales de le période face aux épidémies…

    Par rapport à notre siècle , évolué par excellence, que dirons nos descendants dans quelques siècles devant les effets des mesures de confinement subies pendant les années 2020 et suivantes ?

    Répondre à ce message

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