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Accueil » Articles » Histoire locale » Orléans, Jeanne d’Arc et sa famille » L’usufruit de l’Ile-aux-Boeufs (Orléanais)

L’usufruit de l’Ile-aux-Boeufs (Orléanais)

Charte de 1443 concernant Pierre du Lys, frère de Jehanne

Le vendredi 1er avril 2005, par Jean-Pierre Bernard

Vidimus d’une charte de 1443, octroyant à Pierre du Lys, et à Jehan du Lys, son fils, l’usufruit de l’Ile-aux-Boeufs, sur la loire, à Orléans.

Suite à l’anoblissement de décembre 1429, par le roi Charles VII, Pierre d’Arc se nommait dorénavant Pierre du Lys.

Depuis juillet 1440, Pierre, Isabelle "Romée" sa mère, et d’autres membres de la famille résidaient dans l’Orléanais.

La famille vivait au début dans la rue des Pastoureaux, à Orléans. En 1442, Pierre obtiendra à bail emphytéotique, du chapitre cathédral, la métairie de Bagnault (Bagneaux), dans la commune de Sandillon, dite aussi "la métairie des Chanoines", et qui existe toujours, bien qu’en piteux état de délabrement.

Ce n’est qu’en 1452 qu’il prendra à bail, du chapitre de Saint-Euverte, la maison située près de Saint-Pierre-le-Puellier, en ville. Les Procureurs lui accordant une rente pour vivre dans la cité, Isabelle en fera probablement sa résidence principale.

La métairie de Sandillon ne devait pas suffire à entretenir toute la famille, bien que Pierre touchera lui aussi une pension du roi, de 125 livres tournois, qui sera reportée sur son fils Jehan.

Il faut dire aussi que Pierre, ayant été fait prisonnier en même temps que sa soeur, devra vendre les héritages de sa femme pour payer sa rançon.

L’usufruit de l’Ile-aux-Boeufs, que le duc d’Orléans lui concède, va lui permettre de pouvoir accroître ses revenus, surtout par le forestage, ou droit de péage qu’il touchera en exploitant les bois situés sur l’île.
Plus tard son fils Jehan, puis Antoine de Brunet, son petit-cousin, vont l’exploiter de manière plus rentable, notamment en louant les surfaces de pâturage aux bouchers d’Orléans, pour y nourrir leurs bêtes avant l’abattage pour alimenter en viande les Orléanais.

On possède le vidimus, du 28 juillet 1443, accordant cet usufruit.
C’est un "vidimus" (nous voyons, en latin), c’est-à-dire une ampliation du document, une sorte de "recopiage" et d’entérination effectué par les tabellions du duc, à Orléans et à Blois.

En voici l’essentiel :

D’abord, l’introduction, avec les formules usuelles, où l’on dit que la décision vient du duc :

"A tous ceulx qui ces présentes lectres verront, le bailli
de Bloiz, salut ; scavoir faisons que par Jehan des Estangs
tabellion, juré du scel aux contraux (contrats) de la
chatellenie de Bloiz, ont esté tenues, veues, leues et
diligemment regardées de mot à mot unes lres (lecture ?)
saines et entiers en scel et escrpture (écriture)
scellées en cire vermeille sus double queue du grat
(grand) scel de monsir. (monseigneur) le duc d’Orléans,
desquelles la teneur sensuit :

Charles, duc d’Orléans et de Valoys, conte de Bloiz et
de Beaumot (Beaumont) et seigneur d’Ast et de Coucy.
A noz amés féaulx gens de nos comptes général et
trésorier sur le faict et gouvernement de noz finances,
gouverneur, procureur et receveur de nostre duchié
d’Orliens où à leurs lieutenants, salut et dilection."

