Il en était tout autrement pour les unités étrangères dont le prince propriétaire recevait du Roi une somme importante pour la location de ses services et celle de son régiment, cette allocation englobait toutes les dépenses du dit régiment.
Lors du déplacement de troupes, un trajet était tracé suivant les besoins, ce tracé s’appelait « ROUTTE », seuls le Roi et son ministre de la guerre étaient habilités à fournir ces feuilles de routes.
Une contrainte permanente tout au long de l’Ancien Régime
(Nous prenons la ville Saint-Dizier comme modèle [1], mais nous avons le même type de document pour la ville de Tours ou autres).
Saint-Dizier se trouve dans la position d’une ville aux confins de la Champagne, et est donc impliquée au premier chef dans tous les conflits que connaît la France. Si un épisode de l’ampleur du siège de 1544 [2] ne se reproduit pas, la ville souffre de manière endémique du logement des gens de guerre qu’elle doit assurer l’hiver, époque à laquelle on ne se bat pas.
Sur une population qui varie suivant les époques entre 4 000 et 5 000 habitants, il arrive que l’on doive accueillir 2 000 à 2 500 troupiers, ce qui représente une charge considérable, à tel point que l’on voit parfois des habitants de Saint-Dizier quitter la ville plutôt que d’accueillir les soldats.
En effet, outre le poids financier représenté par le logement et la nourriture des gens de guerre, les relations entre les deux populations sont loin d’être toujours cordiales, et un « Major de place » chargé de la police militaire et des relations avec les échevins est créé en 1641. Par ailleurs, cette charge est d’autant plus mal ressentie que certains habitants sont exemptés du logement des gens de guerre : ainsi, les échevins n’ont-ils pas cette obligation. Aussi, en 1673, une ordonnance limite le nombre des échevins ainsi que celui des exemptions de logement, en faisant valoir que l’intérêt des habitants est d’être le plus nombreux possibles à supporter les frais occasionnés par le cantonnement des troupes.
Cela n’empêche pas différents conflits de se produire : ainsi, en 1742, c’est un cavalier qui est accusé d’avoir quitté son logement en emportant des draps et douze francs dérobés à sa logeuse. Une autre fois, c’est un habitant de la Noue qui refuse le billet de logement d’un soldat, et l’insulte avant de le mettre dehors.
Enfin, il est financièrement très lourd pour la ville de pourvoir à l’entretien des troupes, même de passage : le règlement du 26 mars 1636 fait obligation « aux échevins et habitants de Saint-Dizier de fournir les vivres et le fourrage nécessaires aux régiments qui auront route au dit lieu... »
On comprend que, même concédées à titre d’avance, ces fournitures grèvent le budget de la ville, d’autant que le pouvoir central se montre rarement empressé de s’acquitter de ses dettes. De plus, il peut arriver, comme c’est le cas en mars 1630, que la ville doive avancer la solde des militaires présents. Les échevins réquisitionnent alors le fourrage dans les campagnes, et taxent les denrées alimentaires, ce qui provoque le mécontentement de ceux qui sont frappés par ces taxations, bouchers et boulangers au premier chef.
Dans le livre de Simone Bertière intitulé « Mazarin, » page 241, il est dit ceci :
« Les Besoins entraînés par la guerre étaient immenses. Les troupes composées de mercenaires se dispersaient vite si elles n’étaient pas payées, en espèces sonnantes et trébuchantes. Or le trésor, ou comme l’on disait alors « l’épargne », était toujours vide, non seulement pour cause d’endettement, mais aussi par suite des problèmes de manutention. N’oublions pas que tous les versements se faisaient en numéraire.
Plutôt que de transporter des tonnes de monnaies métallique à travers le pays jusqu’ à Paris pour les redistribuer ensuite, on réaffectait aussitôt sur place le produit des impôts aux dépenses nécessaires. L’épargne se bornait à comptabiliser l’ entée et la sortie des sommes dont elle ne recevait que les surplus. Et les circuits bureaucratiques étaient d’une telle lenteur qu’il fallait un temps infini pour en obtenir un paiement.
Il y avait bien les « ordonnances de comptant », qui obligeaient les trésoriers à verser aussitôt et sans contrôle la somme exigée, mais elles rencontraient leur limite dans la détresse chronique du trésor. Par conséquent, seuls des financiers professionnels, généralement groupé en consortiums, pouvaient avancer rapidement au Roi de l’argent frais à la demande.
Il le lui faut vite, quand il s’agit de payer les soldes en retard. »
Dans le même domaine au niveau endettement des villes, concernant Tours, il est marqué ceci [3] :
« (Les finances de la ville) : Le gouvernement avait d’ ailleurs sur elles un droit de contrôle puisque tous les ans, en théorie, les comptes municipaux devaient être examinés par la chambre des comptes de Paris. Le contrôle royal fut surtout strict à partir du règne personnel de Louis XIV. À cette époque la plupart des villes étaient fort endettées, essentiellement parce que le roi les avaient obligées à lui verser des impôts exceptionnels pour financer les guerres, notamment des taxes destinées à subvenir à l’entretien de l’armée : la « Subvention » puis « L’ustensile » et aussi des « dons gratuits.
En fouillant dans la comptabilité des citées, il serait possible de retrouver nombres de documents du même style. »
Les Habitants devaient « L’Ustensile » au soldat, c’est à dire le lit, le pot et la place au feu et à la chandelle. À cela s’ajoutait la nourriture, comme viennent de nous le décrire les textes cités plus haut. Cela était valable pour les troupes en France [4].
Dans le cas d’un séjour plus long, il pouvait y avoir certaines modifications.
Ce texte intitulé une main-d’œuvre occasionnelle : Le Soldat, nous le démontre :
« L’envoi par la France de troupes régulières pour la défense du pays crée le problème du « logement des gens de guerre », faute de bâtiment adéquat, on loge le soldat chez l’habitant, sauf chez celui qui accomplit déjà, à titre bénévole une fonction publique. Le soldat apportant ses rations, l’habitant fournit le couvert, la place auprès du feu et le coucher ; en retour, le soldat peut l’aider dans certains travaux. Au point de vue de la discipline, le militaire relève toujours de son supérieur immédiat et il appartient à ce dernier d’intervenir s’il survient des disputes entre l’habitant et le soldat. »
Tous ces renseignements sont tiré des Cahiers du centre d’étude d’histoire de la défense, Histoire Socioculturelles des armées.
Les Feuilles de Route
- Une feuille de route
- Voici ce que pouvait être une feuille de route
d’un des soldats d’un régiment. Celle-ci date du 25 pluviôse an 5.
Cette photo a été prise sur le site : http://daniel_burgot.club.fr/html/genealogie/froute.htm
Que je remercie infiniment.
Feuille de route pour des compagnies sous Louis XIV
- Feuille de Route pour une compagnie
- Archives de Metz : Document N° 2MI 57/1 (Bobine Microfilm) Localisation ADOG17x3
…à mon frère le Duc d’Orléans
daté du 10 juillet 1650
Chemins que tiendrons 40 Soldats
Pour aller en garnison à Metz
- Paris : Partant des environs de Paris pour loger à Meaux
- Bussières
- Soisson : Orbais
- Espernay
- Chalons
- Chalons : L’ Espine
- Ste Ménéhould ou il séjournerons un jour
- Vraincourt
- Verdun
- Malatour
- Metz en garnison
Aux lieux dit de passage cy dessus les vivres nécessaires seront fourni par étape aux gens et effectifs conformément aux règlements de sa majesté.
Fait à Orléans le 10e de juillet 1650
Paraphe Louis Le Tellier