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La bataille de la Somme vue par mon père, Fernand Massicard (1913-1999)

Le samedi 2 février 2008, par Nicole Dumest

Un titre vient de m’interpeller : juin 1940, la bataille de la Somme et très vite je me retrouve à lire l’article de Monsieur René CHAMPEAUX.

Dans le classeur relatif à tout ce qui se rapporte à mon père, il y a sa version de « sa guerre », détaillée sur des carnets et des feuilles volantes écrites au crayon, au cœur même de la bataille de la Somme et des jours qui suivirent. Quand a-t-il écrit ce récit si détaillé, je n’en sais rien, mais tant de détails ne s’inventent pas et je reste sidérée par leurs précisions. J’ai pu lui demander des renseignements complémentaires avant qu’il ne disparaisse et pu ainsi compléter ce passage important dans sa vie. C’est son histoire, la vérité des faits n’engage que lui.

Sans doute n’a-t-il pas connu le héros de Mr CHAMPEAUX, mais qui le saura ?

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Fernand Massicard

Fernand MASSICARD né à Paris le 24 février 1913, habite plus tard Montrichard ( 41) où il passe le Conseil de révision de la classe 1933. Il est incorporé le 15 avril 1934 et effectue son service comme appelé au 309 ° Régiment d’Artillerie Portée à Strasbourg, de avril 1934 à juillet 1935, soit quinze mois. A son incorporation le service durait 12 mois. L’arrivée de HITLER comme Chancelier en 1933, puis Führer du Reich à la mort de HIDENBURG, en août 1934 entraîne le rétablissement du service militaire obligatoire en Allemagne le 16 mars 1935 et a pour conséquence l’allongement à 2 ans du service militaire en France pour le nouveau contingent, à partir du 17 mars 1935. Il sera toutefois allongé proportionnellement pour ceux déjà sous les drapeaux (ART.40 Loi du 31.3.1928).

Fernand est « renvoyé dans ses foyers le 6-7-1935 » et rayé des contrôles de l’activité le 7.7.1935 avec un certificat de bonne conduite !

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Son certificat de bonne conduite

La vie va continuer, Fernand travaille avec son père, entrepreneur de maçonnerie, se marie et s’installe à Bléré (37) comme artisan-maçon. Méticuleux, il notera dans des petits agendas de poche les événements de chaque jour.

Mobilisation en 1939 et « la drôle de guerre de Fernand »

La mobilisation générale commence le 24 août 1939 dans un ordre donné selon l’âge, la profession et la qualification militaire. Fernand reçoit son ordre le 27 août et sur l’ordre de mission : il est affecté à Neufchâteau (Vosges). A son arrivée, il est inconnu, impossible de trouver son nom… mais on le garde. Dix jours plus tard, les gendarmes de Bléré le recherchent, il est porté comme déserteur !! Il aurait dû rejoindre Poitiers (Vienne) dans l’artillerie. Pendant ce temps, les événements se bousculent : le 3 septembre, jour de la déclaration de la guerre, il tombe malade avec 39° de fièvre. Il est évacué sur l’hôpital de Toul (Meurthe et Moselle), … direction Toulouse (Haute-Garonne). Au bout de 3 semaines, il est à nouveau évacué sur Frébécourt (Vosges) à 3 km de Donrémy, puis vers Marsannay-les-Bois (Côte d’Or), à 15 km de Dijon. Le1er janvier, profitant d’une permission, il reprend froid et est à nouveau malade Guéri au bout de 3 semaines, il reste pourtant sur place pendant trois mois - son métier de maçon doit être utile, il va entretenir les bâtiments militaires et vivre en dehors de la guerre. Fin avril, il aura une permission de 25 jours de convalescence.

Mais le 10 mai 1940, les Allemands envahissent les Pays-Bas, la Belgique et le Luxembourg. Rien ne va plus ! Fernand essaie de rester à Bléré, en se présentant au Centre militaire de Tours (Indre et Loire), mais échec, la France est envahie à son tour et il est renvoyé sur Neuchâteau, puis retour sur Dijon. A son arrivée, on lui demande ce qu’il sait faire !! On lui propose de conduire un camion, il refuse. On lui attribue alors une camionnette avec remorque, transportant un canon.

