Briançon [1]
Ou j’ai resté environ un mois est une petite ville ou il n’y a rien de remarquable, elles est rempardée et entourée de montagnes, couvertes de neige presque toute l’année.
(1er juin) Parti de Briançon avec tous les effets de campement et 6 jours de vivres sur le dos, travercer le mont-Genèvre pour arriver à Oulz, petit village.
Première étape dans le Piémont (2 juin de Oulz à Suze)
Avec une pluie épouvantable tout le long de la route. Suze est une belle ville. Parti de Suze en chemin de fer jusqu’à Turin où les habitants se portaient en foule à notre arrivé, avec des vivats, des claquements de main et des cris de vive l’armée française.
- Le carnet
Turin, je n’ai resté que 4 ou 5 heures où j’ai visité seulement l’entrée de la ville qui est tout-à-fait belle.
Partis de là pour Vercelli ou le chemin de fer a été coupé et un pont entièrement détruit sur le Pô, par les autrichiens ; nous avons campés là pour la 1re fois sur les boulvars de la ville.
Vercelli, est une ville assez jolie ; nous sommes parti de la pour aller 7 à 8 kiloms plus loin a un village nommé Bourg-Vercelli, nous avons campés dans un champ de blé, où un torrent de pluie nous a forcés à quiter le camp et nous sommes venus coucher dans une vieille église de ce village (4 juin).
De Bourg-Vercelli à Novarre
Novare où nous avons campés en dehors de la ville laquelle était toute dévastée par les Autrichiens qui venaient d’en partir la veille. Novare est une ville de 19000 âmes, batie richement, entièrement à neuf, et remarquable par ses marbres et sa peinture. La Division reçoit l’ordre de partir à 11 heures du matin et ne part qu’à 4 heures du soir, le départ fut retardé par l’encombrement du 4e Corps.
Le canon gronde à Magenta et à Bufalara, les troupes d’infanteries hatent le pas et même nous avons pris le pas de course pour parcourir l’espace de 5 à 6 kilomètres, en cherchant à gagner du terrain entre un encombrement d’artilleries et de bagages ; à l’arrivée de San Martino la division fut arrêtée par la brigade Coniveau, par une colonne de prisoniers Autrichiens ; et par la rentrée sur la rive droite de tout le 4e Corps, on nous fait faire une halte à droite dans un vaste champ inculte, jusqu’à ce que la colonne des 600 prisonniers ait passée, nous partons de là vers les dix heures du soir, la division n’arrive au bivouac qu’à une heure du matin en marchant sur les pauvre malheureux morts la veille, et sur les schakots et gibernes, on se met à taton à préparer le café car il y avait près de 24 heures que l’on n’avait rien pris ; la nuit était très obscure, nous étions sur la rive droite du Noviglio dans un champ couvert de morts et de blessés.
Aussitôt le café pris vers les 3 heures du matin on sonne la marche la division croyant de marcher en avant, on met sac-au-dos on marche 25 ou 30 pas et on prend les disposition pour monter le bivouac, sans le grand encombrement la Victoire de Magenta eut été plus décisive, l’armée ennemie aurait reçu une plus cruelle défaite.
5 juin : division reste dans les positions, elle fournit toute la journée des nombreuses corvées pour enterrer les morts laissés sur le champ de bataille la veille, et même nous avons ramassés 2 blessés Autrichiens que nous avons soignés un jour à notre bivouac, ces pauvres malheureux malgré leurs blessures dévoraient ce qu’on leurs donnaient en nous disant dans leur langage Français Bons Cammarades. On les emporta a l’ambulance avec les cacolés.
6 juin : La Division est envoyée en reconnaissance jusqu’à 2 kilomètres d’Abbieta-Grasso. Elle est de retour à 9 heures du matin et repart à 1 heures de l’après-midi pour s’installer à 8 heures du soir au bivouac, dans de belles prairies en avant du village d’Abbieta-Grasso sur la rive de Vigevanca.
7 juin : Les troupes se mettent en marche à 7 heures du matin pour Bagiano en longeant la rive gauche du canal de Milan, on arrive à 3 heures de l’après-midi au bivouac en dehors et en avant du du village au milieu des prairies de lin. Bagiano est un village batis à droite et à gauche du canal, le pont de communication avait été coupé par les Autrichiens 2 jours avant notre arrivée.
8 juin : A 9 heures du matin, nous nous mettons en marche sur la rive droite du canal, passant par Corsico et Crégeano (petit village situé comme le précédent sur les deux bords du lac) l’étroitesse et la démolition du pont de Crégeano retarde de plusieurs heures la marche de la colonne qui n’arrive à Milan que vers les 9 heures du soir, on établit les tentes sur les remparts de la ville, entre la porte Romano et la porte Tusso, en débordant à droite et à gauche de ces deux portes. Un violent orage gène beaucoup l’établissement du bivouac.
