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Destins de familles de Flandre sur le front belge pendant et après la Grande Guerre (1914-1918)

Villages et visages de Flandre 1900-1920

Le vendredi 8 mars 2024, par Bernard Platevoet

Introduction

Fin des années cinquante, enfants, nous allions de temps en temps en Flandre, chez nos cousins belges, du côté de nos grands-parents paternels. Ils étaient originaires de cette Flandre tant éprouvée et tant détruite pendant la Grande Guerre (1914-1918). Leurs villages étaient situés sur l’axe Ypres-Bailleul correspondant au front de la bataille de l’Yser et du saillant d’Ypres entre l’armée allemande d’une part et les armées alliées belge, française et britannique d’autre part.

Comme la région de Verdun en France, la Flandre, en particulier la région des Monts des Flandres et la région d’Ypres, furent le théâtre d’une des plus terribles batailles de cette guerre et d’une hécatombe sans précédent dans les armées mais aussi de nombreux morts dans la population civile. Elle eut pour conséquence l’exode et la séparation des familles : entre ceux qui prirent le chemin de l’exode, principalement en France et surtout en Normandie, et ceux qui restèrent ou retournèrent en Flandre. C’est ainsi que nos familles ont été séparées. La génération de nos parents née entre 1900 et 1925, donc avant, pendant ou un peu après la Grande Guerre, a presque entièrement disparu. C’est à la troisième génération, la nôtre, que revient maintenant le devoir de mémoire, ainsi que de traduire ce qu’il reste encore des souvenirs transmis par nos parents, de ce qu’ils ont vécu, de ce qu’ils ont eux-mêmes appris de nos grands-parents, des souffrances et drames endurés. En découvrant ou redécouvrant les parcours de nos familles, il m’est apparu nécessaire d’en organiser faits et souvenirs. Il ne s’agit que de bribes, de fragments de souvenirs transmis ou retrouvés, illustrés de documents et photographies anciennes. Ces fragments organisés en un récit, resteront certainement approximatifs, forcément très incomplets et partiaux. Il ne peut en être autrement car ils traduiront aussi une pensée personnelle sur les évènements et le destin des familles dispersées.

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C’est ici que nos familles ont vécu sur cette terre agricole que constitue la Flandre occidentale. Ce territoire comprend des villes françaises et belges comme Armentières, Bailleul et Nieppe, Poperinge et Ypres, mais aussi de nombreux villages au-delà de la frontière belge et jusqu’au Nord d’Ypres. On y parlait surtout flamand mais aussi le français. Nos familles habitaient la région d’Heuvelland, nouveau nom regroupant entre autres les villages de Locre (Loker), Kemmel, Neuve-Eglise (Nieuwkerke), Dranoutre (Dranouter) et Westouter, comme s’il avait fallu les effacer des cartes une seconde fois. Côté français, des villages sont adossés aux monts comme Saint-Jans-Cappel. C’est une région de collines, ce sont les Monts, s’ouvrant sur la vaste plaine de Flandre. Le Mont Kemmel (Kemmelberg), le Mont Noir (Zwarteberg), le Mont Rouge (Rodeberg) et le Mont Aigu (Scherpenberg) sont les « montagnes » des Flamands. Au Nord-Ouest, la ville la plus proche est Poperinge, un peu en retrait du front de 1914, elle fut en partie épargné par la guerre. Nos familles étaient déjà présentes au 16e siècle en Flandre, leurs descendants se partagent essentiellement entre la Flandre belge et française, Bruxelles, mais aussi la Hollande, le Nord de la France et la Normandie. L’éloignement, la séparation depuis trois générations, ont bien sûr distendu les liens et l’oubli des origines est déjà effectif pour la quatrième et la cinquième générations dont le lien avec le berceau de la Flandre occidentale est définitivement rompu.

Voyages en Flandre 1900 – 2019

Ce sont des voyages à la fois rêvés et réels auxquels vous êtes invités à travers l’iconographie des paysages et des hommes de la Flandre que nous ont laissé les photographes de 1900, ceux de la Grande Guerre, mais aussi les peintres des siècles précédents. Ce qu’on pouvait découvrir en 1919, c’était une Flandre meurtrie, défigurée, détruite, un paysage lunaire, un désert minéral comme celui d’une planète inhabitable comme la planète Mars que seuls nos dérisoires petits chars robotisés peuvent maintenant parcourir, photographier, analyser, finalement conquérir, car l’homme a toujours soif de conquête, mais cette fois à seule fin scientifique.

En ces temps anciens, des 16e et 17e siècles, la Flandre n’était pas encore sortie du petit âge glaciaire cher à nos historiens du climat, mais si l’on pouvait regarder le paysage qui s’ouvrait au promeneur à la sortie d’un village de Flandre en 1900, en allant vers le Mont Kemmel, dans la « Montagne », sur les hauteurs du belvédère ou vers le moulin du Scherpenberg, on aurait découvert une campagne tout aussi familière à nos ancêtres lointains, ceux des moissons d’été de Bruegel ou des journées glacées chères aux insouciants patineurs du 16e siècle, du ramassage du bois et des tombereaux tirés par les chevaux le long des chemins : rien finalement n’avait vraiment changé.

