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Etre maire sous la Restauration

Le jeudi 1er décembre 2005, par René Albert

Les difficultés d’un élu municipal à l’occasion d’un changement de régime.

Aux confins du Poitou et de la Touraine, dans le département de la Vienne, se trouve les communes de LES ORMES et DANGE.

C’est aux Ormes que René Joseph BOUCARD exerça le métier de cavalier de maréchaussée durant près de vingt ans, jusqu’à sa mise à la retraite en 1794. Au préalable il avait été enrôlé au régiment Bourbonnais, Compagnie de Luscan, qu’il avait quitté en 1774.

En février 1808, après un premier mandat, il est reconduit dans sa fonction de maire de la commune de Dangé, où il s’est retiré avec sa famille. Ce choix fut certainement commandé par le fait que ses parents s’étaient fixés en ce lieu.

A priori, René Joseph était un fidèle de l’Empereur. Lors de la première Restauration il conserva son poste de maire de la commune mais les partisans de Louis XVIII ne voyaient pas cela d’un bon œil et, le 28 Janvier 1815, une lettre probablement anonyme, ou adressée par un édile ou personnalité du lieu, parvenait au Sous Préfet de Chatellerault, libellée en ces termes :

« Monsieur le Sous Préfet de Chatellerault,
Le Sieur BOUCARD, maire de Dangé, m’est signalé comme professant des principes contraires à la Constitution, comme manifestant le désir de rétablir dans l’exercice des fonctions publiques des distinctions, des exclusions, qu’il est dans la volonté du Roi d’écarter pour jamais..
On va même jusqu’à dire qu’il a, par des propos tenus publiquement, conseillé et, en quelque sorte, provoqué la sédition, parlé d’incendier les châteaux etc...
Le sieur DUPUIS, concierge du château de la Fontaine, s’est plaint d’avoir été par lui menacé de la prison, pour avoir crié et engagé des habitants de Dangé à crier « Vive le Roi ».
Si les imprécations faites (prétées à)au Sieur BOUCARD sont vraies, il doit estre « constant » qu’il n’a pas l’usage de sa raison, ou du moins qu’il en était privé quand il a tenu ces propos et fait les menaces ci après rappelées.
Je vous prie de prendre, sans éclat, et avec la discrétion convenable en pareille matière, les renseignements nécessaires : 1°) pour juger de la foi à accorder au Sieur DUPUIS ; 2°) pour connaître les intentions, la conduite et les habitudes du maire inculpé.
Dans le cas où le résultat des renseignements que auriez recueillis vous donnerait des preuves ou des présomptions suffisantes, je vous prie aussi d’appeler devant vous le sieur BOUCARD, et de lui demander la démission d’une place qu’il ne pourrait plus occuper.
S’il la refusait je ne pourrais me dispenser de proposer sa destitution au Ministre, et même de le suspendre provisoirement.
Dans cette dernière hypothèse je vous serais obligé de recueillir dans un rapport ou une note les faits et les motifs qui vous paraîtraient provoquer cette mesure rigoureuse.
Agréez, Monsieur, les assurances de la considération distinguées, etc... »
(Copie manuscrite contemporaine à l’événement)

Le 17 février qui suivit, René Joseph BOUCARD donna sa démission... Officiellement celle-ci était motivée « par son âge, ses infirmités, et ses affaires » mais il est précisé qu’il est convoqué à la Sous Préfecture à la demande du Sous Préfet De Lattre. Dans la même lettre, dont une copie conforme est éditée le 24 février 1815 par la Sous Préfecture, il est mentionné que René Joseph BOUCARD « veut jouir d’une tranquillité qui lui est devenue indispensablement nécessaire ». Il assurera l’intérim jusqu’à remplacement à son poste. Visiblement on a voulu éviter les « frottements ».

Ce même 24 février le Sous Préfet avise son autorité de tutelle de cette démission. A cette occasion il proposait un certain Louis MARQUET, entrepreneur des relais de la diligence, pour reprendre la Mairie.

Le 26 février, Napoléon quittait l’Ile d’Elbe après dix mois d’exil. On connaît la suite... Ce fut les « Cent Jours »...

René Joseph retrouva sa fonction de maire le 22 Mai 1815, fonction qu’il assurera au moins jusqu’à la défaite de Waterloo le 18 Juin 1815 et probablement jusqu’au retour de LOUIS XVIII, qui rentra à Paris pour la seconde fois le 8 Juillet 1815.

C’est à l’âge de 78 ans, le 12 Octobre 1826 que René Joseph décéda. La déclaration de ce décès fut enregistré par le maire en place, le Comte d’Aubery, peut-être l’auteur de ses problèmes. Ce dernier était le propriètaire du chateau de la Fontaine...


(Sources Archives Municipales de Chatellerault et DANGE, ainsi que A.D 86)

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1 Message

  • > Etre maire sous la Restauration 14 décembre 2005 08:37, par Jacqueline Gasquet

    Réponse tout à fait personnelle. Dans plusieurs petites communes du Gard, Aigremont, Dommessargues, Sanilhac, mes ancêtres protestants ont été officiers municipaux dès le début de la Révolution... ils savaient écrire. Avant l’Edit de Tolérance, ils avaient été exclus de toute fonction, ils se "rattrappent". Ils deviennenet maires et certains le restent à travers tous les régimes jusqu’à leur mort. A Aigremont, le fils Louis Eugène succède, à son père Louis Gasquet et son grand-père Louis Gasquet, qui avaient été maires quasiment sans interruption depuis la Révolution, et le reste durant tout le second Empire. Je ne pense pas, qu’ils aient eu vraiment d’étiquettes politiques. Ils forment une nouvelle caste respectable... ils marient leur enfants entre eux... . Un de leur descendant sera maire dans les années 30 et fondera la cave coopérative d’Aigremont... et puis la famille quitte Aigremont.
    Jacqueline Gasquet-Boniffay

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