Fernand notera sur des papiers la suite de l’aventure :

1er RAT 662 BAC 3e régiment
« Le 21 mai 1940, départ de Brognon [au nord de Dijon] pour Arc-sur-Tille. Commencé formation de la BAC [bataillon d’artillerie ?] qui est prête à partir le 23 au soir avec 8 pièces de 47 –8 chenillettes – 5 voitures de liaison – 10 camionnettes – 6 camions et 4 side-cars, l’effectif se composait de 150 hommes, commandés par le Lieutenant V. et n’ayant reçu aucune instruction ( les officiers pas plus que les sous-officiers ne connaissent le fonctionnement de l’engin ( rendement et portée) ainsi que la manière de viser pour atteindre le but suivant la distance.
Départ le 24 au matin, passé par Les Lannes, Montbart, Les Riceys, Bar-sur- Seine, Troyes, Nogent-sur-Seine, Meaux, Creil, Clermont et arrivée le 3e jour à Crèvecoeur-le-Grand dans l’Oise.
Le 29 mai après 2 jours de repos dans un bois, à 3 km de Crèvecoeur nous sommes partis sur Couty (Somme). Nous faisions partis de la 13e DI qui nous a placé pour tenir un front de 12 km. Dans l’après-midi, ma pièce (8e) est allée prendre position à Poix. Nous devions garder un chemin venant de la route d’Amiens et traversant la ligne (portée 150m).

Le 31, nous avons changé de position dans le même pays, pour aller garder un petit pont sur un ruisseau.

Le 3 juin, rechangement de position : nous sommes allés sur la route de Abbeville à 200m du pont qui passe sur le chemin de fer.
Le 5 juin à 4 h du matin, nous avons été en alerte, les Allemands venaient de traverser la Somme. Le génie a travaillé toute la journée et la nuit suivante pour miner le pont. C’était la déroute en plein. Les avions ont bombardé la ville qui était déjà bien touchée par les précédents.

Le 6 de bon matin après avoir veillé toute la nuit on nous a annoncé la venue de 200 chars.

Peu après, le pont a sauté, mais auparavent les chars sont descendus dans les prés et passé sous le viaduc pour nous encercler sur 3 côtés. En même temps, l’aviation a bombardé de nouveau et ont lancé des parachutistes. Vers midi, l’infanterie allemande a commencé à donner et voulait prendre le bois où nous étions. Les quelques (pointeurs ?) qui nous soutenaient (25) ont riposté, mais ont dû abandonner. Peu après, un tir de barrage a commencé et comme il se rapprochait de plus en plus, nous avons dû nous replier pour soi-disant nous mettre à 200m plus bas. Là, la situation devenait plus dangereuse par suite d’un bombardement par l’artillerie et de l’encerclement. Nous avons dû nous replier en traversant la ville qui était en feu et prendre la route de Beauvais. Après avoir suivi cette route sur 5 km des avions nous ont fait rebrousser chemin. Nous sommes revenus sur nos pas pour tacher de prendre la route de… (PC du lieutenant) mais impossible de passer c’était à découvert et des avions volants à très basse altitude nous interdisaient tout passage. Nous sommes revenus sur la route de Beauvais et avons pris position de notre propre chef en haut de la côte de Poix et en bordure d’un bois. Des avions sont venus à nouveau mitrailler le bois. A la tombée de la nuit voyant la position plus tenable nous sommes partis au PC 8 km. Nous avons retrouvé là le lieutenant qui nous a fait mettre en position sur une grande hauteur près de Guisancourt. Après un gros effort pour arriver à monter la pièce et camoufler les voitures nous nous préparions à manger et nous reposer quant à nouveau le lieutenant est venu nous avertir qu’il fallait quitter en vitesse cette place ( nous étions complètement isolés) pour aller dans un petit patelin à Bergicourt. Il nous fallait garder une route d’accès au pays 200m et un pont.- la pièce n’y était qu’à 25m. Après la mise en batterie et 2 h de sommeil il a fallu faire des travaux de camouflage et une tranchée.

Nous commencions à déjeuner ce 7 quand le bombardement commença et tout près de la pièce. Quelques instants après l’infanterie allemande était dans le bois, en bordure du pays et mitraillait. La nôtre a riposté sans résultats. Trois heures après, elles se repliait ne laissant que quelques groupes. Le bombardement de l’artillerie était intense des 2 côtés. Les anti-chars de 25 se sont repliés peu après et enfin vers 16 h ma pièce, après avoir mis en position de route 3 fois et remis en combat, a dû abandonner l’idée de continuer. Nous sommes montés par la seule route libre, mais nous avons dû passer en plein dans la mitraille. Nous étant trompés de chemin en haut, il a fallu franchir une chicane faite avec des instruments de culture et ensuite obligé de passer à travers champs, en plein sur une butte et pendant 4 km. Nous avons rattrapé une route où 7 ou 8 km plus loin, nous avons retrouvé le lieutenant qui nous a conduit à l’échelon, à 5 km plus à l’arrière. Là, nous avons retrouvé le restant de la pièce, véhicule de liaison et chenillette. Notre pièce était la seule revenue sur les 8.

