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Un devoir ô combien traumatisant

Le vendredi 3 mars 2023, par Michel Baumgarth

Mardi 11 novembre 1952…

Ce jour était férié, mais ce ne fut pas un jour de congé pour moi car ma classe avait été désignée pour rendre Le devoir de mémoire aux poilus de 14-18 devant le monument aux morts de Créteil.
L’annonce nous avait été faite la veille par notre vénéré instituteur Monsieur Louis Allezard.

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Louis Allezard.

Il n’avait guère été disert, mais nous avions bien senti que pour lui, vieux hussard noir de la République, la chose était de la plus haute importance et qu’il considérait que la mission qu’il nous confiait était d’importance.
Bien qu’il ne nous ait rien dit de « la » guerre, nous avions bien compris qu’il en avait été et sûrement pas planqué à l’arrière …

Le jour dit, muet et hiératique sur l’esplanade devant l’entrée du cimetière, il attendait sa bonne trentaine de mouflets endimanchés du mieux qu’il était possible en ce temps qui sentait encore trop les restrictions.

Il nous accueillit sans dire un mot et son silence nous disait bien qu’il était à la fois ici et ailleurs, qu’il était à la fois dans le présent et dans son passé.

Son attitude était si inhabituelle et si déconcertante pour nous qu’elle avait étouffé dans l’œuf toute velléité d’agitation de notre part : prostrés, silencieux et attentifs, nous observions l’aréopage d’anciens combattants des deux guerres bardés de décorations et arborant une nuée de drapeaux et d’oriflammes.

Bien sûr, il y avait le maire et ses édiles ; bien sûr, il y avait les gendarmes, les pompiers et les instruments de la clique municipale ; il y avait, bien sûr, tous les notables et il y avait en plus du monde, plein de monde, du monde tant et plus…

Cela faisait beaucoup, beaucoup d’adultes … et nous, nous n’étions que trois dizaines de gamins bien jeunots…

À l’heure prévue, le maire, assisté du capitaine de gendarmerie et du chef des pompiers, prit la tête du cortège et se dirigea vers le carré militaire qui jouxtait l’imposant monument aux morts. Nous, les mômes, nous attendions que l’esplanade se fut vidée de tous les participants.

Quand ce fut fait, sans rien dire, notre maître se dirigea à son tour vers le lieu de la cérémonie entrainant derrière lui sa nichée, mais nous ne rejoignîmes pas les adultes ; sa trajectoire dévia, il longea les tombes et il déposa régulièrement un de ses novices tous les quatre ou cinq sépultures.

Les yeux rivés sur celle qui lui était dévolue, chaque gamin tournait donc le dos aux adultes et était distant de quelques mètres de ses plus proches copains : notre posture ne différait donc guère de celle d’un cancre mis au piquet… De fait, nous n’étions donc pas spectateurs, mais seulement auditeurs et nous n’osions pas quitter des yeux la stèle du mort qui nous avait été assignée. C’est long, très long un tête à tête avec une épitaphe…

La commémoration commença avec les discours et la musique ; puis il y eut la sonnerie aux morts suivie de l’interminable litanie des prénom et nom de chacun des 270 poilus prononcés d’une voix monotonale et ponctuée de la lancinante et lugubre antienne « … mort pour la France ! » .

C’était flippant, très flippant et encore plus flippant quand on est un mouflet cantonné là, seul, avec comme unique horizon une épitaphe…
La cérémonie s’éternisa : cela nous paru long, bien long, très-très long avant que le cortège se remette en mouvement et rebrousse chemin vers l’esplanade.
Notre maître attendit patiemment que tout ce beau monde se soit dispersé avant de nous ramener dans le monde des vivants. Alors il nous libéra en prononçant une seule phrase : « Merci mes tatous  [1]

Sauve-toi, la vie t’appelle (Boris Cyrulnik)

En un autre lieu et en d’autres circonstances, il y aurait eu la bruyante envolée de moineaux de toutes nos fins des cours ; mais là, il n’y eut ni les bousculades et bourrades habituelles ni les apostrophes et invectives ordinaires : nous étions médusés, stupéfiés, pétrifiés, sidérés par ce que nous venions de subir ; nous étions incapables de partager entre nous sur ce vécu douloureux ; chacun a fuit sans dire un mot, seul, de son côté…

Le lendemain, la reprise à l’école fut déconcertante : à croire qu’il ne s’était rien passé … notre maître resta muet sur le sujet : pas la moindre allusion ! Quant à nous, les enfants, nous n’aurions pas pu parler de l’indicible ; le tabou, tacite, s’imposa à chacun d’entre nous : nul n’en a jamais parlé.

J’ignore donc ce qu’il en fut pour mes condisciples ; mais moi, j’étais un gamin solitaire et très particulier, à la pensée en arborescences, totalement allergique à l’irrationnel et à l’injustice et même pas très convaincu que la cigogne qui m’avait amené m’avait déposé sur la bonne planète.

Quant à moi, mon séjour forcé et prolongé devant la stèle de mon poilu n’avait pas été une léthargie protectrice, mais une cogitation fébrile tous azimuts :

• d’abord mon attention s’était figée sur l’extravagance du carnage : mon Créteil à moi comptait environ 12000 habitants ; en 1914, il devait y en avoir environ 8000 … soit dans les 4000 mâles dont probablement la moitié en âge d’avoir été mobilisés … alors 270 « morts pour la France », ça fait 13 % des soldats… presqu’un sur sept !!! C’était monstrueux et pour moi totalement abscons.

• ensuite il y avait l’insupportable antinomie entre la théorie de notre éducation et la pratique des adultes : dans mon enfance, quand deux marmots se mettaient une peignée, il se trouvait toujours un adulte pour les séparer ( souvent en leur collant une beigne à chacun ) en clamant haut et fort que nous n’étions plus des gamins irresponsables … Deux moutards qui se coltinaient pendant quelques minutes, c’était donc inadmissible ; mais des millions d’adultes qui s’étripent pendant plus de quatre ans …

• surtout il y avait une double incongruité : l’apparente absence de prise de conscience par les participants de l’absurdité de cette guerre ignoble et surtout la fierté affichée des anciens combattants ; cette cérémonie était moins le devoir de mémoire rendu aux poilus décédés que la commémoration de « LA » grande victoire… la grande victoire, la fierté de la France…

• Enfin la présence, à cette cérémonie d’adultes, d’une trentaine de gamins me semblait inadaptée, au minimum inconvenante et même scabreuse : quelle en était la motivation ? Étions-nous sensés recevoir un message ?

