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L’homme mort qui continuait d’avoir des enfants légitimes ou une bizarrerie de l’état-civil

Le jeudi 17 décembre 2015, par Serge Bouvart

Joseph François Eugène BOULNOIS naît à Moncornet (02) le 4 décembre 1862. Il épouse le 19 mai 1883 à Reims (51) Eugénie Victorine ROGÉ, une journalière.

Si l’on en croit l’état-civil, il a eu 9 enfants légitimes nés entre 1884 et 1902 dont : Camille Désiré né en 1896, Émile Adolphe en 1898, Georges Adolphe en 1900 et Madeleine Marie en 1902.

Le problème est que Joseph François Eugène est décédé le 20 septembre 1896 à Iracoubo (Guyane).

Voici son histoire :

Notre homme mesure 1,75m, il a les cheveux et les sourcils châtains, le front droit, les yeux marron-vert, le nez ondulé, une bouche moyenne, le menton rond, le visage ovale et un teint coloré.

Il sait lire et écrire et est de religion catholique.

A 23 ans en 1886, il est condamné à Reims à 2 mois de prison pour coups et blessures.

En 1890, pour la même chose et rébellion, 6 jours.

Journalier, garçon de magasin puis contremaître de filature, il décide simplement de cesser de travailler en 1892 et délaisse plus ou moins sa famille.

Le 31 décembre 1892, il est encore condamné, cette fois à 10 jours de prison, pour outrage à agents.

Le 17 février 1893 naît sa fille Marthe Ernestine qui meurt le 25 juin. Joseph François Eugène n’est pas là. Il est en prison. Il a été condamné le 20 mai à 8 mois de prison pour vol. Il sera cependant libéré avant la fin de ces 8 mois.

Le 11 mai 1894, il est de nouveau condamné à Reims pour vols qualifiés. Cette fois à 8 ans de travaux forcés.

« Boulnois s’était institué à Reims le chef d’une bande de sept individus qui se livraient journellement aux vols. Dans l’espace d’un mois du 24 décembre 1893 au 21 janvier 1894, Boulnois et cette bande ont commis dans la ville de Reims 28 vols accompagnés de circonstances aggravantes : de nuit, maisons habitées, escalades, effractions, fausses clefs, pluralité de coupables. Le jury a refusé à Boulnois les circonstances atténuantes. »

Avis du président de la cour d’appel de Paris sur le lieu de la transportation (01 juin 1894) :

« Boulnois, 31 ans, a travaillé utilement les premières années de son existence d’homme. Les mauvaises compagnies l’ont perdu. Paraît doué de résolution et d’énergie.Peut être employé utilement dans tous les lieux de transportation. »

Le 25 juin 1894, la commission de classement des condamnés aux travaux forcés considère Boulnois comme « indigne d’indulgence » et « est d’avis qu’il soit placé à la 3e classe et dirigé sur la Guyane ».

La condamnation est lourde. Condamné à 8 ans de travaux forcés, Joseph François Eugène sait qu’il devra, après sa libération, rester 8 ans supplémentaires en Guyane, c’est la loi. Il ne peut donc espérer revenir en France métropolitaine qu’en 1910, s’il n’a pas eu d’autre condamnation, et s’il peut payer lui-même son voyage, ce qui est pratiquement impossible pour un bagnard libéré.

En mai 1895, on l’informe que sa femme veut engager une procédure de divorce. Ce divorce n’aura cependant pas lieu.

Le 8 mai 1896, il est en "punition " : « Le condamné 26468 Boulnois 3e classe (cellulaire) pour avoir été trouvé porteur d’une boîte de sardines qu’il avait caché entre ses jambes et n’avoir pas voulu en déclarer la provenance ».

Le 6 avril 1896 naît à Reims son fils légitime (pour la loi) Camille Désiré. Le couple Boulnois - Rogé est toujours marié donc rien d’anormal pour cet acte. Le père est dit « sans domicile connu ».

Le 20 septembre 1896, Joseph meurt donc à Iracoubo en Guyane, à l’âge de 33 ans. L’acte de décès n’est transmis à Reims qu’en juillet 1897.

A partir de cette date, le reste est une énigme : Victorine Rogé a-t-elle été informée du décès de son mari ? Le livret de famille existe depuis 1877, en a t-il été fait mention ? Il semble que non !

Le 2 juin 1898 naît un nouvel enfant légitime : Émile Adolphe. Le domicile du père est encore dit « inconnu ».

