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En 1770, une église paroissiale s’effondre en pleine nuit

Le jeudi 4 octobre 2012, par Liliane Pinot
Aujourd’hui seize du mois d’avril mil sept cent soixante et dix le lendemain du jour de pâques, à trois heures moins un quart du matin s’est écroulée l’église de Thiolières battie en l’an onze cent quarante un. quel fracas ! quel renversement ! quel danger ! mais aussi quel prodige ! je frémis, je tremble, le coeur me manque, je lève les mains au ciel pour lui rendre nos actions de grâces. tout le devant du temple les voutes de la nef du clocher, le clocher lui meme et les cloches tout tombe à la fois : les arbres quon avait mis et au dedans et au dehors pour pour l’appuyer sont cassés par le milieu. quelques heures plus tôt ou plus tard que fusse arrivée cette ruine de ce gros et matériel édifice, sur tout si ceut été le vendredi saint que l’église était toutte pleine ; quel carnage ! quelle catastrophe ! pas un n (n)eut été sauvé ; nous avions été menacés depuis plus d’un an, les croutes des voutes étaient tombées de temps à autre sans frapper jamais personne enfin tout s’est détruit sans qu’aucun ait eu le moindre dommage. les cloches elles mêmes ont été renversées et ne se sont point cassées ; le doigt du dieu et d’un dieu bon et propice y parait trop visiblement marqué. toutte ma parroisse et moi fumes en procession le jour même à ambert ; y portames notre dame de Bon Secours et offrimes à dieu dans la chapelle de notre dame du laire (Notre Dame de Laire) le sacrifice de notre rédemption en reconnaissance d’une grace si spéciale. le lendemain seconde fete de Pâques nous y portames dans l’église st jean le sacré dépot du corps et du sang si précieux de jésus christ. quoy de plus lugubre ! Thiolières sans autel sans sacrifice le lieu autrefois saint devenu profane et interdit. les chemins arrosés de larmes les habitants de la ville (celle d’Ambert, sans doute) melent leurs larmes avec les notres celles de la campagne, tout excites la piété la plus tendre et la plus affectueuse, ce que j’ai vu, ce que j’ai entendu, ce que j’ai épprouvé, je l’ateste et le certifie en foi de quoi ce dix huit avril 1770. Faididez curé.
  • Registre de Thiolières (63), 6 E431/1 BMS 1569-1791, vue 161/348.

et page suivante dans le même registre :

Nota : aujourd’hui jeudy vingt six avril mil sept unt soixante et dix a été clos le choeur de l’église de Thiolières, et suivant la permission reçue de Monseigneur l’évêque en datte du dix huit avril et signée micolon de Blanval vicaire général, nous avons bénis solennellement ledit choeur avec le cimetière et en conséquence y avons célébrés le st sacrifice de la messe et faite les autres fonctions curialles. fait ce 26 avril 1770.
  • Registre de Thiolières (63), 6 E431/1 BMS 1569-1791, vue 162/348.

Note : Le fait que l’effondrement de l’église soit intervenu a une heure où personne ne se trouvait à l’intérieur a dû renforcer la foi de ces paroissiens, d’autant plus que - et l’on peut s’en étonner - les cloches ne se sont même pas cassées ! Le curé manifeste une émotion sincère et semble fort affecté par la disparition du lieu saint. À le lire à la fin, on a l’impression que Dieu, pourtant si miséricordieux en cette circonstance, a déserté le village.

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  • En 1770, une église paroissiale s’effondre en pleine nuit 7 octobre 2012 12:00, par Annie DUBUISSON

    Merci à Liliane Pinot d’avoir publié ce texte. Le récit du curé réveillé comme ses paroissiens en pleine nuit par le fracas est bien documenté : l’église était côté façade et clocher en mauvais état et déjà étayée dedans et dehors. Les nervures des voûtes lâchant petit à petit depuis plus d’un an, elle était sans doute, comme déjà remarqué, désaffectée en partie, sans en interdire l’accès ce qui explique la frayeur rétrospective du curé.

    Comme l’édifice est béant, on ne peut y laisser le St Sacrement, porté de suite à l’église voisine, ce qui rend les lieux sinistrés déserts et vides, "abandonnés" de la présence divine. Mais les choses ne traînent pas,le choeur intact est immédiatement fermé puis reconsacré avec le cimetière probablement endommagé par les débris.La vie paroissiale reprend très vite dans un édifice réduit à l’ancien choeur.

    Pour ce qui concerne les cloches, leur chute a pu être partiellement amortie par les éboulis, et le curé n’est pas spécialiste. Un fondeur a sans doute été appelé pour expertise, une cloche peut se fêler même sans tomber, et doit être refondue. Il serait intéressant de suivre la reconstruction ainsi que le remontage des cloches dans les archives paroissiales si elles ont été conservées.
    Les archives notariales conservent dans le Nord des contrats passés entre communautés villageoises et fondeurs de cloches. Bonnes trouvailles si quelqu’un poursuit l’enquête !
    A voir aussi si un surpoids récent dangereux (ajout d’un bourdon par exemple, d’une horloge..) n’a pas déstabilisé les vieilles structures. Les exemples de chutes dues à une imprudence ne sont pas rares (cathédrale de Beauvais).
    En conclusion : le manque d’entretien sérieux des églises est un vieux problème..

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  • En 1770, une église paroissiale s’effondre en pleine nuit 7 octobre 2012 09:48, par Brigitte Milhoud

    Et 10 jours après cette catastrophe le choeur de l’église de Tholières était clos avec accord de l’évêché d’y célébrer les offices !!
    Sans doute l’église écroulée était-elle si ancienne (et déjà étayée) qu’il avait déjà été prévu de la remplacer par plus grande et plus au goût du 18è siècle.
    Deux chances dans cette histoire, pas de victimes (mais ils avaient pris de nombreux risques !) et l’ancienne église s’est écroulée alors que les paroissiens allaient être immédiatement abrités pour leur culte.
    Merci pour tous ces articles toujours très intéressants.
    B.M.

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  • En 1770, une église paroissiale s’effondre en pleine nuit 6 octobre 2012 07:05, par jean-loup Gajac

    On voit aussi qu’il n’y a pas eu de victimes car l’église menaçait ruine, à en croire le fait qu’elle était étayée par des "arbres", tant dehors que dedans, donc probablement déjà désaffectée au culte ?

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  • En 1770, une église paroissiale s’effondre en pleine nuit 5 octobre 2012 15:15, par Jacques Dupé

    Oui, je me suis fait la même réflexion : Dieu, pourtant si miséricordieux en cette circonstance, a déserté le village. C’est formidable la foi !

    Merci pour ce texte, c’est un vrai plaisir !

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