Ce message était-il qu’il n’y a rien au dessus de la patrie ? Assurément notre hiérarchie affective personnelle n’était pas compatible avec ça et « mourir pour la patrie est le sort le plus beau, le plus digne d’envie » [2] n’était certainement pas recevable par des marmots [3].

Ce message était-il que nous avions atteint l’âge de comprendre la vie des adultes et de nous intégrer à la vie sociale ? Mais nous n’avions que 9 ans et ce rite de passage eut été bien trop prématuré tant pour nous que pour nos parents [4] ; les cérémonies initiatiques qui nous attendaient, nous savions que c’était pour bien plus tard : d’abord la communion solennelle à 12 ans et le certif à 14…

Pourquoi les adultes avaient-ils tant voulu notre présence ???

Voulaient-ils nous dirent que cette guerre, ils l’avaient faite pour leurs enfants, pour que leurs enfants… ? Et voulaient-ils nous dire que nous, les enfants de leurs enfants, nous héritions du devoir de mémoire à la multitude d’entres eux qui n’en étaient pas revenus ? Cela reviendrait à soutenir que nous, des mômes nés trois décennies plus tard, nous avions une part de responsabilité dans leur tragique destin…

• Et pourquoi étions-nous la seule classe concernée ?...

À ces questions, je n’avais aucune réponse rationnelle ; tout cela me paraissait totalement absurde, illogique et pour tout dire insane. Mais comment aurais-je pu parler de l’indicible et à qui ? Je ne fis donc aucune confidence à mes proches, pas même à mon frère ; oui, pas même à mon frère !

Devant ce traumatisme impossible à digérer, je n’avais aucune échappatoire…
En cette occurrence la survie passe très souvent par l’occultation totale ; j’ai eu cette chance.
Cette amnésie complète dura presque sept décennies.

Mai 2022, fantasme ou réalité ?

Mon inaptitude à supporter tout ce qui défie la logique et la moindre injustice expliquant suffisamment mon aversion, je ne crois pas que mon profond désintérêt ou plutôt ma répulsion pour les exploits guerriers et la chose militaire ait été induite ce jour-là par ce traumatisme de mon enfance. Quoi qu’il soit, je m’en tins le plus possible à distance (sauf, hélas, pour le service militaire).

Mais faire sa généalogie sans être rattrapé par cette foutue guerre de 14-18 relève de l’impossible ; inconsciemment j’ai longtemps évité de gratter de trop prés quand je tombais sur une victime de cette boucherie ; mais je me suis laissé piéger par un poilu qui n’était même pas vraiment des miens.

Au cours des recherches qui ont débouché sur la rédaction de mes deux derniers articles [5], j’avais appris l’existence de Désiré Cléty qui fut le premier compagnon de ma grand-mère, puis la reconnaissance de leur petite fille Henriette comme pupille de la nation. Cela impliquait que Désiré était « mort pour la France ».

Hélas, je n’ai pas su résister à la curiosité d’aller vérifier à Créteil s’il figurait sur le monument aux morts et si sa tombe se trouvait au carré militaire…

Dès mon arrivée devant le cimetière, j’ai ressenti que quelque chose clochait : au cours des dernières décennies, j’en avais, hélas, franchi les portes de nombreuses fois pour accompagner mes défunts ; mais pourtant je n’avais aucun souvenir du monument aux morts qui le jouxte … un édifice pourtant long de 8 mètres et haut de 7 !!!

… Oui, pendant toutes ces années mes yeux l’avaient scotomisé ! Alors, pourquoi cette occultation totale ???

Je ne me suis pas interrogé longtemps sur cet étrange comportement car, dès mon arrivée au carré militaire, mon passé remonta à la surface et me submergea : la barrière psychologique protectrice avait cédé et j’ai, à nouveau, subi dans son intégralité le choc traumatique de mes 9 ans.

Mais je n’étais plus le gamin fragile et démuni de ressources d’antan : fort de mon expérience de médecin, je savais qu’il était indispensable de ne pas garder ça par devers moi, mais au contraire d’en parler.

Tout naturellement, c’est auprès de mon frère que j’ai cherché l’aide dont j’avais besoin.
Il m’écouta sans m’interrompre avec la plus grande attention ; son silence s’éternisa, puis il me dit sur un ton étonné et teinté d’un peu de reproche : « mais, à l’époque, tu ne m’en as pas parlé ! » ; puis il me dit que, lui, il n’avait jamais été réquisitionné pour l’une de ces cérémonies et même qu’il ignorait totalement que les enfants des écoles y aient jamais été convoqués.

De notoriété publique, la mémoire de Christian est prodigieuse ; j’étais perplexe…
De cette période de mon enfance, il me reste deux amis très chers, victor hugoliens [6] comme moi, mais qui n’étaient pas mes condisciples en 1952 ; je les ai évidemment interrogés ; leur réponse fut identique…

Il me restait une dernière carte à jouer : Sylvianne, mon aînée de deux ans, ma tante pour l’état-civil, mais de facto notre sœur puisque que nous avons été élevés ensemble dès ma naissance.

Absente, c’est son fils Christophe qui me répondit au téléphone ; je lui ai raconté mon affaire qui l’intéressa fort et il me promit de l’interroger.

Le lendemain, Christophe m’a rappelé : « Tu n’as pas fantasmé : Maman m’a dit qu’elle a vécu la même chose quand elle était gamine et qu’elle aussi n’a jamais pu en parler à personne. »

Et Christophe ajouta : « Maman m’a même précisé que le nom sur la stèle de la tombe de son poilu était Chapelle … »

Ahurissant ! Sylvianne se souvenait de ce nom plus de soixante dix ans après !!!
À l’évidence, comme pour moi, son traumatisme avait dû être terrible …

Évidemment, je me suis précipité sur internet : Wikipédia / cimetière de Créteil me livra la photo du monument aux morts ; en l’agrandissant je pus lire le 12e nom de la 2e colonne : ce nom, c’était … CHAPELLE !