Le 20 février 1900 naît Georges Adolphe, légitime de Joseph François Eugène Boulnois, 37 ans, garçon de magasin, domicile inconnu.

L’acte de naissance de Georges Adolphe Boulnois en 1900 est particulier ; c’est le seul à être plusieurs fois rectifié.

Georges Adolphe à porté, pour la loi, 3 patronymes différents : Il naît en 1900 fils légitime d’Eugène Boulnois. Il porte donc le patronyme BOULNOIS.

Par jugement du tribunal civil de Reims du 8 novembre 1906 l’acte est rectifié il est dit né de Eugénie Victorine ROGÉ veuve BOULNOIS par conséquent de père inconnu. Son patronyme devient donc ROGÉ.

Il est reconnu par son vrai père, Émile Guillemain en 1909. GUILLEMAIN sera son patronyme définitif.

Enfin en 1902 naît Madeleine Marie Boulnois dernière fille légitime de Joseph François Eugène Boulnois, 39 ans, journalier, domicile à ce jour inconnu, mais donc en réalité du bagnard matricule 26468, mort à 33 ans, en 1896.

Émile Guillemain est sans aucun doute le père de tous les enfants nés à partir de 1896 ; Il habite avec Eugénie Rogé et c’est lui qui les déclare à la mairie. A part Georges Adolphe, ils sont tous décédés en bas âge, ce qui peut expliquer le manque de rectification sur les actes.

Sources :

  • État-civil de Reims (51).
  • État-civil de Moncornet (02).
  • État-civil d’Iracoubo.
  • Dossier de Joseph François Eugène Boulnois,bagnard, matricule 26468.

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20 Messages

  • Oh !!! Merci merci pour ce post ! Il me donne de nouvelles pistes de recherches concernant la famille de mon bagnard. J’avais cherché des enfants naturels de sa femme après son départ, mais je n’aurais jamais pensé trouver des enfants qui auraient été déclarés légitimes, sous son nom à lui, et après son décès. Je viens d’ailleurs d’en trouver un (mort né malheureusement).

    Merci aussi pour les pistes d’approfondissement de son histoire - son dossier de bagnard est extrêmement léger (fiche d’arrivée au bagne et acte de décès, rien d’autre).

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  • Bonjour,intéressant comme cas,,,ces enfants qui naissent d un père decedé..et qui porte son nom de famille Boulnois,
    ceci dit toutes ces naissances sont bien déclarées à la mairie ,,,,et qui sont des faux vu L absence du père Boulnois,,,
    Avait il donc une loi en ces temps qui entérinait donc ces déclarations et qui donnait le droit D être reconnu légalement ,,D un père mort,,,même si le vrai père MR Guillemain en était le géniteur ?
    j ai aussi le cas de 2 enfants nés après la mort du père et qui justement portent le patronyme du défunt père,
    je me posais la question de savoir si une loi en était la cause de cette acceptation d enfants reconnu D un père decedé..?
    cordialement L Lagesse

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  • Bonjour,
    J’ai un cas un peu similaire à cette histoire mais plus récente. En raison du caractère récent, je ne mentionnerai pas de patronyme. L’histoire concerne l’oncle de ma grand-mère. Ce dernier bien que décédé en 1900 se retrouve père d’un petit garçon né en 1904. Je sais que sa veuve vit maritalement avec un homme violent qui engendrera un drame dans cette famille. Est-ce la raison pour laquelle l’enfant ne porte pas le nom de son vrai père ? J’ai voulu en savoir plus sur la vie de ce petit garçon dont aucune modification de patronyme n’a jamais été portée sur l’acte de naissance. Il est décédé (mention marginale sur l’acte de naissance) vers 1960 mais je n’ai jamais pu trouver son décès dans la commune où il est soi-disant décédé ! Y a t il eu une modification de patronyme non portée sur l’acte de naissance, le père est-il encore une personne différente de cet homme violent ? Je le découvrirais peut être un jour.
    Bonne journée

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    • Bonjour a SUTRA.
      .Vu que l oncle est décédé en 1900 et l enfant nait en 1904 il n est pas ; bien sure de la lignée de l oncle de votre grand mère
      Et si il ne porte pas le nom de l homme violent c est bien que la veuve a eu un autre homme dans sa vie et que le garçon ayant bien un patronyme que vous connaissez.il est donc le fils de son géniteur .. il faut chercher cette piste...
      IL n est pas l enfant de L Oncle ni de l homme violent...
      Cordialement LL

