"le 27 aout 1916
cher Parents je vous ecris quelques mots pour vous dire que mes nouvelles sont toujour bonne nous avons ataqués avant hier sur la
gauche de Péronne mai nous avons pas été bien loin moi je suis été anterrés par un obus jai la jambe gauche un peut talé mai se net rien je sui été évacuée dans un depots d’aclopée si vous pouvez manvoyer de lagent car je net plu rien je sui revenu juste avec ma veste et mon pantalon et ancor il et tout déchirés. voici mon adresse. Félix Jacquet :
23e d’Infanterie Dépot des Eclopée de Comty anex de luzières Robinetri Somme".
Jean Félix Jacquet est né le 9 octobre 1891 à Villette, dans l’Ain.
Il est incorporé au 60e RI (Besançon) en octobre 1911 afin d’accomplir son service national. La mobilisation de 1914 survient avant qu’il ait achevé sa période de conscription. Mobilisé comme soldat de 2e classe au 60e RI, il est blessé d’une balle à la jambe gauche dès le 29 août 1914.
Il est incorporé en 1915 au 23e RI (originellement Bourg-en-Bresse), au sein duquel il combat jusqu’en 1918.
Le 30 juillet 1916, le régiment prend part à l’offensive française de la Somme, au bois d’Hem. Progressant de 400 m, l’unité perd 519 hommes dont 106 tués. Relevé le 2 août, le régiment réintègre le secteur le 20 août. Les attaques vont se succéder dans ce même secteur sans gain décisif. C’est durant l’une d’elles que Félix est blessé d’une balle à la jambe gauche le 26 août 1916.
Au début de 1917, le 23e RI rejoint la Marne ; il combat vaillamment lors des violentes attaques françaises du secteur de Loivre, devant Villers-Franqueux, mais subit des pertes terribles. Lors de ces opérations, Félix est blessé une nouvelle fois et évacué à Amiens, ou il est soigné du 16 avril au 6 mai. Ses faits d’armes lui vaudront une citation à l’ordre du régiment et l’attribution de la croix de guerre avec étoile de bronze : "grenadier d’élite d’un grand courage, s’est constamment battu à la grenade au cours des progressions sur des terrains battus par des feux de barrages et de mitrailleuses".
- La section de mon grand oncle, vers 1915, avec mon grand oncle (cerclé de rouge).
Au passage, on note l’extrême disparité des uniformes,
avant la généralisation, en 1916, des tenues bleu horizon.
Relevé fin avril, le régiment remonte en ligne le 3 mai, après avoir été "regonflé" par 630 jeunes recrues de la classe 17.
Après un bref passage en Champagne, il monte en ligne à Verdun (octobre 17).
Au début de 1918, il prend position en Lorraine, près da forêt de Parroy. le 21 mai, il est dirigé sur Toul puis Beauvais ; le 10 mai il arrive près de Cassel (Nord). Là il prend part à la troisième campagne des Flandres, près du Mont Vidaigne, en Belgique. Les combats y sont violents et les allemands emploient en masse les obus à l’Ypérite. Félix y est tué le 24 mai 1918, par éclat d’obus ou peut-être gazé.
Par décret du Président de la République en date du 11 avril 1920, la médaille militaire lui est conférée à titre posthume.
"Soldat d’un grand courage. Blessé deux fois au cours de la campagne. A été tué glorieusement à son poste de combat au mont Vidaigne (Belgique) le 24 mai 1918.
- Un extrait du panonceau envoyé à ses parents en 1920 ("offert par l’Union des grandes associations françaises à tous les combattants morts pour la France")
Copyright Pierre Jacquet
le 23e Régiment d’infanterie de ligne :
Créé sous Louis XIV en 1656 , dit "Royal" ou "régiment des Lions" il s’illustre à Fontenoy. Il participe ensuite aux combats de la République et des deux Empires. Il s’illustre en 1870 à Gravelotte et combattra plus tard au Tonkin. Il est présent sur les champs de bataille des deux guerres mondiales. Dissous en 1942, il est reconstitué pour participer aux opérations en Tunisie et en Algérie. Dissous en 1976, ses traditions sont reprises par le centre d’entrainement Commando des Rousses.
Il obtient, par décision du Maréchal Pétain du 19 décembre 1918, le droit au port de la fourragère à la couleur du ruban de la Légion d’honneur, pour avoir été cité à six reprises à l’ordre de l’armée durant la campagne. Il est ainsi l’un des 8 régiments français d’infanterie les plus décorés de la Grande Guerre.