9 juin : Séjour à Milan
Vers onze heures du matin l’Empereur et le roi de Sardaigne se rendent à la Cathédrale pour assister à un Tédéum. La haie est formée par la garde impériale depuis le palais Bonaparte jusqu’aux doguemes, la population fait éclater sur le passage du cortège les témoignages les plus brillants pour Victor-Emmanuel et sa vive reconnaissance pour Napoléon III et pour l’armée française, le soir une manifestation semblable se renouvelle par une promenade aux torches avec la musique effectuée par plus de 5000 personnes ; la ville est brillantement illuminée avec des bougies.
10 juin : Grande représentation au théâtre de la Scalla, renouvellement de la manifestation de la ville.
Milan est une jolie ville bien propre et bien bâtie, les rues très droites et bien larges ce qu’il y a de remarquable c’est sa cathédrale qui est construite toute en marbre, il y a 530 marches d’escaliers pour monter à la Flèche (à chaque étage il y a une terrasse pour se reposer). On y compte 8315 statues en dehors et en dedans.
11 juin : Nous sommes partis de Milan à 10 heures du matin pour Gorgonzola, les troupes sortent par la partie orientale et prennent le chemin qui passe par Mozanica, Piatello et Casabianca, touts des villages de peu d’importance on s’établit sur le soir en avant de Gorgonzola dans des belles prairies sur la gauche de la route ; l’armée sarde qui est à notre gauche occupe Biézza-Vagrio ; on conserve un batallion du 55e qui occupe le village de Fornaco.
12 juin : La Division quite le bivouac à trois heures du matin pour se rendre à Tréviglio, c’est là qu’en passant par Inroga, village assez grand construit tout près de l’Adda, l’Empereur avec sa suite a disposé l Division pour assister au passage de cette rivière, l’ennemi en se retirant ayant fait sauter un pont en npierre, on reconstruit un pont en bateau jetté par l’artillerie et le génie.
Tréviglio est une ville de 2000 âmes presque sans mouvements, les rues sont étroites le maisons vieilles et mal bâties, rien de remarquable, qu’un château à l’entrée du bourg au font d’une petite place, à 4 heures de l’après-midi on s’appète à établir les tentes, lorsqu’un violent orage éclate et une pluie épouvantable nous force à nous abriter dans les maisons les plus voisines, heureusement que les gens sont très complaisants, ils nous donnent du bois alors on fait des grands feus dans tous les coins pour se sécher et pour faire la soupe, chacun couche ou il peut.
13 juin : La Division quitte Trévoglio passe par Isna, Berganachi, Ozzevechi, franchit la Sésia sur un pont de pilotis que l’ennemi a essayé de détruire, et que les habitants ont promptement réparé, les troupes se placent dans de beaux prés à droite et à gauche de la route jusqu’au hameau de Sola.
14 juin : On va de Sola, à Fontanella en suivant la route qui passe par Antignana. A une heure de l’après-midi on établit le bivouac à 700 ou 800 mètres de Fontanella en suivant la route de Sonsina, la difficulté est grande pour se procurer des vivres, les moyens de transport sont insuffisant, il n’y avait pas de magasins sur le derière de l’armée ; le pays est ruiné par le passage et les réquisitions forcées de l’armée Autrichienne ; enfin on finit par trouver dans une vieille église une quantité de pains noirs que les Autrichiens n’avaient pas eu le temps ’enlever. L’administration s’en empare et le distribue à la division, dans ces villages de Fontanella et de Antignana. Les musiques du pays viennent au devant de nous avec tous les habitants qui viennent nous prouver leur reconnaissance.
15 juin : Séjour.
16 juin : On se dirige sur Sansino, on franchit l’Oglio sur un pont de bois que l’ennemi n’avait pu faire beaucoup de dégats, le camp est établi à gauche et à droite de la route à 1500 mètres d’Arcinovi.
17 juin : La Division part à 7 heures du matin pour Mairano ; elle suit le chemin qui passe par Pompano, Corzano Lonchéra et Azzano ; on s’établit en avant de Mairano dans les prairies de pierres d’Izzia.
(18 juin) A 5 heures on se met en marche pour Poncarale en passant par Azzano et Cabriano, en franchissant les petites rivières de la Mérila.
19, 20 et 21 juin : Séjour à Poncarale
22 juin : La division part pour Mizzano en passant par Longa et Montiona.
Le 23 juin : séjour.
