Il repart le 10 mars 1752 [1]. Sur le rôle, il est noté un départ le 10 mars 1752 et le naufrage le 26 avril 1752 alors que dans le livre " Les naufrages célèbres " les auteurs donnent la date de départ le 10 juin 1752 et le naufrage le 26 juillet 1752), avec comme capitaine Bernard-Nicolas Morin des Mézerets de Lorient et premier lieutenant Jean Richard de Port-Louis. A bord, il y a 162 hommes d’équipage, 122 soldats et 18 passagers soit un total de 302 personnes. Le 26 avril 1752, vers midi, le navire est au large des côtes du Brésil quand un homme annonce que de la fumée sort du panneau de la grande écoutille. L’équipage essaie de comprendre les causes de l’incendie et couvre les écoutilles de voiles mouillées pour limiter les entrées d’air et ainsi ralentir la propagation du feu.
Le capitaine craignant qu’il y ait la panique dans l’équipage fait armer 80 soldats pour maintenir l’ordre. Tout le monde jette de l’eau dans les cales et l’on dirige les manches des pompes vers l’incendie qui continue de plus belle.
Comme la yole gène pour la lutte contre l’incendie, le capitaine décide de la faire mettre à l’eau. Quatre hommes et un maître s’en emparent aussitôt. Comme ils n’ont pas d’aviron, trois matelots sautent à l’eau pour leur en porter. On leur demande de rejoindre le navire mais, les occupants de la yole, voyant que l’incendie progresse rapidement, plutôt que de revenir, s’éloignent.
A partir de ce moment, le capitaine demande de mettre les autres embarcations à l’eau mais l’équipage étant fatigué par la lutte contre l’incendie, la manœuvre pour hisser la première embarcation se fait difficilement. Quant elle est en hauteur, les flammes du feu viennent brûler les cordages qui la soutiennent et elle se fracasse sur les canons de tribord.
L’ensemble de l’équipage se rend alors compte de la gravité de la situation. L’aumônier qui est sur le gaillard arrière donne l’absolution générale. A partir de ce moment, chacun est préoccupé pour sauver sa vie, on jette à l’eau tous les éléments qui peuvent servir de flotteur, cages, vergues, espars et certains sautent à l’eau. Les hommes s’accrochent alors aux objets flottants mais à ce moment l’incendie, qui a encore progressé, déclenche le tir des canons et les boulets atteignent les hommes qui se débattent dans l’eau.
Le feu prend de l’ampleur et atteint les fenêtres de la grande chambre et de celle du conseil. L’auteur du récit de cet incendie, le sieur Pierre La Fond, 2e lieutenant, voyant qu’il n’y a plus d’espoir, se dépouille de ses habits et se jette lui aussi à l’eau. Un soldat, qui se noie, s’accroche à lui et le met en difficulté mais il se dégage et arrive à atteindre une vergue chargée de monde. Le capitaine et un passager, le chevalier Le Prevost de la Touche (lieutenant colonel), décident de ne pas quitter le navire.
Vers 17 h 00, le sieur Pierre La Fond voit la yole proche de lui et il la rejoint à la nage. La frêle embarcation recueille en plus le pilote et un maître. Les flammes dévorent toujours le vaisseau et celles-ci ayant atteint la cargaison de poudre, le navire explose et disparaît, tuant par les projections, de nombreuses personnes accrochées aux débris de bois. La yole échappe à ce désastre et les hommes décident de retourner vers les débris du navire pour récupérer quelques vivres. A la nuit, ils trouvent une barrique d’eau de vie, quinze livres de lard salé, une pièce de toile, une douzaine de douves de barriques et quelques cordes.
Avec le matériel récupéré, l’équipage de la yole, constitué de dix marins, se met à équiper l’embarcation. Ils démontent le fond de la yole pour avoir des planches et des clous et montent sur la yole un gouvernail et un mat pour dresser une voile. Ils ne possèdent ni cartes, ni instruments mais le sieur Pierre La Fond sait grâce au dernier point qu’ils se situent à environ deux cents lieues de la terre. Ils naviguent, dévêtus, pendant huit jours et huit nuits sans voir la terre sous les rayons ardents du soleil dans la journée et dans le froid de la nuit. Le sixième jour, une petite pluie leur apporte un peu d’eau douce et ils se contentent comme nourriture d’un morceau de lard salé tous les vingt-quatre heures. Ils voient quelques poissons volants mais ils ne réussissent pas à en capturer. L’inquiétude, le manque de nourriture, les mouvements de la mer les empêchent de dormir et les épuisent petit à petit. Le sieur Pierre La Fond tient la barre, la huitième nuit, pendant dix heures d’affiler et au matin ils aperçoivent la terre.
Une grande joie emplit les cœurs et leurs forces reviennent. A deux de l’après-midi, ils abordent les côtes du Brésil (côte de Pernambouc), dans la baie du Tresson. Leur aspect est terrible après ces huit jours de mer, certains sont nus, les autres ont des chemises pourries et en lambeaux. Ils délibèrent pour savoir dans quelle direction se diriger quand cinquante Portugais, dont certains sont armés, arrivent. Les rescapés expliquent leur mésaventure et les habitants du lieu compatissent à leur malheur et les invitent à leurs habitations. Le chef du lieu leur fournit des chemises et des culottes de toile et leur sert un bon repas. Il leur indique aussi qu’il y a à moins d’une demi lieue une église dédiée à Saint-michel et ils décident bien que très fatigués d’aller remercier le Seigneur de les avoir sauvés.
Dans ce naufrage, il y eut donc 292 disparus et les 10 rescapés furent :
1. Pierre La Fond de Braux - 2e lieutenant - de Dinan.
2. Jacques Aurbert - Maître - de Saint-servan.
3. Bathazar Grispe - 2e bosseman - Vénitien.
4. Nicolas Henrio - Premier Pilote - de Lorient.
5. Saturnin Plumer - Matelot - de Saint-cado en Belz.
6. Mathurin Tottevin - Matelot - d’Erquy en Saint-brieuc.
7. Jean Corentin Le Gal - Matelot - de Saint-esprit en Quimper.
8. Joseph Clovis Hendeman - Matelot voilier - Saint-malo.
9. Joseph Ruche - Matelot voilier - Saint-malo.
10. Julien de la Mothe - Matelot voilier - de Esvran.