- Avis aux requisiteurs
Vosbles est situé dans la petite montagne jurassienne ou Jura plissé du sud, dans l’ancien canton d’Arinthod et dans le diocèse de Saint Claude depuis 1742. Les vallées de la Valouse et du Suran parallèles à la vallée de l’Ain tracent leur passage dans des reliefs très accentués. La petite montagne est un pays accidenté et au 17e siècle peu boisé et cultivé à l’extrême, l’hiver dure assez longtemps si bien que la couverture de neige protège les céréales des gelées.
Vosbles, situé sur la rive droite de la Valouse est délimité au nord par Genod et Saint Hymetière, au sud par Cornod, à l’est Chemilla et à l’ouest par Charnod et Aroma.
Les déplacements sont compliqués, la route actuelle relie le village de Menouille à Arinthod par 17 km de route tortueuse, on se rendait au 18e siècle dans la même ville par un sentier muletier long de 8 à 9 km, sa pente était trop forte pour qu’une charrette y passe, par endroits les cavaliers doivent mettre pied à terre.
Les anciennes paroisses de Montgefond et de Chavagna sont intégrées à Vosbles le 5 février 1823. Arinthod est à 10 km, Ambronay et Saint Claude à environ 40 km, Orgelet à 23 km. En 1790 la population de Vosbles est de 349 habitants en 1793 et 110 en 2015.
- Eglise de Vosbles
- Bâtie en 1826, vue depuis le cimetière
La vie était dure dans la petite montagne au 18e siècle ! Le travail du bois est une activité caractéristique de la petite montagne, chaque village ayant sa fabrication propre, comme les cuillers à Menouille. La préoccupation vitale des habitants était le bois ! La zone des bois communaux constituait une frange à de constantes disputes. A Arinthod " il n’y a point de bois" ; A Chatonnay " Il n’y a aucun bois" ; A Charnod " 20 arpents de bois-taillis en mauvais état" ; A Mongefond " 10 arpents de buis et de bois blanc " ; A Vosbles " pas de bois...il n’y a de bois que de la plus mauvaise espèce, tout rabougris et qui ne peuvent soutenir le cordage ". Mongefond délibère " de ne pas couper du bois attendu que celui qui devait être coupé n’est que broussailles"." Faire paître une vache et un poulain dans un canton de bois mis en règle par la communauté de Vosbles coûta 10 livres à Juste Rochet " |
- Chapelle restaurée
- Une partie de l’ancienne église.
Le curé et la cure.
Le curé est d’abord un pasteur, chargé d’instruire les âmes qui lui sont confiées, d’administrer les sacrements ; il exerce sa juridiction sur un territoire déterminé, la paroisse, il est le seul maître de tout ce qui concerne le spirituel des paroisses.
Le curé reçoit sa charge pastorale, sa « mission canonique », de l’évêque du diocèse, « le vrai pasteur de son troupeau ».
Le candidat à une cure doit être « recommandable par les vertus, l’évêque qui nomme les curés doit y veiller.
L’évêque examine les candidats qui lui sont présentés, soit l’examen par l’évêque, ou le concours devant un jury, comme prévu par le concile de Trente, l’évêque accorde le visa de sa propre autorité. Le refus doit être motivé, il est susceptible d’appel, simple devant le supérieur hiérarchique, d’abus devant les parlements (nous le verrons plus tard ).
Le curé est tenu de résider dans sa paroisse (concile de Trente) il « ne doit jamais abandonner un jour ni une nuit tout entière sa paroisse, comme un bon pasteur son troupeau ».
L’évêque visite sur les lieux mêmes de la paroisse. Le curé doit acquitter un droit de procuration pour l’entretien du prélat visiteur et de sa suite. Même les paroisses les plus pauvres y sont tenues, les évêques veilleront cependant à ne pas écraser les paroisses de charges trop lourdes.
Le curé était le rédacteur des actes dans les registres de catholicité, avant que l’Etat Civil soit créé par la révolution, où figuraient les actes de baptêmes, de mariages et de sépultures. Grâce aux curés, nous pouvons consulter ces actes concernant nos ancêtres. Mais les différences sont importantes entre les curés, les paroisses en tenant compte de l’écriture, la véracité des faits, leur paresse... et nous y reviendrons.
