Deux gros bastions verriers jalonnent ce territoire : au nord, la forêts royale de Grésigne, constamment convoitée, et au sud, cette arête boisée que constitue la Montagne Noire.
Ce sont principalement deux familles bien connues qui puisent leurs racines profondes dans le massif forestier de la Montagne Noire. A l’extrémité nord-est, les RIOLS ont succédé aux ALMOUY, dès le premier XVIe siècle, dans les verreries de Moussans. A l’extrémité sud-ouest se trouve le territoire d’Arfons, devenu le repaire des ROBERT vers la même époque. Les généalogies de ces deux familles, dont les rameaux s’entrecroisent pendant près de quatre siècles, renouvellent et corrigent les travaux des auteurs précurseurs : Elisée de Robert des Garils pour la famille de Robert et Francis de Riols de Fonclare pour la famille de Riols.
La troisième plus importante famille de verriers par ses effectifs est celle des GRENIER alias GRANIER dont Robert Planchon a fait une remarquable étude. L’identification d’un berceau familial unique est ici problématique, tant les Grenier semblent présents dans tous les sites verriers du Sud-Ouest.
Les anciennes familles verrières de la Grésigne ne sont pas oubliées, même si elles se sont effacées au profit des nouvelles venues. Les AUDOUY alias AUDOY, les AMOUIN alias AMOIN et les NOGUIER ont cédé la place aux ROBERT, aux GRENIER, aux SUÈRE et aux VERBISIER alias BERBIGIER, ou encore aux FILQUIER, venus du Rouergue.
Quelques familles ont eu une brève existence tel les BELIN, venus de l’Ariège, ou un peu plus longue pour les DOUTRE alias d’OUTRE, dont l’origine reste une énigme.
Enfin, les forêts de la Montagne Noire ou de la Grésigne ont attiré et retenu non seulement des gentilshommes verriers du Bas-Languedoc, tels que les BERTIN et les LAROQUE, ou ceux du Quercy, tels les COULON alias COLOMB, mais aussi ceux de la Basse-Auvergne, tels les RENAUD alias REYNAUD.
Le caractère primordial de ces familles est l’appartenance à la noblesse. Mais elles forment un corps particulier de la noblesse française : celui des gentilshommes verriers. Selon la charte du Roi Charles VII donnée à Sommières en 1445, les nobles peuvent exercer le métier de verrier sans déroger à la noblesse. Cependant, il faut être fils de gentilhomme verrier pour l’exercer ou bien être noble et fils d’une mère née d’un gentilhomme verrier.
Ces restrictions contribuèrent à garder les secrets de fabrication du verre dans un petit nombre de famille. Cette préservation du secret a été accentuée par une très forte endogamie entre familles de verriers, voire à l’intérieur de la même famille. Il n’est pas rare de trouver des individus dont trois aïeux sur quatre portent le même patronyme. L’appartenance à la religion réformée de la plupart de ces familles a aussi favorisé cette endogamie. En dehors de leur cercle professionnel, les verriers se sont unis matrimonialement avec des familles nobles non verrières et des familles bourgeoises, ou plus modestes selon leur niveau de fortune.
La Révolution, qui a supprimé la noblesse et tous les privilèges professionnels, accentua le déclin de l’activité verrière artisanale. Si les gentilshommes verriers du Languedoc, fiers de leur noblesse et de leur indépendance, avaient toujours refusé de travailler dans la verrerie préindustrielle de Carmaux avant 1789, beaucoup quittèrent Moussans ou la vallée du Thoré, aux XIXe siècle, pour aller travailler dans les verreries au charbon du Bousquet d’Orb ou d’ailleurs, à Béziers, Toulouse et certainement bien plus loin. Beaucoup d’autres ont troqué la canne à souffler pour la charrue et sont devenus cultivateurs comme nombre de leurs voisins.
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