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La charte des us et coutumes des bastides médiévales

Le dimanche 1er septembre 2002

Le pays des bastides et Cités médiévales est situé dans le Grand Sud Ouest à 2 heures de Bordeaux ou de Toulouse, entre les rivières Dordogne et Lot avec pour axe central la Vallée du Dropt. La nature verdoyante et vallonnée est parsemée de forêts, de châteaux et plusieurs sites classés. Ce patrimoine culturel né de l’architecture médiévale, est également emprunt d’un vécu caractéristique de cette époque. En ces temps, la vie était régie par un écrit à la fois juste et insolite avec des règles qui ne manquaient pas de piquant : La charte des Us et Coutumes.

La charte des Us et Coutumes est caractéristique aux bastides. C’est une sorte de constitution, d’ensemble de lois qui s’appliquaient aux habitants de la bastide. Au Moyen-âge, en général, les seigneurs faisaient la justice selon le principe « La loi, c’est moi ! ». Autant dire que c’était loin d’être objectif et impartial ! Dans les bastides, tout est différent et ce, grâce à cette fameuse Charte. Prenons, par exemple, celle de Monpazier (dont certains articles sont similaires à celles de Beaumont, de Monflanquin ou de Villeréal)...

Tout commence comme un conte de fée ! Il était une fois un roi anglais, Edouard Ier qui avait des terres en France. Il avait tellement peur de se les faire voler, qu’il décida de construire une ville en un endroit stratégique afin de repousser les troupes armées. Cette cité, bâtie selon un plan en échiquier s’identifia comme une bastide dont le nom fut Monpazier. Toutes les personnes qui s’installeraient dans cette bastide deviendraient libres et la justice serait équitable grâce à une Charte qui définiraient les Us et Coutumes. Quelle révolution pour le peuple habitué à servir leur Seigneur et à subir les caprices, désirs et autorité de celui-ci.

Cette charte a d’autant plus de valeur qu’elle a été faite et cosignée par messire jean de Grailly, Sénéchal de Guyenne pour le Roi et Duc d’Aquitaine Edouard Ier Plantagenêt d’une part et par le Seigneur Pierre de Gontaut, Baron de Biron d’autre part, en l’an de grâce 1284, le 7 janvier.

Mais que contient-elle vraiment ? C’est ce que nous allons voir...

Le premier article définit les impôts à payer. jusque là, rien de très impressionnant ! Les bastides se différenciaient par le fait que ses habitants ne payaient pas la taille, le droit de gîte et toute une série d’impôts qui sévissaient à l’époque médiévale. On retrouve cet article dans les chartes de plusieurs bastides telles que Monpazier et Beaumont du Périgord.

A Monpazier, on peut encore voir la grange aux dîmes aujourd’hui devenue boulangerie-pâtisserie.

L’article 2 stipule que les habitants pourront « marier leurs filles à qui ils l’entendront ». Ils n’auront pas à prendre en compte l’avis du Seigneur et leurs filles n’auront pas à subir le droit de cuissage, ce qui est un vrai soulagement pour ces dernières ! A travers les moeurs médiévales, un peu rustres, cet article est une vraie nouveauté qui essaie de balayer les privilèges des Seigneurs.

La charte de Villefranche du Périgord traite aussi du mariage sous un angle plus classique. En fait, elle définit la préparation et la procédure à adopter. En introduction, on peut lire : « La célébration des mariages requiert l’aide des amis et voisins pour préparer les couronnes, la jonchée, planter les genévriers et porter le tourin ». On peut s’imaginer la scène : plutôt conviviale !!!

La charte des Us et Coutumes de Beaumont du Périgord possède un article similaire (son article 3) « Les habitants pourront marier leurs fils où ils voudront et engager leurs fils dans les ordres religieux ». Les filles des serfs, des affranchis, ne pouvaient se marier sans l’autorisation du Seigneur et sans « payer » cette autorisation. En ce qui concerne les garçons, il fallait, pour entrer dans les ordres, l’autorisation du Seigneur car l’Eglise ne recevait aucun serf comme clerc. Devenir prêtre ou moine, c’était améliorer sa situation, bénéficier d’une certaine classe sociale et d’une certaine fierté pour la famille ! N’était pas prêtre qui voulait !!! On retrouve également cette idée dans l’article 2 de la charte de Monpazier : « Leurs garçons pourront entrer librement dans les ordres religieux (sans avoir à payer de Dot) ».

Passons directement à l’article 5. Encore un article qui est toujours d’actualité ! En effet, il donne les jours des marchés et foires soit tous les jeudis pour le marché et le troisième jeudi pour la foire, en ce qui concerne Monpazier. Aujourd’hui, il en est de même. On peut toujours voir les boisseaux qui servaient de mesures pour les céréales tels l’orge, le seigle, le blé ou l’avoine. Le marché a toujours lieu sur la place et sous halle et ce, depuis le Moyen-âge.

Le marché de Monpazier, fidèle à la tradition, a lieu tous les jeudis et ce depuis 700 ans. Heureusement, depuis, les systèmes de réfrigération ont été inventés.

Il est également dit que « Le roi percevra une taxe spéciale sur tout ce qui entre en ville.pour y être vendu ». D’ailleurs, ce péage se pratiquait aux portes fortifiées de la ville, que l’on peut encore emprunter de nos jours.
A Beaumont, c’était pire ; l’article 31 de la charte développe le prix à payer pour chaque chose que quelqu’un peut vendre. Selon ce que l’on vendait si c’était une chèvre, des souliers ou du blé, le coût était différent. Tout y est détaillé !