J’ai continué mes recherches sur Généanet ; le relevé des tombes du carré militaire de Créteil donne accès aux clichés de 183 sépultures et l’une d’entre elles est celle d’Augustin Antoine CHAPELLE. Elle se singularise des autres par la présence d’une plaque ajoutée par sa famille il y a presqu’un siècle.

Donc il ne s’agissait pas d’un fantasme, mais bien d’une réalité !

La tombe du poilu Augustin Chapelle existe bel et bien au carré militaire de Créteil ; cela implique que la présence de Sylvianne à une commémoration de l’armistice des années 50 est patente ; la réquisition d’écoliers pour cette cérémonie était donc pratique courante en ce temps-là.

À l’évidence, ma réminiscence douloureuse n’était donc pas un fantasme, mais la résurgence d’un traumatisme psychologique bien réel datant de presque sept décennies.

D’aucuns trouveront que cet intervalle de temps est bien long et qu’il ne sert à rien de remuer les scories du passé ; mais l’option de la mise aux oubliettes de mon infortune n’était pas réaliste car elle ne tenait pas compte de deux données essentielles : d’une part le fait que ce second épisode n’est pas que la simple découverte passive de mon vécu ancien, mais un réel actif et présent traumatisme ; d’autre part la persistance, dans la structure psychique de l’adulte chenu que je suis devenu, des caractéristiques qui faisaient de moi un enfant hors normes différent de ses condisciples.

Les incohérences et les injustices qui écorchaient et révoltaient le petit mioche de mes 9 ans me hérissent et m’indignent toujours aujourd’hui avec la même intensité.
Ce nouveau traumatisme psychologique, je ne pouvais pas le passer sous silence et pourtant je ne pouvais pas l’imposer à mon entourage très majoritairement composé de « normaux-pensants  [7] » peu aptes à en comprendre la portée. Néanmoins il me fallait impérieusement en parler, quitte à n’en parler qu’avec moi-même…

J’ai un demi-siècle d’expérience en médecine et cela me donnait l’opportunité de faire mon auto-analyse par le biais de la rédaction du récit de mes vicissitudes, d’où la conception et la rédaction de ce texte.

Mon initiative me fut salutaire car ne pas comprendre m’est insupportable et je crois avoir trouvé la bonne réponse à deux interrogations qui me tarabustaient particulièrement :

• la première concernait l’étrange mutisme de notre maître Monsieur Allezard : comment lui, si proche et si respectueux de ses « tatous », a-t-il pu nous conduire sans préparation psychologique à cette épreuve ? Et pourquoi n’a-t-il pas pansé nos meurtrissures le lendemain ?
Dans le contexte du début des années cinquante la contestation des décisions de la hiérarchie n’était pas de mise et n’était même pas concevable par les subalternes : la décision de la réquisition des écoliers venait forcément « d’en haut » ; … comme le maire et, après lui, le directeur de l’école, l’instituteur se devait d’exécuter sans rechigner. Le mal fait, notre maître s’était trouvé totalement impuissant à amortir le choc subi par ses « tatous », d’où son silence.

• La seconde concernait mon grand-père Adrien : il était le factotum de mon école et de facto l’homme de confiance du directeur ; surtout il était l’ami de Louis Allezard dont il partageait la passion de la photographie. Cette guerre, il l’avait faite, avait été blessé et prisonnier pendant quatre ans …
Il n’avait donc pas pu ignorer la réquisition de ma classe … Pourtant il ne m’avait rien dit, ni avant, ni après … et lui, l’ancien combattant, il avait été absent à cette foutue cérémonie !
Sa présence n’aurait probablement rien changé à mon désarroi et à ma détresse, mais elle m’aurait donné l’opportunité salvatrice de pouvoir en parler avec lui, après.
Certes, il est très probable qu’à cette époque, je ne savais rien du passé militaire de mon grand-père et son absence à la cérémonie ne m’avait donc pas interpelé ; mais ce n’était plus le cas lors de mon second traumatisme, d’où mes questionnements : pourquoi n’était-il pas là ? Et pourquoi s’était-il tu avant et après ?
Grand-père n’avait pas la fibre militaire : je n’ai retrouvé aucune carte d’ancien combattant dans la précieuse valise qui contenait les choses et documents qui lui tenaient à cœur ; quant aux propos qu’il tenait, dans mon souvenir aucun n’a jamais concerné ni l’armée ni la guerre…
Avant la cérémonie, il n’avait donc aucune motivation à m’en parler et ce d’autant que c’était sous la houlette de son ami Louis Allezard ; après, ils auront estimé tous les deux que, faute de savoir quoi dire pour atténuer le choc, il valait mieux se taire.

Parvenu au stade ultime des corrections et de la mise en page, j’ai envisagé de proposer ce texte à Thierry Sabot puisqu’il traite de mœurs et usages en cours au temps d’antan :

• De nos jours, dans notre société de l’enfant roi, le recours à la cellule psychologique de soutien est devenue la règle à la moindre situation un tant soit peu dramatique.

• Tandis qu’en mon temps d’enfance, faire participer des mouflets à la commémoration d’une effroyable boucherie causée et entretenue par la stupidité des adultes ne soulevait aucune réprobation…

J’ai longtemps hésité à faire cet envoi à cause du caractère très intime de mon récit ; pourtant le faire me permettrait de prolonger mon auto-psychothérapie grâce aux réactions de mes lecteurs. Je m’y suis résolu parce que, après tout, il appartient à Thierry Sabot de décider de ce qui est ou n’est pas Gazettifiable.

ADDENDUM … hélas !

Un comportement du temps d’antan ? Ce n’est vraiment pas si sûr…

J’étais résolu à faire cet envoi, mais un contretemps le retarda : comme chaque semaine, je m’étais rendu à la médiathèque pour faire ma provision de revues diverses.
L’une d’entre elles était le numéro 495 de mai 2022 de « L’HISTOIRE » portant en titre « L’ÉTOILE JAUNE » et dont le thème était l’histoire de ce stigmate infâme imposé par Hitler aux juifs.
Sur la moitié supérieure de la page 12, l’article était précédé par une photographie qui me fit bondir …

Ce cliché de la revue Histoire 495 était la partie droite de la photographie qui fut prise en juillet 2017 lors de la cérémonie officielle commémorant les 75 ans de la rafle du Vél’ d’hiv les 16 et 17 juillet 1942 et qui illustrait l’article du Monde relatant l’événement (elle est visible sur cette page du journal Le Monde).

