Le village de Gagny ne possédant pas de rivière pour satisfaire a l’entretien du linge de ses administrées. Monsieur Regley Président des Assemblées Municipales ( Le maire) décide vers 1874 de faire construire un lavoir communal au bord du chemin de Neuilly (avenue Aristide Briand) à proximité du ru Saint Baudile et près du chemin de fer. Lieux occupés par le service technique municipal jusqu’à la date de rédaction.
Le 5 août 1875 le choix des prestataires est fait : l’Architecte M. Paul Dolbey, l’entrepreneur M. Pechinot, le charpentier M. Charbonnier. La construction se fait avec un réservoir sur le toit du bâtiment qui existe encore à ce jour. Le lavoir ouvert vers 1876, servait aux familles et aux laveuses pour entretenir le linge de leur clientèle.
Dès 1877 le lavoir est agrandi avec prévision de trois bassins par l’achat d’un terrain à M. Denos Charles situé au lieudit « Le Pré St Faron ». Suite à cet agrandissement Monsieur Regley exige un premier règlement qui est adopté le 15 septembre1879. Une surveillance sévère est souhaitée.
Il faut savoir que certaines dames venant laver leur linge ou celui de leur clientes n’avaient pas toujours bon caractère et entre-elles il y eut quelques accrochages assez chauds. Elles se battaient pour une place avec leur linge mouillé, les crêpages de chignons étaient fréquents, les plus hardies intimidaient les plus timides, sans parler du langage imagé qu’elles employaient.
Un surveillant nommé Lemaître, sera chargé de faire appliquer le règlement.
Le surveillant devra vider les bassins 2 fois par semaine. Veillez à la propreté et à l’ordre. Etre sévère, faire payer la location des cordes à étendre. Empêcher l’accès aux enfants.
Pour les utilisatrices :
- Interdiction de laver dans le premier bassin strictement réservé au rinçage.
- Interdiction d’essanger (prélavage) dans le grand bassin uniquement destiné au lavage.
- Interdiction de laver dans le 3e bassin strictement réservé au lavage des couches.
Chaque personne ne pourra prétendre à plus de 0,90 m de place, ce qui était exiguë pour certaines, car à cette époque n’oublions pas les robes étoffées et longues de ces dames.
Pour satisfaire à la propreté et à l’hygiène, il est défendu d’uriner sur les grilles d’égout !
Il ne pourra être retenu de cordes à étendre. Le maximum ne pouvant excéder 3 par personnes pour que chacune puisse en disposer. Le préposé ne devra accorder de corde que proportionnellement au nombre de lessiveuses plus ou moins considérables certains jours.
Toute personne qui contreviendrait au dit règlement sera punie d’une amende et en cas de récidive sera exclus du lavoir.
En résumé : satisfaction, ordre et propreté pour le public.
Mais malgré les règlements de nouvelles infractions seront repérées.
Des personnes étrangères à Gagny viennent utiliser le lavoir, envahissent les lieux par une grande quantité de linge, et gênent les laveuses de Gagny. Les eaux n’étant changées que deux fois par semaine. À la suite de ces constatations, il est décidé d’établir un nouveau règlement en date du 4 juillet 1884 à la demande de M. Léon Bry nouveau maire :
- Interdire l’accès au lavoir à toute personne ne résidant pas sur la commune, sauf aux blanchisseuses professionnelles pour les besoins de leur clientèle.
L’appariteur, le garde champêtre et les membres de la commission des eaux du lavoir seront chargés de l’exécution du règlement.
Les horaires d’ouverture du lavoir vers 1895 étaient du 1er octobre au 1er avril : ouverture à 6 heures du matin, fermeture à 18 heures. Et du 1er avril au 1er octobre, de 4 heures du matin avec la fermeture à 20 heures.
Ce lavoir fut fermé par mesure d’hygiène en 1935. En 1938, il accueillera l’atelier public de distillation qui se trouvait dans la cour de la mairie, et sera occupé ensuite par les troupes d’occupation en 1942.
Dans les années 1876, une demande est faite par Monsieur Mallot, auprès de M.ROYER Maire de l’époque afin de pouvoir construire un lavoir privé à côté du lavoir communal, sur un terrain loué à la commune. Cette demande sera accordée par la municipalité, il semblerait que l’ouverture se serait faite vers 1883.
En 1903, ce sera M. Grégoire blanchisseur qui gérera ce lavoir et ensuite la famille Claverie, qui lui donnera le nom de « Lavoir Claverie ».
La plupart des utilisatrices des deux lavoirs venaient avec leur poussette, simple caisse montée sur trois roues. A côté de blanchisseries plus importantes, ces femmes desservaient une clientèle plutôt réduite si l’on se réfère à leur nombre. Ainsi on comptait six laveuses, rien que dans le haut de la rue Jules Guesdes, et trois vers le Sentier des petits clos.