Sous une lumière pâle et chaude d’une fin d’après-midi d’hiver, on préparait la terre, ou dans ce paysage agreste d’été, sous une lumière plus violente, c’était là que femmes et hommes s’activaient au ramassage des récoltes dans les champs où les gerbes de blé dressées finissaient de sécher, scènes ordinaires des tableaux d’un Bruegel et des winterlandschap hollandais.

Cette montée vers le Mont Kemmel était jalonnée de petites fermes sur le coteau et autour du moulin. En direction de Locre, c’est là qu’on découvrait les fermes des familles Deschildre, Platevoet et Haelewyn encore couvertes de chaume ou de tuiles flamandes aux formes douces et ondulantes, fermes, dépendances, jardins et vergers modestes le long des chemins de terre sur les pentes du Mont et près du moulin.

On aurait pu découvrir aussi les « folies » construites ou restaurées au 19e siècle par des familles bourgeoises, comme le château des Dufresne sur le Mont Noir à Saint-Jans-Cappel, qui devint la résidence d’été des Cleenewerck de Crayencour, famille de Marguerite Yourcenar encore enfant à cette époque, souvenir évanoui de sa jeunesse flamande (elle y habita jusqu’en 1912) qu’elle nous livra dans « Archives du Nord ». Le château de Kemmel du Bourgmestre Bruneel n’était pas différent de celui que peignit Jacob Grimmer en 1592, hauts pignons à redent, tour, chapelle, baignant dans l’eau et qu’un pont reliait au monde. Paysages, masures et demeures de prestige, tous identiques aux représentations des primitifs flamands et des peintres du Siècle d’Or hollandais.

Réminiscences des demeures anciennes, d’une Flandre opulente, celle des drapiers, des guildes, des corporations qui bâtirent du XIIIe siècle au XVIIe siècle, les joyaux d’architecture emblématiques qui ont couvert la Flandre : ceux d’Ypres, de Gand, de Bruges, d’Anvers, de Furnes, de Bruxelles, mais aussi de Haarlem et de Delft en Hollande, ou encore, plus modestes, la place d’Arras ou l’ancien beffroi d’Orchies dans le Nord de la France. Ce sont les halles monumentales d’Ypres, la cathédrale Saint-Martin, dentelles de pierre gothiques, maisons des guildes, des congrégations religieuses, témoins d’un passé glorieux mais révolu, souvent broyés dans l’histoire, mais toujours renaissants.

Fragments de vie quotidienne en Flandre 1900-1914

La vie dans les villages de Flandre avant la grande guerre était paisible, les enfants pouvaient jouer à l’extérieur dans les rues ou sur les places comme celle de Kemmel. Beaucoup d’enfants fréquentaient les pensionnats et écoles tenus par les congrégations comme celle de Neuve-Eglise, le pensionnat Ste Elisabeth, où était notre grand tante sœur Marie-Elisabeth Deschildre. Elle est sans doute l’une des sœurs photographiées devant le pensionnat avec les enfants forts nombreux, comme le montraient les vues d’époque (1900-1914). Avoir de 5 à plus de 10 enfants dans une famille était courant dans les familles de Flandre. Mais les maladies comme la diphtérie, la tuberculose voire des infections aujourd’hui banales étaient encore à l’origine de nombreux décès d’enfants en bas âge.

La famille Platevoet-Deschildre perdit quatre enfants, la famille Haelewyn-Deschildre en perdit deux, mais le taux de mortalité était quand même bien moindre que dans les siècles précédents (40 à 50% des enfants et des jeunes adultes disparaissaient au 17e siècle).

Les enfants Haelewyn et Platevoet nés entre 1900 et 1910 ont bien sûr fréquenté le pensionnat Ste-Elisabeth à Neuve-Eglise jusqu’au moment de sa destruction par les bombardements. On remarque les tenues vestimentaires réglementaires : calot « militaire » et nœud en tissu pour les garçons, collerette brodée pour les filles, médaille de communiante pour les plus âgées.

Les jours ordinaires, le travail de la terre occupait les villageois en fonction des saisons. Le ramassage du bois était effectué sur les pentes du Mont Kemmel. Les hommes étaient aussi artisans, notamment dans la réparation des machines agricoles. Les estaminets des villages étaient fréquentés par les villageois, les tonneaux de bière étant livrés par les brasseries certains jours.

Fréquentées par toute la population, les églises recelaient des trésors de l’art flamand comme cette adoration des mages, attribuée à Jordaens, qu’on pouvait voir dans l’église de Kemmel et qui fut détruite avec l’église dans les bombardements de la Grande Guerre. On peut voir d’autres versions notamment celle conservée à Cherbourg.

On pouvait aller facilement à Ypres pour réaliser des achats particuliers soit en voiture à cheval, soit par le tram et se rendre au marché du samedi qui réunissait sur la place les roulotes des camelots de la région et sous la halle les fermières qui vendaient leurs productions, dans un décor exceptionnel, inchangé ou presque depuis le Moyen âge. On pouvait passer voir la cathédrale Saint-Martin et la salle gothique de l’ancien monastère, visiter le beffroi et la grande salle de la Halle toute décorée et aux poutraisons formidables (salle Pauwels).

