Acte 15 - L’honorable Gilles Morinays
Scène 6 - Le rédacteur du cahier de Vezin
"Gilles préside l’assemblée au banc d’œuvre, convoquée après vêpres, au son de la cloche : le général de la paroisse. Un général exceptionnel, puisqu’il s’agit de dire, entendre et écrire, les plaintes et doléances des habitants de Vezin.
Tous les hommes majeurs, présents dimanche dernier, sont revenus ce soir, parfois accompagnés de plus jeunes membres de la famille voulant y être pour tout savoir.
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— C’est bien vu Grégoire ! C’est pourquoi, moi, Gilles Morinays, syndic de Vezin, désigné par vous député à l’assemblée de sénéchaussée de Rennes, chargé de rédiger, en votre nom, le cahier des plaintes, doléances et observations de cette paroisse, je vous propose d’écrire le premier article de la façon suivante : « Les habitants de Vezin désirent… que le peuple des campagnes soit mieux représenté aux États particuliers de la province et aux autres assemblées quelconques de la même manière qu’il l’est aux États généraux ». Vous m’avez bien entendu, j’ai dis : « le peuple des campagnes » et non pas les riches bourgeois des villes qui prétendent être le tiers à eux seuls. C’est notre manière, à nous, de répondre aux vues bienfaisantes de notre bon roi Louis, qui nous écrit le 16 mars dernier : « Sa Majesté a pensé qu’il ne pouvait priver ses sujets de Bretagne, du juste droit, qu’ils ont tous, ensemble ou séparément, d’être représenté à la prochaine assemblée des États généraux. Ils sont François et se sont montrés tels, avec honneur, dans tous les dangers de l’État. Ils participent à tous les intérêts de la Monarchie, ils sont associés à sa prospérité et jouissent de tous les avantages qui résultent de sa puissance ; aussi, le plus grand nombre des habitants de Bretagne regarderaient-ils comme un véritable malheur d’être négligés, dans un moment où tous les sujets du Roi nomment les députés, qui viendront autour de Sa Majesté, travailler avec Elle au bonheur public, à la gloire et à la prospérité de l’État ».
La déclaration royale, et la proposition de Gilles, sont accueillies par un concert de sabots claquant au sol, comme il semble être devenu la pratique pour exprimer l’approbation joyeuse du général depuis le dimanche dernier.
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— Si vous n’avez plus rien à ajouter, je conclurai notre cahier par la formule : « Adopte, ledit général des habitants, tous et chacun des articles de doléances ci-dessus. Et ont, les assistants, signé le général, ceux qui le savent faire ». Et ceux qui le savent faire peuvent venir après moi signer…
Répondent à l’appel de Gilles : M. Derniaux, C. Kalbreut, Pierre Delaunay, Louis Guinyait, R. Rouger, Pierre Louazel, Gilles Fourché, Joseph Thouanel, Pierre Louazel, Jacques Faucheu et Colleu.
Pendant que ceux qui savent, relisent le cahier manuscrit sur trois feuillets, des conciliabules se poursuivent, prolongeant l’assemblée en de nombreux petits débats, où chacun peut plus facilement s’exprimer et se rassurer, à s’écouter parler et se convaincre de son bon droit, sans aucune envie de se séparer malgré l’heure avancée. Chacun vient de mesurer, combien à être ensemble, il se peut réveiller de courage."
Le Jeu des questions du grand Jacques
Question de l’acte 15 - Scène 6 : L’une des doléances fréquentes en 1789 est la suppression du tirage au sort. Les milices royales et provinciales étaient pourvues par tirage au sort parmi les hommes valides de 16 à 40 ans. Mais, qui en était exempté ? Vous trouverez la réponse la semaine prochaine dans l’acte 15 - Scène 7 Réponse à la question de l’acte 15 - Scène 5 : Revoir l’acte 15 - Scène 5 Dès janvier 1789, un libelle écrit par un vicaire favorable au tiers état circule, 30 000 exemplaires sont vendus en moins de deux mois. Qui est cet auteur à succès et que dit-il de si révolutionnaire ? Emmanuel Joseph Siéyes (1748-1836), vicaire général de Chartres, auteur de Qu’est-ce que le tiers état ? "Tu as eu à connaître le libelle de l’abbé qui écrit pour le tiers. Les questions qu’il pose et les réponses sont claires ! « Qu’est-ce que le Tiers État ? » demande-t-il. « Tout » répond-il. « Qu’a-t-il été, jusqu’à présent ? » « Rien », qui peut le nier ? « Que demande-t-il ? », « À être quelque chose », tout simplement. Peut-on croire que le roi ne soit pour rien au fait que nous soyons Rien ? Peut-on penser que le roi ait vraiment envie que nous devenions quelque chose ?" Laboureurs d’espoirs |
À suivre… Acte 15 - L’honorable Gilles Morinays - Scène 7 - Le témoin de l’Histoire