Sur les traces de Bion, pasteur protestant de Zurich, se développe en France le mouvement des colonies de vacances, un mouvement à trois branches : charitable, laïc, catholique. L’église catholique arrive en dernier, s’appuyant sur son puissant réseau d’institutions charitables, en particulier les conférences Saint Vincent de Paul et les patronages de paroisses. Albert de Mun crée l’Association Catholique de la Jeunesse et la première colonie de patronage catholique apparaît à l’initiative de l’abbé de Pitray, responsable du patronage de St-Sulpice.
"L’œuvre des Saines Vacances", fondée en 1899 par M. de Lassuchette, directeur du patronage et du cercle ouvrier de Vaugirard, à Saint-Laurent-sur-mer en Normandie, était ouverte aux enfants des diverses œuvres et écoles parisiennes. Les enfants de la Maison Blanche et de Notre Dame du Travail de Plaisance en étaient alors les colons.
Colonie Notre dame de Bellecombe
C’est justement à Saint- Laurent-sur-Mer, avec de jeunes parisiens, que l’abbé Paradis [1] fit ses débuts dans ce genre d’apostolat. Plus tard, au cours de ses deux années de théologie aux Facultés catholiques de Lyon, il consacre ses loisirs aux enfants d’une paroisse nouvelle et prospère de faubourg, Notre dame de Bellecombe. Tous ses jeudis, avec une régularité sans défaillance, il les passe dans la cour ou dans les salles du patronage ; et, l’été venu, c’est encore lui qui organise, installe et dirige la colonie paroissiale dont il fut le fondateur [2], dans quelques villages des Alpes, Domessin ou Saint Pierre-d’Albigny, en Savoie.
La caravane
L’abbé Paradis ne s’arrêta pas là, tout en appréciant et en utilisant largement ce qui avait été fait avant lui, il sut faire du nouveau : il fonda la caravane. Cette œuvre, qui fut son œuvre de prédilection, avait un recrutement de fortune. Elle s’adressait aux enfants et aux jeunes gens - jeunes étudiants, jeunes employés de préférence - qui, ayant entendu dire qu’elle existait, désiraient en être et se faisait agréer par le directeur. Formalité facile, car on y était admis, comme au festin de la parabole évangélique, sur la seule recommandation de la robe nuptiale, qui était en l’espèce celle de l’honnêteté. Si le candidat était pauvre, des parrains et marraines pourvoyaient à ses besoins.
Ainsi, depuis l’année 1908, s’organisait chaque année, au mois d’août, une communauté originale, ne dépassant pas trente membres, qui s’en allait cheminer quinze jours durant , à travers les Alpes. La petite troupe partait un beau matin, sac au dos, coiffée du béret blanc, les cannes ferrées battant le pavé et le fanion tricolore flottant au vent.
Mon père habitait dans le quartier des Brotteaux, à la limite de la paroisse Saint Joseph, voisine de Notre Dame de Bellecombe. Ses parents avaient entendu parler de l’abbé Paradis et de la caravane. C’est donc tout naturellement que sa mère l’inscrivit pour la Caravane de 1911. Mais je vais laisser le soin à mon père de parler de cette première expérience.
C’est le cœur bien gros, n’ayant jamais quitté mes parents, qu’un matin du mois d’août 1911, je partais pour 15 jours avec une vingtaine de camarades que je ne connaissais pas. Nous étions sous la direction d’un prêtre ardent, qui, quelques semaines plus tôt, était un inconnu pour moi.
Nous devions aller, à pieds, sac à dos, de Chambéry à Grenoble. L’appréhension du début fut bien vite dissipée, un esprit vraiment familial régnant parmi nous. cette quinzaine de vie errante à travers forêts, vallées, glaciers, cols ou sommets, devait laisser en mon âme une impression profonde et me donner pour toujours l’amour de la montagne ... [3].
- Bulletin de l’oeuvre des Saines Vacances Lyonnaises
Sources :
Archives familiales :
- Bulletins de la caravane (1912-1955)
- Cartes postales de l’œuvre des saines vacances lyonnaises et photographie provenant de la collection de mon père.
- "L’abbé Edouard Paradis", biographie écrite en 1917 par l’abbé Etienne Bornet, Directeur du petit séminaire St Jean et l’un des animateurs de la caravane.