A peine rendu là avec l’échelon, il a fallu se replier, toujours plus à l’arrière ( ma camionnette a pris le canon). A 20 h, nous étions sur la route de Crèvecoeur. Nous nous sommes camouflés dans un bois et nous devions attendre le lieutenant qui était parti avec notre adjudant-chef pour ramener les autres pièces. Ils ne sont jamais revenus. A 1 h du matin, le 8 juin, nous sommes partis et passé par Crèvecoeur qui était en flammes. Nous sommes allés à (Fénétrange ? non retrouvé) lieu de rassemblement.

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Au sud de Poix, les lieux des batailles retrouvés
Là, une autre pièce est revenue entière avec quelques camarades de 2 autres pièces mais sans leur matériel. En fin de matinée, nous sommes allés plus à l’arrière d’où un lieutenant du 28e RA est venu pour faire mettre les 2 pièces qui restaient complètes, en batterie près de Crèvecoeur. Comme ma pièce allait prendre position vers 14 h alors que nous étions complètement à découvert, nous avons été bloqués par 80 avions de bombardement qui étaient de passage. Ils sont restés1/2 heure au dessus de nous à mitrailler et à bombarder le pays et une batterie qui était tout près. A la suite de cela, comme nous étions repérés, nous avons dû rebrousser chemin et sommes repliés par Beauvais qui était en flammes.

Nous étions seuls – voiture de liaison et camionnette transportant le canon. Avant Bresle nous avons dû nous camoufler sous le passage de 10 avions qui sont venus bombarder cette ville pleine de troupes. Sommes passés aussitôt après où il y avait eu beaucoup de dégâts ( artilleurs, grosse pièce).

[ Commentaires en 1998 : « spectacle macabre, toutes les canalisations étaient crevées, l’eau jaillissait de partout. Dans les rues, il y avait des chevaux, ceux qui tiraient les pièces d’artillerie, qui étaient abandonnés. Il y avait des blessés, mais un supérieur m’interdit de m’arrêter.Vue un mort, la tête coupée, grosse frayeur »] Le 9 juin, après avoir couché entre Bresles et Clermont ( le soir, nous avons été bombardés par avions), nous sommes partis pour cette ville, où après les renseignements pour trouver l’échelon, nous nous sommes dirigés sur Neuilly-sur-Thelle. Nous les avons rejoints là et nous nous sommes dirigés sur l’Isle-Adam où était repliée la 13e DI. Dans l’après-midi, l’autre pièce qui était allée prendre position près de Crèvecoeur est revenue . Sommes allés dans le bois –Un jour de repos.

Le 10 au soir, nous avons appris que notre batterie était dissoute et que nous étions désignés pour renforcer une autre batterie, la 609e BAC commandée par un capitaine et à qui il lui restait 5 pièces. Dès ce soir là, il a fallu se tenir prêt pour une nouvelle position près de l’Oise, d’où nous y sommes partis vers 6 h, le 11 juin. Ma pièce était commandée par le sous-lieutenant et avait la plus mauvaise place. Nous avons fait là toute la journée, des travaux pour l’abri et le camouflage. Je suis allé chercher des munitions et les camarades, beaucoup de ravitaillement en vivre et vins, dans le pays évacué.

Dès le soir, et durant toute la nuit, bombardements de part et d’autres.
Le lendemain 12 juin vers 8 h le bombardement est devenu d’une extrême violence, il a fallu garder l’abri sans cesse et vers 13 h un obus ayant tombé sur la pièce, l’a décamouflée. Dès cet instant les obus ont redoublé de violence sur cet endroit. Notre abri bien que solide menaçait de s’effondrer et ne pouvait plus rien garantir. Les tirailleurs de leur côté ne pouvaient plus tenir et se repliaient. Le chef de l’autre pièce qui se trouvait à 200m plus à l’arrière est venu voir ce que nous faisions. Sur sa pièce, il en restait plus que quatre, les autres avec l’adjudant s’étaient sauvés... Ne pouvant plus tenir, en plus du bombardement, l’abri était rempli de fumée de poudre, il a fallu sortir, les uns après les autres (15), en choisissant le moment de bondir entre les éclats d’obus. Il a fallu se sauver à pied - à pied et sans rien - , ma camionnette ayant eu des pneus de crevés et un éclat dans le moteur, d’autre part le canon était devenu inutilisable. Malgré les éclatements tout autour de nous, nous avons pu rejoindre l’autre pièce, sans avoir de mal, à part un blessé léger à la main. A cette pièce, nous avons pu prendre la camionnette, et qui malgré être plus que surchargée nous a mené hors de danger dans la forêt, mais non sans avoir eu bien du mal à passer en ville qui à ce moment était en pleine bagarre.