Inversement, aux beaux jours, les dimanches et jours de fêtes, la bourgeoisie d’Ypres venait par le tram jusqu’à Kemmel ou Nieuwkerke pour respirer l’air des Monts, gravir la grande allée du Kemmelberg jusqu’au belvédère d’où l’on découvrait la plaine flamande s’étendant jusqu’à la mer. On pouvait voir l’embouchure de l’Yser par beau temps et sans doute aussi pouvait-on deviner les clochers et tours de Furnes et de Dixmude. On avait une vue d’ensemble d’Ypres, cette ville presque inchangée depuis l’époque médiévale, on visitait le Scherpenberg et son moulin, on prenait une boisson ou le diner à « la Belle Vue ». Puis, par le tram du soir on regagnait Ypres.

Cette période des dernières années du 19e siècle et des premières années du 20e siècle, fut abondamment illustrée par la photographie, elle donna l’impression d’une « Belle Epoque » qui se termina pour la Flandre et une grande partie de l’Europe dans le cataclysme de 1914.

Nos familles dans la Grande Guerre

La Flandre fut de tous temps terre de passage, de conquête et de domination, trop besogneuse, trop riche sans doute, trop enviée. Sans remonter aux temps romains, elle fut terre de Bourgogne, d’Autriche, d’Espagne, de France et enfin de Belgique et de France à la fois, tant de fois accaparée, soumise, dévastée, brûlée, question de possession et même de religion. Avec la Grande Guerre, Dulle Griet (la Folle Greta ou Margot), figure noire et légendaire de Flandre, tenancière à l’occasion de taverne poussant à boire et à s’encanailler comme on la voit dans les scènes peintes par Teniers ou par un Molenaer, revint encore une fois sur le champ de la guerre en 1914, arme à la main, plus terrible encore, incendiant, dévastant, écrasant cette terre, la transformant en enfer comme jamais.
Le début de la guerre et la stabilisation du front de l’Yser.

Malgré sa résistance l’armée belge ne pouvait réellement s’opposer à l’invasion allemande. Dès le 20 août 1914, Bruxelles tombait, le gouvernement belge alla s’installer provisoirement à Anvers, mais l’avancée des troupes allemandes en Flandre occidentale ne permit plus de défendre Anvers qui tomba à son tour. Dès le début de l’invasion les destructions furent immenses avec la perte inestimable de trésors architecturaux, de bibliothèques incendiées, de fonds documentaires uniques et d’écrits médiévaux qui partirent en fumée. Le gouvernement quitta la Belgique le 16 octobre 1914 et, sur proposition de la France, s’installa dans la cité balnéaire de Sainte-Adresse près du Havre qui devint territoire belge pour la durée de la guerre. L’administration belge s’y installa et eut son propre service postal dans ce petit territoire. Par contre, le roi Albert 1er ne quitta jamais la Belgique et dirigea l’armée belge depuis la station de La Panne sur la côte et la partie ouest de la Belgique qui fut terriblement bombardée mais ne fut jamais envahie.

L’invasion allemande fut rapide et terrible, les bombardements défigurèrent les villes de Belgique et du Nord de la France où des villages entiers furent incendiés comme Orchies, des centres historiques comme celui d’Arras détruits. Dès l’automne 1914, l’Ypres du Moyen-âge, la Halle et la cathédrale furent incendiées aux premiers jours de l’offensive. Mais ce n’était rien par rapport à l’état de la ville après quatre années de guerre sur le saillant d’Ypres. Après ce déchaînement de fer et de feu, il ne restait d’Ypres que des chicots informes de pierre à l’image du beffroi, rappelant ces fragments d’aqueducs noirs et informes, entrevues dans les faubourgs de Rome, témoins deux fois millénaires d’un monde évanoui. Ypres n’existait plus. Le front se fixa depuis la région d’Ypres jusqu’à Bailleul, en passant par les Monts des Flandres.

7 janvier 1915 : … Je pense souvent à vous et je tiens à vous envoyer une vue de Belgique malgré que je ne suis pas là pour mon plaisir, il faut que j’y reste et je ne veux pas laisser passer cette nouvelle année sans vous envoyer mes vœux les plus sincères. Je suis un peu en retard … je vous le dis franchement je ne pensais pas être en Belgique à ce moment ci, la belle ville d’Ypres est bombardée les flèches de la cathédrale sont tombées il y a déjà longtemps, nous, nous sommes toujours aux environs de cette ville autrefois si coquette aujourd’hui en ruine, c’est triste et terrible je voudrais bien la quitter car j’en ai assez et je ne suis pas le seul, heureusement que je ne suis pas bileux. Allons, je finis en vous embrassant pour la bonne année, celui qui pense à vous … Le Tointeaux.

28 septembre 1917 : …Aujourd’hui nous avons eu la visite du roi Albert 1er il s’est fortement intéressé à la cuisine, ce doit être un gourmand. Je ne sais si c’est à son occasion mais aujourd’hui les Boches nous ont fait courir et marcher à 4 pattes avec leur bombardement de 155. Il en est tombé un dans un boyau juste 1 minute après que le roi y était passé à cet endroit. On a même cru qu’il avait encaissé, heureusement que non. Il est très sympathique ce roi. Il cause assez familièrement avec n’importe quel soldat et puis il a pas peur lui. A moi il ne m’a pas parlé. Il a peut-être pas osé. Il paraît que des fois il vient avec sa femme… Ludovic.

Extraits d’écrits de soldats sur cartes postales envoyées du front de l’Yser

Extrait d’une carte envoyé du front de l’Yser en 1915 par un soldat :
« Vous pouvez voir comme les boches ont arrangé ce monument qui était superbe. Les fr. sont excellents ainsi que le cigare à M. Moissard. Aujourd’hui je me suis payé deux œufs assez chers il est vrai, mais ils m’ont fait du bien et surtout plaisir il y avait 5 mois que j’en avais pas mangé ! Je vous embrasse de tout cœur ».