En voici le descriptif puisque la réglementation des droits d’auteurs n’autorise pas sa reproduction ici :

• L’arrière-plan est occupé par l’aéropage de la communauté juive de France face au monument commémoratif de la place des martyrs juifs du vélodrome d’hiver ( Paris 15e ).

• Au premier plan de la photo tronquée [8] publiée dans la revue Histoire N°495, il n’y a que deux personnages, côte à côte, à gauche de l’étendard de l’association des anciens déportés juifs et de leurs familles.

• Le président de la république, au garde à vous, est logiquement l’un des deux, mais la la personne qui le jouxte à sa gauche, au même niveau, n’est pas son épouse, c’est …

… une gamine de 6 ou 7 ans !!!

Qui a eu la brillante idée de mettre en scène cette petite fille ? !!!

Je ne comprends pas …
Et toi, ma petite sœur d’infortune, toi qui n’avais pas demandé à être là, à quoi pensais-tu ?
J’espère que c’était à ta poupée, pour te rassurer et fuir le traquenard dans lequel t’avaient piégée des adultes inconscients…
Ou bien méditais-tu la spéculation qu’il faut toujours se méfier des adultes et doutais-tu de l’intérêt de grandir pour leur ressembler ?
À quoi pensait notre Président ? À la définition du mot empathie ? Ou bien qu’une formation en psychologie pour le responsable de sa communication serait la bienvenue ?

Je ne comprends pas… Je ne peux pas comprendre… Je ne veux pas comprendre…

Le 11 novembre 1952, je n’avais pas compris … Aujourd’hui, je ne comprends toujours pas !


[1Il nous appelait affectueusement ses tatous : « t’as tout du ballot ! »

[2L’auteur de cette ineptie est Rouget de l’Isle.

[3Je doute qu’elle le soit pour un adulte…

[4En ce temps-là, proposer le volontariat aux enfants et demander l’autorisation des parents n’étaient pas dans les mœurs ; si cela avait été le cas, le bataillon des mouflets de service eût été bien mince…

[5Deux articles parus dans la Gazette intitulés « Divagations généalogiques : Dis, c’était quoi le prénom de Maman Cocard » ( première divagation : « Maman Cocard » et deuxième divagation : « Victorine »).

[6Notre école s’appelle Victor Hugo ; nous étions donc des victor-hugoliens.

[7Un ouvrage incontournable pour comprendre ce qui me différencie des « normaux-pensants » : Christelle Petitcollin - « Je pense trop » - éditions Trédaniel.

[8La partie gauche non publiée dans le N° 495 de la revue Histoire est occupée, au premier plan, par le premier ministre israélien Benjamin Nétanyahou et trois autres enfants dont un à peine plus âgé que la fillette.

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28 Messages

  • Un devoir ô combien traumatisant 7 mars 2023 18:08, par Jacqueline ISNEL-GUERIN

    Bonjour Michel,
    Forte émotion à la lecture de votre texte !
    Quand j’étais une fillette (il y a bien longtemps !!), avec tous les écoliers nous allions participer à LA Cérémonie du 11 novembre, nous chantions en chœur La Marseillaise. J’ai raconté sur la gazette (article ’Un monument des enfants à Savines") mon ressenti de l’époque.
    N’ayant aucune envie - et même peur- que cela arrive, j’avais du mal à chanter cette phrase "qu’un sang impur abreuve nos sillons !", j’éprouvais déjà ce sentiment qu’il vaudrait mieux arrêter toute guerre et vivre fraternellement !
    Maintenant, à 75 ans, je sais que ce sera, hélas, toujours impossible !
    Merci pour ce texte et pour tous ceux que vous nous proposez régulièrement sur la gazette.
    Amicalement. Jacquie Isnel-Guérin

    Répondre à ce message

  • Un devoir ô combien traumatisant 7 mars 2023 11:32, par magguy level

    oui cela a du etre traumatisant car sans préparation ni explication !! pour ces jeunes enfants !! A l’époque on ne prenait pas de gants et tout évennement même dramatique nous étais imposé j’ai du assisté à 7ans àux funérailles de mon parrain décédé à 30 ans et quand j’y repense 70 ans après tous les détails sont présents dans ma mémoire et pour toujours en conclusion cet évennement est bien resté ancré à jamais dans votre souvenir et c’est bien ce que voulait les adultes autour de vous !!!!!!

    Répondre à ce message

  • Un devoir ô combien traumatisant 6 mars 2023 21:10, par Colette Boulard

    Merci, monsieur Baumgarth, pour ce récit, cette analyse si personnelle, intime. Il est très sain de reconnaître et d’accepter de dire qu’un traumatisme lors de votre prime jeunesse, s’est manifesté des décades plus tard. Parce que c’est ça, la vie des hommes (je veux dire des humains).
    Je n’ai pas eu, petite, à faire faction devant un monument aux morts ni devant la stèle d’un soldat. Mais j’ai eu, enfant, d’autres devoirs imposés, violents même à mes yeux, auxquels je ne pus me soustraire, et cela m’a marquée.Comme l’expriment d’autres lecteurs, cette question du traumatisme possible pour l’enfant ne se posait pas la plupart du temps.Il fallait faire son devoir, comme le gosse des voisins, comme les autres, point barre.
    Par contre, mon père, prisonnier de guerre, ayant beaucoup, beaucoup parlé de sa guerre et de sa captivité, cela a empoisonné une partie de mon enfance. Le pauvre avait du mal à dépasser lui-même certaines blessures morales, certains souvenirs, de réels traumatismes, et en parlait beaucoup, trop pour moi pour qui tout ça c’était vieux, loin ! Sensible, ayant aussi besoin d’autre chose, et de plus de gaité, j’en ai souffert, et ai saturé face à ces récits envahissants. Ensuite, j’ai "oublié" la plupart des récits, ce que maintenant je regrette inévitablement, mon père étant décédé. Mais maintenant, je suis libre de lire, entendre, comprendre, ou de le refuser. Petite je n’avais pas cette liberté.