C’est lors de la visite épiscopale que s’effectue la surveillance de l’évêque et qu’il peut infliger les éventuelles sanctions. « Le droit ou plutôt le devoir de visite auquel les évêques sont obligés, est une des matières des plus vastes du droit canonique »
La cure est une responsabilité spirituelle et désigne le soin des âmes par le biais d’une église et de son bénéfice ecclésiastique. Les cures disposent de revenus par le biais de la dîme, des oblations (offrande faite à Dieu), des offrandes.
La dîme ou dime ou décime est une contribution variable, étymologiquement de 10 %, versée en nature ou en espèces, à une institution civile ou religieuse. Elle joue un rôle structurant dans la société féodale occidentale à partir du Haut Moyen Âge.
La cure correspond à la « charge d’âme » qui est une traduction du latin cura animarum. C’est une charge ecclésiastique définie au sein de l’Église catholique qui correspond à la direction spirituelle et administrative d’une paroisse.
Le mot de cure est utilisé dans le langage courant pour parler de la charge paroissiale du curé, on dit ainsi qu’un curé obtient une cure quand on lui attribue une paroisse. Il s’agit dans cette acception d’une fonction et non plus d’une action spirituelle. Par extension, le mot de cure en est venu à désigner le presbytère.
Être nommé à la cure d’une paroisse, c’est en avoir la responsabilité spirituelle. Un seul prêtre peut être nommé curé d’une paroisse par l’évêque du diocèse. On dit aussi recteur ou abbé d’une paroisse, les autres prêtres sont qualifiés de vicaires.
Comme les sépultures sont d’un bon rapport, certains curés refusent d’enterrer les paroissiens qui n’ont rien laissé à l’Église.
Le prêtre et le curé sont au même niveau hiérarchique, mais tous les prêtres ne sont pas forcément curés alors que tous les curés sont des prêtres.
Claude FENOUILLET curé de Vosbles, le narrateur, explique, vers le 7 avril 1727 entre les pages 112 à 114 les problèmes de la cure avec beaucoup de détails et surtout il se protège, n’étant pas responsable ...
Tout commence en 1722 !
Le 3 août 1722 Claude Philibert CARNET prêtre curé est décédé puis inhumé le 4 août par Léonard PANISSET prêtre et curé de Genod.
- Messire Claude Philibert Carnet...
- Vosbles 1722 5E 126/3 AD du Jura
Messire Claude Philibers CARNET curé de Vosbles est décédé le trois du mois après avoir reçu les sacrements et a esté ensépulturé le quatre du mois et an que dessus par moy soussigné Léonard PANISSET prêtre et curé de Genod en foy de quoy j’ai signé. |
Claude Philibert CARNET est déjà le curé de Vosbles le 22 juin 1686 (baptême de Louys CARNET), et il a officié pour la dernière fois le 20 juillet 1722 pour le baptême de Claude DRAPIER.
Le 4 octobre 1722 son successeur Guillaume COMTE baptise Adrianne, fille d’ Humber BUNENOZ et de Marie CARNET, tous gens de labeur : c’est son premier acte !
- Baptême de Guillaume Comte
- AD Jura Saint Hymetière 1684 5E103/4 page 78/179
Guillaume CONTE est né et baptisé le 2 janvier 1684 à Montcoux paroisse de Saint-Hymetière, à quelques kilomètres de Vosbles, fils de Claude CONTE (décédé le 2 décembre 1734) et de Marie PICOD (décédée le 20 décembre 1725). " A esté parrain Claude PICOD et marraine Marie COMTE, en présence de François PICOD et de Benoit COMTE illettrés. |
Guillaume a dix frères et soeurs nés entre 1677 et 1700 [1].
Louis VUITTON, célèbre maroquinier, fut baptisé à l’église de Saint-Hymetière en 1821.
Le texte de Claude FENOUILLET commence ainsi :
- Par le décès de Sieur vénérable...