Le front s’est établi alors le long de la vallée de l’Yser à l’Est d’Ypres, du village de Langemark jusqu’à Steenstraat. De l’hiver 1914 au printemps 1915, la première grande bataille aboutit à la destruction totale des villages et à l’anéantissement d’Ypres. De plus les gaz asphyxiants, utilisés pour la première fois par les allemands le 22 avril 1915 contre les troupes françaises, provoquèrent une hécatombe sans précédent dans les premières lignes au Nord d’Ypres, les cuirassiers à cheval, dont faisait partie le brigadier Destouche (l’écrivain Louis-Ferdinand Céline), furent décimés. L’artillerie française mise hors de combat, le front fut alors enfoncé jusqu’au village de Boesinghe et jusqu’au canal de l’Yser. Les contre-attaques françaises sans matériel adapté, menées « baïonnette au canon » ont été tout aussi catastrophiques, et le bilan humain fut désastreux. A ce prix, et avec l’appui canadien et britannique le front fut alors stabilisé à la mi-mai 1915 à 3 km à l’Est d’Ypres. Il va sans dire que les familles avaient dû quitter dès le début de cette offensive le secteur de Langemark et d’autres villages comme Gheluvelt à l’Est d’Ypres, communes d’origine de la famille Haspeslagh.

Le roi des Belges s’est alors replié à Furnes (Veurne) avec une partie de son armée et des armées alliées, sa famille s’est établie à La Panne. Il donna l’ordre d’inonder la plaine flamande à partir des écluses de Nieuport ce qui empêcha les Allemands de progresser jusqu’à la mer. Avec le roi Albert, le général en chef des armées Joffre visita les troupes accompagné du Président Poincaré dès la fin de 1914 et en 1915. Ils ne pourront que constater l’étendue du désastre sur le front de l’Yser et les pertes immenses déjà infligées par l’armée prussienne aux armées anglaise, belge et française.

La vie des soldats sur le front fut extrêmement précaire, l’hiver 1914-1915 fut rude aussi bien dans la Meuse que sur le saillant d’Ypres. La destruction par les Allemands de sites historiques comme Ypres a sidéré et révolté les combattants qui ont vécu dans le froid et la boue des tranchées. La logistique était difficile et la nourriture grossière. Comme le montrent les courriers envoyés aux familles, les colis et les petites attentions reçus des familles furent très appréciés, des denrées pourtant ordinaires comme les œufs, étaient rares et recherchées (voir l’extrait du texte accompagnant une carte postale d’Ypres après l’incendie de 1914).

Même si les villes plus à l’Ouest ne furent jamais occupées, elles eurent à subir les bombardements. La ville balnéaire de Nieuport située à l’embouchure de l’Yser, était stratégique et fut intensément bombardée par les Allemands et extrêmement dévastée ainsi que Dixmude. Furnes (Veurne) resta la base arrière de l’armée belge et des divisions alliées, cette ville si remarquable a subi également des destructions mais qui restèrent mineures, les principaux édifices patrimoniaux construits entre le 15e et le 18e siècles ayant été relativement épargnés par ces bombardements, notamment les églises et l’hôtel de ville hispano-flamand de style Renaissance. Par contre, le bel ensemble de maisons flamandes donnant sur la Grand-Place fut par contre en grande partie détruit.

Le front sud autour du Mont Kemmel et plus à l’Ouest

Plus au Sud, dans la région d’Heuvelland, le front s’est établi entre Wytschoete et Saint-Yvon. Le Mont Kemmel et les villages de Kemmel, de Locre, Neuve-Eglise et Ploegsteert étaient plus à l’Ouest, entre 2 et 5 km du front, mais bien sûr directement sous le feu et les bombardements ennemis qu’ils vont subir de 1916 et 1918.

La vie dans les fermes pendant les années de guerre

Les villages comme Locre, Kemmel, Neuve-Eglise étaient sans cesse sous les bombardements allemands. Il n’était pas rare qu’un obus explosait dans une cour de ferme et tuait ceux qui s’y trouvait, ce fut le cas dans la ferme des Haelewyn. Un obus tua un jeune vétérinaire et le cheval qu’il venait soigner comme l’avait raconté Stéphanie Deschildre-Haelewyn à son petit-fils Roger Fontaine. « Les lambeaux de chair du cheval ou de l’homme qu’on retrouva n’étaient même pas séparables… » avait-elle dit… Il en fut de même d’un soldat anglais déchiqueté dans la cour et toutes les vitres de la maison furent soufflées par les explosions. L’épisode le plus dramatique que vécurent les habitants de Neuve-Eglise fut sans doute celui du 24 juin 1917 avec le bombardement de l’église provisoire installée dans une grange de la ferme la Polouche. Ce bombardement fit 13 morts et de nombreux blessés. Notre grand-tante Louise Deschildre alors âgée de trente ans, grièvement blessée, fut transportée à Poperinge (Hôpital de Proven) et mourut dans la nuit. Avait-elle perdu connaissance dans l’explosion ? Que furent ces dernières pensées lors du transport vers l’hôpital et au seuil de la mort ? Il n’y a pas de réponse, les morts nous laissent désemparés et plus seuls encore. Louise laissait deux jeunes enfants Joseph et André Careye, un père (Henri Deschildre) et un époux (Augustin Careye) effondrés et seuls devant l’inconcevable : mourir à 30 ans. Furent également tués Emile Deschildre (cousin germain de Louise Deschildre) époux de Stéphanie Vandenberghe, Marie-Louise Dassonneville épouse d’Eugène Careye et mère d’Augustin Careye.

