D’après H.F. Buffet, l’histoire des navettes entre Gâvres et Port-Louis dans le Morbihan commence le 7 juillet 1774 [1]. En effet, à cette date, le sieur Bruté de Remur au nom du fermier général du Duché de Penthièvre afferme (loue) le passage à Louis Guilloto [2]. Avant cette date, il ne semble pas avoir existé officiellement de navire de passage entre Gâvres et Port-Louis séparés par un chenal d’environ 300 m de large. Ce chenal donne accès à la petite mer de Gâvres.
En 1812, Joseph Corvec (Né le 25 juillet 1774 à Bangâvres -Acte de baptême du 26/07/1774 à Port-Louis, marié avec Françoise Thoumelin le 17 septembre 1800 à Riantec et décédé le 14 octobre 1832 à Bangâvres.) exerce le métier de passager, c’est-à-dire de conducteur du navire qui fait la liaison. Aujourd’hui, on dirait le passeur. Au décès de sa femme, la même année, un inventaire des biens du couple est établi, par Maître Sauvée, le 24 octobre [3]. Dans cet inventaire, il est fait état du bateau de passage, de ses agrès et de ses apparaux qui sont estimés le tout à 60 francs. A cette époque, les navires étaient des canots à voiles.
- Un canot à voiles au départ de la cale de Gâvres
Le 5 juillet 1871, un drame épouvantable se produit. Le bateau de passage de Gâvres à Port-Louis, parti de la cale de Pen-er-run à Locmalo, chavire à cause d’une fausse manœuvre des voiles par le patron, un dénommé Rio. Le canot de sauvetage, dirigé par M. Pédron, réussi à sauver quelques passagers mais il y eut un grand nombre de victimes.
Le jour du naufrage, le nombre de noyés n’est pas connu exactement car certains passagers étaient des engagés à la pêche à la sardine qui n’avaient pas leur famille à Gâvres. L’estimation est d’environ 20 à 25 morts [4]. D’après le journaliste de l’Abeille de Lorient qui relate les faits, le bateau du patron Rio aurait déjà sombré trois fois avant cette catastrophe [5].
- Le canot à moteur Bretagne
quittant Gâvres pour Port-Louis vers 1920
De nombreux navires ont servi pour le passage. Les liaisons étaient assurées entre Gâvres et Port-Louis et parfois avec Larmor et Lorient. Certains navires servaient uniquement au transport de marchandises et d’autres à la traversée de passagers.
Pour la communauté de Gâvres, ces navettes avaient une grande importance car Gâvres à longtemps dépendu de Riantec au niveau administratif et religieux. En conséquence pour se marier, pour baptiser et pour enterrer un proche, les Gâvrais devaient se rendre à Riantec, distant de plus de 3 km du lieu de débarquement à Port-Louis, en traversant le bras de mer séparant Gâvres de Port-Louis, puis faire le chemin jusqu’au centre de Riantec. Ce trajet était à réaliser à toute époque de l’année, avec un bébé dans les bras pour la naissance d’un enfant ou avec le cercueil du défunt pour un enterrement [6].
Dans le hors série N° 8 de juillet 1997, du Centre d’Animation Historique du pays de Port-Louis, J. C. Caillibot a établi la liste des navires qui ont assuré les liaisons à partir de 1875.
Dans ce tableau, on remarque que le nom de bateau le plus fréquent est celui de " Bretagne ". En effet, 5 navires ont porté ce nom, ensuite, l’on retrouve 2 fois les noms " Joséphine ", " Christophe " et " Pierre Corvec ". Les propriétaires ont des patronymes bien connus de la région : Padellec, Mollo, Corvec, Tallec et Le Nezet. La durée d’utilisation des navires est variable, d’une année pour la " Sainte Anne " et le " Tarn " à 32 ans pour l’ " Aller et Retour ".
La traversée bien que très courte n’a pas été toujours de tout repos, le témoignage d’Odette Le Lan le confirme :
" Un matin de l’année 1935 ou 36, nous étions parties, mon amie, qui habitait Port-Louis, et moi-même, pour Gâvres passer la journée. Dans la soirée, au moment du retour, le temps avait changé et la mer était très mauvaise mais il fallait reprendre le bateau pour la traversée de Gâvres à Port-Louis. Ce n’est pas que le trajet fût bien long, peut-être 10 minutes dans le canot à moteur mais il y avait beaucoup de courant et des vagues. Ces dernières passaient au-dessus de nous. Dans le bateau, nous étions environ 10 à 12 personnes. Il y avait un prêtre et une dame se cramponnait à lui en priant. Tout c’est très bien passé, mais nous sommes arrivées l’autre côté bien mouillées. "
- Le navire Trait d’Union
à la cale de Port-Louis en juillet 2001.
Actuellement, le nouveau bateau se nomme Trait d’Union II et sa silhouette, jaune et blanche, tranche avec celle des anciens navires. Il a été baptisé le 28 janvier 1999 par Mme Lion et a été construit par les chantiers Bernard de Locmiquélic. Il mesure 10,50 mètres avec une puissance de deux fois 100 chevaux et peut transporter 28 passagers. Il a coûté environ 1,5 MF (0,228 million d’Euros). Tous les passagers sont abrités du vent, de la pluie et des embruns par une cabine avec de grandes vitres. Il part d’un ponton au port de Gâvres et arrive à la cale du Lohic à Port-Louis. Par vents forts d’ouest ou de suroît, il accoste à Locmalo [7].
- Ligne O dont fait partie le " Batobus "
Il est exploité en sous-traitance par la compagnie finistérienne Pen ar Bed et est un prolongement du service des bus de la ligne O de la Compagnie des Transports de la Région Lorientaise (CTRL) sous l’intitulé de " Batobus ". La traversée est réalisée pour la somme de 1,10 Euro.