" Par le décès de Sieur vénérable Claude Philibert CARNET natif de Vosbles arrivé le 3 août 1722, le Sieur Guillaume COMTE de Montcoux paroisse de Saint-Hymetière est nommé par l’Abbé BOUCHÛ à cause de sa dignité de l’Abbaye Notre Dame d’Ambronay en Bugey, fut dépossédé par sentence de récréance rendue au baillage d’ Orgelet par le sieur Claude François GINDRE qui s’avisa en qualité de savoyard de demander la cure de Vosbles au concours par ce qu’elle ... le Comté de Bourgogne quoy que du diocèse de Lyon où il n’y en a point et l’obtint y étant seul ..." ( étant seul c’est plus facile de l’obtenir !) [2] |
Récréance : Le jugement qui accorde cette possession provisoire, s’appelle jugement de récréance. Les sentences de récréance sont exécutoires nonobstant l’appel, suivant l’ordonnance de 1667, pourvu qu’elles soient rendues par des juges royaux ressortissants sans moyen.
A ce stade de notre récit, il est nécessaire de présenter rapidement les personnes intervenant dans la suite de ce "feuilleton à rebondissements" :
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Claude Bouchu, abbé d’Ambronay
L’abbaye Notre-Dame d’Ambronay est une abbaye bénédictine, fondée au XIe siècle par Barnard de Romans, qui se dresse sur la commune d’Ambronay dans le département de l’Ain. Elle s’étendit dans toutes les directions. Elle avait en outre 12 prieurés et 15 cures disséminés.
Claude BOUCHU est l’Abbé de Notre Dame du 10 avril 1694 au 1er février 1730, date de son décès. Un abbé, est tout d’abord un moine chrétien élu par ses pairs pour diriger un monastère, une abbaye.
Claude BOUCHU l’abbé est né vers 1660 à Dijon, seigneur de Loisy, comte de Pont-de-Veyle, marquis de Lessard. Il a été tonsuré par Ardouin de Perefixe, archevêque de Paris, le 13 juin 1669, le 10 avril 1694 il devint le 49e abbé de Notre Dame d’Ambronay.
"Les richesses de l’Abbaye étaient immenses et l’on comprend que les vingt quatre (l’abbé comptant pour deux) religieux d’Ambronay menassent joyeuse et grasse vie à l’ombre de leur cloître.
Tous ces gentilshommes, fils de plus nobles familles de la Bresse, du Bugey, de la Savoie, se souciaient fort peu de la règle de Saint Benoît et des austérités monacales. Servis par des domestiques qui les dispensaient de tous les travaux pénibles, ils se livraient tout à loisir à la consommation de leurs énormes prébendes. " L’Abbaye d’Ambronay était également trop riche, avait de trop grasses prébendes pour ne pas tenter l’appétit de ses puissants voisins moins fortunés." [3]
Les prébendes sont la part de biens prélevée sur les revenus d’une église attribuée à un clerc pour sa subsistance et en compensation du ministère accompli ; titre auquel est attachée une prébende. |
L’abbé Claude BOUCHU est décédé à 70 ans le 1e février 1730 et inhumé le 2 février dans le cimetière de Loisy (Saône et Loire). Il avait désigné sa nièce, Marie Elisabeth Claude Pétronille BOUCHU, comme héritière : "Outre la part considérable qui lui échut provenant de la fortune de son père, Claude-Pétronille BOUCHU fut par testament déclarée légataire universelle de son oncle Claude BOUCHU, abbé d’Ambronay, qui lui léguait en legs spécial un diamant précieux d’une valeur de 4,000 livres." [4]
Le baillage d’Orgelet
Le baillage d’ Orgelet occupe la partie méridionale de la Franche Comté et fait partie du Baillage d’Aval ou de Salins. Des Bernardines font édifier à Orgelet un monastère au début du XVIIIe siècle. Le baillage a subsisté jusqu’à la Révolution. Il datait d’avant Charles Quint qui le confirma en 1546.
Les paroisses suivantes font partie du baillage d’Orgelet : Vosbles, Arinthod, Charnod, Valfin, Genod, Saint Ymetière, Vescles, Croissiat, Douffia, Dramelay.