Le bâtiment public n’a guère changé d’aspect extérieur depuis plus de quatre-vingts ans. La porte cochère était surmontée, il y a encore quelques années, de l’inscription « Lavoir », alors qu’un peu plus loin une petite porte et deux fenêtres indiquent une partie habitée.
A gauche en entrant, la chaudière disparaissait sous un bâti en maçonnerie d’où sortaient des tuyaux de cuivre muni de cadran. Un petit escalier métallique conduisait à la partie habitée. Mais ce qui attirait le regard, c’était les deux énormes cuves, sortes de lessiveuses géantes, véritable cœur de l’établissement.
Chaque jour le patron accompagné de son aide montait à l’intérieur pour y entasser les paquets de linge sale apportés quelques heures auparavant. Les deux couvercles, actionnés par des chaînes, descendaient du plafond pour fermer les cuviers. Un étrange personnage, toujours noir des pieds à la tête comme le charbon dont il alimentait le foyer, mettait en route le lessivage qui durait une partie de la nuit. Vers quatre ou cinq heures du matin, les couvercles relevés laissaient échapper un nuage de vapeur. L’arrosage de lessive bouillante avait été stoppé mais les ballots de linge restaient très chauds et fumants. Commençait alors pour le patron et son aide le décuvage et la répartition du linge dans la salle. Travail pénible et malsain.
Au début de la matinée chaque blanchisseuse, assistée parfois d’une aide, reprenait possession de son bien et déployait sur une tablette horizontale les différentes pièces lessivées qu’elle pouvait frotter, savonner et rincer, puisant dans un seau l’eau chaude ou froide à l’un des nombreux robinets.
Les vêtements professionnels très sales, tels que les « bleus » de mécanicien étaient traités dans l’une des deux barboteuses, sortes de gros tambours horizontaux, et séchés dans l’une des essoreuses.
La salle du lavoir bourdonnait comme une ruche très bruyante avec les engins de lavage et les papotages des blanchisseuses, qui quelque fois comme dans le lavoir communal échangeaient entre elles des propos un peu vifs.
Le linge propre repartait vers son lieu d’origine, transporté soit par la blanchisseuse elle-même, soit par le livreur du lavoir.
A la fin de 1926 le garçon de lavoir mourut. Il assurait, en plus du travail sur place, les livraisons grâce à une charrette attelée d’un cheval. Le patron lui trouva un successeur et en profita pour moderniser le service de livraison en lui attribuant une petite automobile « Berliet » avec carrosserie claire et capote de toile noire. Il semble que l’extension de l’activité prendra de l’essor. Un autre garçon de lavoir fut embauché, la voiture insuffisante sera remplacée par une camionnette de marque « Unic ».
Tel était vers 1930 l’établissement, à l’époque de la description. Monsieur Barrès était devenu le patron, époux d’une fille Claverie, elle-même responsable des bains douches situés derrière l’appartement familial.
L’extension du lavoir permettra d’accueillir les blanchisseuses des communes avoisinantes, celles du Raincy, Villemomble, Les Pavillons sous Bois, Sevran, Aulnay sous bois.
Cinq jours par semaine le linge propre et sale circulait sur les routes des environs, ce qui obligea le patron à remplacer la camionnette « Unic » par un véhicule plus important.
Sur place une petite annexe fut construite, la chambre chaude qui permettait de sécher les draps et le personnel augmenta de deux personnes.
Suite à la fermeture du lavoir communal par mesure d’hygiène (délibération de février 1935), Monsieur Barrès, propriétaire du lavoir voisin, proposa à la commune d’accueillir les ménagères nécessiteuses avec des bons de la mairie tous les vendredis. Elles pourront disposer et utiliser 1 baquet à laver, 1 baquet à rincer, des tréteaux et obtenir 1 seau d’environ 16 litres d’eau chaude ou froide pris aux divers robinets, plus de la lessive.
Les difficultés devinrent importantes vers les années 1940 ce qui freinera l’activité du lavoir et peu à peu sa fonction s’étiola.
L’évolution des techniques, la modernisation des méthodes de lavage du linge, l’arrivée des laveries automatiques et des machines à laver chez les ménagères accentueront la disparition de ce service.
Il faut également penser que ce travail de blanchisseuses était particulièrement ingrat, très dur et surtout malsain, elles manipulaient toutes la journée le linge des bien portants mais aussi des malades, sans parler de l’atmosphère chaude et humide, du bruit important produit par les machines.
Nous apprécions en 2008 la facilité d’entretenir le linge dans de meilleures conditions.