Le 24 juin : Le troisième corps se dirige tout entier du côté de Médole, lorsque vers les 6 heures du matin nous rencontrâmes l’avant garde d’une colonne Autrichienne qui était sorti la veille de Pechiara et de Mantoue pour nous empêcher de passer la Chièse (rivière). Le Mal Canrobert sur la demande du Général Mich nommé Mal à Solférino, lui envoi pour le soutenir la Division Trochut. On ne jugea pas à propos d’envoyer ou de porter sur Médole le 3e Corps tout entier, car on risque qu’une colonne ennemi forte de 30000 hommes sort de Mantoue pour se jeter sur notre derière par Castelgafréda, l’avant garde de ce corp composée d’environ 250 à 300 cavaliers et deux pièces d’artillerie se montre en effet derièr ce village.
Le Général Bourbaki, prévenu par un officier d’ordonnance du Mal Canrobert, prend ses dispositions pour faire face à l’ennemi, et protéger l’artillerie de réserve ainsi que les convois de bagage du 3e Corps. Il masque ses troupes autant que le terrain le permet, de manière à pouvoir déployer si l’ennemi se présente à Castelgafréda ; 4 pièces d’artillerie sont placées sur les chemins qui conduisent au village, à un embranchement où se trouve le hameau de Selvale. En avant de 500 mètres la compagnie de grenadiers était déjà déployée en tirailleurs près d’un tournant de la route qui donne dans le village de Castelgafréda ; nous étions divisés en deux sections, de manière que la section de droite était à droite de ce village et celle de gauche (dont je faisais partie) était sur le flanc gauche de ce même village, nous marchions excessivement génés dans des terrains de maïs et traversant des fossés plein d’eau nous voyons passer des cavalliers au grand galop, nous voulions faire feu, le capitaine nous le défend en disant que c’est des hussards français, il envoi un sergent pour s’en assurer, qui répond à son tour encore que c’était des français nous avançons tranquillement sur le village ; En passant près d’une tour (espèce de fort) une détonation de feu se fait entendre, alors nous n’avons plus de doute, on voit en effet que c’est l’ennemi, nous embusquons derrière des harbres et haies qui se trouvent là, et nous avons soutenu le feu à merveille, le colonel Hardy vient nous chercher en disant qu’une poignée d’hommes comme nous étions nous n’aurions pas dû tant avancer, le clairon sonne le ralliment au bataillon, nous rentrons tous sur la route, l’ennemi croyant que l’on battait en retraite sort du village pour venir à notre poursuite car nous étions éloignés de près de 2 Kil. de la division, les voyant venir de nouveau sur nous le sabre à la main au grand galop, nous fesons demi-tour et on fait une décharge sur eux heureusement pour nous qu’une Compagnie du 11 Bata. de chasseur à pied vint nous aider à soutenir le feu, l’ennemi après que nous en avons descendus 3 ou 4 d’à cheval, nous croyant plus nombreux fait demi-tour, on nous fait rentrer dans la Division, et les chasseurs les poursuivirent jusque dans le village d’où ils prennent la fuite. A 5 heures du soir toute crainte parraissait être disparue de ce côté-là.
On nous dirriges ensuite vers une belle ferme dont se trouvait un belle maison, et on nous donne ordre de faire le café en plaçant des factionnaires et des postes avancés tout autour.
Le café but vers les 6 heures et ½ du soir on prévoit un grand orage qui se préparait. On nous fait mettre sac au dos et on nous dirige sur Médole, vous arrivons à cet endroit (lieu ou a commencé la bataille du 24) vers les 7 heures ½ tout mouillés et épuisés de fatigue on nous fait mettre sac à terre, prendre un biscuit dans la poche et nous partons au pas de cours, pour nous dirriger du côté de Solférino ou le canon gronde fortement, les blessés ne cessaient d’encombrer la route et nous étions obligés de nous écarter dans les terres afin de les laisser passer assez librement, on les transportaient du lieu du champ de bataille dans le village de Médole. Nous arrivons sur la grande plaine ou avait lieu ce sinistre carnage en marchant sur les corps morts et blessés de toutes parts. Il se fait un mouvement de troupes on nous fait prendre notre place de bataille, vers 8 ou 9 heures du soir le canon cesse : la bataille de Solérino est gagnée nous avons passé la nuit à garder les positions en faisant de grands feus pour nous sécher et faire la soupe (car depuis le jour avant nous n’avions pris qu’un café). La moitié de nous ont été envoyé à Médole pour chercher les sacs la nuit se passe tranquille sans alertes ; il nous reste de cette journée 6000 prisonniers 90 pièces de canon et 2 drapeaux. (Cette journée a été mémorable pour la France).