1722 Messire Claude François GINDRE Prestre Bourgeois de Saint Claude prend possession de la cure près d’un an avant la nomination officielle !
Suite des registres des baptêmes mariages et mortuaires de l’église Saint Estienne de Vosble Chavagnaz et Mongefond faits par Messire Claude François GINDRE prestre Bourgeois de Saint Claude nommé à la cure de Vosble par le concours le 15 septembre 1722 après en avoir pris possession le 29 juillet de la présente année et y estant envoyé en possession paisible par sentence de récréance le 20 septembre de la même année rendue au baillage d’ Orgelet contre le Sieur Guillaume COMTE prêtre de Montcoux paroisse de Saint Hymetière qui avait été nommé à la cure par l’abbé d’Ambronay [5].
Le 12 juillet 1723, Guillaume COMTE Curé de Vosbles signe son dernier acte : le baptême d’ Estienne ROCHET [6]. L’acte suivant ce texte est en latin et la signature est celle de Claude François GINDRE.
Pendant une période les deux curés seront présents ensemble , du 4 octobre 1722 au 12 juillet 1723, les actes sont signés par COMTE. GINDRE a été nommé, mais son prédécesseur conteste devant le Parlement de Besançon !
La période GINDRE
Après le 12 juillet 1723, tous les actes sont en latin ! Il va marier Claude ROCHET en 1725 et inhumer en 1726 son père Jean Claude ROCHET : des ancêtres de mon épouse à la 8 et 9° génération.
Le 7 avril 1727 Claude François GINDRE est enseveli par Claude FENOUILLET curé, en présence de GINDRE curé de Saint Julien (un frère , un cousin ?). Dans son avis , Claude FENOUILLET parle : " du prétendu curé de Vosbles " !
Claude François GINDRE est décédé pendant la " litispendance " de Saint Claude : c’est l’état d’un litige porté simultanément devant deux tribunaux du même degré également compétents !
- Et le souscrit...
Et le souscrit par tant de mission du Sieur Guillaume COMTE de son droit à la cure de Vosbles que par droit d’une nouvelle nomination de Messire BOUCHÛ abbé d’Ambronay ancien et perpétuel nominateur de l’église Saint Estienne de Vosbles fut aussy dépossédé par le sieur Jean François BOUQUEROD de Giny [7]par la sentence rendue à Orgelet en 1728. Dont appel de la sentence et du fonds comme d’abus, obtint arrêt au parlement de Besançon avec dépends et restitution des revenus et des fruits même aux peines de l’ordonnance des quatre mois le quatorzième décembre 1731. A cet effet les minutes des registres suivants ne sont pas bien exacts parce que les papiers de l’église ont été au greffe de Valefin jusqu’en 1732 et que le sieur BOUQUEROD a laissé les actes sur plusieurs papiers volants ou quart de papier. |
Il est vrai que les 130 km ne facilitait pas le déplacement de l’évêque pour visiter les paroisses de la petite montagne, néanmoins un manque de contrôle et de surveillance est indéniable des autorités du diocèse.
1727 : l’intérim FENOUILLET
Il a attendu l’arrivée de BOUQUEROD à la cure et de plus l’église va mal !
" L’église de Vosbles étant tombée en ruine un interdit fut lancé et eû pour asile assigné l’église et le cymetière de Genod d’où vient qu’en 1727 Jean Claude ROCHET y fut enterré Claude ROUGEMONT y fut enterré le 15 mars... "
Le prieuré de Vosbles était une dépendance de l’abbaye d’Ambronay et fut habité jusqu’au XIVe siècle par un prieur et deux religieux bénédictins. L’église prieurale et paroissiale de Vosbles, dédiée à l’invention des reliques de Saint Etienne, premier martyr était au nord ouest du village ; elle a été en grande partie démolie. Il n’en reste que le choeur qui sert actuellement (en 1854) de chapelle (voir la photo).
L’église actuelle est construite en 1826 aux frais de M. le curé PELIER. Mort en 1843, il a aussi fait construire le presbytère et l’école des filles [8]. Le curé PELIER avait de l’argent, lui au moins, il en aura fait profiter les paroissiens de Vosbles.
- Minute des registres...