L’article 6 « prévoit les Peines et Amendes qui seront appliquées en cas de : coups, blessures, crimes, vol, viol et adultère à L’intérieur de la cité ». C’est de loin l’article le plus burlesque, drôle et original de la Charte des Us et coutumes. En règle générale, les vols étaient punis par des amendes ou parfois plus violemment surtout si le voleur avait dérobé beaucoup de marchandises. Mais un peu de patience, nous connaîtrons leur sort selon la légende.

Prenons l’exemple de l’adultère : « Le délit d’adultère sera taxé de 100 Sols pour chacun des 2 partenaires, qui, de plus, seront condamnés à parcourir la ville dans un état de nudité complète attachés l’un à l’autre ». Cette pratique se faisait, en plus, les jours de marché de façon à ce que les citoyens puissent leur jeter légumes et autres projectiles. Vous pouvez imaginer la scène ! Cela faisait passer l’envie à certains de tromper sa femme ou son mari ! La vie médiévale ne manquait pas d’animation. On retrouve ce principe dans d’autres chartes comme celle de Monflanquin ou de Beaumont du Périgord.

L’article 22 de la charte de Monflanquin stipule : « De même, les adultères hommes et femmes, s’ils ont été pris en flagrant délit et qu’il y ait eu plainte ou bien s’ils ont été convaincus du fait par des personnes dignes de foi ou bien s’ils en ont fait l’aveu en justice, paieront chacun cent Sols pour la justice ou seront tenus à courir tout nus à travers ta ville, à leur choix. » !!! Pour les gens qui avaient les moyens, le choix devait être vite fait.

En ce qui concerne Villeréal, l’article 23 de sa charte est du même style : « l’homme ou la femme pris en adultère seront punis l’un et l’autre d’une amende ou courront nus la ville à leur choix. » On ne plaisantait pas avec l’adultère ! Imaginez sur ces places, un couple attaché par des cordes, complètement nu, traversant la place !!! Si cette loi était toujours de rigueur, la vie de la place serait plus comique !!!

Le dernier amendement de l’article 6 traite du viol : « Quand un homme aura violé une femme, il lui en coûtera 5oo Sols à la commune pour les frais de justice, plus des dommages et intérêts au mari. Si c’est une vierge qui est violée, d’homme devra la marier ou lui trouver un mari qui lui convienne. S’il ne peut pas, il sera châtré ! ». C’est une justice un peu barbare, certes ! Quoique radicale ! Une fois castré, le violeur a peu de chances de récidiver.

Hors de ces chartes, il existe des légendes qui relatent quelques traditions « juridiques ». Par exemple, il paraît que « Lorsqu’un voleur était pris avec une grande possession de marchandises votées, on suspendait son cadavre à un crochet d’une porte fortifiée afin de dissuader les éventuels voleurs qui entraient dans la Bastide. » Ce système devait refreiner les envies de vol de certains. Aujourd’hui, nous pouvons toujours voir ce crochet qui se trouve sous la porte Saint-Jacques. Un cadavre de voleur suspendu au plafond de la porte est un bon moyen de dissuasion, il faut le reconnaître !

Aujourd’hui, ces chartes des Us et Coutumes sont une caractéristique quasi-indispensable de l’identité des bastides. On a rarement retrouvé ces chartes en l’état. La plupart a brûlé dans les nombreux incendies qui ravageaient les cités au Moyen-Age. Mais grâce au bouche à oreille, aux traditions qui ont perdurées, on a pu reconstitué ces écrits. Malgré leur grand âge, ces dernières plaisent et font toujours sourire grâce à leur anecdotes et à leur sens de la justice assez particulier.

La charte des Us et Coutumes de Monpazier est disponible et consultable à l’office de tourisme. En ce qui concerne les autres bastides, vous pourrez retrouver leur charte soit sur Internet soit en le demandant à l’office de tourisme.

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3 Messages

  • La charte des us et coutumes des bastides médiévales 4 décembre 2007 07:59, par JL FOSSAT

    On aimerait savoir par référence à Hubert DELPONT (Revue de la Soc. des Sciences Agenais Agen), s’il est possible d’établir d’Agen à Lyon, une carte du droit de REBA (REVA) sur les céréales du Moyen Age à 1790

    Répondre à ce message

  • Coutumes de Montpazier 13 avril 2008 11:18, par Claude RIBEYROL

    Je cherche les références exactes de la charte originale des coutumes de Montpazier. Quel fonds d’archives, A quel endroit, sous quelle cote ?
    Merci d’avance si vous pouvez m’aider.
    Claude RIBEYROL

    Voir en ligne : Site Guyenne

    Répondre à ce message

  • La charte des us et coutumes des bastides médiévales 11 décembre 2019 21:43, par Jean-Marie Baras

    Bonjour.
    Votre article est très intéressant mais quelles sont vos sources ?
    Je cherche les références exactes de la charte originale des coutumes de Montpazier. Quel fonds d’archives, A quel endroit, sous quelle cote ?
    Très cordialement.

    Jean-Marie Baras, président du Groupe archéologique de Monpazier

    Répondre à ce message

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