25 juin : La Division quitte le champ de bataille pour se rendre droite et en avant de Solférino sur les positions enlevées la veille par le 1er corp et la garde impériale ; au moment du départ une alerte produite par la rentrée d’une reconnaissance française occasione jusqu’à Médole et Castiglione un tumulte aux conducteurs des voitures qui suivent les deux routes. Le général prend alors des mesures d’offensives auxquelles il suspends quand il s’est assuré que tout ce bruit n’a aucune cause sérieuse.
A 7 heures du soir les troupes rétablissent le bivouac, elles environnent et couvrent toutes les hauteurs qui s’étendent entre Solférino et Cavriana. De cette ligne de hauteur on distingue facilement le Mincio, le lac de Garde et la route de Peschiéra.
26 et 27 juin : séjour.
28 juin : La Division marche sur Goito et se range en ligne de bataille pour marcher de front sur un superbe château à un Kil. du Mincio, car en crainte que l’ennemi se trouve là, d’après un mur que l’on appessoit tout crénellé, long d’environ 300 mètres, et des batteries à chaque coin du mur que l’on connaissait que ces travaux étaient faits de frais. L’ennemi venant de perdre la bataille de Solférino, ne trouva pas prudent de nous attendre, craignant de prendre un bain dans le Mincio, en était parti la veille.
Nous avons campés en face de cette belle maison de campagne où se trouvait encore un bon vieillard agé de 103 ans qui avant fait plusieurs campagnes sous le règne de Napoléon 1er et dans la nuits deux cavaliers Autrichiens ont désertés armes et bagage, sont venus au camp en disant qu’ils voulaient servir la France.
29, 30 juin 1er 2, 3 juillet : séjour à Goito.
Une alerte du 2 juillet fait prendre les armes à la division, vers une heure du matin on envoit une reconnaissance et on s’assure que c’est un actionnaire qui a donné cette fausse alerte on entre sous les tentes.
4 juillet : passage du Mincio.
La division vient camper en avant de Vallegio et le 1er Bataillon ou je suis du 59e reste sur une hauteur avec 2 ou 3 pièces d’artillerie de la garde afin de garder cette position sur la rive gauche du Mincio près du moulin de Volta. La rivière coule à nos pieds ou deux ponts en barque sont placés dessus afin de donner moyen aux troupes françaises de franchir le Mincio. Nous occupons cette hauteur [qui] est à environ 1500 mètres de Valleggio entre les hameaux de Campagnole et de Ferone.
5 juillet : le 5e Corps commandé par le prince Napoléon nous dépasse franchit encore le Mincio et nous changeons de bivouac pour aller rejoindre les divisions. La nuit du 6 au 7 était affreuse acause de violents éclairs des orages épouvantables. Le canon grondait à Peschiéra et le tonner grondait sur nos têtes une pluie épouvantable il fallait se conduire en regardant briller les armes des hommes qui étaient devant soi.
On nous fait prendre le café à moitié chemin vers les 10 heures du soir que nous croyons même coucher à ce bivouac mais il vient un ordre qu’il fallait rouler les capotes se mettre en veste et partir promptement pour aller rejoindre le régiment. En arrivant au lieu ou était la Division vers les 3 heures du matin on nous fait mettre sac à terre prendre deux biscuits dans nos poches du sucre et du café et on nous distribue une ration d’eau de vie à chacun sur une crête de montagne près d’une ferme qui se trouvait là, car on s’attendait à une forte attaque.
7 juillet : Sur la route de Valleggio à Villafranca et le village de Venterelle aux pieds des colines de Sainte Lucia le 3e Corp tout entier couvre Valleggio Fornello et fait face à Villafranca. L’Empereur déjà à cheval à 3 heures du matin modifie l’emplacement de la 3e division en la faisant appuyer à gauche, il laisse une de ces brigades sur les hauteurs inoccupées par le 2e et 3e corps. Un coup de canon tiré par notre artillerie, et l’ennemi n’ayant pas répondu et ne s’étant même pas présenté l’Empereur à fait rentrer ses troupes dans leurs bivouac. Jamais je n’avais vu un pareil enthousiasme dans les esprits ; chaque soldat était si bien préparé que si les Autrichiens s’étaint présentés ils auraient reçus la plus cruelle défaite qu’il fut possible d’imaginer ; car les 5 corps d’armées étaient tous réunis et placés sur la même ligne enfin tant loin qu’on ne pouvait pas les distinguer.
L’attitude de ce jour est la preuve la plus certaine du courage du soldat français, maussi telle était la joie de marcher en avant, autant fut violent le regret de se retirer et de rentrer sous les tentes sans tirer un coup de fusil. L’empereur lui-même avait tellement avancé que les cent gardes de son escorte l’avait perdu il avait été jusqu’au avant-postes de l’armée Autrichienne.
Source :
- Serge Berstein et Pierre Milza, Nationalismes et concert européen, 1815-1919, Paris Hatier, 1992.