    Répondre à ce message

  • 11 novembre 5 mars 2023 14:07, par Giselle Coste-Berta

    bonjour, dans mon petit village où maman enseignait aux 10 enfants que nous étions, le 11/11 était le jour d’une grande promenade dans la montagne jusqu’à la stèle commémorative de l’exécution d’un jeune valet de ferme de 18 ans qui ravitaillait le maquis .Nous posions des fleurs sur la stèle et ensuite nous jouions : cache cache etc, Cela ne m’a jamais traumatisée , jusqu’à ce jour où en discutant avec mon père (il était soldat à garder un cimetière à Morhange) il m’apprit que les résistants se trouvaient proches du jeune homme mais ne l’ont pas défendu. Là , j’ai été vraiment choquée et je le suis toujours. D’après ce qu’avait appris papa, les allemands n’étaient pas très nombreux. Auraient ils été battus ou au contraire le maquis
    aurait -il été décimé ? On ne peut savoir mais chaque 11/11 je pense à ce jeune homme.
    l’Histoire n’est pas toujours belle.

    Répondre à ce message

    • 11 novembre 5 mars 2023 20:01, par Orson

      Bonsoir Gisèle,

      Morhange n’est pas en montagne, mais sur le plateau lorrain de Moselle, considéré comme allemand à partir de 1940, aussi bien par l’Allemagne nazie et par la France vichyste à partir du 16 juin 1940. Il n’y avait pas à proprement parler de maquis, seulement des réfractaires clandestins et sans armes, qui ne pouvaient pas rejoindre la France pour la plupart puisque la gendarmerie ou toute autre administration française les aurait livrés aux Allemands et ils auraient été fusillés aussitôt et sans procès et leurs familles déportées. Ces réfractaires ne risquaient donc pas seulement leur vie mais aussi celles de leurs familles, lesquelles si elles ne savaient prouver par quelque subterfuge la "trahison" de leur fils, frère ou mari, étaient elles-mêmes en danger. Ceci explique comment et pourquoi 90% des jeunes hommes de cette région ont été "Malgré-Nous" (ont connu, la guerre et le goulag ensuite), 7 à 10% réfractaires et quelques autres, résistants et combattants dans la mesure où ils avaient pu rejoindre la "France Libre" ou les maquis.
      Ces réfractaires clandestins, non armés, vivaient donc aux crochets de la population qui les nourrissait sur ses cartes de restrictions (car tout était règlementé), en échange, il ne fallait pas d’esclandre, ni aucune action qui aurait mis leurs bienfaiteurs civils en danger, cela en attendant des jours meilleurs... C’est une autre forme de résistance. Des clandestins, il y en avait à peu près partout, principalement dans les forêts, mais aussi dans les greniers, les fermes, les anciennes mines et même dans un clocher d’église où j’ai de la parenté et où sont restés camouflés trois hommes (traqués pourtant) pendant un an et demi, et qui, finalement, utilement prévenus à temps, ont pu traverser ce temps difficile et en sont sortis rescapés...
      Puisque l’occasion se présente, je voudrais (à la manière de Michel Baumgarth) rendre hommage à mon instituteur du cours moyen (Mr Collignon) et qui avait plus ou moins huit ans à cette époque de la guerre et qui était déjà chargé d’emmener du pain la matin aux quatre gars qui se trouvaient dans la forêt à 3 kilomètres de son village. Bien-sûr, il savait à son âge que c’était interdit et que c’était un secret, mais il l’a fait quand même, pour être digne des siens. Finalement tout c’est bien passé pour lui et pour ces 4 jeunes qui ont survécu à la guerre aussi. Et je me souviens de ses leçons aussi : bien que "scientifique" (il aimait nous enseigner les mathématiques d’abord), il commençait tous les matins par la "morale" (avec la "leçon du jour" à recopier sur nos cahiers) et je peux dire j’ai eu droit à St-Exupéry, à Maurice Herzog, à Mermoz et à d’autres. Et entre tous ceux là, à son vécu dans cette période, et, mine de rien, je n’en ai rien oublié....
      Tout cela pour dire que cette interprétation d’un évènement que vous n’avez d’ailleurs pas vécu est très sévère et certainement partiale, mais c’est probablement celle qu’on vous a donnée à intégrer. Or la réalité est toujours à nuancer (meilleur des cas) quand elle ne contredit pas carrément le version qu’on voudrait officielle.

      Répondre à ce message

      • 11 novembre 7 mars 2023 10:55, par giselle Coste-Berta

        bonjour Orson
        je connais Morhange pour avoir vécu 4 ans en Lorraine et y avoir amené ma fille pour un entretien de stage à l’usine de tuyaux (je ne me souviens plus du nom)
        Et pour avoir été professeur d’allemand ,et avoir enseigné l’histoire accessoirement, je connais aussi l’histoire des guerres qui ont confronté la France et l’Allemagne.
        J’ai seulement voulu montrer que tous les maquis ne se valaient pas et que certains maquisards ont profité de la guerre. Mon père ne faisait pas partie du maquis, occupé qu’il était à ravitailler par son travail une trentaine de personnes (familles et amis) .Et aussi parce qu’il connaissait la "valeur " des maquisards.
        Par contre d’autres , comme le commandant Julien furent de vrais héros.
        Votre message m’avait rappelé mon enfance et notre "promenade " du 11 novembre. Je savais déjà que l’oncle de papa était mort à 18 ans dans le nord pendant la 1èreguerre
        et que son frère, mon grand père, gazé lors de l’attaque d’un tunnel , toujours dan le nord avait perdu la vue et était mort des suites de cette guerre, laissant mon père chef de famille à 10 ans à peine.
        mais notre insouciance d’enfants nous protégeait, et ce n’est qu’en devenant adulte que j’ai compris beaucoup de choses, par exemple comment les normaliennes de Montpellier ont essayé et parfois réussi de protéger leurs camarades juives.
        nombreuses sont les histoires de la guerre .
        cordialement
        Giselle

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  • Un devoir ô combien traumatisant 4 mars 2023 15:36, par Martine SCHERRER

    Bonjour Michel,
    Merci pour votre témoignage fort intéressant où vous décrivez bien l’injustice et l’indicible ressentis par les enfants. Indicible = qu’on ne peut pas dire, cela aboutissant à un secret.
    En psychogénéalogie on dit que les personnes qui travaillent dans le domaine des soins réparent les ancêtres (Salomon SELLAM) assurément vous avez bien réparé.
    Je n’ai pas connu mon grand-père paternel, quand j’ai posé une question sur son décès on m’a raconté une histoire que je n’ai pas crue une seule seconde, j’avais 4 ans. C’était indicible car trop douloureux, j’ai connu la vraie histoire par mon père bien plus tard à l’occasion de généalogie.
    Merci aussi pour votre citation du livre "Je pense trop" Qui fait comprendre bien des choses.
    Bien cordialement.
    Martine 75 ans.