L’offensive allemande au Mont Kemmel au printemps 1918

Si les bombardements du printemps 1917 sur les villages furent désastreux, la bataille pour le Mont Kemmel au mois d’avril 1918 dépassa en intensité et en sauvagerie tout ce qui avait été connu auparavant. On savait que l’offensive allemande était imminente : elle fut déclenchée le 25 avril 1918 et les civils qui ne quittèrent pas à temps le secteur de Kemmel furent condamnés pour la plupart.

On peut fixer à avril 1918 le départ de la plupart des familles des villages autour des Monts des Flandres vers la France. Certains quittèrent précipitamment leur ferme vraisemblablement très peu de temps avant l’offensive allemande du 25 avril. Ils brûlèrent toutes les archives non indispensables. Revenant quelques jours plus tard, juste après l’offensive, ils constatèrent que leurs fermes n’existaient plus comme toutes les constructions dans le secteur Kemmel-Locre, ils découvrirent l’immensité du désastre, les soldats morts mais aussi les civils qui n’avaient pas voulu partir, femmes et enfants, gisants sans vie. Ces familles n’avaient plus rien et comprirent que leur départ serait sans retour. Ils partirent en charrette vers la France puis en train, dans des wagons à bestiaux à destination de Paris puis d’Evreux en Normandie.

Le traumatisme vécu fut tel que le récit des évènements ne put être abordé et en partie sans doute, que bien des années après. Les Flamands migrants laissaient derrière eux leurs frères et sœurs, leurs parents encore vivants et les familles auxquelles ils étaient alliés. C’est ainsi que furent séparées et partagées entre la Belgique et l’Ouest de la France de nombreuses familles qui habitaient sur le front de l’Yser les familles Platevoet, Deschildre, Haelewyn et la séparation définitive avec des familles proches, comme les Careye, les Vandevoorde, les Coene, les Vandenbergue qui restèrent en Belgique ou dans la zone française frontalière.

Né un 27 avril, 44 ans jour pour jour après la bataille de Kemmel, je suis donc né ce même jour commémoratif d’un terrible carnage, que relata bien des années après Jean Giono. Cet écrivain et Céline ne se remirent jamais des horreurs dont ils avaient été témoins sur le front belge à Kemmel ou près d’Ypres. Entre le 25 et le 29 avril 1918 près de 5300 soldats français ont été sacrifiés, dont seulement une cinquantaine ont pu être identifiés (tous reposent dans l’ossuaire de Kemmel).

La fin de la guerre et le bilan en Flandre occidentale

Philippe Sagnac en reportage dans cette Flandre, au printemps 1919 découvrit un paysage irréel, dantesque, résultat de cette lutte acharnée, de combats jusqu’au corps à corps, pour quelques mètres d’une terre saturée d’obus, bouleversée, nappée de gaz toxiques. Ypres n’était plus qu’un champ de ruine.

En 1919, un silence étrange sur cette région des Monts des Flandres avait remplacé la fureur du printemps 1918. C’était comme une région abandonnée, désertifiée par l’effet d’un gigantesque cataclysme sidéral, l’horizon ondulé avait perdu la verticalité que donnent la vie, les constructions humaines et les activités. Hormis des restes d’arbre encore debout, dont les moignons subsistants se dressaient comme les bras de Christs jansénistes, il ne restait plus rien : un désert minéral, lourd et morne, un paysage de Constant Permeke. Les cartes postales édifiantes, parfois même indécentes, tant de fois envoyées, montraient ce désert et ces ruines nées du monde fou d’hier. Locre et Kemmel n’existaient plus, on cherchait vainement les maisons des familles Six et Vandromme à Locre. La route de Locre menant aux Monts était jonchée de chariots disloqués et de bâtiments éventrés méconnaissables. Les fermes des Platevoet, des Deschildre et des Haelewyn sur les pentes de Kemmelberg, le belvédère, le moulin de Scherpenberg (Mont Aigu) avaient disparu.

Le château des Cleenewerck de Crayencour, parents de Marguerite Yourcenar, à Saint-Jans-Cappel n’était plus qu’une épave dressant ses fragments de charpente vers le ciel comme des mats désarticulés ; un amoncellement de pierres entouré d’eau boueuse représentaient les restes du château des Bruneel à Kemmel.

Il ne restait des églises de Kemmel et de Locre, ce petit Westminster de Flandre, que quelques lambeaux de murs informes, entourés de tombes bouleversées, éventrées : même les tombes avaient été bombardées, même les morts avaient été bombardés. On reconnaissait à peine les rues de Neuve-Eglise (Nieuwkerke), un alignement de maisons à demi effondrées formait les rues de Bailleul et d’Ypres. Le pensionnat et le couvent où se trouvait notre grand-tante Marie-Louise Deschildre (Sœur Marie-Elisabeth) furent en grande partie détruits. Les forêts qui couvraient en partie les Monts avaient laissé place à d’immenses étendus parsemées de cratères, jonchées de débris et d’arbres déchiquetés.

