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« Je rends hommage à votre petit soldat… »

Mort une nuit de janvier 1917 aux portes du Fort de Douaumont

Le lundi 25 février 2008, par Christian Faure, Michel Guironnet

Comme l’écrit très justement l’historien Pierre Miquel : « Si l’on considère la contre-attaque française réussie du 24 octobre 1916 comme la fin de la bataille de Verdun, force est d’observer que les engagements partiels, les offensives limitées se prolongent en 1917, et qu’on meure encore à Verdun cette année là » (« Mourir à Verdun »)

Paul Marius Hilarion FAURE naît à Marseille le 23 février 1895. Son frère Jean Baptiste Marius, né le 3 juin 1890 à Marseille, est en 1914 Canonnier servant au 141e Régiment d’Artillerie Lourde.

Un autre frère, Joseph Marius Eugène ; l’ainé des trois enfants ; né à Marseille le 21 janvier 1888, est le grand père de Christian FAURE. Celui-ci a bien voulu nous transmettre les documents qu’il conserve précieusement.

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Paul Hilarion Marius au 22e Régiment d’Infanterie.
On remarque, cousu sur sa manche, un insigne en forme de " V " renversé. Ces ’’chevrons’’ indiquent la durée de présence au front. Ils sont cousus sur le bras gauche : le premier chevron indique une année effective de présence dans la zone des armées, et chaque chevron supplémentaire une période de six mois de plus.

De la classe 1915, Paul Marius Hilarion est d’abord incorporé au 22e Régiment d’Infanterie, puis au 414e Régiment d’Infanterie.

L’historique du 414e RI explique :

« C’est dans les premiers jours de mars 1915 (du 3 au 6) que se rassemblent dans la région de Montluel, les éléments destinés à former le régiment.

Ces éléments sont composés pour les 3/5 d’hommes de la classe 1915 et pour les 2/5 d’hommes de retour du front, provenant des compagnies formées dans les dépôts des régiments des 7e, 14e et 21e Régions (52e, 75e, 140e, 22e, 30e, 97e , 99e, 17e , 23e, 133e et 158e). Ils sont groupés d’abord sous les ordres du Colonel LANCE puis les premiers jours d’avril ils forment le 414e R.I. sous les ordres du Lieutenant-Colonel CRETIN… »

« …Dans la 2e quinzaine d’août (1916), après un court repos dans la région d’Erige, le régiment est transporté en autos à Sainte-Menehould. Il se reforme dans les secteurs calmes du bois d’Hanzy et de Massiges.

Le 5 octobre, le régiment gagne en autos le Camp de Mailly et fait partie du 18e Corps. Pendant deux mois il s’entraîne en vue de nouveaux combats.

Le 30 Novembre 1916, le 414e quitte le camp de Mailly et gagne, par étapes, la région de Condé-en-Barrois. Là il est en réserve d’Armée pendant l’attaque du 15 décembre. Le 23 décembre il est amené en autos à Haudainville et Belleray.

Le 25 décembre, il monte en ligne dans le secteur de la Ferme des Chambrettes et du Bois des Courrières.Il y reste jusqu’au 19 février 1917, après avoir résisté vaillamment aux nombreuses attaques ennemies ».

Comme l’écrit très justement l’historien Pierre Miquel : « Si l’on considère la contre attaque française réussie du 24 octobre 1916 comme la fin de la bataille de Verdun, force est d’observer que les engagements partiels, les offensives limitées se prolongent en 1917, et qu’on meure encore à Verdun cette année là » (« Mourir à Verdun »)
Pour preuve, cette lettre qui arrive à Marseille dans les premiers jours de février 1917 :

« Lyon le 27 janvier 1917.

Le Chef du Bureau Spécial de comptabilité des 17e, 217e et 414e Régiment d’Infanterie à Monsieur le Maire de Marseille, Bouches du Rhône.

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Paul Marius Hilarion FAURE (au centre sur la photo).
Il est encore au 22e Régiment d’Infanterie.

J’ai l’honneur de vous faire connaître que je viens de recevoir du Ministère de la Guerre l’avis officiel de la mort de Faure Paul Marius Hilarion, classe 1915, Mle 2589, Rt (recrutement) Marseille 2830, soldat au 414e Régiment d’Infanterie tué à l’ennemi le 3 janvier 1917 devant Verdun secteur de Douaumont (Meuse).

Je vous prie de prévenir la famille en lui présentant les condoléances du Ministère de la Guerre et de me faire connaître la date à laquelle votre mission aura été accomplie.
Veuillez agréer, Monsieur le Maire, mes sincères salutations ».

La « personne indiquée par ce militaire comme devant être avisée en cas d’évènement grave » se trouve à « l’usine Fournier ». C’est là ; « au 17 Boulevard des Trois Frères au Canet - Marseille » qu’habite Désiré François Faure, le père de Paul, avec son épouse Joséphine Anaïs Perrin.

Désiré est déjà au courant depuis quelques jours de la terrible nouvelle. Comment a-t-il appris la mort à vingt deux ans de son garçon ? On ne sait. Peut être par ce soldat du 414e RI, à la caserne de Lyon, qui vient de recevoir ce courrier d’un de ses amis resté au front :

« Le 29 janvier 1917

Cher Ami,

Il y a déjà quelques jours que j’ai reçu ta lettre du 20 (janvier) et constate avec plaisir que tu est toujours à Lyon et à la C.H.M ? Tu es un veinard car, depuis que tu nous a quittés , ce n’est plus la vie.