De là, nous avons pu rejoindre l’échelon et sommes allés ensemble passer la nuit dans un parc de château, à Beffemont [peut-être Bouffémont ?].
Le lendemain 13 juin, l’artillerie allemande ripostant sur des pièces françaises installées près de nous, il a fallu partir. Nous nous sommes dirigés sur Paris et vers midi, nous avons traversé la capitale ».

« Le 9 juin, les Allemands occupent Dieppe, Rouen, Compiègne, et atteignent la Seine et la Marne. Pour les Français, la bataille de la Somme s’est transformée en déroute…
Le 10 juin, les Allemands traversent la Seine, tandis que l’armée française se retire en désordre sur la Loire. Le général Weygand admet officiellement que le front s’est effondré.
Le 12 juin, le général Weygand signe l’ordre de retraite générale. [1] »

On peut considérer que la bataille de la Somme est là aussi terminée pour Fernand MASSICARD, sa guerre continue pourtant et les renseignements apportés par ses notes restent tout aussi intéressants, témoignages réels de ces journées difficiles.

« Par suite d’un camarade qui était malade, la camionnette où j’étais monté a perdu la colonne. Nous avons continué sur Versailles, Palaiseau, où après les renseignements, nous avons pris la route d’Orléans . Nous trouvant parmi les réfugiés qui étaient des milliers, après avoir couché sur la route, nous ne sommes arrivés qu’après 27 h dans cette ville et à 15 h le 14 (juin).Là, petit à petit, les voitures se sont regroupées. Nous sommes allés au quartier Châtillon pour le ravitaillement, vivres et essence. A la tombée de la nuit, nous sommes allés au champ de courses pour coucher.

Le lendemain 15 juin, le capitaine ayant rassemblé tous ceux qui restaient de l’ancienne batterie – 40 hommes – après avoir informé de tout ce que nous avions perdu (7 canons, 8 chenillettes, 8 camionnettes, 2 véhicules de liaison, 1 camion, 2 side-cars) a pris d’office les chauffeurs de voitures rescapés et les cuisiniers [Commentaires de 1998 : peut-être pas tous les chauffeurs !!] et a demandé 12 volontaires pour servir la seule pièce qui restait. Après de longues réflexions, l’instant fût épineux, et les reproches pénibles à entendre. Les 12 volontaires s’étaient inscrits, les 21 qui restaient [certains avaient disparu…] et dont je faisais parti, ont été désarmés et laissé à l’abandon. Nous avons pu arriver à obtenir, tout de même, un ordre de mission qui nous dirigeait sur Blois et par nos propres moyens. [C’est la fuite en avant, au milieu de la débâcle générale]. Nous sommes partis à midi et nous avons couché à Saint-Dye, avec les camarades.

Le lendemain [16 juin] avec un camarade, Constant. V, nous avons topé une voiture qui nous a fait faire 10 km, mais nous avons perdu les autres camarades, malgré que nous avions rendez-vous à 1 km de Blois. Avec le copain, nous avons couché à 2 km après Blois.

Le 17 juin, nous nous sommes présentés aux renseignements où, avant, nous nous sommes débrouillés pour avoir 2 vélos ! [le système n’était sans doute pas conforme à la loi] On nous a dirigé sur Vierzon. Nous sommes allés jusqu’à Montrichard pour coucher [Chez ses parents].

Le 18 juin, contrordre : ceux qui allaient du côté de Vierzon étaient refoulés sur Tours. Avons donc pris cette direction et sommes arrivés à Bléré (37).

[Commentaires :Pendant toute cette période, je n’ai jamais vu un Allemand de près].

L’aventure est loin d’être terminée, et je me demande comment tant de gens ont pu vivre cette douloureuse époque, où le sommeil était très perturbé, la nourriture difficile à trouver, le stress permanent, la vie si incertaine...

Quelle connerie la guerre !