« Mon centre cède, ma droite recule, situation excellente, j’attaque » disait Foch, lors de la seconde bataille de la Marne, mais aussi lors de la contre-offensive qu’il dirigea au Mont Kemmel dès mai 1918. « J’attaque ? » Qui attaque ? Qui d’autre que ces centaines de milliers de combattants* qui furent abattus comme des bêtes (en paraphrasant Marguerite Yourcenar), comme Charles Péguy, grand patriote, aux premiers jours de la guerre en 1914, lors de la première bataille de la Marne ; Jean de la Ville de Miremont, poète auteur de l’Horizon Chimérique, cycle de poèmes mis en musique par Gabriel Fauré, qui rêvait « de grands départs inassouvis », mort à 28 ans en 1914, enseveli dans la boue du Chemin des Dames ; ceux qui crevèrent au fond d’un fossé comme Alain-Fournier enfoui avec ses compagnons comme des charognes dans une fosse commune, retrouvés 80 ans plus tard sur le champ de bataille de Calonne ; tous les compagnons de Maurice Genevoix disparus dans l’enfer dantesque des Eparges en Meuse ; ceux de Kemmel, d’Ypres ou d’ailleurs déchiquetés par les « marmites » allemandes ou criblés de shrapnell ; plus terrible encore, ceux qu’on n’a jamais retrouvés, ceux qu’il fut impossible d’identifier et que les familles ont attendus en vain.

En 1919, ceux-là même qui défilèrent sur les places de Belgique, ou qui paradèrent à Paris le jour du 14 juillet et firent le salut aux « morts pour la Patrie », sabre au clair ou brandissant leur bâton dérisoire de maréchal de France, rougi du sang des centaines de milliers de combattants, ceux d’Europe, français, belges, anglais et allemands, ceux d’Amérique, des Indes et d’Afrique, tous fauchés par la mitraille au champ d’honneur et d’horreur, ou tués au corps à corps dans les tranchées, quelque part à Verdun, sur la Marne ou sur la terre de Flandre, gazés près d’Ypres ou abattus dans le bois de Kemmel ou ailleurs, ensevelis dans la boue des trous d’obus. Cette terre de Flandre, terre encore menaçante et maudite en 1919, au point que nos grands-oncles n’osaient plus la cultiver, peur de sauter eux-aussi sur une mine ou sur un obus déterré, mais surtout terre devenue sacrée, si noire du sang versé, si grasse des chairs éparpillées, si minéralisée des os broyés : combattants morts pour rien, seuls les morts perdent les guerres.
Après quatre années de souffrance les vainqueurs, militaires et politiciens, avaient oublié que l’humiliation des vaincus conduirait à leur propre défaite et pire, pour certains, comme le vainqueur de Verdun, à la trahison. Les hommes du traité de Versailles (1919) n’avaient sans doute jamais vu à Madrid « la Reddition de Breda » de Vélasquez : où le vainqueur, même au faîte de sa gloire, était resté magnanime envers le vaincu.

* 500 000 soldats et civils tués sur le front d’Ypres et de l’Yser

Ainsi, ceux qui étaient restés en Flandre, ou ceux qui étaient retournés dans les ruines de Locre, Kemmel, Neuve-Eglise et côté français à Saint-Jans-Cappel et Bailleul, ont commencé dès la fin de la guerre, à déblayer les routes, restaurer les habitations réparables, reconstruire des édifices provisoires, ne serait-ce que les lieux de culte. Vinrent ensuite les lieux de mémoire militaires et civils, puis, bien des années après, les édifices patrimoniaux reconstruits à l’identique comme ceux d’Ypres ou de Dixmude mais aussi les églises des villages dévastés. Après des années d’effort, la reconstruction d’Ypres à l’identique fut un exemple extraordinaire, comme on peut le voir de nos jours pour toute la ville et en particulier pour son centre historique. Il en fut de même des églises de Locre, Kemmel, Neuve-Eglise et Dranouter. Le Mont Kemmel a retrouvé sa forêt, mais demeure à jamais un sanctuaire où tant d’hommes ont perdu la vie.

Désastre effacé mais pas oublié

Le village de Neuve-Eglise comme tous les villages de Belgique et de France possède un monument à la mémoire de ses combattants et des villageois civils morts dans les combats et bombardements : plus de 60 morts militaires et civils pour ce modeste village… Les jours de commémoration, « Ceux de 14 » ont longtemps défilé et rendu hommage au « grand troupeau » des disparus, jamais revenus du « casse-pipe ». Au cours de notre jeunesse fin des années 1950, nous les avions vus défiler ces survivants, au son des fanfares. Si certains revinrent des combats atteints définitivement dans leur chair, d’autres ont dû ressentir un mélange de fierté et de culpabilité de s’en être miraculeusement sortis, sentiments ambivalents envers leurs camarades de combat disparus.

Pendant toute la période des années 1920, le ressentiment à l’égard des Allemands fut très vif en Belgique et dans le Nord de la France comme en témoigne cette vignette apposée sur une carte postale en 1929 : « Belges souvenez-vous, rien d’Allemand, rien des Allemands ».