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  • Un devoir ô combien traumatisant 4 mars 2023 09:46, par Francoise BRY DEIBER

    Quel terrible récit.... très émouvant. On ne peut rester insensible à la lecture de cet article.
    J’éprouve toujours autant de plaisir à lire ces articles de qualité

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  • Souvenir de 1959 3 mars 2023 19:20, par Maryse Stenuit-Millet

    Cher victor-hugolien ,
    Votre récit m’a émue et m’a évoqué le 11 novembre 1959.J’étais en CE 2 à l’école primaire de Vouvray (37).
    Toute classe devait être présente au monument aux morts .
    Je ne manquais jamais l’école, j’étais bonne élève et ce n’était pas une époque où les élèves contestaient les demandes de la maitresse...
    Mais mon père, ma tante et ma grand-mère (ces deux dernières avaient connu a guerre de 14-18) ont dit "tu n’iras pas à cette commémoration"Et je n’y suis pas allée.Le lendemain l’institutrice (dont je tairais le nom)nous a demandé d’écrire une rédaction sur la cérémonie de la veille.(Elle savait pertinemment que je n’y avais pas participé). J’ai écrit un récit en inventant ...Il y avait évidemment des erreurs, des incohérences. Quand elle a rendu les cahiers,elle n’avait pas corrigé et n’a fait aucun commentaire (et pourtant,la bienveillance n’était pas sa plus grande qualité !!)Elle n’a pas non plus cherché à parler à mes parents...Ils lui auraient dit ce qu’ils pensaient de l’implication des enfants dans le rappel traumatisant des horreurs de la "grande guerre".
    Je partage votre émotion, même après des décennies.
    M.S-M

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    • Souvenir de 1959 3 mars 2023 22:48, par Monique Barbas

      votre très beau récit m’a beaucoup touchée, et m’a rappelé un certain 11 novembre de mon enfance .Le 11 novembre 1945 dans un village de Normandie j’assistais avec ma classe aux cérémonies et dans le village 2 prisonniers n’étaient pas encore rentrés dont mon père nous avons prié pour eux ne sachant pas se qu’ils étaient devenus. Ce même jour quelques heures plus tard nous apprenions qu’ils venaient d’arriver au Havre. Comment oublier, j’ai 88ans

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  • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 18:25, par Hauchard Didier

    Bonsoir,
    Mes parents étant instituteurs, fin 50 debut 60 nous allions avec les classes de CM1 CM2 et certificat d études à la cérémonie au monument aux morts en face de l école du 11 novembre, et nous chantions la Marseillaise.
    Mes deux grands pères ont été blessés, mais il n en parlait pas.
    Pour l un d entre eux , j ai même appris son parcours militaire et ses blessures importantes par le registre matricule en 2014.
    En novembre dernier une de mes petite fille en CM2 a assisté à la cérémonie aux monument aux morts dans son village. Le thème donné par l école était : la débâcle en 1940.
    Avec notre aide pour les faits, elle a exposé le départ de mes grands parents de Fécamp, les lumières d Yvetot en feu et l incendie des pétroles de Port Jérôme, la difficulté de traverser la Seine ...
    C était une très bonne initiative qui participe au devoir de mémoire.
    Bien cordialement
    Didier H

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  • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 15:28, par catherine marquet

    Bonjour, Michel,

    Toujours aussi passionnant cet article.
    J’ai remarqué que lorsqu’on prend de l’âge ( j’aai pratiquement 64 ans) , les souvenirs d’enfance reviennent et il nous semble que c’était hier.
    Traumatisant, je veux bien croire , d’autant plus que l’instituteur ne vous avait rien expliqué auparavant.
    Bien cordialement.

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    • Un devoir ô combien traumatisant 4 mars 2023 10:06, par mic50

      Bonjour Catherine,
      J’en ai pratiquement 12 de plus et cette époque 50/55 était resté marqué par celle de 39/45. Celle la on en parlait encore moins. Il ma fallut prendre mes 60 ans et faire ma généalogie pour tout comprendre, et faire le bilan des morts pour la France dans ma famille.
      Je vous souhaite un bon WE avec un temps convenable sur la Normandie.
      Bien amicalement.
      Michel Glock

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      • Un devoir ô combien traumatisant 5 mars 2023 13:01, par catherine marquet

        Bonjour, Michel,

        Pour moi, ce sera un week-end gris et légèrement pluvieux sur la SEINE ET MARNE !!
        Sinon, j’ai possé la question à mon mari né en 1948 et il n’a pas connu ce genre de cérémonie avec les enfants de l’école.
        Bien amicalement.
        Catherine

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        • Un devoir ô combien traumatisant 6 mars 2023 09:08, par mic50

          Bonjour Catherine,
          A l’époque j’étais en région parisienne, Etampes,je crois que le régime n’était pas le même pour tous.Ce sont des souvenirs qui me sont rappelés à cause de cet article,et l’occasion de pouvoir en parler.
          Merci pour vos réponses cela m’a fait plaisir.
          Bien amicalement.
          Michel Glock.

