Présentation : Depuis le terrible dey Victor Hugues, et sous son Gouvernement même, la Guadeloupe a été Alger par ses marins » s’exclamaient en 1800 Jeannet et Bresseau, agents des consuls en Guadeloupe. L’activité frénétique des corsaires aux larges des côtes guadeloupéennes au temps de Victor Hugues a pu, en effet, évoquer à divers titres celles des terribles pirates barbaresques qui sévissaient en Méditerranée à la même époque.
C’est cette aventure méconnue que Michel Rodigneaux nous fait revivre ici. Mettant à profit sa double culture historique et juridique, il décortique ce qu’il faut bien appeler une « économie corsaire », pendant la Révolution et l’Empire en Guadeloupe, jusqu’à la capitulation du général Ernouf devant les Anglais en 1810.
La grande et la petite histoire se rejoignent ainsi en une épopée héroïque, dont les héros ont pour nom Victor Hugues, Desfourneaux, Ernouf.
L’auteur a su exploiter avec intelligence des documents inédits, conservés aujourd’hui aux Archives départementales de la Guadeloupe, après avoir transité par l’ambassade de France à Washington pendant près d’un demi-siècle. Il nous démontre aussi comment une aventure, vieille de plus de deux siècles, continue de susciter les rancoeurs états-uniennes encore aujourd’hui.
Avec La guerre de course en Guadeloupe, c’est un peu du mystère des corsaires qui se dévoile, sans pour autant tuer la légende, fort heureusement !
Tables des matières :
- Préface d’Hélène Servant.
- Chapitre premier : pirates, corsaires et flibustiers
- Chapitre II : La guerre maritime aux Antilles
- Chapitre III : La guerre totale de Victor Hugues
- Chapitre IV : La question des neutres
- Chapitre V : Un héritage embarrassant
- Chapitre VI : L’anéantissement de la course guadeloupéenne
- Chapitre VII : Le droit de la course et son application locale
- Chapitre VIII : La juridiction des prises en France et aux Antilles
- Chapitre IX : Les revendications américaines
L’auteur : Michel Rodigneaux est né à Pointe-à-Pitre (Guadeloupe). Ancien élève du Centre de perfectionnement aux affaires (CPA), il a étudié le droit à l’institut Vizioz, l’histoire et les relations internationales, en France et aux États-Unis. Au cours de sa carrière, après plusieurs postes de direction en Guadeloupe, il a représenté L’Agence française de développement dans des pays de la Caraïbe, de l’océan Indien et du Pacifique. Descendant avéré de corsaire, c’est tout naturellement que ses recherches généalogiques l’ont amené à l’histoire du phénomène corsaire en général. La guerre de course en Guadeloupe est son premier essai.
Un avis : Cet ouvrage est le résultat d’un véritable travail d’historien. L’auteur, par une démarche rigoureuse et claire, dévoile au lecteur ce que fut la guerre de course en Guadeloupe. Il a su replacer le contexte guadeloupéen de cette marine de corsaires dans un cadre plus général des luttes de pouvoir entre Anglais, Américains et Français. Il a exploité des sources nouvelles qui lui ont permis de donner des informations non connues sur les opérations de course de la fin du XVIIIe siècle et du début de XIXe siècle en Guadeloupe.
J’ai particulièrement apprécié - m’étant moi-même intéressé à ce sujet - le chapitre concernant « La juridiction des prises en France et aux Antilles ». Dans ce chapitre, on découvre le déroulement des procédures administratives liées à une prise. L’auteur décortique pas à pas le travail des juridictions chargées de juger de la légalité d’une prise. Un autre chapitre intéressant est celui concernant les réclamations des Américains sur les prises faites par les navires français.
Cet ouvrage est à lire absolument par les Guadeloupéens qui s’intéressent à leur histoire mais aussi bien sûr par toute personne qui veut approfondir ses connaissances sur la guerre de course en général et sur celle s’étant déroulée autour de la Guadeloupe. La bibliographie est précise et deux index (Noms de personnes et de bateaux - noms de lieux) permettent d’effectuer des recherches rapides dans l’ouvrage et en font un outil de travail et de recherches facile d’utilisation. Un ouvrage qui a une bonne place dans toute bibliothèque « Marine ».
Des extraits qui ont retenu mon attention :
1. « [...] L’on ne peut manquer, une fois encore, de faire le parallèle entre la traite et la course, l’une portant atteinte à la liberté de l’homme, l’autre à la libre circulation des biens. [...] »
2. « [...] A partir de 1803, la législation métropolitaine prévoit une troisième pièce nécessaire aux armateurs : c’est le billet, ou traité de rançon. Le droit de rançonner les bâtiments ennemis, reconnu depuis l’ordonnance de Marine d’août 1681, avait été supprimé à la fin de l’ancien régime. Le règlement du 21 prairial an XI (10 juin 1803) le remet en vigueur, [...] »
3. « [...] Hugues a été remplacé à cause de ses intérêts personnels dans la course, mais surtout parce qu’il est allé trop loin en déclanchant, au niveau régional et de sa propre initiative, un conflit majeur avec les Américains que le gouvernement central ne souhaitait pas. [...] »
4. « [...] Il s’avère que la plupart des plaignants américains furent dédommagés pour les prises effectuées après 1803. Mais beaucoup de victimes dépossédées avant cette date, [...], ne savaient où s’adresser. L’appel désespéré qu’elles adressèrent au Congrès suscita la création de la Court of claims (Cour fédérale des réclamations) [...] »
Jean-Yves Le Lan pour www.histoire-genealogie.com