Cette branche méconnue de notre discipline consiste à aller s’installer dans le nid des autres généanautes pour faire un petit coucou à des cousins potentiels.
Fort de cette brillante idée, je me jette sur mon Mac, je fais www.geneanet.org, puis recherche globale, les arbres... Et j’affiche fièrement mon patronyme Baumgarth. Le verdict tombe : 77 arbres.
La forêt n’est pas bien grande... En fait, ce n’est même qu’un petit bosquet, puisqu’après avoir éliminé les redondances et 3 de Baumgarth à la choquante particule bien peu germanique, il ne reste que 43 arbres dont je m’empresse d’aller observer la frondaison.
La récolte est fabuleuse : bien que je n’ai trouvé aucun lien apparent entre les branches Baumgarth de ces arbres et la mienne, j’ai déniché une ahurissante et passionnante saga généalogique qui, de plus, m’a permis de prendre conscience que j’avais commis une énorme erreur dans mes laborieuses recherches dans les archives.
Parmi ces 43 arbres, 6 généanautes ont un ancêtre commun dont les extraordinaires mésaventures patronymiques méritent d’être contées :
Antoine BAUMGARTHEN (1768- ? marié en 1790 à Mackenheim (67) à Litvine Klein 1772- ?), fils d’un Antonius BAUMGARTHEN (?- ? x Elisabeth MERCKIN), lui même fils d’Antonius BAUMGARTHEN (?- ? x Salomea PULERIN) a eu - au moins - 8 enfants qui se partagèrent 4 variantes patronymiques : BAUMGARTHEN comme papa, mais aussi BAUMGART, BAUMGARD et BAUMGARTH.
4 variantes patronymiques dans une fratrie !!!
Le fils aîné, Jean-Michel BAUMGARTHEN (25 mai 1797 Mackenheim - ??- Marié avec Véronique BLEYEL 1799-1844) qui avait donc échappé à la dérive précédente a eu -au moins - 11enfants qui se partagèrent en 4, 5 ou 6 patronymes selon mes généanautes : BAUMGARTHEN, mais aussi BAUMGARD, BAUMGARTH, BAUMGARTEN , BAUMGARTNER, BAUMGERTNER.
4 à 6 variantes patronymiques dans une fratrie !!!
7 variantes patronymiques en 2 générations !!!
La malédiction se poursuivi avec le dernier de ces frères nommé Joseph BAUMGARTNER par les uns, BAUMGERTNER ou BAUMGARTEN par les autres (6 avril 1841 Ostwald - ?, marié avec Marie-Amélie JACOBI 1842- ?) qui engendra bien trois fils BAUMGERTNER (Joseph, Alphonse et Henri-just), mais aussi une petite Madeleine affublée de l’horrible BEAUMGERTNER par un ignare officier d’état civil totalement hermétique à notre beau dialecte alsacien.
8 variantes patronymiques en 3 générations !!!
Madeleine supporta sa disgrâce pendant 39 longues années puis, miracle de l’amour, elle trouva la plus élégante des solutions en épousant son cousin Michel BAUMGARTHEN (1er juin 1872-1930 ), fils de son oncle Jacques, l’un des BAUMGARTHEN rescapés de la précédente génération.
Elle fit ainsi d’une pierre deux coups en mettant une heureuse fin à l’existence d’une abomination onomastique qui aurait laissé sans voix Pierre-Gabriel Gonzalez (cf. la Revue Française de Généalogie) et en retrouvant le patronyme légitime dont elle aurait dû hériter s’il n’y avait eu deux erreurs d’état civil successives à 34 ans d’intervalle. Dès Lors, ses fils pouvaient faire renaître leur lignée BAUMGARTHEN après une interruption de 73 ans.
Cette saga magnifique, outre les très agréables moments qu’elle m’a fait passé, m’a rendu l’immense service de me faire prendre conscience de ma monstrueuse erreur de débutant : faisant fi de l’avertissement de Jean-Louis Beaucarnot sur les variantes onomastiques, je ne m’étais polarisé, dans mes recherches aux archives, que sur la seule orthographe de mon nom.