Minute des registres des baptêmes, mariages et enterrements pour l’année 1727. Depuis la mort du sieur Claude François GINDRE prétendu curé de Vosbles jusqu’à semblable venue du sieur Jean François BOUQUEROD fait par le curé soussigné prêtre natif de la paroisse de Villette de Montdidier près Cornod. Claude FENOUILLET prêtre curé. [9].
Cornod, proche de Vosbles, a deux églises : Saint Martin et Saint Didier au hameau de Villette. Jean de Seyturier, seigneur de Cornod est fait baron de Cornod et de Montdidier en 1582.
Claude FENOUILLET se moque de la situation, encore une fois Guillaume COMTE est bafoué par le baillage d’ Orgelet et est cette fois dépossédé de la cure de Vosbles par Jean François BOUQUEROD.
Donc par l’arrêt de Besançon, Jean François BOUQUEROD doit laisser la place, et une histoire de gros sous, en restituant les revenus de la Cure ! Mais le séjour de BOUQUEROD curé ne s’est pas passé comme prévu !
Les registres sont déposés chez le greffier, celui ci écrit : " que dans tous les registres qui ont estés déposez d’abord après le décès du Sieur GINDRE dernier curé de Vosbles des baptêmes mariages et mortuaires , il ne s’y est trouvé aucun registre des baptêmes et mariages escrits de la main du sieur curé du dit Vosbles.. et commençant en 1643 et finissant en mille six cent huitante six.
Dans le dit registre , il n’y a aucun mortuaire qui s’y est trouvé un autre registre écrit et signé de la main du Sieur Philibert CARNET curé de Vosbles, commençant en mille six cent huitante six et finissant en mille sept cent vingt deux au commencement duquel est le mortuaire de Claude ROYER du 23 avril même année en foy de quoy j’ay signé le 17 novembre 1731 " signé illisible greffier.
Les registres ne correspondent à rien, des manques, des oublis, des erreurs. Claude FENOUILLET s’est acharné à essayer de régulariser la situation ... les actes ne sont pas dans l’ordre chronologique ! 1730 est avant 1728 !
"Les minutes des registres suivants ne seront pas bien exacts par ce que les papiers de l’église ont " estés" au greffe de Valfin sur Valouse jusqu’à 1732 et que le Sieur BOUQUEROD a laissé ses actes sur plusieurs papiers volants ou quart de papier " (même pas sur un post it !)
Claude FENOUILLET devient le " titulaire" de la cure de Vosbles :
" Le premier avril 1732, Marie Françoise fille de Joseph ECOIFFIER et d’Agnès PECHOUX mariés a été baptisée dans l’église Saint Etienne de Vosbles par nous Claude FENOUILLET prêtre natif de Villette près Cornod, et curé envoyé en possession de la ditte cure par arrêt rendu le 14 décembre 1731 au souverain parlement de Besançon, dont parrain et marraine sont Joseph fils d’Humbert ECOIFFIER et Marie la soeur tous de Vosbles" [10].
Le jugement du Parlement de Besançon comporte 13 pages. Claude FENOUILLET a assigné Jean François BOUQUEROD le 5 janvier 1728. Tout est bien détaillé, comme par exemple la quittance du 15 avril 1729 contesté par Claude FENOUILLET : " La Cour ... condamne le sieur BOUQUEROD à " l’amande" de soixante quinze livres .."
Pour régulariser les actes, Claude FENOUILLET a fait au mieux :
- le 1° acte est celui de la sépulture de Claude GINDRE prétendu Curé de Vosbles qui a été enterré à Genod acte signé Fenouillet
- les actes suivants : sépultures DRAPIER, MARQUIS, BRUN, ROCHET d’avril 1727 indiquent que les cérémonies ont eu lieu à Genod , car l’église est en ruines ... avec la signature de Claude FENOUILLET
- Seul Claude ECOIFFIER fut enterré dans l’église de Vosbles ...