A cette date, alors que le Général de Gaulle lance son « appel du 18 juin », les ordres et contre-ordres se succèdent. La situation est difficile et très incertaine. Fernand qui a retrouvé sa femme - sans nouvelles - et son copain Constant, ne passent même pas la nuit à Bléré (37). A la gendarmerie de Bléré, le chef Pinault (qui sera tué par les Allemands) leur conseille de partir au plus vite vers Loches et de gagner le sud. Ainsi commence l’exode de mes parents. Odette, la femme de Fernand ne veut pas rester, elle aussi doit partir…Elle confie son herboristerie à un couple, presque inconnu et valise sur le porte-bagages, « cartes postales » en poche, l’équipée se lance sur les petites routes de campagne.

Fernand reprend son carnet et ses notes.

18 juin. Départ pour Loches par la route de Cigogné. Le soir avons couché à Chédigny [dans une grange et dans le foin].

19 juin. Départ de Chédigny, passé par Chambourg, Dolus (-le-Sec), Manthelan (passé à la gendarmerie), la Chapelle-Blanche, Ligueil et enfin la Haye-Descartes. (Arrêt et couché). (couché à 3 km de la Haye [cette fois dans un lit].

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« Cartes postales » utilisées pour l’exode vers le sud
20 juin. Départ de la Haye-Descartes .Passé par route de Châtellerault (6 km) Leugny, Mairé, Lézigny, Coussay-les-Bois, Leigné-les-Bois, Chenevelles, Archigny (déjeuner au bord d’un ruisseau, près d’une laiterie). Puis Bellefonds, La Chapelle-Moulières, Liniers ; Lavoux, Saint-Julien-l’Ars. Arrêt et avons couché à 2 km de Saint-Julien, (famille de 7 enfants).

21 juin. Repos jusqu’à 20 h. [Il était préférable de rouler de nuit, par sécurité]. Puis départ en passant par Savigny-Lévescault, Pinier, Nieul-L’Espoir, Gisay. Avons couché dans une ferme avec un lit.

22 juin. Passé par Marnay, Champagné-Saint-Hilaire (déjeuner), Brux, Chaunay etTraversay où nous avons couché.

Le 22 juin, l’Armistice est signé avec l’Allemagne à Rothondes, la nouvelle est connue le lendemain.

_ 23 juin. Départ de Traversay(Deux-Sèvres) , Ruffec (déjeuner). Barro, Verteuil, Poursac, Couture, Valence, Saint-Angeau, Sainte-Colombes, Coulgens, La Rochette, Rivières, La Rochefoucault, Rangogne(Charente), (couché chez le Maire).
Les kilomètres ont eu raison de Odette – combien en avaient-ils déjà parcourus ? – et là mes parents allaient se séparer. Odette repart vers le nord, seule et se retrouve dans un foyer, à Saint-Junien (Haute-Vienne à l’ouest de Limoges) où elle restera au moins jusqu’au 5 juillet.

24 juin. Départ de Rangogne vers Chazelles, Bouëx, Dignac (déjeuner), Pontaroux, La Roche-Beaumontrt, Mareuil, Périgueux (couché).
L’Armistice est signé avec l’Italie,. Fin de la Guerre à minuit 35.

25 juin. Départ de Périgueux, et là, nous nous sommes dirigés vers le Bugue (centre de tri), en passant par Les Versannes et Ladouze. Arrivé au Bugue (Dordogne) à 17 h. Nous avons couché là. Le Bugue : « centre de rassemblement général ». Vendu vélo (20 francs).

26 juin. Départ du Bugue à 20 h 30 par le train, direction Castres. Passé Agen, Montauban.

27 juin. Continué voyage par le train. Passé Toulouse, Castelnaudary (Aude) , Castres (Tarn). Arrivé à 16 h. Passé au bureau de la place. A 19 h, pris petit train pour Brassac. A Brassac, pris car pour le Bez. Couché à 1 km plus haut dans un hôtel abandonné.

Castres : centre de rassemblement Artillerie.

De Castres à Brassac, suivi la vallée de l’Agout, très belle région. Brassac centre touristique très renommé.

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Le carnet
28 juin. Le Bez : départ à 11 h pour Brassac.

Brassac (Tarn) : logé dans un hôpital religieux St-Joseph, couché dans une classe de l’école libre.

Dans ce carnet, on trouve aussi les traces épistolaires qu’il entretenait avec sa femme, ses parents et amis, seuls liens qui existaient à cette époque.