On expose pourquoi le duc prend cette décision, en faveur de Pierre, qui l’a bien servi autrefois :

"Receue avons l’umble supplicacion de nostre bien amé
Pierre du Lis, chevalier, contenant que, pour acquiter
sa loyauté envers monseigneur le Roy et nous, il s’en
feust départi (était parti) de son païs et venu (au)
service de mondit seigneur le Roy et de nous, en la
compaignie de Jehanne-la-Pucelle, sa soeur, avecqs
laquelle jusques à son absentement et depuis ce jour
jusques à présent, il a exposé son corps et ses biens
oudit service, et au faict des guerres de mondit seigneur
le Roy, tant à la résistance des ennemis de ce royaume
qui tindrent le siège devant nostre ville d’Orliens, come
en plusieurs voïages faiz en entprins (entrepris) par
mondit seigneur le Roy et ses chiefs de guerre et
autrement en plusieurs et divers lieux, et par fortune
desdictes guerres a esté prisonnier desdits ennemis et
à ceste cause vendu les héritaiges de sa femme et perdu
tous ses biens tellement que a paine a de quoy vivre
ne (ni) avoir la vie de sa femme et de ses enfants."
(nb : a priori, il n’avait qu’un fils unique : Jehan)

Alors on cite et localise l’objet du don qu’on lui octroie :

"... nous requérat très humblement que pour luy aidier à
ce, il nous plaise luy donner sa vie (lui procurer un
moyen d’existence, des revenus), la vie durant de luy et
de Jehan du Lis, son filz naturel et légitime, les
usufruicts, prouffiz, revenus et émolumens d’une ysle
appellée l’Ysle-aux-Beufs, à nous appartenant, assise en
la rivière de Loyre, près de La Salle, au droit de Chécy,
ainsi comme elle se poursuit et comporte, et comprenant
environ demy arpent de la dite ysle, qui est au droit de
l’ostel de la Court-Dieu, appellé "Guiron", laquelle ysle
Jehan Bourdon et aultres tenoient naguières de nous à la
somme de six livres parisis valant marc d’argent, sept
livres tournoys, payant chascun an, par moictié, à deux
termes, c’est à savoir à tous et aulcun nostre seigneur,
et à laquelle ysle et choses dessusdites de nostre
consentement, ils ont naguières renoncé à nostre prouffit
et pour en disposer à nostre voulenté, ainsi que plus
aplain peut apparoir par lectres de renonciacion données
le XXVI è jour de ce présent moys de juillet, l’an mil
CCCC quarente et trois."

Ce passage important renseigne que l’ancien tenancier se nommait Jehan Bourdon. C’est sans doute pour cette raison que l’île porta un temps le nom de : l’Ile-aux-Bourdons.
Le duc ayant récupéré le bail, le transfère aux du Lys.
Il semblerait que le bail ne concerne pas l’île dans sa totalité, car il est bien écrit : "... demy arpent de la dicte ysle... au droit de l’ostel de la Court-Dieu, appellé Guiron".
Il est possible que l’on incluait pas le reste de l’île, fréquemment sous les eaux, au gré des crues de la Loire, et que l’on indiquait la partie toujours émergée.
L’acte se poursuit :

"Pour quoy nous, eue considéracion aux choses dessusdies,
voulons en faveur et contemplacion de ladite Jehanne-la-
Pucelle, sa soeur germaine, et des grants, hauls (hauts)
et notables services qu’elle et ledit Pierre, son frère,
ont faiz à mondit seigneur le Roy et à nous, à la
compulsion et résistance desdits ennemis et autrement,
avons donné et donnons de nostre certaine science
(de manière mûrement réfléchie) et grâce espécialle, par
ces présentes audit messire Pierre, lesdicts usfruiz,
prouffitz, revenus et émolumens de la dite ysle et choses
dessusdites pour y ceulx prandre et parcevoir doresnavant
par luy et sondit filz, la vie durant d’eulx deux et de
chascun d’eulx, tant come le survivant d’eulx vivra et
aura la vie au corps..."