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  • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 13:56, par Jomin Françoise

    Bonjour,votre écrit m’a fortement émue, car je suis originaire d’un village de l’Aisne, qui a souffert et qui porte encore des traces de la guerre de 1870, 1914.1918 et 1940.1945,
    J’ai participé avec tous les élèves de l’école communale aux commémorations au cimetière militaire pendant toutes mes années scolaires élémentaires. Je me souviens de ces 2 ou 3 kilomètres que nous faisions au pas avec la fanfare dans la neige et nous avions si froid ! Mais Je me sentais investie d’un grand devoir envers nos anciens combattants, et je pensais que ma place était d’être là et j’en étais fière, mon arrière grand père étant mort à Verdun.
    Tous les matins nous chantions le chant du partisan avec notre maîtresse d’école avant de commencer les cours !
    Je me rends compte maintenant que ces années m’ont fortement façonnée, car j’en relate toujours les faits lorsque l’on me questionne sur mon enfance ! Bien cordialement. Françoise Jomin

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  • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 11:37, par mic50

    Bonjour à tous,
    Moi aussi nous participions à cette cérémonie du 11 Novembre dans les années 50/60 c’était la classe entière qui était présente environ 15 élèves.
    Il n’y avait pas tout cet environnement c’était simplement l’énumération des noms et la sonnerie aux morts, mais nous avions certainement pas toute cette émotion, d’ailleurs personne ne nous avait rien expliqué.
    J’ai compris toute cette histoire lorsque j’ai fait ma généalogie avec tous ces drames familiaux, et cette boucherie que j’ai découvert en consultant les journaux de campagne sur mémoire des hommes.
    Ayant un age certain j’espère que nos jeunes irons aussi faire des recherches et essayer de comprendre (si cela peut arrêter ces guerres, on peut rêver)
    cordialement.
    Michel Glock

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    • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 21:14, par Orson

      Bonsoir Michel,

      Croire qu’il n’y aura plus de guerre, c’est comme espérer qu’il n’y aura plus d’incendie de forêt. Or, on sait que les incendies de forêt permettent de la régénérer, puisqu’ils s’inscrivent dans un continuum probablement nécessaire. Cela permet de "rebattre les cartes" pour le dire trivialement.

      Cordialement.

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      • Un devoir ô combien traumatisant 4 mars 2023 09:55, par mic50

        Bonjour Orson,
        Oui c’est vrai votre réflexion, je rêve d’un avenir meilleur pour nos enfants et petit enfants. Nous ne sommes pas les maîtres dans cette vie nous ne sommes que des pousses qui peuvent très bien grandir ou se faner, nous n’avons pas le choix. (Il faudrait avoir le pouvoir sur nos politiques).
        Cette der des der à quand même laissé des traces indélébiles dans les familles,de toutes manière il ne faut pas que cela s’efface comme le tableau a l’école.
        Merci pour votre réponse cela me permet de réfléchir sur d’autres points de vue.
        Bien amicalement.
        Michel Glock

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  • Essayons d’éviter que ça recommence ! 3 mars 2023 11:13, par Jean-Pierre Budin

    Bonjour Monsieur Baumgarth,
    Plus encore que par votre description précise de cette triste expérience du 11 novembre 1952, j’ai été touché par ce que vous exprimez de votre horreur de la guerre.
    C’est que nous subissons présentement dans la plupart des médias le discours enthousiaste de va-ten-guerre qui ne semblent rêver que de la pérennisation et de l’extension de la guerre en Ukraine. Fournir des armes, vaincre, triompher. Comme si la catastrophe était désirable. Mais seuls les marchands de canons se frottent les mains.
    je préfèrerais entendre un autre discours, comme en auraient fait François Cavanna ou Boris Vian.
    J’ai un âge voisin du vôtre, et j’apprécie beaucoup vos textes. Soyez-en sincèrement remercié.
    Jean-Pierre Budin

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  • Enfances peu protégées d’autrefois 3 mars 2023 11:08, par claudine Haubert

    Bonjour Monsieur et merci pour votre article passionnant !
    J’aimerais rappeler que dans les années 50 l’éducation des enfants était encore sous l’influence de l’éducation du début de siècle et même un peu du siècle précédent ! Les enfants étaient considérés comme des adultes,habillés comme tels, fumant la pipe (!) pour certains garçons, et se frottant très tôt à "la vraie vie".
    La notion d’épargner les enfants, de les ménager, de les protéger d’une vérité trop crue est une notion "moderne" apparue entre autre après 1968, l’enfant devenant une denrée plus rare, plus désirée (avec la contraception et les nouvelles notions psychologiques).
    Quand je pense à ce que ma grand-mère me racontait sur "la vie", alors que je n’avais que 7 ou 8 ans, je me suis souvent fait la réflexion que jamais au grand jamais je n’aurais raconté cela à mes propres petits-enfants ! Et pourtant elle était institutrice dans le Var, mais née en 1875...
    Cordialement, Cl. Haubert

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  • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 10:34, par BERTRAND Yves

    Bonjour
    J’ai participé à ce genre de cérémonie. Je sais que c’est entre 1960 et 1962, dans un petit village de Gironde. Je n’avais pas huit ans.
    Je n’en ai pas gardé le même traumatisme mais le souvenir de ce moment est resté permanent jusqu’à aujourd’hui.
    J’ai gardé le sentiment que je n’avais rien à faire là.
    J’ai habité sept ans à Metz et quatre ans à Verdun. Devant les cimetières militaires de la première guerre, je me suis toujours demandé comment l’être humain pouvait recommencer indéfiniment les mêmes erreurs.
    Cordialement
    Y. BERTRAND

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  • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 10:22, par martine hautot

    Bonjour,Michel

    Dans mon petit village normand ,c’était aussi l’habitude :à chaque commémoration les enfants de l’école venaient en rang chanter la Marseillaise devant le monument aux morts ,je ne m’en étonnais pas ,je ne comprenais pas tout ,croyais que "nous entrerons dans la carrière quand nos aînés n’ y seront plus"cela parlait de la carrière de craie prés du village où nous allions nous promener,le plus impressionnant,c’était la litanie "des morts pour la France "et la sonnerie aux morts.
    Mon père ,ancien prisonnier de guerre de la seconde guerre mondiale que ceux de 14 regardaient avec mépris était très patriote et ne manquait pas de prendre des risques pour accrocher un grand drapeau à la façade de notre maison le 11 novembre,le 14 juillet ... je baignaisdans ce climat-là

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    • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 20:54, par Orson

      Bonsoir Martine,

      Votre anecdote à propos de "carrière" est bien rafraichissante, je dois avoir quelque-chose d’équivalent en mémoire, mais cela ne me revient pas tout de suite. En ce qui concerne les prisonniers de guerre de la première ou de la seconde guerre mondiale, je n’ai pas eu l’occasion de constater quelque mépris des uns pour les autres, tout cela n’étant que cas particuliers Deux de mes oncles (sans lien de parenté entre eux) ont été anciens combattants et prisonniers de guerre, l’un en "Bohème-Moravie", très volubile et qui nous a raconté, spécialement à nous enfants, des anecdotes truculentes qui nous ont fait nos meilleures veillées, et l’autre ; rescapé des goulags (et bien qu’enseignant) n’en a jamais parlé du tout (ni en bien, ni en mal). Pourtant, ils se sont fréquentés dans nos réunions de famille pendant des décennies, sans une once d’animosité. Entre les deux (indépendamment d’eux et de l’Histoire qui reste ce qu’elle est), juste une différence de caractère qui ne les a pas empêchés de vivre ni de se cotoyer à l’occasion.
      Cordialement.