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    • Bonjour,
      Si l’administration donne en 1904 le nom de l’oncle, mort en 1900, à l’enfant, c’est qu’on ne lui a fourni aucun document attestant le décès.
      Il faudrait bien relire l’acte de naissance. Que dit-on du père ? Qui déclare l’enfant ?
      Autres questions : Où est mort l’oncle ? Sa veuve sait-elle qu’il est décédé ?
      Vu le nom donné à l’enfant, n’importe qui peut en être le père, même le gars violent. N’importe qui sauf l’oncle.

      Cordialement
      Serge

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      • Bonsoir,
        L’enfant est né à l’hôpital, sa naissance a donc était déclaré par les employés de celui-ci. Le père est décédé dans la ville de naissance de l’enfant de mort naturelle. Je pense que l’homme violent est très probablement le père vu le 2e prénom de l’enfant. Le message que vous a envoyé un autre lecteur sur certaines règles de droit me semble très intéressant et apporterait une réponse à mon cas. Passionnant.
        Bonne soirée
        Béatrice

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  • Bonjour, je n’ai pas fait beaucoup de droit mais j’ai retenu la formule "pater is est quem justae nuptiae demonstrant" c’est issu du droit romain et repris dans le code Napoléon.Un enfant est réputé né du père si le mariage est légitime. Ceci pour la paix des familles.(-et de la société). La procédure de désaveu de paternité est une des plus ardues qui soit.Si cette procédure n’est pas engagée, l’enfant portera le nom du mari de sa mère, fut-il mort.Quant à l’enfant, il peut engager une recherche de paternité, mais ceci est une autre affaire.

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  • Les employés de l’état-civil ne vérifient pas les déclarations, et en admettent qui constituent des faux et usage de faux qui sont rarement sanctionnés. J’ai un exemple dans le sens opposé à celui du titre : l’enfant adultérin d’une femme mariée séparée de fait, mais non encore divorcée, de son mari, déclaré comme enfant naturel de la mère, alors qu’il aurait dû être déclaré comme enfant légitime, quitte au mari de le désavouer. Cela a fait des complications sans fin, et l’enfant s’est retrouvé enfant naturel non reconnu (comme un enfant trouvé), mais le déclarant n’a pas été inquiété.

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    • Je rebondis sur les 3 derniers messages de MR de F, de Foncin et Sutra,,
      tous très pertinent ,,,
      ce code Napoléon qui assurait justement la paix dans les familles mais quid d enfants nés de ""relations intimes""ainsi dit dans des actes ,qui ne sont pas légitimes par mariage mais qui portent ,meme après le décès du géniteur,le patronyme du dit géniteur ?

      et mieux encore souvent la mère ajoutait son patronyme à ses enfants,,,
      qui sont finalement ces enfants ?fils naturel,fils non reconnu par UN des géniteurs,,,car souvent ces "dames" eurent plusieurs enfants de pères différents meme pour pousser le bouchon plus loin,elles ne savaient pas qui étaient le père,,,Traumatisme certain pour des enfants ...issus de plusieurs possibilité sauf la mère qui les reconnaît,Les juifs font autrement,,,filiation par la mère,,Il est exacte QUE les officiers d état civil meme les notaires ne contrôlaient pas ce genre de détails !!!!! Dans nos îles nous avons eu des dizaines de cas semblable,,,
      Heureux que le code Napoléon a été modifié ne serait ce que pour L adultère,,
      tres cordialement Lorraine,

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      • Bonjour,

        Rien que de très normal dans cette affaire. Cela peut paraître surprenant, mais il faut toujours se replonger dans les textes applicables au moment des faits....qui ont d’ailleurs perdurer jusqu’en 2005.