Il est nettement dit qu’il s’agit d’une grâce spéciale, obtenue par Pierre et Jehan, eu égard aux services rendus à la couronne par Jehanne, leur soeur et tante, et par déférence envers elle.
Arrive l’ordre du duc à son administration d’obtempérer :

"... si (aussi) vous mandons, comandons et expressément
enjoignons par ces dites présentes et à chacun de vous,
si come à luy appartendra et aussi à tous noz aultres
justiciers, officiers et subjiés (sujets) de nostre dit
duchié présents et à venir, que de nostre présent don
facent, seuffrent et laissent lesdits messire Pierre et
Jehan du Lis, son filz, joir (jouir) et user plainement
et paisiblement et ycelles exploictez avoir prandre et
percevoir les prouffiz, usfruiz, revenues et
appartenances, ledit temps durant, sans leur faire mectre
ou donner ne (ni) souffrir estre faict, mis ou donné
aulcun arrest, d’estourbier ou empeschement, au contraire"

et aux comptables du duché de rester quittes, et de prendre bonne note :

"Et par rapportant ces présentes ou vidimus d’icelles,
collationné en la Chambre de noz comptes pour une foiz
seulement avecque recoingnoissance dudit chevalier
joysset (jouissent) desdictes choses, nous voulons vous
nostre receveur et tous aultres qu’il appartendra estre
et demourer quictes et deschargez le temps dessusdit
durant desdites vies dudit chevalier et de sondit filz,
de la recepte des revenus, de la recepte des revenues
dessusdictes par vous, gens de noz dits comptes et par
tous aultres à qui il appartendra sans aulcun contredict
ou difficulté."

La suite nous apprend que d’autres bontés ont été faites au chevalier, "non exprimées dans ces présentes", et qu’aussi le famille de La Pucelle profitait de la reconnaissance ducale et royale :

"Car ainsi le voulons et nous plaist estre faict, non
obstant quelzconques aultres dons ou biens faiz par nous
audit chevalier non exprimez en ces présentes et
quelzconques ordonnances par nous faictes et à faire de
non donner ou aliéner aulcunes choses de nostre domaine
retrainçons, mandemens ou deffensement à ce contraires.

En tesmoing de ce, nous avons fait mettre nostre scel à
ces présentes.

Donné à Orliens le XXVIII è jour de juillet, l’an de
grâce mil CCCC quarante et trois."

Le vidimus est entériné par Jehan Le Fuzelier, général conseiller de monseigneur le duc d’Orléans, et se termine ainsi :

"... Me consens en tant que en moy est, et qu’il me
touche et appartient, à l’entérinement et accomplissement
du contenu ès desdictes lectres, tout selon pour les
causes et par la fourme et manie (manière) que mondit
seigneur le duc le veult et mande par icelles.

Donné soubz mes saingt manuel et signet, le XXIX è jour
dudit moys de juillet, l’an mil CCCC quarente et trois,
et signée J. Le Fuzelier."

Le 2 août suivant, tout sera confirmé par le sceau de la chatellenie de Blois, et signé par Jehan des Estangs, "tabellion juré du scel" (garde des sceaux) de cette chatellenie.

Pierre et son fils Jehan sont dorénavant et légalement usufruitiers de l’Ile-aux-Boeufs.

Deux ans et demi plus tard, en janvier 1446, sans doute sur demande des instances ducales, Pierre du Lys affirmera que tout a bien été exécuté et accompli des ordres donnés :

"L’an mil CCCC quarente et six, le vendredy XXVII è jour
de janvier, messire Pierre du Lis, chevalier, confessa
que, par vertu de ces présentes, les gens et officiers de
monseigneur le duc d’Orliens le ont lessé et le lessent
paisiblement joir (jouir) et user de l’ysle et
appartenances contenues au blanc, et en prandre et
percevoir les fruiz et revenues pour les causes contenues
en ces présentes, sans aulcune chose en paier et bailler."

Ref. : Arch. Loiret n° A.274. -
Bull. S.A.H.O., tome 3, 1860.

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