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  • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 10:07, par Monique

    Bonjour,
    Enfant, je n’ai jamais participé aux cérémonies du 11 novembre. Ce n’était pas la peine, tous les dimanches, mon grand-père nous parlait de sa guerre, celle de 39/45, de sa captivité. Il m’a appris La Marseillaise en entier et tous les chants patriotiques, indigné de savoir que l’Education nationale dans les années 1960, nous laissait dans l’ignorance de leur existence. Mon père me menait à la revue du 14 juillet et pour lui, qui avait fait parti du Réseau de résistance Combat, c’était d’une grande importance que je sache. Moi-même, adulte, pris dans le tourbillon d’une vie pas facile, je n’ai pas mené mes enfants mais, par contre, j’ai emmené l’aîné de mes petits-enfants à toutes les commémorations du 11 novembre, du 8 mai, du 14 juillet. Chaque fois, je lui ai fait remarqué que des êtres humains étaient morts pour que nous puissions, maintenant, vivre en paix dans notre pays. Ne pas les oublier est tout de même un peu normal vu leurs souffrances.
    Votre instituteur a vécu ces souffrances indicibles. Comment voulez-vous qu’il vous en parle et vous explique à cet âge si tendre ? Et vous dire quoi ? Qu’il avait vu son copain agoniser à trois pas de lui sans pouvoir l’aider ? Qu’il avait vécu dans des tranchées où les os des morts servaient de porte-manteaux ? Qu’il avait encore dans le nez l’odeur de la mort, le bruit incessant des bombes,les hurlements des blessés et des mourants, les hennissements des chevaux affolés, blessés ? Comment pouvait-il vous raconter sa peur ? C’était impossible et ne rien dire, aussi, voulez dire vous protéger de l’indicible.
    J’ai lu beaucoup de lettres de Poilus. Dans la plupart, ils disaient ne rien risquer, être bien à l’abri. Ils voulaient protéger leurs familles de cette épouvantable tuerie. C’est tout à leur honneur. A titre d’exemple, dans une lettre écrite par ma grand-mère à son frère sur le front italien, elle parle d’un voisin venu en permission. Celui-ci, après quelques bouteilles sans doute, avait fini par leur raconter que son régiment était parti à l’assaut et en arrivant en haut de la colline, ils étaient douze survivants. Comment voulez-vous expliquer "ça" à des mômes ? Mieux valait ne rien dire pour vous protéger. Et puis, peut-être n’avait-il pas pensé que la participation à cette commémoration vous aurez traumatisé à ce point ? Vous savez, quand on est pris dans une situation difficile, on fait au mieux sans trop se rendre compte des dégâts psychologiques occasionnés. Ce n’était sûrement pas voulu mais subis. Alors......
    Une question me taraude : vous rappelez-vous le nom de ce Poilu auquel, finalement, vous avez rendu hommage sans le vouloir et surtout, sans comprendre le sens de cette cérémonie ? Vous qui êtes un généalogiste confirmé, une telle recherche pourrait vous aider à surmonter ce traumatisme.
    Bien cordialement.

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    • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 21:02, par Orson

      Beau message Monique,

      Vous vous mettez dans la situation de l’époque avec un grand discernement et c’est comme ça que vous savez en parler le mieux. Lire tous ces évènements avec nos oeillères actuelles est vain et vous l’avez bien compris.

      Cordialement.

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  • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 09:29, par Philippe Bergé

    Bonjour,
    J’ai 69 ans, et cet article me remémore les années 1964/65. Un petit village du Tarn-et-Garonne, à l’école il n’y avait que 2 classes, j’étais avec l’instituteur qui s’occupe des cours : CM1, CM2, et Fin d’Etude, une quinzaines de gosses. une fois par semaine nous avions cours de solfège/chant avec Monsieur Sol (pas sûr que ce soit la bonne orthographe), et donc le 11 novembre nous rejoignions avec les CE2 le monument aux morts en face de la mairie et de l’école. Je me rappelle que lors de l’appel des noms nous devions répondre "Mort pour la France", et en fin de cérémonie nous chantions la Marseillaise et peut-être d’autres chants patriotiques.
    Cordialement.

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  • Un devoir ô combien traumatisant 3 mars 2023 08:33, par Françoise PUYSSEGUR

    Bonjour Mr 
    Vous venez de raviver un souvenir de 11 nov 1960 où les enfants de l’école primaire de ma commune dont je faisais partie sont restés immobiles, (dans mon souvenir au mois 1 heure), devant le Monument aux Morts sous une pluie battante et un vent sibérien.
    La veille la directrice de l’école était venue dans la classe pour nous dire qu’il était obligatoire de venir à cette cérémonie pour chanter la Marseillaise. Je me retrouve dans votre analyse car aucune explication ne nous étais donnée, 14/18 n’était pas dans les manuels de l’éducation nationale à ce moment là, ou bien j’ai occulté...
    Je pense que les autorités supposaient que les informations était données dans les familles. Mais les familles étaient muettes en ce temps là, la douleur était encore trop présente. Les enfants devaient ’’se souvenir ??’’ sans comprendre, aucune conscience de ce que cela avait été pour les hommes.
    Dans la famille de mon mari cette guerre a pris trois des frères, une sœur et la mère de sa grand-mère qui n’a jamais parlé de cette période, qui elle, a perdu son mari en 44 assassiné par un déserteur allemand pour lui prendre son vélo vêtements et papiers...
    Cordialement
    F Puysségur

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