Notes de la nouvelle adresse : 4e compagnie, 1re pièce, Parc régional de Vernou, Brassac, Tarn.

A Brassac, sans doute peu d’événements, car rien n’est signalé jusqu’au 10 juillet, à part un service en ville le 5 juillet, de 8 h à 11 h 30.
Chaque jour, Fernand envoie une lettre, mais aucune n’arrive et pour cause…Sa femme n’avait aucune nouvelle, aucune adresse. La première arrivera le 21 juillet, un dimanche, pourquoi ?

10 juillet. Commencé à travailler maçonnerie. 10 h (à déduire pour l’appel).

12 juillet. Travaillé 5 h route de Castres (soubassement).

13 juillet. Travaillé 10 h, de 6 à 10 h : route de Castres, le restant Usine Boyer.

15 juillet. Travaillé 10 h. Usine Boyer.

16 juillet. Travaillé de 6 à 8 h (Usine Boyer), de1 h à 6 h ( ferme près de l’usine). En tout 7 h. service en ville de 8 h à 11 h 30. du soir].

17 juillet. 9 h : 6 à 8 h à la ferme, 9 à 11 h à la remise (auge à porcs), 1 à 6 h à la ferme.

18, 19, 20, 22 juillet. 10 h à la ferme.

23 juillet. 8 h à la ferme.

24 juillet. 9 h ½ à la ferme (cabanon Jean-Jean).

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Courrier adressé le 5 juillet
25 juillet. Garde au poste.

26 juillet. 10 h (cabanon). A déduire ½ h pour renseignements au bureau.

27, 29, 30, 31 juillet et 1er août. 10 ou 9 h (charcuterie).

Reçu de Monsieur Oulès pour travail : 600francs. Touché prêt et paye : 570 francs.

2 août. Départ de Brassac à 7 h, par le petit train pour Vabres, passé Centre démobilisateur, resté jusqu’à 15 h 30. Touché 200 francs. Vabres-Castres, arrivé à 18 h, couché dans un hôtel.

3 août. Départ de Castres à 11 h pour Castelnaudary. Arrivé à 14 h 30. Départ à 15 h pour Toulouse, arrivé à 17 h. Départ de Toulouse à 18 h 35 pour Montauban, arrivé à 20 h. Départ de Montauban à 21 h 30 pour Brives, arrivé à 3 h du matin.

4 août. Départ de Brives à 6 h pour Limoges, arrivé à 8 h. Départ de Limoges à 17 h 30 pour Châteauroux (Indre). Arrivé à 20 h 30, couché dans un dortoir.

5 août. Départ de Châteauroux à 7 h 30 par le car, pour Loches ; arrivé à 10 h. Loches-Luzillé (Indre et Loire) à pied, Luzillé-Bléré en vélo ( de quelle origine ?), arrivé à 21 h 30 !!!!

Notes du mois d’août :

2 août, consommations : 8.25

chambre : 11.00

3 août, coiffeur : 4.00

consommations : 5.00

consommations : 2.00

dîner : 2.30

Fernand sera officiellement démobilisé le 2 août 1940.
Ses extraits des services s’établissent ainsi :

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Extraits des services

Par contre, à l’examen de son dossier militaire, Fernand ne remplira pas les conditions pour être reconnu comme combattant.

C’est la fin de l’HISTOIRE….. et les retrouvailles avec Maman, qui de son côté, après être restée un certain temps à Saint-Junien avait regagné Bléré avec d’autres réfugiés. _ Ceux-ci retournaient vers le nord, en voiture, et avaient pris la femme et le vélo…
Il est dommage de ne pas en savoir plus, c’était quand même une DRÔLE d’AVENTURE et un joli périple.


[1La seconde Guerre mondiale au jour le jour, Presses de la Cité.

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9 Messages

  • Bonjour Nicole,

    je suis actuellement en train d’écrire un livre sur juin 1940. Je suis intéressé par votre récit et souhaiterais échanger avec vous par mail.
    Je vous remercie par avance pour votre réponse.

    Cordialement

    Alain LEFEBVRE

    Répondre à ce message

  • Formidable récit je tiens à votre disposition des photos des combats de Poix de Picardie et des alentours.

    Répondre à ce message

  • Madame Nicole DUMEST

    Originaire de CASTRES, depuis 1933 et connaissant parfaitement tous ces lieux cités dans le "périple" de Vôtre Père : Brassac, Le Bez, Vabre et même les noms des Personnes qui y sont désignées,industriels et autres, c’est avec intérêt que j’ai pris connaissance de tout Vôtre récit, traçant étapes par étapes le parcours de : Fernand MASSICARD, Vôtre Père.

