Acte 15 - L’honorable Gilles Morinays
Scène 4 - Le laboureur
"... — Moi, c’est Maître Gilles. Voilà Jan, mon frère, avec qui nous partagerons le labeur. Marie, tu mettras une ration de plus pour Augustin. C’est sept sols la journée et nous verrons ce soir ce que sera demain. Jan, tu attelleras Thazar et Germain quand Augustin conduira Bécar et Tiburce. Moi, je m’occuperai des chevaux, j’attellerai Macaron et Félix à la charrue et Altibo tirera la charrette avec les outils. Pour reposer les bœufs, quand il le faudra, nous conduirons les vaches à la relève : Lise et Millette pour toi, Jan, Rosine et Zoé pour Augustin. Vous les userez juste ce qu’il faut pour permettre aux mâles de souffler un peu, de temps en temps, sans fatiguer les belles au point de leur gâter le lait. Nous ferons chacun une pièce : Augustin la farougère à l’araire, Jan et moi, nous ferons plus profond, à la charrue, pour le sarrasin. Quant à toi Marie, tu profiteras de la sortie des chevaux pour rafraîchir l’écurie. Tu engraisseras les cochons et mettras Pierre au clou pour aller tailler la vigne pendant que Rose sarmentera derrière toi.
...
Quand Gilles se place en tête, à la gauche d’Altibo qu’il prend par le guide, le cortège s’ébranle à pas lourds. Augustin chemine à la droite de Millette, au deuxième rang des laitières. Je ferme la marche derrière Tiburce. Chacun porte une aiguillade à chausson de fer.
Vue de dos, la carrure de Gilles n’en est que plus impressionnante. Sa longue tignasse blanchie recouvre son col, l’engonçant dans sa blouse de grosse toile bleue tombant droite de ses larges épaules jusqu’à mi-jambes. À cinquante-cinq ans, il reste une force de la nature, malgré les travaux qui en usent plus d’un bien avant cet âge avancé.
Lorsqu’il se retourne pour vérifier l’alignement, son visage carré, lèvres pincées, mâchoires serrées, est animé de mouvements secs ; le regard vif et mobile est à l’affût de tout ce qui pourrait dérégler le train.
Nous suivons la piste montante, tracée à travers les cultures à force de passer toujours aux mêmes endroits. Les terres du Grand Caradeuc s’étalent au flanc du coteau qui les protège des vents dominants, en s’abaissant doucement jusqu’au ruisseau du Lagot, au fond du val, aujourd’hui recouvert d’une nappe de brume cotonneuse."
Le Jeu des questions du grand Jacques
Question de l’acte 15 - Scène 4 : Pourquoi Marie devra-t-elle mettre "Pierre au clou pour aller tailler la vigne" ? Vous trouverez la réponse la semaine prochaine dans l’acte 15 - Scène 5 Réponse à la question de l’acte 15 - Scène 3 : Que viennent faire "quelques ruches" dans l’énumération descriptive des biens du Grand Caradeuc ? Revoir l’acte 15 - scène 3 À cette époque, toutes les fermes, même les plus pauvres, possèdent plusieurs ruches (10-20-40). Le miel est la seule source de sucre ajouté disponible. Laboureurs d’espoirs Note 88. |
À suivre… Acte 15 - L’honorable Gilles Morinays - Scène 5 - Le rebelle