- les actes OISELET / REYBARD-OISELET concernent des cérémonies à Genod et furent signés par Claude FENOUILLET
- Jean COLON est enterré à Vosbles le 24 mars 1730 par BOUQUEROD, mais l’acte régularisé est signé par FENOUILLET ! (page 116)
Confusion totale dans les années 1726 - 1727 - 1729... actes sans aucun ordre , signatures FENOUILLET , BOUQUEROD et un nouveau curé Léonard PANISSET (page 118). A partir de 1732 , les actes seront enregistrés normalement par Claude FENOUILLET.
Malgré cette bataille pour conquérir une cure, l’Abbé BOUCHU n’a pas réussi à imposer son protégé : la cure doit être bien rentable et apporter de confortables revenus. Conséquence : aucune conscience professionnelle, des registres bâclés.
Les archives de l’Ain confirment les dérives de l’Abbé BOUCHU :
" Malheureusement, à Ambronay, comme en plusieurs autres monastères de l’ordre bénédictin, le relâchement de la ferveur et de le discipline religieuses ne tarda pas à suivre, vers la fin du 15e siècle, l’introduction du déplorable " régime de la commende " que l’ on a pu appeler " le chancre rongeur de l’ordre monastique".
Dans le régime de la commende, un ecclésiastique (abbé ou prieur « commendataire ») ou un laïc tient une abbaye ou un prieuré in commendam, c’est-à-dire en percevant personnellement les revenus, et, s’il s’agit d’un ecclésiastique, en exerçant aussi une certaine juridiction sans toutefois la moindre autorité sur la discipline intérieure des moines. |
Au lieu d’être élus par les moines et de vivre avec eux, en communauté ou du moins dans le logis abbatial contigu au couvent, les abbés d’Ambronay qui furent, à partir de cette époque, nommés et imposés par les ducs de Savoie, puis par les rois de France, vécurent, d’ordinaire, de la vie des grands seigneurs du temps, loin du monastère où ils n’apparaissaient que dans les circonstances exceptionnelles.
N’étant pas tous prêtres, comme ce fut le cas de Charles de LIVRON (1664) et de Claude BOUCHU (1690), n’étant pas même nécessairement dans les ordres sacrés et ne portant pas le costume religieux, quelques nouveaux abbés d’Ambronay se laissèrent aller à une vie mondaine, en utilisant les revenus de l’abbaye dans lesquels ils se faisaient la part du lion. [11].
Claude BOUCHU était également procédurier !
L’inventaire sommaire des archives départementales de l’Ain antérieures à 1790 [12], édité en 1916 fait part, entre autres, des conflits suivants :
- page 355 : contestation entre messire Claude Bouchu, abbé commendataire d’Ambronay, et Paul de La Barre, écuyer, tuteur des enfants du marquis de Livron, à propos de réparations à faire à la grosse tour du château de Saint André.
- page 457 : entre dame Louise Guérin, relicte de Messire Claude Bouchu, chevalier, intendant de justice, police et finances en Bourgogne et Bresse (NB : Louise GUERIN est la mère de l’Abbé Claude BOUCHU !)
- page 490 : entre messire Claude Bouchu, abbé conmandataire et seigneur d’Amhronay, et Antoine Gagnon, hôte à Bourg.
- page 495 : entre messire Claude Bouchu, abbé commandataire d’Ambronay, et le baron de Pommier.
La dîme, prélèvement dont le curé recevait sa part pesait fortement sur l’économie rurale. Son existence même conduisait le clergé à surveiller les paysans dans leurs travaux essentiels. Un ancien professeur du séminaire de Lyon considérait "que la cure de Vosbles ne donnait pas l’exemple d’une vie austère toute consacrée au sacerdoce " (Colette MERLIN)
Claude FENOUILLET avait vu juste en parlant de " .. prétendu Curé .."
Que sont devenus les pauvres paroissiens de Vosbles pendant ces neuf années ? Ce n’était pas le souci de ces prétendus curés égoïstes et fainéants !
Claude FENOUILLET a probablement signé son dernier acte (baptême de Marie Françoise BASSET) le 10 mars 1734 et l’ inhumation le 11 mars 1734 de Benoîte DRAPIER.
Claude FENOUILLET est décédé le 5 mai 1734 à 43 ans (né vers 1691) et inhumé à Genod le 6 mai 1734 par PANISSET curé de Genod en présence du prêtre et vicaire de Valfin et de Jean Baptiste OYSELET de Genod.