Le retour à la vie des flamands « déracinés » en Normandie et ailleurs

Pour nombre de familles flamandes, il n’y a pas eu de retour dans la Flandre d’origine. Il se trouve qu’avec l’hécatombe de 14-18, bon nombre de fermes en France n’avaient plus d’homme pour les valoriser. Qu’il s’agisse du Nord de la France ou de la Normandie, beaucoup de familles n’ont pas eu de difficultés pour reprendre une ferme, pas très loin des villages d’origine, soit un peu plus loin notamment dans la région de la Pévèle à Orchies par exemple, comme Angèle et Jules Coene-Decherf, ou dans d’autres villages de la Pévèle française ou belge.

La Normandie fut quand même la région qui accueillit de nombreuses familles flamandes suite à l’exode depuis le front de l’Yser. Ce fut pour les familles déracinées de nos grands-parents un grand traumatisme : éloignement de la famille proche restée en Belgique, changement complet de vie et d’environnement, il fallait retrouver une maison, une ferme avec des terres à cultiver, du bétail à élever, la plupart étant agriculteur. Certains enfants avaient été envoyés de Belgique en région parisienne pendant de longs mois afin de les éloigner de la guerre. Ce fut le cas de 6 des enfants Haelewyn qui séjournèrent dans la colonie de Chevilly-Larue en banlieue parisienne, sous l’autorité de Sœur Marie-Elisabeth Deschildre, volontaire pour accompagner les enfants dans cette colonie, et les sortir ainsi du front belge. Outre l’éloignement forcé, les conditions de vie dans ce pensionnat furent difficiles et les enfants eurent le sentiment qu’ils avaient été durement traités (témoignage d’Albert Haelewyn à ses enfants), aussi gardèrent-ils un très mauvais souvenir de ce séjour, ce qui n’est pas étonnant. Daniel, Abel et Isabelle Platevoet, les ainés de la famille Platevoet-Deschildre, avaient également séjourné à Chevilly-Larue en région parisienne (d’après le site Exillium.bis).

Scolariser les enfants ne fut pas sans poser de problèmes pour les plus âgés nés en Belgique, car leur langue maternelle était le flamand. Cette langue fut assimilée par les enfants français à de l’allemand, d’où la réputation de ces enfants qualifiés de « Boches du Nord ». Ce fut le cas des enfants Haelewyn et aussi des enfants Platevoet, notamment Daniel, Abel, Isabelle et Michel. Leur père, Camille Platevoet, leur avait interdit de parler flamand à l’école. La consigne était de ne pas se faire remarquer sinon « leur père les renverrait en Belgique », c’est-à-dire dans l’enfer qu’ils avaient connu… La volonté d’intégration comme tous les flamands nouvellement installés en Normandie, était évidente. D’ailleurs, Camille Platevoet choisit de prendre la nationalité française dans les années suivantes comme beaucoup de flamands expatriés, il en fut de même d’Albert Haelewyn pour que sa fille Andréa puisse entrer à l’Ecole Normale et devenir institutrice.

Malgré la volonté d’intégration à la société française, la nostalgie du pays d’origine et le besoin de revoir la famille restée en Flandre étaient bien présents. Régulièrement nos grands-parents retournaient en Belgique, ce fut le cas jusque dans les années 1950. Mais les derniers représentants de cette génération étaient tous décédés après 1965. Le retour en Flandre se fit pour les deux générations suivantes avec les enfants nés en Belgique mais aussi ceux nés en France, puis les petits enfants tous nés en France et ne parlant pas le flamand.

Ce qu’il faut retenir

L’analyse des faits et du comportement de nos familles en dit long sur les drames vécus, le déracinement, seule réponse au dilemme : la fuite ou la mort. La détermination de ces familles flamandes qui n’ont pas eu d’autre choix que de fuir leur pays d’origine sans espoir de retour, s’implanter dans une région française et vivre autre chose définitivement.

Travailler et encore travailler pour surmonter le dénuement, la pauvreté, élever les nombreux enfants, leur donner une éducation stricte avec pour premier but l’intégration. L’intégration par la langue, « l’oubli » du flamand avec interdiction de le parler à l’école, l’intégration à marche forcée, un minimum d’instruction pour la seconde génération avec tout au plus l’obtention du certificat d’étude primaire. Très majoritairement issus de l’agriculture, il fallait entreprendre. Les familles ont apporté leurs savoir-faire dans la culture et l’élevage, elles devaient comprendre les particularités de leur région d’adoption, la Normandie, le bocage et l’élevage normands, les cultures traditionnelles mais aussi apporter les cultures et méthodes importées du pays d’origine.

Le déracinement est aussi une force : compter avant tout sur soi-même, compter sur l’entraide dans la communauté flamande, mais aussi coopérer avec la population autochtone, chacun ayant à apprendre de l’autre.

La communauté flamande s’est ouverte vers d’autres cultures : les premiers mariages se sont faits souvent entre flamands de la seconde génération. Ainsi dans la famille Haelewyn, sur 10 enfants de la seconde génération, il y eut 5 mariages entre jeunes de familles flamandes. Néanmoins, à la génération suivante, sur 104 petits-enfants qui portent le nom de leur père, seuls 43% des familles portent encore un nom d’origine flamande. Pour les générations suivantes, les noms flamands se dilueront encore. A partir de la quatrième génération, des alliances se font même avec des familles d’autres pays d’Europe. Aussi, de génération en génération, les noms flamands et l’origine flamande s’oublieront peu à peu pour la plupart.

