Il embarque ensuite à Lorient sur les navires de la Compagnie des Indes comme chirurgien avec pour destination le Bengale, la Chine, les Indes, etc. Sa carrière comme officier major en tant que chirurgien dans la Compagnie des Indes est résumée dans le tableau ci-après [4] :
Dates de la campagne | Nom du navire | Destination | Cote des archives |
---|---|---|---|
20/10/1750 au 28/06/1752 | Le Duc de Parme | Le Bengale | SHDL-2P34-II.25 |
30/12/1753 au 30/07/1755 | Le Condé | La Chine | SHDL-2P37-I.10 |
07/03/1758 au 04/07/1759 | Le Dargenson | Les Indes | SHDL-1P196, 667 - 2P10-II.5 |
04/07/1759 au 04/08/1761 | Le Vengeur | L’Île de France [5] | SHDL-1P196, 667 - 2P10-II.5 - 1P195, 656 |
07/02/1765 au 28/07/1766 | Le Beaumont | La Chine | SHDL-2P40-II.11 – 1P203, 745 |
03/03/1768 au 15/06/1770 | Le Marquis de Castries | Le Bengale | SHDL-1P206, 780 |
Le 14 août 1770, il se marie à Lorient avec Marguerite Caro fille de Louis Caro, officier des vaisseaux de la Compagnie des Indes [6]. Le couple a un premier enfant dès l’année suivante qui sera prénommé Jean Louis. Ce dernier naît le 4 septembre 1771 à Lorient et est baptisé le même jour par le recteur de Lorient : Grimaud Giraud.
L’année suivante, il embarque sur La Digue comme subrécargue. Le navire a comme propriétaire et armateur la société « Piquet et Saint-Pierre ». La Digue part de Lorient le 17 avril 1772 et fait escale à Port-Louis de l’île de France du 5 août au 14 septembre. Le navire effectue une opération de traite aux îles Querimbe du 18 novembre 1772 au 22 février 1773. Thomas Vernet décrit la suite de la campagne en ces termes : « Fin mars, alors qu’il est en route pour Cayenne et la Martinique, le navire relâche au cap de Bonne-Espérance avec une « cargaison considérable de noirs ». Après avoir débarqué les esclaves pour les « rafraîchir », La Digue repart pour le Cap-Français, principal port de Saint-Domingue, où elle arrive le 13 juillet 1773. 230 esclaves sont débarqués. La Digue est de retour à Lorient le 20 décembre, puis à Nantes le 4 janvier 1774. » [7]
Dès son retour en France, Jean Vincent Morice décide d’organiser une traite à Zanzibar, « sur la foi d’un commerçant arabe qu’il avait su mettre dans ses intérêts ». [8]
Il repart de Lorient le 5 mai 1774 sur L’Espérance. Ce navire est en fait La Digue rebaptisé L’Espérance et est cette fois la propriété de la société « Foucault » qui arme le navire avec comme capitaine Jean Robinot Desmolières. Jean Vincent Morice est à bord le maître des opérations diplomatiques et médicales. L’Espérance arrive à Port-Louis de l’île de France le 17 ou 18 septembre 1774 et navigue le 5 novembre sur Saint-Denis de l’île Bourbon pour y débarquer des passagers et des soldats du régiment de l’île de France. Le 14 novembre, L’Espérance est rejoint par L’Etoile du Matin, le 15 les deux navires quittent l’île Bourbon et font relâche à Agaléga du 27 au 29 novembre afin d’obtenir des provisions et d’explorer la zone. C’est au niveau de la baie d’Ungama (ou Formosa) entre l’archipel de Lamu et Malindi, que l’expédition aborde la côte le 3 janvier 1775. Quatre jours plus tard, les deux navires sont devant la ville de Zanzibar.
Les contacts entre les Français et le gouverneur omanais sont immédiats et cordiaux. Dès le premier entretien les français se voient proposer 600 esclaves sous un mois. L’Espérance et L’Etoile du Matin lèvent l’ancre le 10 mars 1775 avec 614 adultes, adolescents et enfants sevrés auxquels s’ajoutent cinq enfants « à la mamelle ».
Un problème important apparaît rapidement car certains esclaves sont infectés par la variole et Jean Vincent Morice pratique l’inoculation. Malgré ce traitement la propagation de la maladie est fulgurante mais les soins permettent de limiter les décès car uniquement neuf esclaves mourront jusqu’au 28 avril.
Le 28 mai, L’Espérance passe à proximité de Rodrigue et arrive le 30 mai à l’île de France. Les esclaves sont mis en quarantaine. Jean Vincent Morice déclare avoir acheté 700 esclaves et en avoir rapporté « environ 500 ».
Dès le 28 août, Jean Vincent Morice renvoie L’Etoile du Matin (rebaptisé L’Abyssinie) à Zanzibar et L’Espérance le suit le 31 août avec l’armateur à son bord et le 13 septembre un troisième navire part, L’Abyssin. 925 esclaves sont achetés et 860 rapportés à Port-Louis.
Le 3 mars 1776, Jean Vincent Morice propose à monsieur de Sartine d’implanter un établissement commercial à Kilwa et le 14 octobre 1776, Jean Vincent Morice signe un traité pour cent ans avec le sultan de Kilwa. Dans ce traité, le sultan s’engage à fournir 1000 esclaves par an à 20 piastres et lui met à disposition une forteresse. En retour, Jean Vincent Morice versera 2 piastres par esclave au sultan [9] (voir la traduction du traité en encadré).
Dans le courant de l’année 1777, Jean Vincent Morice fait part aux autorités dans des mémoires de l’intérêt d’implanter un établissement commercial sur les côtes Est de l’Afrique et rédige en septembre 1777 un projet d’implantation en donnant dans le détail les besoins financier, matériel et humain nécessaires [10]. Le 3 octobre 1779, il part de Port-Louis en direction de Zanzibar comme capitaine du navire Le Saint-Pierre afin d’honorer une demande de 600 esclaves de l’administration de l’île de France [11]. Il décède le 16 juin 1780 à Kilwa [12].
Traduction du traité, écrit en arabe, entre Morice et le « Sultan » de Kilwa, le 14 octobre 1776 « Nous le Roi de Kilwa, Sultan Hasan, fils d’Ibrahim, fils du Sultan Youssouf, le Shirazi de Kilwa, nous donnons notre parole à monsieur Morice, un Français, que nous lui fournirons, chaque année, mille esclaves à vingt piastres l’unité et qu’il [monsieur Morice] donnera au Sultan, un présent de deux piastres pour chaque esclave. Il peut faire commerce de ses esclaves avec qui bon lui semble, Français, Hollandais, Portugais ou autres, mais pas au delà du nombre reçu. Ce traité entre lui et nous a une durée de cent ans. Comme garantie, nous lui offrons une forteresse où il pourra installer le nombre de canons qu’il voudra et son drapeau. Les Français, les Maures et le Sultan de Kilwa ne font plus qu’un. Si quelqu’un attaque l’un d’entre eux, il les attaque tous. Fait, sous nos signes et sceaux, le 14 octobre 1776 Signé : Morice Nous, soussignés, le capitaine et l’officier du navire « Abyssinie » commissionnés par monsieur Morice, certifions que tout ce qui concerne ce traité a été fait en notre présence, à Kilwa, le 14 octobre 1776. Signés : Pichard Pigne-Broüard. » |