        L’ancien article 312 du Code civil (version 1804) stipulait ceci : "L’enfant conçu pendant le mariage, a pour père le mari.
        Néanmoins celui-ci pourra désavouer l’enfant, s’il prouve que, pendant le temps qui a couru depuis le 300e jusqu’u 180e jour avant la naissance de cet enfant, il était, soit par cause d’éloignement, soit par l’effet de quelque accident, dans l’impossibilité physique de cohabiter avec sa femme"
        L’ancien article 313 (version 1804) empêchait le mari de désavouer pour cause d’impuissance, et même pour cause d’adultère, sauf si la naissance lui était cachée.
        L’ancien article 315 prévoyait que la légitimité de l’enfant né plus de 300 jours après la dissolution du mariage pouvait être contestée, etc.....
        La présomption de l’article 312 était irréfragable. Le maire suite à la déclaration de naissance d’un enfant d’une femme mariée ne pouvait donc enregistrer l’enfant que sous le nom du mari. Si le mari était mort entre temps, et faute pour le maire d’avoir l’information, il se devait donc de continuer d’enregistrer les enfants sous le nom du mari. Cela peut paraître cocasse, mais c’était ainsi. Le géniteur a pu faire reconnaître sa paternité pour l’un des enfants en excipant que le mari était mort, et ce sans doute sans grand problème.
        Actuellement l’article 312 du Code civil indique que "L’enfant conçu ou né pendant le mariage a pour père le mari". Mais, en vertu du nouvel article 314 "La présomption de paternité est écartée lorsque l’acte de naissance de l’enfant ne désigne pas le mari en qualité de père et que l’enfant n’a pas la possession d’état à son égard".
        Si cet article avait existé à cette époque, le mari aurait pu être ignoré et l’enfant aurait porté un autre nom. Autre temps, autre mœurs !

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    • Comme preuve que les déclarations ne sont pas vérifiées : ma mère , enfant adultérinne de ma grand mère célibataire et d’un homme , déjà marié et non séparé , a été déclarée par son père biologique comme étant née de lui et de son épouse , même si maman a été élevée par sa mère , celle-ci n’existe pas vis à vis de la loi

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    • Des enfants déclaraient par le père sous une fausse mère
      Non seulement les employés de mairie ne font pas attention mais est-ce que les personnes savaient exactement à quoi servait un livret de famille.
      Enfant ma mère avait été témoin de la découverte chez des voisins, après le décès du mari, que celui ci avait fait inscrire sur un livret de famille les naissances des enfants du couple mais l’épouse n’était pas la mère des enfants. Ne sachant pas lire ce qui était courant à cette époque la pauvre femme ne savait pas à quoi pouvait servir les papiers que son mari avaient rangés dans un tiroir.
      Que sont devenus femme et enfants... ont ils pu faire rectifier l’état civil j’en doute. Ma mère était trop jeune pour s’intéresser aux suites données.

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  • j’ai le même problème dans ma famille, j’ai un oncle qui est né en 1916(bulletin de naissance à l’appui) et son père est décédé en 1914 (j’ai eu la date de décès par mémoire des hommes) alors je pense que je peux avoir confiance mais voilà il y a une erreur c’est sur mais ou ?

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  • Ce n’est pas si étrange que cela.
    En effet, les actes était déclaratifs.
    Ainsi, sur l’acte de mariage de la soeur de mon grand-père, figure , acte de notoriété joint que la mère de la mariée est séparée du père depuis 1898 et qu’elle ignore son domicile et ce qu’il est devenu - confirmé par le juge de paix - or en 1900,1901 et 1905 elle a eu 3 enfants légitimes qui portent le nom du père.
    Il lui a suffit de fournir son acte de mariage et de déclarer la naissance des enfants.
    Ces faits sont confirmés par les enfants qui savaient qu’ils n’avaient pas le même père.

    Dans votre cas, il semble que la même chose se soit passée.

    De plus à cette époque tout enfant né d’une mère mariée portait le nom du mari (il fallait qu’il entame une procédure judiciaire pour contester la paternité et à l’époque il n’y avait pas l’ADN...)

    Marie

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  • Quelle bizarrerie en effet que la naissance de ces enfants issus d’un père décédé... J’ai pensé que sans doute cette femme ne voulait pas que ses enfants soient indiqués "de père inconnu", peut-être par peur du "qu’en dira-t-on" (les filles-mères étant mal vues...).
    C’est un vrai mystère que la vie de cette femme ayant des enfants de ce Guillemain avec qui elle vit et les déclarant de son défunt mari... (peut-être était-elle devenue un peu folle suite au traumatisme de la déportation de son mari ?)

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  • Bonjour
    Merci beaucoup pour cet article très intéressant, ainsi que les commentaires expliquant le code Napoléon.

    Tout ceci confirme encore un peu plus les doutes que j’avais concernant la filiation d’une ancêtre, le "père officiel" étant interné.

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