Introduction : Comment un petit livret parcheminé rédigé d’une écriture fine et délicate allait-il faire revivre un homme vieux de plusieurs siècles ?
Lorsqu’en 1989, soit près de 200 ans après les faits, un ancien professeur des Ecoles remet entre les mains de Madeleine Arnold Tétard, à la suite d’une exposition sur le Bicentenaire de la Révolution française, cet objet obtenu dans une vente aux enchères d’un vieux manoir breton, il ne sait pas encore qu’allait commencer pour elle une longue quête historique au travers du temps et de l’espace pour faire revivre l’auteur de ce livret : Paul Mathurin François Chéreil de la Rivière.
L’histoire : Paul Mathurin François Chéreil de la Rivière naît dans une riche famille bretonne en 1767. Son père occupe la lourde charge de président de la Chambre des Comptes de Bretagne. Sa mère, quant à elle, se lance dans le commerce sur les conseils de ses cousins Pinczon du Sel qui ont fait fortune dans les colonies.
Au contact de ses cousins, le jeune Paul se met à rêver lui aussi de voyages et d’aventures. Pour l’heure, il entre chez les Jésuites à l’âge de 10 ans où il effectue sa scolarité avec François-René de Chateaubriand, lequel deviendra célèbre des années plus tard. Lorsque son père décède, sa charge de président de la Chambre des Comptes de Bretagne est reprise par Jean-Paul, le frère de Paul.
A force d’insistance, Paul obtient l’autorisation de partir sur les mers avec son cousin Auguste pour l’île du Dodo. Cette première expérience ne sera pas une réussite. Cela n’empêchera pas Paul de repartir pour l’Isle de France (aujourd’hui île Maurice) avec son épouse Thérèse dans l’espoir de faire fortune. Las, la Révolution française éclate en 1789, bouleversant la France et le monde.
De Rennes à Pléchatel, en passant par Bruz et Bourg des Comptes, depuis les îles d’Amérique jusqu’en la lointaine Isle de France (aujourd’hui Maurice) où il prétendit à une vie de colon pendant la terrible Révolution française, c’est à une quête perpétuelle du bonheur que Paul Mathurin va consacrer sa vie pris dans la tourmente qui le sépare de sa vie d’antan et des siens restés au pays. L’attente des lettres de la métropole, le combat des préjugés, celui sur les océans, le trafic du bois d’ébène, la vie artificielle des colons lancés à la recherche de fortunes aléatoires... C’est à tout cela que vous convie l’auteur qui a prêté sa plume à Paul Mathurin François Chéreil de la Rivière pour que son histoire parvienne aux jeunes générations.
Un extrait :
[...] Nous arrivâmes à Port Louis d’Isle de France, au milieu de février mil sept cent quatre-vingt-sept. Depuis le Cap, les alizés m’avaient asséché la peau. Je découvrais la chaleur, moite, humide, exceptionnelle, indescriptible. J’étouffais dans ma culotte de casimir et tombais chemise et redingote au moindre souffle pour m’aérer. Personne n’y trouva à redire, ce pays-là était habitué à ces débauches de costume et enfin nous touchâmes au but.
Notre arrivée fut un enchantement pour moi. [...]
L’auteur : Ancienne Archiviste documentaliste, Madeleine Arnold Tétard est auteur et co-auteur de nombreux ouvrages d’histoire locale.
Un premier avis : Cet ouvrage qui repose sur cent soixante quinze lettres du XVIIIe S se lit comme un roman, presque un roman d’aventures. La langue employée, les détails du quotidien bien documenté, le vocabulaire spécifique pour la marine, les colons etc...tout participe à rendre l’ouvrage vivant.
Le récit rédigé à la première personne donne une impression de proximité et d’intimité au lecteur. On partage la vie de ce chevalier breton, de l’enfance au soir d’une existence hors normes.
Parti pour les Îles d’Amérique puis de l’Océan Indien, il reviendra des décennies plus tard dans sa Bretagne. Le plus surprenant est peut-être de le découvrir comme l’un de ces hommes charnières entre l’ancien régime et la naissance du futur citoyen. Imprégné des traditions de sa caste mais ne les partageant plus tout à fait sur bien des points.
Tout au long du déroulement de la vie de Paul Chéreil de la Rivière vient en contrepoint l’histoire de la France révolutionnaire puis napoléonienne et celle des nations. Mais c’est si intimement lié par petites touches que cela ne rompt pas le chuchotement de cette voix qui nous parvient après deux siècles d’oubli. (France Apprill de GénéaPass)
Un deuxième avis : L’ouvrage est agréable à lire et intéressant pour imaginer la vie d’un breton à l’île de France pendant la période révolutionnaire. Le récit à la première personne le rend très vivant ; en effet, c’est Paul Mathurin François Chéreil de la Rivière qui raconte sa vie avec la plume de l’auteur. Ce livre n’est toutefois qu’un roman et il ne faut donc pas prendre à la lettre toutes les informations et précisions citées dans ses pages. Un petit reproche toutefois, la couverture « Document Histoire » et la présentation de la quatrième de couverture « Comment un petit livret parcheminé d’une écriture fine et délicate allait-il faire revivre un homme vieux de plusieurs siècles ? [...] Grâce à ce livret et au travail de recherches de Madeleine Arnold Tétard, c’est un document historique exceptionnel [...] » peuvent induire le lecteur en erreur et faire considérer ce roman comme un ouvrage d’histoire.
Jean-Yves Le Lan pour histoire-genealogie.com/