La nostalgie du pays et de la langue a existé : langue et pays des souvenirs pour les parents mais aussi pour les enfants nés avant 1916 qui connaissaient le flamand (nos grands-parents et les plus âgés de nos parents). Transmission de la culture du Nord et de la religion. Ainsi, la maison des Normands de Flandre ne ressemble pas à la maison des Normands de souche, c’est la maison des pays du Nord : organisée, rationnelle, entretenue.

L’acharnement, le courage, la rigueur et l’intelligence ont été au rendez-vous, avec au bout la réussite : deux guerres mondiales n’auront pas empêché ces familles déracinées et le plus souvent ruinées, de se relever. Après deux générations, force est de constater cette réussite : excellence dans l’agriculture, excellence dans le commerce, dans les services de l’état, excellence dans les études de la troisième génération à la cinquième génération, avec un lot de diplômés au plus haut niveau : enseignants, ingénieurs, docteurs et enseignants à l’Université, polytechnicien, professions médicales et aussi réussite dans le domaine des arts. C’est le résultat de la transmission d’un état d’esprit et d’une culture, mais aussi de l’assimilation des règles et de la culture du pays d’adoption.

Il semble clair que la liaison entre les familles flamandes de Belgique et celles établies en France depuis plus d’un siècle, ne dépassera pas, sauf exception, la troisième génération (ou quatrième génération), c’est-à-dire entre petits cousins qui ont tous connu les deux premières générations. A l’heure où j’écris ces lignes, les petits cousins ont tous plus de 65 ans et pour les plus âgés, plus de 80 ans. Les enfants des petits cousins ne se connaissent pratiquement pas, eux-mêmes ont ou auront des enfants constituant les 5e et 6èmegénérations qui s’envoleront en France ou plus largement en Europe !

Que ce récit les incite à emprunter les chemins chargés de vie et d’Histoire que leurs ancêtres ont tant parcouru. Que ce récit les invite à retourner sur ces lieux de mémoire, de voir ou revoir ces villages et ces villes, incarnant la grandeur et la beauté de cette Flandre, phénix toujours renaissant des vicissitudes de la vie et du temps.

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Références principales :

  • Buffetaut Yves 2015 – Les Français à Ypres, 1914-1915. Ysec Editions, Louviers, 81p.
  • Bourlet Michaël 2012 – La Belgique et la Grande Guerre. Edition France-Quercy, Mercuès, 256p.
  • Cellier Albert 2005 – Des Foréziens dans l’enfer du Kemmel, 25 avril 1918, d’après le témoignage de Louis Cellier.
  • Les Cahiers de village de Forez, N°12, mai 2005, 30 p.
  • Céline Louis-Ferdinand 1970 – Casse-pipe, Editions Gallimard, collection Folio, 120p.
  • Céline Louis-Ferdinand 2022 – Guerre. Editions Gallimard, Paris, 175p.
  • Ellenberger Marc – Histoire de la colonie de Chevilly-Larue des enfants de l’Yser (1915-1919) ; site web de la ville de Chevilly-Larue.
  • Gallois Frédéric – site généGallois : la famille, les histoires et l’Histoire. histoire.gallois.info
  • Genevoix Maurice 2018 – Ceux de 14, 1re édition Flammarion 1950, édition 2018, 860p.
  • Giono jean 1931 – Le grand troupeau. Editions Gallimard 1972, collection Folio.
  • Jünger Ernst 1920 –. Orages d’acier, in : Journaux de guerre 1, 1914-1918, édition La Pléiade, Gallimard 2008, 870p.
  • Kuyle Ghislain – liste des enfants belges ayant séjournés dans des colonies durant la guerre 14-18 ; Site Exillium.bis.
  • Nivet Philippe 2004 - Les réfugiés de guerre dans la société française (1914-1946), dans Histoire, économie & société 2004/2 (23e année), p. 247- 259.
  • Ollivier Joseph 2008 – Récit du bombardement de la ferme de la Polouche, Neuve-Eglise, le 24 juin 1917 ; récit publié sur le site Geneanet, d’après la transcription de Hourdé Henri.
  • Platevoet Richard 2022 – généalogie des familles d’origine flamande : Platevoet, Deschildre, Haelewyn, Sys, Coene-Decherf, Dekeuwer, Geloen, Haspeslagh. Fichiers Excel non publiés, d’après les archives de Flandre occidentale, de Heuvelland (Belgique) et archives privées.
  • Remarque Erich Maria 1928 – A l’ouest rien de nouveau. Eds Stock, le Livre de Poche 2001, 220 p.
  • Ringoot Sonia (direction) 2013 – En quête de terre, des Belges en Normandie. Editions OREP, 200 p.
  • Sagnac Philippe 1921. Dans les Flandres de Lille à Ypres, 8 juillet 1919. Revue du Nord N°26, p.111-118.
  • Yourcenar Marguerite 1968 – L’œuvre au noir, Editions Gallimard, Paris.
    Yourcenar Marguerite 1977 – Le labyrinthe du monde II : Archives du Nord ; Editions Gallimard, Paris.

Documents :
• Collection personnelle de cartes postales anciennes.
• Archives de l’état civil d’Heuvelland
• Lettres familiales et photographies anciennes issues des fonds Gabriel et Marcel Platevoet
• Photographies issues des fonds documentaires d’Andréa Haelewyn-Gallois, Roland Platevoet et de Bernard Platevoet.

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