Il avait pourtant raison, le bougre : ma balade en compagnie d’ Antoine Baumgarthen m’a convaincu que ces variantes ne sont pas la malédiction réservée aux seuls malheureux Dupond-Dupont comme j’avais eu la naïveté de le croire.
Je suis d’autant plus impardonnable qu’une particularité de mon aïeul Jean BAUMGARTH (1736-15 février 1811 Friesenheim, marié avec Marie-Anne Riehl 11mars 1743- ?), fils de mon naufragé, aurait dû me mettre la puce à l’oreille : sachant probablement lire et écrire,- qualité rare à l’époque -, il figure régulièrement comme témoin sur les actes d’état civil de sa commune dès l’âge de 17 ans.
Quand le curé de Friesenheim mentionnait systématiquement en latin : « ...en présence de Johannès BAUMGARTEN... » , mon ancêtre, imperturbable, apposait tout aussi systématiquement sa belle signature : Jean BAUMGARTH.
A la réflexion, l’existence de variantes orthographiques de mon nom ne m’étaient d’ailleurs pas inconnue, car je me rappelle qu’il y a une trentaine d’années, alors que j’étais médecin généraliste à La Roche sur Yon et président de la chorale baroque de la ville, nous fîmes un voyage d’échange avec la chorale de Gummersbach ( ex-Allemagne de l’Ouest).
L’amie qui organisa le déplacement me fit la surprise de me faire héberger chez un docteur BAUMGART. Le sympathique confrère tint à me faire visiter l’hôpital où il exerçait en compagnie du docteur BAUMGARDT et du docteur BAUMGARTEN...
Il me faut donc tirer la leçon de ma bévue en reprenant toute ma recherche avec vigilance quant aux possibles erreurs de transcription sur les actes d’état-civil.
Un rapide test me conforte dans cette bonne résolution grâce à la coucou-généalogie : je me remets sur mon Mac, je fais www.geneanet.org, puis étude globale : les arbres... et j’inscris la variante BAUMGART. Le résultat douche un instant mon ardeur : 509 arbres !
Je trouve la parade : je refais la manoeuvre en ajoutant Friesenheim dans la case « commune » ; le choix se réduit à deux arbres dont l’un me livre un Jean BAUMGART marié avec Anne-Marie RIEHL dont sont issus un François Ignace BAUMGART né le 15 janvier 1776, une Marie-Elisabeth BAUMGART née le 1er octobre 1777, un François-Antoine BAUMGART né en avril 1779 et une Françoise BAUMGART née en 178O.
La comparaison avec mon Jean BAUMGARTH, témoin du curé RUBIN, est éloquente : dans le même village, son épouse portant les mêmes nom et prénom, parmi les onze enfants du couple de mon arbre, quatre portent les mêmes prénoms et ont les mêmes dates de naissance... Aucun doute possible : même si la disparition du H reste pour l’instant un mystère, la généanaute Marie-Claire Ancel est bien ma lointaine cousine [1]).
La coucou-généalogie me permettra d’ajouter quelques branches ou brindilles à mon chêne [2] en concrétisant ces retrouvailles par une « cousinade virtuelle ».
Mon histoire se termine ; il est d’usage de tirer une morale d’un récit ; la mienne comporte trois volets :
- 1) Jean-Louis Beaucarnot a toujours raison...
- 2) Méfiance, les variantes patronymiques ne sont pas l’apanage des héros de Hergé...
- 3) N’en déplaise aux puristes, la coucou-généalogie et son corollaire la cousinade virtuelle sont des techniques riches de potentialités.
Il me reste à citer mes sources :
- Les indicatifs des 6 généanautes descendants d’Antoine BAUMGARTHEN sont, dans l’ordre d’apparition sur l’écran : dreuxyves, corléonecic, manouchii, jimmydu92, adlig et rchatelin.
- L’indicatif du généanaute « Baumgart-Friesenheim « est p4arkxt.
Que chacun soit ici chaleureusement remercié.
Je leur conseille vivement de pratiquer la coucou-généalogie en comparant les différences de leurs arbres en une cousinade virtuelle : c’est le moyen d’ajouter des branches et de rectifier d’éventuelles erreurs.