    La débâcle de juin 1940, m’a également été imposée dans la Somme, avec ordre par mes Supérieurs de déposer les armes, le 6 juin, à la suite de quoi, mon parcours n’a pas été dirigé vers le Sud, mais sur décision du vainqueur, vers le Nord-Est de l’Europe, destination : Stalag 1 B et cela, avec " Bail de 5 années."

    Comme vous l’avez fait pour Vôtre Père suite à ses " carnets de route," j’ai moi-même écrit mon parcours ainsi que le récit durant cette période, avec pour titre dans mon Site : " 5 Années Noires " http://suarez.club.fr/index.htm où vous pouvez en prendre connaissance, si telle est Vôtre curiosité à découvrir d’autres récits vécus de manières différentes pour chacun d’entre-nous.

    Avec mes félicitations pour Vôtre récit faisant Honneur à Vôtre Père, je vous prie d’agréer Madame mes respectueuses salutations.

    Louis SUAREZ

    Voir en ligne : 5 ANNEES NOIRES

    Répondre à ce message

  • Actuellement a coté de Mareuil ce n’est pas la Rochebeaumont mais la Rochebeaucourt .Voir la journée du 24 juin .

    Répondre à ce message

  • Bonjour à tous,
    Bonjour Nicole,

    Et merci pour ce témoignage de l’un de ces nombreux acteurs quasi impuissants devant des événements qui les ont dépassés et désolés.
    Le second mari de ma mère, Félix MAGNON, était adjudant-chef à l’époque et commandait une section d’infanterie. Il était dans le même secteur que votre papa au même moment.
    Il m’a raconté qu’il est resté au contact des troupes allemandes tant qu’il a pu pour défendre Beauvais et leur en interdire l’accés. Lui et ses hommes ont dû leur salut ce jour là à un lieutenant d’artillerie. Celui-ci avait reçu l’ordre de se replier avec sa batterie mais sachant que la section de mon beau-père était entre lui et les allemands, il a continué de tirer au canon pour freiner leur avance jusqu’au repli de toute la section et à leur tour mon beau-père et ses hommes ont accompagné et couvert le repli de cette batterie. Suite à cet épisode, ce lieutenant avait dit à mon beau-père qu’il ferait un rapport pour le faire nommer sous-lieutenant pour fait d’armes.
    Quelques jours plus tard mon beau-père, son capitaine de compagnie et bien d’autres ont été faits prisonniers dépassés par l’ampleur des moyens militaires adverses. Il s’évada avec son capitaine et un autre soldat mais ils furent repris peu de temps après. Décidé à ne pas rester aux main des allemands, il s’évada une nouvelle fois, seul, car personne n’avait voulu l’accompagner, jugeant l’entreprise trop risquée et vouée à l’échec. Quand il réussit à rejoindre des troupes françaises, le cessez-le feu était prononcé et il lui fut reproché par les autorités d’avoir perdu son arme. Il répondit qu’il regrettait sincèrement d’avoir oubliè de la réclamer à ses geôliers avant son départ.
    Il ne fut jamais promu sous-lieutenant car, comme beaucoup, il fut rayé des contrôles de l’armée. Il reçu la médaille des évadés mais refusa la médaille militaire qu’on voulu lui remettre près de trente ans plus tard.
    Il est décédé lui aussi en 1999, le 2 janvier, à l’âge de 92 ans. Je l’ai gardé une nuit pour soulager ma mère quand il a commencé à avoir des problèmes de santé. Cette nuit-là son esprit dérangé par la maladie lui a fait revivre ces moments car il s’agrippait à moi et me disait "Il faut vous mettre à l’abri" "Il faut prévenir le capitaine et les autres".
    Je tenais à lui rendre hommage à l’occasion de la lecture de votre article, comme à tous ceux qui ont vécu ces tristes moments.
    Ironie de l’histoire, il avait participé quelques années auparavant à la construction de la ligne Maginot...

    Yves BERTRAND

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  • La bataille de la Somme vue par mon père, Fernand Massicard (1913-1999) 23 février 2008 08:26, par Jean-Michel GUILLAUME

    Bravo NICOLE pour le récit de la bataille de la Somme par ton Papa,le voyage de ta Maman que beaucoup de personnes d’indre et loire ont fait.C’est une richesse les relevés de ton Pére . Peu ont laissés des traces aussi préçises ou n’ont rien dit de leur periple.
    Dommage pour leur descendants et les interréssés que nous sommes.
    Merci à toi d’avoir mis ce texte et Photo à disposition des pationnés de la vie de Bléré qui ont fréquentés ou non ton Papa ,surnommé "TOTO" pour les intimes.Celui ci etait un homme droit, calme et rigoureux dans son travail.
    Jean-Michel le voisin de tes parents.