Tu me dis savoir que notre ami Faure a été tué ; c’est triste, que veux tu. Je ne puis t’apprendre grand-chose à son sujet, je n’étais pas avec lui. Je sais qu’ils ont été touchés quatre par le même obus. Faure est mort presque de suite. C’était lors d’une relève au Bois des Caurrières, plus loin que Douaumont.

Beillat a eu plusieurs doigts coupés et Dallard a été touché à une jambe et (il est) mort au poste de secours. Lui a eu son corps transporté à Bevaux près (de) Verdun tandis que Faure, il est enterré près de la ligne de feu.

Je ne puis te dire davantage sur ces tristes choses. Ce dernier coup, la Compagnie a perdu près de 50 (soldats), évacués ou tués.

Parmi les tués que tu connais, il y a Rivier, Lavert, enfin et dire que l’on parle peut être ; c’est un canard ; que les perms sont supprimées dans l’armée ; il ne nous manque plus que ça ; vraiment j’en ai marre !

Ecris moi plus souvent et dis moi ce qu’il se passe à Lyon. Je termine en t’envoyant mes sincères amitiés. Jérôme Regnier ? »

Le soldat Dallard se nomme Léon Jean Claude Dallard. Natif de Marseille, le 14 juillet 1891, il est du 414e RI et meurt lui aussi le 3 janvier 1917 « dans le secteur de Douaumont »

Le soldat Félix Antoine Julien Lavert, du 414e RI également, est né dans la Loire, à Saint Julien Molin Molette, le 21 novembre 1895. Il est tué « à l’ennemi à Douaumont » le 31 décembre 1916 (d’après leurs fiches de Mémoires des Hommes).

Le « canard » (faux-bruits, rumeurs) d’avoir, entre autres malheurs, les permissions supprimées désespère ce soldat : il en a plus qu’assez !

Pour connaître les circonstances de la mort de son fils, Désiré Faure écrit fin janvier au Commandant du 414e Régiment d’Infanterie. Le Sous-Lieutenant Barbieux lui répond :

« Aux Armées le 21 janvier 1917

Cher Monsieur,

Ayant été le triste témoin des derniers moments de votre cher enfant, le Capitaine Tertel ?, Commandant la première compagnie de mitrailleuses, m’a prié de répondre à la lettre que vous lui avez adressé le 21 de ce mois.

Je m’acquitte de cette pénible mission en m’associant de tout cœur à votre profond chagrin que je comprends d’autant mieux que moi aussi je suis peiné.

Et je rends hommage à votre petit soldat qui a laissé à ses chefs et à ses camarades un souvenir ineffaçable.

Dans la nuit du 3 au 4 janvier (1917) le deuxième peloton que je commandais était relevé et se rendait vers l’arrière quand il fut pris sous un bombardement violent.

Un obus blessa votre fils et trois de ses camarades. Des soins immédiats furent prodigués à votre enfant, mais, hélas, il était mortellement atteint et quelques minutes après il rendait le dernier soupir en prononçant les noms de « maman » et « mon Dieu »
Son corps repose à la lisière du Bois de la Vauche, 800 mètres environ au nord du Fort de Douaumont.

Vous recevrez dans quelques temps les objets qu’il portait sur lui et que j’ai précieusement recueillis pour vous. Ils vous parviendront par le dépôt du 414e de Lyon.

D’autre part, vous trouverez ci-joint un mandat de quinze francs qui n’a pu être payé à votre fils.

Je me fais l’interprêtre du Capitaine, des gradés et des soldats de la Compagnie pour vous présenter nos bien sincères condoléances et vous assurer de notre sympathie.
Une citation a été demandée par le Capitaine pour votre cher Paul tombé si bravement au Champ d’Honneur. Je me ferai un devoir de vous en informer dès qu’elle aura paru.

Veuillez agréer, cher Monsieur, l’assurance de mes sentiments très affectueux.
Sous Lieutenant Barbieux, 1re Compagnie de Mitrailleuses 414e Sect. Postal 198 »

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Campagne 1915-1916 : 1re Compagnie de Mitrailleuses du 414e Régiment d’Infanterie.

Le Sous Lieutenant tient parole :

« Aux Armées le 19 février 1917

Cher Monsieur,

Suivant la promesse que je vous avais faite, je vous adresse la copie de la citation dont votre enfant a été l’objet :

Ordre du Régiment N° 309 – Citation- Le Lieutenant Colonel Fray, Commandant le 414e Régiment d’Infanterie, cite à l’ordre du Régiment FAURE Paul, soldat à la 1re Compagnie de Mitrailleurs du 414e.

« Bon et brave soldat qui s’est toujours vaillamment conduit. Tué à son poste de combat le 3 janvier 1917 »

Veuillez agréer, Cher Monsieur, l’assurance de mes sentiments très affectueux et dévoués. Barbieux, Sous Lieutenant »

L’inventaire des objets du Mitrailleur Paul Faure remis à sa famille et les deux « documents officiels » concernant le lieu de sa sépulture sont pieusement conservés par son petit-neveu Christian. A noter que sa tombe localisée en mai 1917 est « non repérée » en septembre 1919 ! (voir les documents ci-dessous).

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Inventaire de février 1917
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« Inhumé à la lizière sud du Bois de la Veauche… »
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Recherche sur inhumation en 1919 à Douaumont

Cette nécessaire recherche d’informations complémentaires pour situer ce document dans son contexte n’a été possible que grâce à la « galaxie » des sites et forums sur Internet consacrés à la Grande Guerre et à ses passionnés. Qu’ils en soient ici remerciés ! Michel Guironnet

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