Sur le registre suivant (1734- 1756), dès le 22 juin 1734, les actes sont signés par JOYARD curé de Vosbles qui est toujours présent en 1756.
De 1773 au 18 novembre 1792, CHAMPION est le curé de Vosbles. Louis François CHAMPION châtelain de Charnod avocat au parlement a eu au moins deux fils :
- François Marie Xavier CHAMPION, né à Charnod le 14 décembre 1743, avocat au parlement et juge à la cour d’appel
- un deuxième fils qui fut curé à Vosbles du 23 octobre 1773 (baptême de Joseph BASSET) au 18 novembre 1792 (le prénom n’a jamais été indiqué dans les actes !)
Colette Merlin dans son livre donne des précisions sur le curé CHAMPION :
" Propriétaire terrien, homme d’affaires, mais aussi amateur de loisirs, le curé CHAMPION chassait. Certes, il n’était pas le seul à commettre ce délit, les registres des justices seigneuriales en témoignent abondamment."
" La personnalité et le destin du curé CHAMPION en font un personnage exceptionnel qui ne peut évidemment servir de modèle ."
Rien dans les registres n’ indique qu’il ne s’occupait pas de ses paroissiens, les actes sont bien rédigés et précis. Le curé CHAMPION était déjà intéressé par la généalogie !
Sur sept pages environ, il a exposé ses recherches généalogiques sur la famille CARNET, dont faisait partie le curé Claude CARNET décédé à Vosbles en 1722.Toutes les notes sont barrées.
Page suivante, le registre est validé par François Lazare BABEY lieutenant général du baillage d’Orgelet [13]
- Des actes barrés...
En fait, le curé CHAMPION se prénomme Pierre Félix ! (son prénom n’est jamais indiqué dans les actes). Il est né le 19 mai 1746 à Charnod et baptisé le lendemain.
En 1789 Pierre Félix Champion, curé de Vosbles, s’enthousiasma pour les idées nouvelles et réunit plusieurs fois les prêtres du baillage d’Orgelet pour leur présenter ses idées de réforme. Il fut d’ailleurs élu dans des assemblées de son ordre puis du tiers-état où il défendit l’abandon des privilèges de la noblesse et du clergé.
On le retrouve donc sans étonnement député à l’Assemblée Nationale en 1791. Il siégea parmi les modérés de cette assemblée, fit de l’opposition au projet d’abolir les mots Sire et Majesté et pour protester contre une adresse des amis de la constitution de Sarrelouis qui demandait à Louis XVI de quitter le trône. Après le 18 brumaire, il fut nommé conseiller de préfecture.
Le frère de Pierre Félix, Marie-François Xavier CHAMPION (1743-1809) ancien membre du conseil général du département fut maire d’Orgelet le 5 juin 1793 et fut destitué le 1er juillet 1793.
Pierre Félix CHAMPION est décédé à Lons le Saunier le 22 thermidor an XIV (9 août 1804) [14].
Sources :
- Inventaire sommaire des archives départementales antérieures à 1790 Ain, série A, (Art. 1-4). Série B, (Art. 1-347), édité en 1916
- Gallica Le Bugey - 1911/01 (A3,T2,FASC5)-1912/10 (A3,T2,FASC6)
Société Le Bugey (Belley, Ain) édité en 1911 janvier (tome II) - La petite montagne Jurassienne à la veille de la révolution par Colette MERLIN (1994)
- Les curés entre collateurs, évêques, patrons et vicaires. Le point de vue des juristes français (XVIIe-XVIIIe siècles.) Jean-Louis Gazzaniga
- Archives départementales de l’Ain et du Jura : état civil
- Dictionnaire géographique, historique et statistique des communes de la Franche-Comté et des hameaux qui en dépendent (Tome VI page 158 - 162 / 302)
- Administration départementale du Jura (1790-1793) par Aline Bouchard, édité en 2011 page 169
Archives départementales du Doubs : jugement du Parlement en date du 14 décembre 1731 (BPB1768 13 pages) par Florent BOUQUIN Archiviste chargé de classements complexes.