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  • Bonjour Nicole,

    Félicitations pour ce formidable article sur votre père et sa guerre. Vous avez eu énormement de chance de pouvoir exploiter ses témoignages à travers son carnet de guerre. Mes grands-pères et arrières-grands-pères (voire arrières-arrières-grands-pères)qui ont fait les guerres (1870-71 ; 1914-1918 ; 1936-1939 en Espagne ; 1939-1945) n’en n’ont malheureusement tenu aucun. Cela dit, j’ai pu me rappeler de certaines anecdotes que chacun ont vécu durant leur guerre pour faire leur biographie à partir de documents qu’ils m’ont laissé fort heureusement (livrets militaires, photographies etc.). Je n’ai pu que collecter minutieusement par témoignage oral et souvenir la guerre d’Espagne vécut par mon grand-père maternel et ce avant qu’il ne meure. En revanche sur cette période de 1939-1945, mon grand-père paternel étant mort ne nous a rien laissé si ce n’est une photographie où il était sur la base aérienne de Toulouse en 1940 et où il était mécanicien sur les avions de chasse Dewoitine 520. Il m’avait juste dit qu’il avait failli être enrôlé pour piloter ses appareils faute de pilotes et que lorsque la débâcle fut "officielle" il a regagné ses foyers pour échapper aux Allemands. Avec sa mort en 2004, ...Quelle perte historique ! Encore bravo !

    Cordialement,

    Alexandre Dumont-Castells

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  • La bataille de la Somme vue par mon père, Fernand Massicard (1913-1999) 1er février 2008 16:38, par René CHAMPEAUX

    Bonjour Nicole. Je constate qu’après nos échanges en juin 2006 vous avez eu la bonne idée de transmettre à Thierry SABOT les très intéressantes notes de Fernand, votre père, "sur sa drôle de Guerre"... Il est vrai que l’histoire de Fernand est assez rocambolesque et lève le voile sur les difficultés de l’encadrement à organiser une défense efficace (mais aussi le repli)et aussi sur le manque flagrant de moyens face à un envahisseur puissant, organisé et encadré. La résistance, sur le papier, était difficile car disproportionnée et certains, comme mon oncle René CHAMPEAUX, par héroïsme ou contraint de tenir leurs positions, ont cru bien faire de tenir jusqu’au bout, face à cette vague déferlante que rien ne pouvait contenir, seulement ralentir un peu, et ce, au péril de leur vie ... Fin mai, début juin 1940, Fernand MASSICARD et René CHAMPEAUX se trouvaient donc à quelques Km l’un de l’autre. Le 6 juin 1940 en fin d’après-midi, après leur repli, le 3e bataillon du 21e R.I. du Sergent CHAMPEAUX était en position de défense dans les petites vallées de la Poix et des Evoissons, à Frémontiers plus précisemment, avec pour mission de résister et de ne plus reculer…. Depuis mon article paru en juin 2006, j’ai pu retrouvé et rencontré Fernand JEANNOT (90 ans), tireur et aux cotés de mon oncle et qui a pu me décrire plus précisemment ses derniers moments, blessé mortellement par un éclat de mortier tombé à quelques mêtres devant leur position. J’ai même découvert (!) que mon beau-père, Marcel JANIN (aujourd’hui 92 ans) était aussi dans le coin ! Son régiment, le 18e Génie Télégraphiste cantonné à Quevauvilliers (à 6 km au Nord de Frémontiers a reçu l’ordre de repli le 6 juin et qu’ils sont repartis en camions et dans le plus grand désordre en direction de Paris. Quelques jours plus tard, à nouveau pressés par les Allemands qui foncent sur la capitale, ils descendront jusqu’à Lalinde (Dordogne), ce qui les sauvera et leur évitera d’être prisonniers et déportés… Tant mieux pour eux ! Ils seront démobilisés fin juin 1940 et pourront rejoindre leurs foyers… Quant à Fernand JEANNOT, le copain de mon oncle, il fut fait prisonnier le 7 juin 40 et ne sera libéré que cinq ans plus tard, début 45 ... Que de tristes histoires pour tout nos respectueux e valeureux anciens !

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